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Critiques de Frédéric Ciriez (77)
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Récits B

Il y a une dizaine d'années paraissait "Des néons sous la mer", une boite de nuit sous l'eau dans la baie de Paimpol; autant dire que ce genre de bouquin laisse des traces. Un peu "allumé" l'auteur ai-je pensé, mais je n'ai rien oublié, c'est pourquoi j'ai lu ces "Récits B" qui seraient comme les faces B des vinyles, pas du second choix , mais dans ces récits des personnages sans envergure qui ne brillent pas, pas des looser, mais pas des stars non plus.

13 petits récits qui vont de Paimpol à Alger, à Paris(Ah le stade de France! quel plaisir, un visuel étourdissant!).

Une promenade autour d'un rond-point d'entrée de ville , un petit mot sur chaque enseigne: caustique, et tout est vrai, j'ai vérifié. Un petit récit mettant en scène la ville de St Brieuc vaut le détour , pas forcément pour les briochins, et plein de sous-entendus je suppose.

Cela donne une mosaïque de chapitres pas forcément reliés entre eux sinon par de l'humour et un brin de tendresse aussi pour tous ces personnages de seconds rôles.

On trouve des pépites sur les faces B , pardon les "récits B"qui ont été repêchés par l'auteur dans d'autres textes d'ailleurs. J'en redemande, je me suis délectée .
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Frantz Fanon

En août 1961, Frantz Fanon rencontre Jean-Paul Sartre, en compagnie de Simone de Beauvoir et de Claude Lanzmann. Ces trois journées d’intense discussion servent de prétexte à cette biographie dessinée. Fanon revient sur son parcours de psychiatre, son engagement dans la guerre d’indépendance algérienne et les luttes anticoloniales en général, deux sujets extrêmement liés. Plongée en image au coeur de sa pensée.

(...)

Romain Lamy met en scène (et en bulles) avec brio et beaucoup de chaleur, les dialogues écrits par Frédéric Ciriez, toujours très justes, vivants et savamment nourris sans jamais pécher par excès de didactisme. Certains de moments de rêves, traités de façon déstructurés, tranchent, comme il se doit, avec le réalisme général. Tous deux réussissent à nous faire partager l’intimité de ce huis-clos. Excellente immersion dans l’oeuvre, le parcours et la pensée de Frantz Fanon, presque comme si lui-même se livrait à nous.



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Je suis capable de tout



Abandon vers la 100ème page...



...Parce que le concept de développement personnel par coaching ne m'intéresse pas du tout et m'agacerait même plutôt, ne pouvant m'ôter de l'idée que c'est bien une préoccupation de pays riches. J'admets néanmoins que je rejoins l'auteur dans cette critique à rebrousse-poil plutôt grinçante de nos sociétés.



... Parce que je me suis ennuyée rapidement dans la pénible biographie autocentrée de ce coach qui s'entraîne à la course avec un lévrier et rencontre la Mort sur une terrasse de Dubaï.



...Parce que cette lectrice de plage,( et son adolescente accro aux mangas érotiques) captivée par ce genre de littérature de travail sur soi-même est si cliché que je ne me sens pas de perdre mon temps à l'accompagner jusqu'à la réalisation de ses fantasmes sentimentaux...qui s'annoncent aussi chauds que sa plage de naturistes. (il semblerait qu'un bel Adonis va lui faire perdre la tête).



Je sentais bien que ce livre n'était pas pour moi. Il le sera peut-être pour d'autres

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Mélo

Paris, 30 avril 2013. Un homme roule dans la ville, prend le périph, arrive en banlieue et trouve une rue tranquille, à Saint-Ouen, tout près de la déchetterie et de la fourrière. C'est cet endroit qu'il a choisi pour garer sa Xantia et mettre fin à ses jours en se plantant dans le coeur le couteau qu'il vient d'acheter. Il a choisi la veille des défilés du 1er mai, où en tant que syndicaliste il aurait figuré en bonne place, pour en finir avec une vie qui ne lui convenait plus. Pourtant, il n'était pas seul, il avait des amis. La preuve : sur son portable les SMS affluent, on l'invite à des fêtes, on s'inquiète de savoir ce qu'il fait, on déplore son silence.

Ce même jour, Parfait sillonne le Xè arrondissement de Paris au volant de son camion-poubelle. Il a hâte que s'achève cette journée de travail et s'impatiente de la lenteur de ses "ripeurs". Ce soir, il sera Montrouge dans la salle du Chic Club et connaîtra son heure de gloire. Il a tout prévu, une tenue inédite et hors du commun, des accessoires plus que parfaits, dont un boy blanc qui tiendra une ombrelle au-dessus de sa tête et une arrivée en Rolls! C'est sûr, il va vaincre et réduire à néant les efforts de tous les autres sapeurs de la soirée. Il aimerait que son pote syndicaliste soit là pour voir ça mais ses SMS restent sans réponse...

Pour Barbara, la journée est longue aussi. Sur ses rollers, elle parcourt la capitale pour écouler le contenu de son "gloryfier", un panier d'ouvreuse de cinéma qu'elle porte autour de la taille et qui contient des souvenirs de Paris en tout genre, gadgets, briquets, lingettes désinfectantes, crèmes solaires, etc. Entre un aller-retour à Aubervilliers pour refaire le plein de marchandises, une conférence à la prestigieuse ESCP (Ecole Supérieure de Commerce de Paris), Barbara patine et vend en rêvant d'un brillant avenir, une franchise à son nom et des équipes de vendeurs en rollers dans toutes les rues de la capitale. Elle réussira, c'est certain, et elle ne sera pas seule, son amoureuse, future réalisatrice, sera à ses côtés et elles formeront un couple riche et heureux. En attendant, les affaires marchent bien, son gloryfier se vide et quand certains clients la prennent de haut parce qu'elle est chinoise, elle s'en amuse, comme ce frimeur de chauffeur de camion-poubelle black qui lui a acheté un briquet érotique et qu'elle a gentiment insulté dans sa langue maternelle.





Une journée particulière dans la vie de trois personnages qu'on a l'habitude de croiser sans vraiment les voir, un syndicaliste déprimé, un éboueur congolais et une vendeuse ambulante chinoise. Une écriture brillante, poétique, imagée qui donne l'impression de visionner trois court-métrages. Terrassé par la vie comme le premier ou conquérants comme les deux autres, on les suit dans un Paris accablé de chaleur pour un voyage au coeur de leurs pensées.

