Franz Michel Willam

Marie avait toujours compris mieux que personne les prophéties sur la Passion de Jésus qui se trouvaient dans les Livres Saints. Mais, lorsque Jésus eût annoncé au grand jour ce qui devait lui arriver à Jérusalem, qu’il serait traîné devant les tribunaux, — livré aux païens de Rome, flagellé, bafoué, couvert de crachats et mis à mort, Marie eut entre les mains une « clef » effrayante qui lui ouvrit la dernière signification des prophéties. Cette clef lui servit aussi pour l’intelligence des psaumes. Les psaumes prophétisant la Passion, qui avaient pénétré si avant dans son esprit avec tout leur sens et toutes leurs pensées, semblaient se dresser et lui crier : Nous voici! Nous attendons que ton Fils fasse de nous des réalités et nous fasse pénétrer dans sa vie ! — Les différentes prophéties se tenaient maintenant devant elle comme des messagères que Dieu lui avait envoyées à elle aussi, la mère de Jésus. Elle devait donc, selon la prédiction de Siméon au Temple et selon les paroles de Jésus à Cana, être là avec lui à son heure et être transpercée du glaive de douleur!

Marie rentra chez elle. C’était alors le plein été. Quand, descendant le pays montagneux de Samarie, elle arriva dans la plaine de Jezraël, son chemin la conduisit à travers une forêt de chardons des champs de toutes sortes, qui commençaient déjà à sécher et dont le vent emportait les semences. Et au nord de la plaine qu’un flot de lumière tremblante prolongeait dans un lointain indécis, elle vit briller, comme des perles dans des écailles de rocher, les maisons bâties sur les hauteurs. Quelles purent bien être ses pensées quand elle aperçut Nazareth ?
Ce que Dieu avait décidé pour elle, il l’avait décidé aussi pour son Fils ; ce ne pouvait être qu’un dessein de son souverain amour. Elle pouvait donc lui abandonner l’organisation future de sa vie.
Il serait normal de penser que Zacharie et Élisabeth envoyèrent à la famille de Marie un message sur ce qu’ils savaient. Plusieurs explications anciennes admettent que Joseph fut renseigné surtout par cette voie. Le récit évangélique semble plutôt indiquer le contraire.
Les femmes qui habitaient dans la même maison que Marie, quelles qu’elles aient été, remarquèrent sans doute, les premières, son état. Les femmes ont pour ces choses beaucoup de perspicacité. Et alors on fit ce qui, en Orient, où les fiançailles étaient l’équivalent juridique du mariage, paraissait tout naturel : — on avertit le fiancé.
Qui a averti Joseph ? De nombreux témoignages nous apprennent que les contrats de mariage étaient rédigés par écrit et que le document était confié à l’« ami » du fiancé. En Galilée, cette institution est d’autant plus compréhensible que dans ce pays, à la différence de ce qui se passait en Judée, les fiancés ne vivaient pas ensemble, d’ordinaire, avant les noces. Il est donc facile dépenser que Joseph fut averti par son homme de confiance, de l’état de Marie. Cela serait encore possible, même s’il n’y avait pas eu de contrat de mariage écrit. On cite un cas semblable, plus tard où l’ami du fiancé joue encore un rôle.

Les recherches préparatoires à ce travail ont failli me coûter la vie. Maintenant que j’ai devant moi le livre achevé, je ne veux pas oublier ceux qui m’ont prêté leur concours en Palestine et au Caire. Je remercie son Excellence Monseigneur, le Dr Fellinger, évêque à Jérusalem, la Révérende Mère Supérieure Berchmana, le R. P. Cyr. Michels et le Dr Risenauer de l’hôpital Papaioannou au Caire. Je me souviendrai toujours de l’aide dévouée de la chère Sœur Edeltrud.
Le but de ce livre n’est pas de remplacer les Évangiles, mais de les faire mieux connaître et de les rendre indispensables au lecteur.