AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Frédéric Martel (79)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Sodoma

Je n’aime pas me cantonner au seul roman, premier, second ou multiple, français ou pas ; je n’aime pas être rangée dans une petite boite, lire comme tout le monde, ce que tout le monde lit. Et parfois, j’aime bien sortir vraiment des rails, et m’engager sur un terrain qui pourrait s’avérer glissant voire polémique.

Cet essai sur l’homosexualité au Vatican en avait tous les ingrédients. A l’inverse ce fut un ouvrage dénué de jugement, sans effet racoleur, teinté d’humour, parfois, mais surtout très éclairant sur un phénomène qui au fond ne m’a guère surprise sur le fond, mais effarée sur son ampleur annoncée par son auteur.



Pourquoi me direz-vous consacrer plus de 600 pages à l’homosexualité au Vatican, et plus généralement au sein de l’Eglise catholique ? Après tout, chacun est bien libre de faire ce qu’il veut de ses fesses, entre adultes consentants ; ce qui se passe sous la soutane ne nous regarde pas. Sauf que la sexualité est depuis 50 ans une obsession de l’Eglise catholique, qui n’a de cesse de nous prescrire ceci ou cela, nous interdire tel ou tel comportement, et nous promettre les enfers dans certains cas. Charité bien ordonnée commence par soi- même… Dans ce domaine, l’hypocrisie règne en maître.



« Plus un prélat est homophobe, plus il a de chance d’être lui-même homosexuel. Ces conservateurs, ces « tradi », ces « dubia » sont bien les fameux « rigides qui mènent une double vie » dont parle si souvent François. »



Dans cette grande enquête menée sur tous les continents et s’appuyant sur de nombreuses ressources et d’innombrables entretiens, Frédéric Martel a cherché à comprendre « la psychologie collective et l’homosociabilité généralisée », et à expliquer les comportements, les discours homophobes , l’hystérie autour de l’usage du préservatif en pleine pandémie de Sida, les « affaires » qui ont éclaboussé l’Institution, jusqu’à la démission surprise de Ratzinger et la prise de conscience du Pape François qui n’a pas les coudées franches pour réformer, si ce n’est un peu, les choses.



Martel avance également une des raisons de la baisse des vocations sacerdotales que l’on observe depuis les années70. Avant la libération sexuelle, un adolescent gay ou qui doutait s’engageait dans le sacerdoce ; de paria dans la société civile, il devenait initié dans l’Eglise. Tout était caché, restait « à l’intérieur de la paroisse » ,la question de a chasteté vis-à-vis des femmes ne se posait ainsi pas !Le tout était de rester dans » le placard », pourvu que l’on soit discret, et l’homosexualité si décriée au dehors était tolérée voir mise en valeur quand il s’agissait de promotion au sein de la hiérarchie.



Martel ne dénonce en rien le fait d’être ou pas homosexuel, mais l’hypocrisie qui règne à son sujet, et à propos de ses dérives de la part de certains prélats qui se sont révélés être ou supposés être de véritables prédateurs sexuels, et/ou à propos de ceux qui ont fermé les yeux en raison de leur propre homosexualité de peur que celle- ci soit révélée.



« En stigmatisant les homosexuels en Afrique, l’Eglise les contraint à se cacher. Ils se réfugient dans les séminaires pour se protéger et ne pas avoir à se marier. »



« L’homosexualité fut l’un des ressorts de ma vocation. Le sacerdoce célibataire est un problème pour un prêtre hétérosexuel ; c’était une aubaine pour le jeune gay que j’étais. C’était une libération. » Parole de prêtre italien.



Cet essai est judicieusement construit. D’abord, il traite du pontificat actuel sous la forme d’un état des lieux, et en dressant une sorte de feuille de route pour le pape François. Puis, il reprend successivement et chronologiquement les trois avant -derniers pontificats (à savoir ceux de Paul VI, Jean-Paul II (le pire selon l’auteur) et Benoît XVI plus mystique d’administrateur et vite dépassé par les évènements) en expliquant comment s’est installé le double langage et le durcissement de la morale sexuelle dans l’Eglise en même temps que s’installaient les affaires, les prélats et autres dignitaires dans une sorte de bulle d’impunité.