Frédéric Ciriez manie la plume avec brio et ne recule devant aucun détail pour nous mener dans l'intimité de ses personnages. En Xantia, en camion-poubelle, en Rolls, à rollers ou en bus, on découvre un Paris magnifié par une écriture moderne et nerveuse et ce sont des mondes inconnus qui s'ouvrent à nous : les errances du syndicaliste, inspecteur du travail, conseiller en insertion, malheureux avec les femmes; les sapeurs congolais qui vivent et respirent pour le Vêtement, se rencontrent lors de soirées prévues pour se mesurer, se défier, par le costume et par les mots; les vendeurs ambulants, la fatigue, les meilleurs coins, les clients difficiles, les techniques de vente.

Un roman saisissant, surprenant et tendre, à lire.
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BettieBook

Bon, commençons par le commencement : ce livre est né d'une résidence d'écrivain qui a eu lieu en 2015 à l'Université Paris Nanterre auprès d'étudiants en master 2 Métiers du livre. Le sujet portait sur « la question de la critique littéraire envisagée comme une écriture de création à part entière ». (Oh, comme ça m'aurait intéressée… j'aimerais parfois retourner sur les bancs de l'école...)

Que ce sujet ne vous effraie pas : ce roman, plein d'humour, pose un regard acéré et satirique sur l'état de la critique littéraire et les difficultés de la presse écrite qui se voit un peu délaissée, notamment par les jeunes ultraconnectés qui, s'ils ont l'idée d'acheter un livre, consulteront plus facilement Internet (les blogs - très bonne idée, je ne peux que les encourager…- , les sites de lecteurs ou les vidéos de booktubers.)

Les chiffres sont là, la critique maintenant passe moins par les professionnels que par n'importe quel quidam qui poste son avis pour inviter les lecteurs à partager son coup de coeur ou bien, au contraire, leur permettre de faire une économie substantielle d'une vingtaine d'euros. Est-ce à dire que la critique s'est démocratisée ? Il y a certainement un peu de ça, c'est évident...

« BettieBook » est justement le nom du site d'une jeune et jolie lectrice booktubeuse, Bettie Leroy, passionnée par les livres, notamment les dystopies et dont les critiques sont lues par un nombre incalculable de followers. (Ah, il va falloir vous habituer à une langue branchée! Moi, j'interroge régulièrement mes propres gamins sur le sens de certains termes et une fois que j'ai compris à quoi ça renvoie, il faut qu'on m'explique... à quoi ça sert !)

L'autre personnage se nomme Stéphane Sorge : il est critique littéraire « papier et TV » (quel ringard!): il écrit dans Le Monde des livres, Books, Paris Première, Livres Hebdo, les Échos week-end, Télé 2 semaines et Lovely Lady (pour ces deux derniers, sous pseudo), il est invité à droite à gauche à des dîners mondains et littéraires dans des lieux prestigieux, fréquente les Salons du livre, participe, en tant que juré, à des prix littéraires, rencontre des auteurs, des attachées de presse avec lesquelles il couche, reçoit des services de presse en pagaille qu'il n'ouvre pas, les revend chez Gibert dès qu'il peut et lit parfois un peu vite les livres dont il parle…

Il fait aussi un peu de télé...

Il gagne 2700 euros net par mois « toutes piges confondues ».

Quand il a le temps et besoin d'arrondir encore un peu ses fins de mois, il devient nègre.

Portrait peu flatteur s'il en est...

Un jour, sa chef de service du Monde des livres lui demande de faire un reportage sur « les booktubeurs et les influenceurs littéraires du web. »

Un monde totalement inconnu pour lui.

C'est là qu'il découvre BettieBook. C'est une booktubeuse influente.

« Plus on la voit, plus elle vit. Plus on s'abonne à sa chaîne, plus elle existe. Elle est un média, l'actualisation sans fin d'un corps et d'un discours. Elle est BettieBook. »

Il la rencontre lors du Salon du livre de Noël. Elle répond en toute simplicité à ses questions : non, elle ne le connaît pas, n'a jamais entendu parler de lui. Elle aime partager sa passion avec ses abonnés qui sont un peu ses amis, elle travaille dans un salon de bronzage parce que ses vidéos ne lui rapportent rien. Quand il lui demande :« Qu'est-ce qui te rend heureuse ? », elle répond: lire. Il lui pose la question qui le hante : « Tu lis Le Monde des livres ? » Elle dit: « Non, je l'habite, lol. » Il dit : « Pardon ? » Elle dit : « Ben oui, j'habite le nouveau monde des livres. Pas l'ancien où tu travailles. » Il pense : «  Tu vas le payer. » Il dit : « Tu manques pas d'humour! » Elle dit : « Ben les auteures d'aujourd'hui, c'est nous. La preuve, t'es là pour moi. »

Oh, que c'est dur, oh, que ça fait mal… C'est la chute. Il faut redescendre sur terre, quitter le piédestal : les temps ont changé.

Notre critique dort mal, « il pense à la fille qui lui a rappelé sa condition de vieux exerçant un métier de vieux sur un support de vieux. » Il finit par s'abonner à sa chaîne Youtube.

Alors qu'il se voit sombrer petit à petit, elle grimpe dans l'audience, il descend, elle monte, plus haut, toujours plus haut : « Ses revenus à lui ont baissé de 27 % en une année. Sa notoriété à elle a crû de 200 % en six mois. Il se sent en bout de course. Elle réfléchit à de nouvelles opportunités professionnelles, aimerait être repérée par un YouTube-manager qui lui trouverait des plans. Il se demande comment il va joindre les deux bouts pour les fêtes de fin d'année, songe à un crédit conso chez Cetelem. Elle se fixe l'objectif des 60 000 abonnés pour Noël. Ses cheveux à lui sont ternes. Jamais elle ne s'est sentie aussi belle, aussi Bettie, autant BettieBook. Son avis a moins de poids dans les prix littéraires où il tapine. Elle envisage de postuler au jury du prix Orange de la Nouvelle numérique. Il a envie de vomir alors qu'il passe le portique de sécurité de la télé. Elle sait au plus profond d'elle- même qu'elle ne restera pas longtemps végéter à Melun chez So'leil. Ses vidéos le fascinent. Elle pense que les vieux médias doivent mourir. »

Stéphane, notre pauvre critique déchu en voie de fossilisation, rumine. Un sombre désir de vengeance s'empare soudain de lui : que va-t-il pouvoir faire pour ralentir la folle ascension de Bettie ? Quel beau croche-pied inventer pour qu'elle se vautre ?

