Pas besoin de faire passer une bombe atomique en douce aux États-Unis, ou de tenter d’en assembler une à partir d’éléments achetés en contrebande aux frontières, qui étaient bien plus surveillées que dans le passé. Pas besoin de créer de laboratoires clandestins pour fabriquer des tonnes d’agents neurotoxiques au risque d’être découvert, ou de tenter de le disperser via une flotte d’avions épandeurs ou une autre méthode aérienne. L’ingéniosité était de retourner la technologie de l’ennemi contre lui. Que ce soit un avion commercial, un camion essence 18-roues ou encore mieux, une centrale nucléaire.
Ce serait la bombe la plus sale que Ramzan ait jamais connue.
Pour vaincre un tel ennemi, il faut utiliser ce qu’il vous donne.
Le seul point positif dans son existence autrement lamentable était Grace Baker, une nouvelle recrue de vingt-six ans de la centrale nucléaire avec qui Cameron avait entamé une romance accélérée. L’attraction avait été immédiate et réciproque. En trois petites semaines, ils avaient tous deux éprouvés un penchant pour l’autre comparable aux romances du vieil Hollywood. Chez Grace, Cameron avait découvert une beauté sauvage et rebelle ; le genre qui pousse les hommes à traverser les océans.
À ses yeux, c’était comme si Poséidon avait égaré deux énormes casques de Troie sur le littoral du Pacifique. Il se souvint d’une fois où il était monté dans un hélicoptère au Grand Canyon, volant à basse altitude vers la rive sud, trente mètres au-dessus de la cime des arbres ; puis soudain dépassant la rive, la vue époustouflante du Canyon et de son précipice de mille cinq cents mètres.
Dès le début, son corps avait rejeté le changement d’horaire. Il avait tenté d’arrêter la caféine, essayé le Zolpidem, sans résultats. Il avait même acheté un CD de yoga en pensant que le bruit doux des vagues pourrait le bercer vers le sommeil. Pour certains, c’était facile. Pour Cameron, s’ajuster à un horaire de nuit semblait quasiment impossible.
Il avait tué beaucoup. Presque toujours, c’était un acte robotisé – un soldat, un garde, un consul – une chose inhumaine qui devait être éliminée. Tous ceux qu’il avait tués devaient être tués. C’était un boulot qui devait être fait. Mais au Sierra Leone, il s’était laissé emporter. Il avait tué quelqu’un qui n’avait aucune importance.
Il avait des tâches devant lui, nécessaires pour réaliser ses plans. Trop de temps et d’argent avaient été dépensés, et leurs frères dans le monde entier attendaient patiemment des nouvelles de leur succès – un monde entier les attendait. Il leur restait maintenant très peu de temps, et il devait réfléchir, répéter.
On dirait que peu importe les choses terribles qui lui arrivent, ou les mauvaises situations dans lesquelles il se fourre, je veux dire, vous savez à quel point ils en ont après lui, et il trouve toujours un moyen de s’en sortir indemne, de rester imperturbable.
La foi était la clé, pensa Ramzan, la foi et la dévotion ; la dévotion au-delà de l’amour de sa propre vie. Quelque chose qu’un américain ne pourrait jamais comprendre. Il sourit. La raison pour laquelle les fidèles l’emporteraient.
Être avec celle que j’aime – n’est-ce pas le vin le plus doux de la vie ?
Un professionnel doit séparer le plaisir du travail.