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Citation de Charybde2


C’est parfois difficile de ne pas succomber au charme viril de l’aéronautique. Le Salon du Bourget est un monde d’une logique implacable. Tout semble être à sa place : les ingénieurs bien rasés discutent derrière leur comptoir, les militaires se déplacent en petites délégations derrière leurs supérieurs, les missiles sont rangés par ordre de taille et, sur le tarmac, les réacteurs des gros-porteurs brillent de mille feux.
En 2017, nous avions été invités par un magazine à réaliser une série d’images sur le 52e salon international de l’Aéronautique et de l’Espace de Paris-Le Bourget. Nous avons tout d’abord réalisé une première série de photographies au Salon, puis nous sommes rentrés à notre atelier et nous avons réalisé une seconde série d’images en intervenant directement sur les photographies que nous avions faites. Au fur et à mesure que les images se construisaient, nous avons commencé à voir émerger une certaine représentation du monde de l’aéronautique dans laquelle les notions de performance, de fiabilité et d’innovation avaient été remplacées par celles d’absurdité, de bricolage et de nuisance.
Nous pensons que le documentaire photographique est un acte qui peut avoir lieu à la fois avant et après l’événement que l’on cherche à documenter. À l’inverse de la retouche photographique classique qui cherche sans cesse à « invisibiliser » les actions ayant lieu après la prise de vue, nous préférons laisser apparentes et lisibles chacune de nos interventions sur les images. Il nous semble que cette manière de documenter la réalité permet de rendre compte d’une plus grande variété de points de vue et nous pensons que c’est précisément en multipliant les points de vue qu’il est possible de s’approcher au plus près de la complexité du monde dans lequel nous vivons aujourd’hui.
L’aéronautique n’est pas un objet qui nous est extérieur. L’aéronautique est un objet qui nous traverse de part en part en permanence. Il constitue une forme d’ « hyperobjet » aussi menaçant que fascinant pour reprendre ici le terme du philosophe Timothy Morton. Son ambition de vitesse et de puissance se réalise au prix d’immenses dommages environnementaux et si nous voulons lutter contre les accélérations d’objets protéiformes, nous devons rapidement inventer un nouvel imaginaire de la lenteur. (Matthieu Raffard, Mathilde Roussel, « Accélération »)
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