Attention, le pire est possible quand on n'a plus grand-chose à perdre...

Frédéric Ciriez à la fois auteur et critique pose le problème des mutations de la critique littéraire dans un roman où la rencontre, que dis-je, la collision fracassante et explosive de deux mondes, deux milieux complètement opposés produit un décalage vraiment très drôle. Par exemple, l'univers actuel des youtubeurs est rendu de façon extrêmement réaliste, notamment à travers l'emploi de leur jargon que notre critique Stéphane ne connaît absolument pas : une initiation s'impose ! Choc générationnel hilarant !

Mais ce roman peut aussi être lu aussi comme un roman noir à suspense, une sorte de thriller où l'on s'interroge jusqu'à la fin (et encore après - cela devient assez vertigineux même) sur le jeu du vrai et du faux, des apparences et de la réalité, de la superficialité et des profondeurs. On bascule lentement mais sûrement dans la pire des dystopies. Belle mise en abyme !

Cela dit, derrière le côté fantaisiste et cocasse, le propos est étourdissant de lucidité, de justesse et pose des questions essentielles : « la critique est-elle dans un état critique ? » pour reprendre les mots mêmes du roman, y a-t-il vraiment une ancienne et nouvelle critique ? comment les définir l'une et l'autre ? s'opposent-elles vraiment ou bien se complètent-elles ? y a-t-il un lien entre le fond (la critique elle-même) et la forme (le support employé) ? à qui s'adressent-t-elles ? parlent-elles des mêmes livres ? l'une est-elle plus « honnête » que l'autre ? cette mutation de la critique est-elle le reflet même d'une mutation de la littérature ?

Allez, je vous laisse réfléchir à tout cela !

Un bon moment de lecture en tout cas !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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BettieBook

Choc des cultures dans le monde littéraire



En confrontant une booktubeuse et un critique littéraire du Monde des livres, Frédéric Ciriez nous offre un truculent jeu de massacre. Avec quelques arrière-pensées?



Deux personnages, deux parcours diamétralment opposés et deux manières de concevoir leur rôle de médiateur. Les écrivains et les cinéastes ont compris le potentiel de romans et de scénarios qui confrontent des acteurs qui n’ont à priori rien à faire ensemble. Parmi les derniers exemples en date, on peut citer Pactum Salis d’Olivier Bourdeaut et Abdel et la comtesse d’Isabelle Doval.

Frédéric Ciriez a choisi de Confronter Stéphane van Hamme et Betty Leroy. Stéphane étudie les lettres et écrit ses premiers articles pour le Pélican lettré, une revue lilloise. Il choisit alors le pseudonyme de Stéphane Sorge. « Son patronyme se réfère discrètement au Très-Haut, roman où Maurice Blanchot met en scène un certain Henri Sorge – "souci" en allemand. En 1948, année de publication du Très-Haut, la philosophie heideggérienne dominait en France et trouvait des échos chez quelques écrivains préoccupés par le " souci de l’être". Henri Sorge porte le nom d’une inquiétude. Stéphane Sorge devient le nom d’un critique littéraire de vingt et un ans. » Au fil des ans, il va parvenir à se faire une place dans le milieu parisien. Il est pigiste pour le magazine Books et pour le Monde des livres, chroniqueur sur Paris Première et livre également sous un autre pseudonyme des articles à Télé 2 semaines. Mais, à l’image de la presse écrite, sa situation n’en demeure pas moins précaire. La part consacrée à la culture et plus particulièrement aux livres à tendance à se restreindre, tout comme ses lecteurs qui sont en majorité des lectrices. « Il se dit parfois avec une pointe d’amusement qu’il mène une activité professionnelle de femme, à destination des femmes. La seule issue serait de changer de sexe, ou de devenir trans-critique. »

Betty a pour sa part eu envie de partager ses lectures, principalement les dystopies (récit dépeignant une société imaginaire organisée de telle façon qu'elle empêche ses membres d'atteindre le bonheur et entend mettre en garde le lecteur en montrant les conséquences néfastes d’une idéologie) et la littérature young adult. La jeune fille a choisi internet et la vidéo comme média et créé sa chaîne intitulée «BettieBook». Un passe-temps qu’elle pratique à côté de son emploi dans un centre de bronzage à Melun, ce qui ne l’empêche nullement de réussir, car ses vidéos sont suivies par quelque 30000 abonnés. Il faut dire qu’elle a su trouvé le ton juste et a su s’approprier les codes qui correspondent à son public. Sur sa page d’accueil, elle a imaginé une souris en train de grignoter un livre et un slogan approprié « Lectrice et petite souris qui voit tout, tout, tout, suis-moi dans la maison des livres. »

Quand Stéphane Sorge, qui est chargé d’enquêter sur ce nouveau phénomène, la contacte, elle est ravie de l’acueillir, car tout est bon pour accroître encore sa notoriété. Le critique littéraire, quant à lui, s’imagine déjà manger tout cru cette petite souris. Sauf que cette fois, la souris a du répondant : « Nous, on parle directement à nos abonnés, ce sont nos égaux. Ce qui nous intéresse, c’est le partage. On n’est pas comme les critiques littéraires classiques qui ne connaissent pas leurs lecteurs. » Sans oublier que notre érudit est soupçonné d'avoir parlé d'un livre sans l'avoir lu. De quoi régaler tous ceux qui souhaitent prendre sa place!

On sent que Frédéric Ciriez s’est beaucoup amusé à décrire les deux milieux, à alimenter de ses propres expériences cette satire des milieux littéraires, à conjuguer des auteurs réels avec des situations fictives. À moins que… Si ce livre n’est pas un roman à clé, il n’en dépeint pas moins parfaitement les usages, les rivalités, les mesquineries et autres coups bas ou renvois d’ascenseur espérés.

J’imagine que le plaisir que j’ai pris à le lire tient sans doute au fait que j’ai été d’abord l’un – critique littéraire durant plus de dix ans au sein d’un hebdomadaire – puis l’autre avec la création de mon blog littéraire et que je peux dire jusqu’où la réalité dépasse la fiction.

Mais la plume de Frédéric Ciriez ravira aussi les lecteurs qui ne sont pas du sérail, car elle mordante, inventive et joyeusement impertinente. Je vous laisse par exemple imaginer la tempête dans le crâne de Stéphane quand il se retrouve dans le lit de Betty. Tout le reste est littérature!
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Mélo

30 avril. Il fait chaud. Tout le monde ne pense qu’à la soirée qui précède le jour férié. Mais chacun y pense à sa façon et l’histoire s’attache aux pas de trois personnages. Il y a un syndicaliste aux tendances suicidaires. « Affolé par son incapacité à être banal, il se sent vain, se hait. » (p. 85) Il y a Parfait, chauffeur de camion-poubelle le jour, sapeur de la plus grande classe le soir. « Parfait de Paris, le maître incontesté de l’élégance masculine made in Bacongo, digne héritier des plus grands maîtres de l’histoire, va quitter son déguisement de chauffeur de camion-poubelle et mettre sa peau de lumière. » (p. 141) Il y a une jeune Chinoise en patins à roulettes qui vend sa camelote dans tout Paris. « La mondialisation viendrait à elle toute seule, sur son ventre, dans son panier, sous la forme de produits de trois sous fabriqués en Asie, dans la stimulation de l’achat d’impulsion des passants. » (p. 271) Comment ces trois êtres se croisent-ils ? Comment interagissent-ils ? C’est ce que Mélo tente de dire.



Je ne suis pas entièrement convaincue par ce roman. Les personnages pourraient être caricaturaux si les masques ne tombaient pas, chacun révélant autre chose derrière l’archétype. Si je n’ai pas aimé la première partie consacrée au syndicaliste, notamment pour l’écriture blanche qui y est pratiquée, j’ai pris plus de plaisir avec le Congolais adepte de la sape et la jeune Chinoise ambitieuse. Toutefois, je ne sais pas bien où mène ce roman, ni même si son intention est d’aboutir. Comme presque toujours, j’ai été largement agacée par le name-dropping qui bouffe la page et la réduit soit à une liste de courses, soit à une sordide tentative de placement de produits. Certaines marques répétées à l’envi constituent une litanie écœurante et les objets ainsi serinés, s’ils prennent la puissance de grigris des temps modernes, ne parviennent pas être autres que ce qu’ils sont, de tristes produits de la société de consommation. Et que dire de la description qui est faite de Paris ? Entre la tristesse industrielle de sa proche banlieue, la saleté de ses trottoirs jonchés de touristes et l’épileptique boucle de son périphérique, la capitale n’est pas belle. Paris n’est pas une carte postale. C’est là qu’est le mélo : Paris est triste d’un gros chagrin de crocodile et personne ne sait la consoler.



Cette lecture n’est pas un échec, car le style de Frédéric Ciriez est intéressant, mais l’histoire ne me laisse pas beaucoup plus qu’un vague à l’âme assez proche de la nausée que cause un wagon de métro à l’heure de pointe, avec l’impérieux besoin de prendre une grande goulée d’air frais et de me laver les mains.

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Récits B

Comme tout recueil de nouvelles qui se respecte, « Récits B » est inégal et au global plutot moyen avec comme cadres principaux la Bretagne natale (passionnément), Paris (beaucoup) et Alger (un peu).



Le style unique et assez inclassable de Ciriez est bien présent, avec ce mélange de précision, d'excentricité, de poésie et d'humour.



Parfois cela fonctionne, même lorsque comme moi on déteste l'ambiance du football et de ses supporters éméchés, parfois on ne parvient pas à suivre l'auteur dans ses délires tortueux.



« 30 avril dans le 22 » est sans nul doute la nouvelle disposant du plus de potentiel avec ses histoires de revenants, mais sa chute en amoindrit pourtant l'impact.



Un recueil décalé qui ne touche donc pas sa cible à tous les coups.
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2017 : L'élection improbable

J'ai posté deux citations de ce recueil en en finissant la lecture le 25 novembre 2016, mais je n'en ai rédigé la chronique que ce 17 février. Et grand bien m'en a pris !

En donnant à ce recueil de récits de politique fiction, le titre « 2017 l'élection improbable », les éditions La Tengo ont fait mentir les tenants du complot et de la dénonciation d'un système politico-médiatique plus prompt à mettre le couvercle sur la marmite qu'à passer les plats à ceux qui ont réellement faim.

En effet, la réalité que nous vivons va au-delà de ces nouvelles qui, pourtant, au moment de leur parution, semblaient s'être placées sous l'égide de la plus haute improbabilité et de la plus grande iconoclastie.

Au fond, n'est-ce pas là, la preuve que ceux qui conspuent avec force la philosophie de mai 68 ont tort ? La campagne électorale que nous vivons actuellement montre non seulement que « l'imagination est au pouvoir » mais qu'il est aujourd'hui « interdit de s'interdire » toute hypothèse, même les plus farfelues.

D'ailleurs, la victoire du PSG sur le Barça, 4-0, n'est-elle pas à mettre à l'actif de cet air de liberté qui souffle et renvoie à dash les certitudes du passé ?

Ça vous en bouche un coin, non ? Ce retour de slogans que certains n'avaient pas hésité, tout à leur enthousiasme juvénile, à jeter aux orties.

Bref. La vie est vraiment formidable !

11 nouvelles. 11 auteurs. Comme dans une équipe de foot.

Pour moi, La palme revient à «Sarko Papillon», de Thomas Legrand qui imagine notre Nicolas, enfermé dans son propre corps après une collision avec la Porsche Cayenne de Didier Barbelivien, qui s'est suicidé au passage. Réveil du cycliste à l'hôpital. Seule Isabelle Balkany est autorisé par lui à lui rendre visite. On craint le pire. Un nouveau choc. Nicolas est resté dans le coma pendant toute la campagne des présidentielles et il faudra prendre des pincettes pour lui annoncer qui est l'heureux élu. Je ne dévoile rien. Il vous faut lire cette nouvelle.

J'ai bien aimé aussi, « En attendant Angela » de Marie Desplechin. Une famille d'immigrés qui donne à ses enfants pour prénom, le nom des Présidents de la République. Sarkozy et Hollande pourraient être frères…et leur soeur Angela… La famille se demande avec angoisse s'il faudra en arriver à baptiser Marine la petite dernière. Heureusement les évènements en décident autrement…

Jérome Leroy a, sans s'y attendre, anticipé la sortie de Juppé. Vainqueur des primaires, il se retrouve candidat face à Alfred Garcia le candidat de l'ESD (l'Eglise de la Sainte Déconne).

On ne peut passer sous silence la mise sur orbite de Rachida Dati par Frédéric Ciriez dans « le Théâtre Ovale », après une éclatante victoire à la primaire de la droite et du centre. Elle installe son QG de campagne dans les tours Les Mercuriales Porte de Bagnolet « Les Twin Towers » du pauvre précise l'auteur.

Que dire de cette soirée électorale dans «Les Quatre Mercenaires» de Jérémy Collado. Marine le Pen est élue au premier tour. Conseil de guerre à l'Élysée. Sarko, Méluche, Hollande et Bayrou continuent à se bouffer le nez, et à se lancer leur responsabilité réciproque au visage. Incapables de saisir la réalité de ce qu'ils sont en train de vivre.

Je ne vais pas passer en revue les 11 nouvelles, qui présentent toutes un intérêt, vues du 17 février 2017.

Au fond, et je ne fais ni de l'antiparlementarisme, ni du « tous pourris », un fil rouge commun à toutes ces histoires, les hommes et les femmes politiques qui prétendent à l'investiture suprême, ont-ils vissé au corps et à l'esprit le désir de servir la France ou simplement le désir de parachever une carrière politique par la plus haute distinction ? Je n'ai toujours pas la réponse, et cela ne m'empêche pourtant pas d'aller voter. C'est cela aussi la Démocratie. Croire en l'incroyable.


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Frantz Fanon

Frantz Fanon...mais oui bien sûr ! Ce médecin psychiatre ayant joué un rôle considérable au sein du FLN ! Où l'avais-je rencontré hormis dans les rayons de ma bibliothèque de quartier? Dans les Mémoires de Simone de Beauvoir bien sûr !

Les biographies en bande dessinée, ce n'est pas très courant, mais c'est très agréable. D'autant plus lorsque l'on retrouve le couple phare du XXème siècle Beauvoir - Sartre.

Il n'était pas facile de condenser cette vie intense de Frantz Fanon, entre son enfance en Martinique, ses études à Lyon, son engagement dans la seconde Guerre Mondiale, ses avancées dans la psychiatrie en Algérie et ailleurs (il était l'un des rares de son temps à croire en la socialthérapie) et son engagement en faveur d'une lutte armée pour l'indépendance de l'Algérie.

Les questionnements de ce type sont soulevés avec délicatesse et franchise. En outre, les diverses positions de Sartre, Lanzman et Beauvoir, ses interlocuteurs, sont finement distillées au sein de l'œuvre.

Les graphismes sont simples mais très évocateurs. j'ai apprécié en particulier de retrouver les visages familiers de Sartre et Beauvoir sans pour autant entrer dans les détails : on a l'impression de les reconnaître de loin et seules les émotions sont bien visibles.

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BettieBook

« Bettiebook » est un excellent roman « dans l'ère du temps » qui analyse le déclassement des critiques littéraires à l'ancienne, débordée par une jeune génération exploitant à merveille les potentialités du numériques et des réseaux sociaux.



De ce choc des culture nait une relation perversement plaisante, le « vieux » critique tentant de « punir » celle à qui il attribue sa décadence inéluctable.



Original et vivifiant sur le fond, « Bettiebook » est également extrêmement plaisant sur la forme, variée et créative.



Pour moi le meilleur livre de Frédéric Ciriez !
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Je suis capable de tout

Un livre étonnant et drôle. Julie et sa fille Neko sont sur la plage et ont chacune un livre. Julie, se plonge dans un roman de développement personnel d'un ancien champion olympique devenue coach. Quant à sa fille, elle est dévore les tomes d'un manga pour fille.

Chacune d'entre elles vont revenir à la réalité à la fin de leur lecture et essaye de faire avec les personnes réelles autour d'eux ce qu'elles ont retenu de leur lecture.

Drôle, bien pensée et les passages sur le développement personnel sont à mourir de rire si on a déjà lu de vrai doc sur ce sujet :)
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Musées, des mondes énigmatiques

Derrière un titre alléchant et une couverture de toute beauté se cache un recueil de nouvelles assez particuliers et de bonne qualité.



Effectivement, il ne s'agit pas là d'un simple recueil, mais le résultat d'un concours lancé en 1998 par le ministère de la Culture et la Communication/direction des musées de France, dans le cadre de "Lire en fête" et de "L'invitation au musée". Les 15 auteurs réunis ici ont été choisis parmi 191 participants âgés de 18 à 30 ans. le chalenge étant d'écrire une nouvelle tournant autour d'un musée et devant commencer par les lignes de Stefan Wul qui suivent :



"D'un coup d'oeil par-dessus son épaule, Joss s'assura qu'il (elle) avait semé ses poursuivants et poussa la lourde porte. Il (elle) était à présent dans la place, à l'abri, au coeur même du musée, devant la pièce maîtresse du département de..."



J'ai beaucoup aimé l'idée, même si je dois bien avouer qu'à un moment je sautais le début, lu déjà trop de fois.



Je mentirais si je disais que j'ai adoré tous les textes, mais franchement, à part un qui ne m'a vraiment pas passionné, j'ai passé un agréable moment à la lecture de tous les autres.

L'écriture y est de bonne, voir de très bonne qualité dans chacun, et, courts récits aidants, tous se lisent facilement et rapidement.



J'ai tout particulièrement aimé "Max" d'Alexandre Stania, très Science-fiction et qui donne à réfléchir sur notre monde super connecté.

"La galerie" de Sophie Zerbib, avec son coté fantastique et glauque, même si elle m'a fait pensé par certains points aux Anges pleureurs dans Doctor Who.

"Silence d'outre-monde..." de Cécile Voin, qui nous dépeint un monde où la nature a disparu de la surface de la Terre, et ne subsiste plus que dans un musée à l'abri des regards.

"Des muses et des mondes énigmatiques" de Chrysostome Gourio, qui nous fait voyager à travers le temps via des oeuvres célèbres telle "L'enlèvement des Sabines" de Nicolas Poussin, jusqu'à une fin triste mais surprenante.

Et "Fin de siècle" de David Chaumin, son idée de Cryogénisation des pires criminels pour les exposer dans un musée m'a bien amusée, surtout la fin, malgré toute la cruauté qu'elle contient.



Mais j'ai aussi bien apprécié "Les pèlerins du silence" de Yan Arexis et son univers farfelu où il ne fait pas bon garder sa mémoire.

"Anwynn" d'Arnaud Lequien et "Caire free" de Laura Pargade-Klitzke qui nous emmènent dans des enquêtes archéologiques pleines de magie et de poésie pour la seconde.

Et "Derrière l'éléphant, la plaine" de Christophe Varlet, avec l'étrange amitié qui se forme entre un humain et l'IA qui, implantée en lui, l'accompagne.



Pour conclure, si vous aimez les musées et la science-fiction, que dire de plus que foncez, ce recueil ne pourra que vous plaire.
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Mélo

Soiree du 30 avril au 1er mai:

Trois destins se croisent en trois chapitres aux titres révélateurs :

_  tranfixion

_ transformation

_ transaction

Ces trois tranches de vie constituent un bien beau moment de littérature .



Dans un Paris tentaculaire, étouffant tant par son activité que par l'atmosphere surchauffée et la menace d'orage, trois personnages vivent un fragment de leur vie:

_ sa fin pour le syndicaliste désabusé, pourtant entouré d'amis,

_ sa soirée de gloire  pour le chauffeur de camion poubelle congolais  qui travaille et ne vit que pour faire partie de l'excellence de la sape.

_ une soiree de "travail ordinaire"pour la jeune fille d'origine asiatique, décidée a se faire une place dans le monde du commerce de rue avec patins en ligne, "gloryfier" en ceinture, et patente d'autoentrepreneur en poche.

Notre sapé raconte a la première personne, avec passion et truculence sa soirée qui devrait rester dans les mémoires de la communauté internationale des élégants .

Pour ces trois là, la vie est percue différemment :

_ au passé

_au  présent ,

_au  futur,

Du moins l'ai-je  ressenti ainsi.

Le texte rend compte de l'activité fébrile _ ou du vide existentiel _ de chacun des acteurs....  Qu'il est dur de continuer à travailler quand vos viscères vous plient en deux en pleine rue, sur rollers !

Cette" langue incarnée, généreuse et imagée"(*)nous fait vivre le ressenti de chacun



J'ai donc pris plaisir a me laisser porter par le rythme soutenu et riche de cette prose, tendre envers ces citadins anonymes, que nous cotoyons sans les voir.



(*) quatrieme de couverture des ed. Verticales.



Ancien chroniqueur littéraire , Frédéric Ciriez estime qu' "Un critique littéraire est un écrivain qui écrit a partir du texte d'un autre."

Donc, j'en déduis :

, _ ceci n'est pas une critique,

et _ je ne suis pas un écrivain
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Mélo

Le roman de Frédéric Ciriez est le récit de quelques journées avant le premier mai de trois personnages dans les quartiers du nord parisien.

Un Lorientais de trente huit ans, travaillant pour un syndicat, aux instincts suicidaires sans véritable attache amoureuse se poignarde dans sa Xantia.

Parfait, congolais, chauffeur de camion poubelle et ami du Lorientais nous ballade dans le Xe arrondissement avant de se rendre à une manifestation de Sapeurs. Il est le roi de la Sape et affronte dans des joutes verbales d’autres amateurs.

" Moi, Parfait de Paris, travailleur à main nu, venu à toi, vêtu de jaune, de vert et d’argent, sache que je suis le maître du déchet, le terminus esthétique de l’Occident."

Enfin, Barbara, une jeune chinoise vendeuse des rues mais étudiante à l’ École Supérieure de Commerce de Paris, nous fait découvrir sur ses rollers son métier fatigant, risqué mais rentable. Elle vendra à Parfait un superbe briquet qui laisse découvrir le corps d’une sensuelle "poupée russe".

Trois personnages atypiques, aux existences fragiles, qui deviennent très touchants soit par leur solitude, leur ridicule ou leur acharnement.

Seulement, pour les connaître et les apprécier, il faut suivre les parcours sinueux et peu intéressants de l’auteur qui sont ceux de la Xantia du Lorientais, du camion poubelle de Parfait ou des rollers de Barbara. On sinue dans les quartiers parisiens sans grand intérêt, on entre à peine dans les vies des personnages et l’on arrive inévitablement sur le mélo de leurs petites vies.

A part la mise en valeur de personnages qui n’attirent pas habituellement l’attention, je termine le livre en me demandant quelle pouvait être la finalité du roman.
Lien : http://surlaroutedejostein.w..
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BettieBook

Il existe pour moi des autrices et auteurs, à l’image d’Estelle Nollet ou de Juliette Bouchet en exemple, qui ne sont pas assez connues du grand public.

Et Frédéric Ciriez, que j’ai rencontré dans un salon du livre, fait partie aussi de ce groupe bien moins médiatisé, mais tout aussi talentueux.



Cette fois, l’intrigue de son joli roman « BettieBook », se passe dans les milieux littéraires et ceux des youtubeuses. Une rencontre entre deux mondes extrêmes. Celui d’un vieux et respecté critique littéraire « à la ramasse », bien désabusé, perdu dans ce monde moderne. Et celui de « BettieBook », une jeune critique, pleine de vie, pleine d’optimiste, pleine de joie, qui passe une partie de son temps à mettre en ligne ses vidéos de critiques de livres qu’elle a lus.



Le roman est très bien écrit, très vivant et j’y ai retrouvai le style de Frédéric, avec son l’humour et ses petites touches sarcastiques qu’il saupoudre au peu partout dans le récit. Le roman est aussi truffé de mille références littéraires et musicales. Bravo ! Quelle belle culture Frédéric.



Le passage où l’auteur décrit la partie de jambe en l’air, est des plus délirantes et hilarantes. Et avec les détails fournis et les onomatopées, on aurait bien pu en faire une BD.

Paragraphe qui est, à mon humble avis, un peu long. Mais qui justifie bien sûr, la suite du récit, très imaginatif.



Je constate que le romancier a pris plaisir à écrire, comme j’ai eu plaisir à le lire.

Il soulève cependant, pour moi deux questions de fond.

La première, jusqu’à quelle limite certaines personnes sont prêtes à aller. Et quel stratagème pernicieux choisiraient-elles, pour sortir de l’anonymat du monde du virtuel, pour se faire remarquer, se rendre des plus visibles sur les réseaux sociaux d’aujourd’hui.



La deuxième, c’est l’impact que peut avoir « le critique », auprès du public, dans la littérature, mais aussi dans le cinéma ou dans la musique.

Ce pouvoir très dangereux et cette notoriété, que ce même public concède à des personnes, aussi mauvaises critiques qu’elles peuvent l’être parfois.

Des critiques, qui aidés par les médias et les réseaux sociaux, peuvent défaire la réputation d’un romancier ou romancière, ruiner parfois un film, ou ralentir une carrière musicale.



Mais restons confiants et libres, le succès d’un livre ne vient pas d’une quatrième couverture, qui contiendrait des qualificatifs élogieux. Ce sont nous, lecteurs, qui par notre lecture et par nos appréciations, donnons une vie à chaque ouvrage littéraire, historique, culinaire, etc.

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Je suis capable de tout



Le pitch de départ est simple : Julie, quarantenaire plutôt jolie est en vacances. Executive woman sortant de centrale et grande spécialiste de l'énergie éolienne, elle entame son séjour sur la Méditerranée accompagnée de son adolescente de fille de 17 ans. Solitaire depuis son divorce, elle espère rencontrer bien vite une âme soeur.

Jusque là, que du banal sauf que Frédéric Ciriez, avec son stylo au vitriol, va jouer les pourfendeurs de clichés en dézinguant cette intrigue de plage pour la transformer en une critique pugnace de notre société et de ses nombreux travers.

Focus sur le pitch : Le lieu de vacances est l'île du Levant, Mecque du naturisme ( ici appelé " vie naturelle"), Le passe-temps des deux femmes est la lecture : un livre de coaching pour la mère, un manga yaoi pour l'adolescente ( pour les non-initiés,le yaoi s'adresse aux filles en leur racontant des histoires d'amour et de sexe entre garçons). Mais la lecture ne durera pas . La mère a rendez-vous avec un dénommé Giacomo, rencontré sur le net et la jeune fille va se faire draguer par une bande d'ados marseillais cherchant un(e) partenaire de volley.

Et sur cette trame nettement moins plate, dans une époque située dans un futur indéterminé, Frédéric Ciriez va s'en donner à coeur joie. En amateur de littérature, il va parodier de façon décapante des genres qui font le bonheur des comptes des éditeurs. En plus de ceux cités plus haut, je recommande une longue scène érotique, joyeux mélange de "L'amant de Lady Chatterley" et "50 nuances de grey", au ton indescriptible, caustique analyse psychologique de la femme seule moderne mais connectée.

Son esprit critique ne va pas s'arrêter à cette littérature commerciale dévorée par des estivants gorgés de soleil, de musiques et sodas, sur des transats alignés comme dans un sanatorium. Il va également l'appliquer aux téléphones portables qui tiennent en laisse les adolescents ou à la crédulité des élites friquées prêtes à croire n'importe quel bonimenteur à condition qu'il leur parle d'eux, de leur argent et leur fasse miroiter un pouvoir supplémentaire. (Le coaching nouveau look des sectes ? ). Et bien entendu, il va déchirer le paréo idyllique dans lequel se drape l'île du Levant, où la vie naturelle ( le naturisme donc) prend l'allure d'une foire aux bestiaux tout en cohabitant avec une zone militaire nettement moins peace and love.

La fin sur le blog
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Mélo

Ce roman, découpé en trois parties, s'attache à suivre en cette veille de 1er mai le parcours d'un homme, syndicaliste, au bord du suicide; d'un chauffeur de camion-poubelle le jour et sapeur la nuit; et d'une jeune franco-chinoise vendeuse ambulante de rue et étudiante dans une grande école de commerce.

Le point commun entre ces trois personnages, c'est qu'ils se connaissent : le syndicaliste est ami avec le sapeur qui a acheté un briquet à la vendeuse ambulante.

On met dans le shaker, on agite et c'est un récit en demi-teinte qui en ressort, parfois structuré, parfois non.

La première partie baptisée "Transfixion" décrit de manière chaotique et déstructurée les sentiments d'un homme sur la brèche prêt à en finir avec la vie : "Un suicidé n'est jamais un héros, même aux prud'hommes.".

Je n'ai franchement pas aimé cette construction sans queue ni tête, Frédéric Ciriez a un style, mais qui est souvent à l'image de la structure de son récit, ou plutôt de sa non-structure : "Nul humain dans le rétroviseur, juste l'image d'un décor inutile. Personne dans le pare-brise, personne, Sa Majesté la rue - tapis noir. Le script final exige l'annulation de son auteur. Clause : le contrat sera signé au moment de sa mort, avec son sang. Jouer avec le suspens est obscène. L'accomplir est juste.".

La deuxième partie, "Transformation", présente un homme chauffeur de camion-poubelle avec ses principes le jour : "Ca m'agace quand les gens se trompent, pour eux tout le monde est éboueur, même moi. Or je suis chauffeur et mes gars ripeurs, voilà."; et roi de la sape de Paris la nuit : "Je suis la synthèse du chic bourgeois, du dandysme excentrique et du m'as-tu-vu-isme spectaculaire. Je suis la magnificence du code couleur éboueur. Je suis l'élégance d'outre-social. Je vais mordre et être très méchant. Je suis Parfait de Paris.", et modeste avec ça.

Certes, il n'y a plus les soucis d'intemporalité dans le récit, j'ai même été intéressée par le début de cette nouvelle partie du roman, mais j'ai fini par m'en détourner lorsque le narrateur est parti dans ses délires de grand sapeur de Paris, trop pour moi même si je reconnais que ce personnage est bien plus fouillé que le premier.

Quant à la troisième partie, "Transaction", c'est sans doute celle qui m'a le plus intéressée dans ce roman, à travers le prisme de Barbara, une jeune franco-chinoise que le lecteur découvre comme vendeuse ambulante sur rollers pour finir par apprendre qu'elle est étudiante dans une prestigieuse école de commerce et envisage de monter son propre business selon un modèle qu'elle teste grandeur nature : "Tout le monde ne pouvait avoir sa volonté et son abnégation à elle, Barbara; tout le monde ne pouvait être une pionnière, avoir une double vie d'étudiante et de vendeuse expérimentale - question d'image, de tempérament, d'histoire et de trajectoire familiale, certainement.".

Est-ce par que c'est une femme et./ou un personnage plus proche de moi de par son âge, elle m'a touchée et c'est avec un certain plaisir que j'ai suivi ses déambulations dans les rues de Paris, déambulations à la fois physique mais également morale : patiner pour parfois oublier les chocs du quotidien, un personnage à part des deux autres qui a su trouver un chemin jusqu'à moi.

D'une façon plus générale, il ressort de ce roman une étude relativement bien approfondie de trois personnages aux antipodes les uns des autres.

Et si je n'aime pas énormément l'ambiance de fond qui se dégage du récit, avec un Paris à l'image de sa proche banlieue manquant de luminosité et d'éclat, je reconnais que l'idée de base du récit n'était pas mauvaise tout comme sa construction n'est pas inintéressante.

Mais voilà, je ne sais si Frédéric Ciriez a cherché à écrire un mélodrame de trois personnages ou bien un méli-mélo de personnages qui s'entrecroisent ou alors les deux, je ressors de cette lecture avec une impression mitigée où les aspects négatifs l'emportent plus largement sur ceux positifs.



Récit d'une génération et d'une ville désenchantées, "Mélo" ne me laissera ni mélancolie dans le cœur ni souvenir impérissable, juste l'impression d'un roman à l'image de ses personnages : de passage, aussi vite oublié que lu.
Lien : http://lemondedemissg.blogsp..
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Mélo

En dépit de son titre, Mélo ressemble davantage à une tragédie contemporaine qu’à un mélodrame. L’unité de lieu (Paris et sa région) et de temps (la veille du 1er mai) créent véritablement le lien entre les trois récits plus que les trois personnages qui en sont les héros.

La solitude semble être leur point commun. C’est d’autant plus frappant pour le premier. Dépouillé de son nom, il n’est défini que par son engagement syndicaliste, et par ses échecs dans sa vie personnelle. Le choix d’une narration à la troisième personne, désincarnée, froide, sèche, m’a empêché de ressentir de l’empathie pour lui. Ce choix a cependant l’avantage de renforcer le caractère inéluctable de son destin.

A côté, le personnage de Parfait paraît plus optimiste et m’a permis de découvrir un milieu qui m’était entièrement inconnu jusqu’alors, celui des Sapeurs. L’adhésion au personnage était renforcée par la narration à la première personne : le lecteur est véritablement toujours en compagnie de Parfait. Sa solitude est pourtant aussi grande que celle de son ami, si ce n’est qu’il l’a choisie. Quant à Barbara, la jeune étudiante d’origine chinoise, qui vend à la sauvette à l’heure du commerce électronique, elle a beau parcourir Paris en roller et entretenir un contact étroit avec sa clientèle, elle n’en reste pas moins seule, jusqu’au bout.

Syndicalisme, sape, vente à la sauvette : Mélo se voudrait-il un portrait de notre société de consommation ? Parfait et les siens se battent non à coup de vêtements, mais à coup de marques, toutes plus prestigieuses, plus imposantes les unes que les autres. Sa propre fille, qui n’a que sept ans, est définie parce qu’elle possède, non parce qu’elle est. Barbara achète et revend des gadgets divers et variés, joue sur les stéréotypes un brin racistes – même Parfait se laisse prendre aux apparences, lui qui sait pourtant à quel point elles sont trompeuses.

Désespérant ? Oui. Même si les personnages laissent tomber leurs oripeaux, au propre comme au figuré, reprenant ainsi corps devant nous, Mélo reste une œuvre résolument désenchantée.

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Des néons sous la mer

« Le Fascinant », vieux sous-marin de la Marine Nationale termine une calamiteuse carrière le long d’un quai désert de l’anse de Paimpol. Il a été racheté par une société anonyme pour être transformé en bordel flottant. Une douzaine de prostituées indépendantes, aidées de quelques mâles, y accueillent des clients pour des prestations tarifées de gamme moyenne-haute car de nouvelles lois ont autorisé la réouverture des maisons closes. Beau-Vestiaire, le narrateur, chargé de recevoir les clients et de les débarrasser de leurs manteaux et blousons, présente l’établissement au lecteur…

Cet étrange opus, qui se voudrait relever de l’anticipation sociopolitique est présenté comme un premier roman. En fait, il ne relève guère du genre dans la mesure où il ne propose pas la moindre intrigue au lecteur. En clair, il ne se passe rien dans ce bouquin. Dans un fouillis de truismes et de clichés complètement éculés sur la prostitution et la condition féminine, nous avons droit à d’arides descriptions de sites, villes ou paysages dignes d’un vulgaire guide touristique, à des divagations sur les diverses couleurs de l’arc en ciel et de temps en temps à des paragraphes barrés. Cette technique qui permet à celui qui sait ne pas en abuser de mettre en parallèle des idées ou des langages contradictoires pour arriver à des effets comiques ou ironiques, tombe ici complètement en porte à faux. Les parties barrées sont totalement inutiles. L’auteur aurait été bien inspiré de les épargner à son malheureux lecteur ! Un profond ennui se dégage de cette œuvrette. Quoi de plus normal avec pareil sujet. Sexe à chaque détour de phrase, cela tourne à l’obsession et devient vite aussi lassant et aussi convenu qu’un film porno. N’est pas Miller, Bukowski, Sade ou Boccace qui veut. Seule petite lumière dans cette triste traversée de ce désert littéraire faussement poétique : les biographies assez amusantes des péripatéticiennes.
Lien : http://www.etpourquoidonc.fr/
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