De tout cela, on constate la grande misère affective du clergé catholique, sa solitude ; Et parce qu’un homme reste un homme, avec ses sentiments, ses désirs, son corps, et que l’institution s’arque boute sur des principes d’un autre âge, une morale archaïque, on en arrive à des situations invraisemblables, des comportements abjectes. Cette morale d’un autre temps éloigne l’institution des fidèles.



Il y aurait tant à dire sur ce livre qui m’a passionné d’un bout à l’autre. Le travail de l’auteur est remarquable, fouillé, précis, abondamment documenté.



Je laisse l’auteur conclure en l’approuvant mille fois…



« Et même si personne n’ose encore l’avouer publiquement dans l’Eglise, tout le monde sait qu’on ne pourra pas mettre fin aux abus sexuels des prêtres tant qu’on n’abolira pas le célibat, tant que l’homosexualité ne sera pas reconnue dans l’Eglise pour permettre aux prêtres de dénoncer les abus, et tant que les femmes ne seront pas ordonnées. »


Lien : https://leblogdemimipinson.b..
Commenter  J’apprécie          467
Sodoma

"Secret", "secrets", "le secret le mieux gardé du Vatican", "obscur", "inexploré", "la face sombre des nuits sombres", "interdite", "au coeur du Vatican", "la nuit", "des organisations", "des réseaux", "clandestins", "les clefs pour comprendre"... blablabla. Rien à f* du Vatican dont je ne pense aucun bien personnellement, mais je constate que la gauche fait du conspirationnisme décomplexé à fond les ballons. Ce qu'elle reproche à "l'extrême droite", en fait... ce n'est pas vraiment le conspirationnisme en soi; c'est plutôt d'empiéter sur son monopole. Et puis, quel scoop, cette histoire d'homosexualité au Vatican! Il y a beaucoup de pékins à être restés enfermés dans un placard pendant 55 ans et à ignorer qu'un pape nommé Paul VI a été élu en 1963? Enfin, c'est marrant cet acharnement contre les catholiques seuls... Je note que les cibles autorisées - voire obligatoires - sont étroitement sélectionnées par les médias en 2019: les "mâles blancs", les "catholiques", etc. Tout le reste, pas touche! Un livre médiocre qui s'adresse à la paresse intellectuelle et au ronronnement du politiquement correct. J'ajoute que je trouve la couverture ignoble. Ignoble. On n'imagine pas le scandale public, avec l'équivalent, s'il s'était agi d'une autre religion...
Commenter  J’apprécie          390
Sodoma

On ne peut qu’admirer la richesse et la profondeur de cette enquête tragiquement sidérante, qui permet de comprendre bien des énigmes vaticanes, fournissant « la » clé de lecture indispensable. Il est important que les catholiques la lisent sans préjugés, car comprendre ce qui y est décrit est la seule chance pour cette religion de se sauver et de perdurer. On peut regretter – mais ce sont des détails – les multiples et inutiles anglicismes, une certaine auto-complaisance et des redites et des décalages sans doute dus au fait que les chapitres n’ont pas été écrits dans l’ordre de leur lecture. Un ouvrage impressionnant et capital.
Commenter  J’apprécie          370
Sodoma

Ce livre était à écrire. Frédéric Martel l'a fait.

Fruit de quatre années d'enquêtes, d'interviews, d'études, ce livre présente sans jugements ni à-prioris les faits, rien que les faits.

Résultats de ceux qui ont accepté de parler, ceux qui ont osé dire et ceux qui, par leur silence, n'en n'ont pas moins exprimé.

Aucune concession, aucune hypocrisie dans ce qui nous est révélé : la réalité certes brutale mais ô combien nécessaire.

Les clans homosexuels (et non le « lobby ») sortent des pénombres vaticanesques et l'homosexualité assumée ou pas, pratiquante ou pas, en « amour d'amitié » ou plus se révèle à travers pays, diocèse, simple curie…

Que les choses soient claires et répétées, il s'agit ici d'homosexualité et non de pédophilie : confusion parfois entretenue par certains protagonistes et non des moindres. Le scandale de la pédophilie est évoqué et malheureusement y sont montrées les dérives du sacro-saint silence et de la protection des coupables jusqu'à Benoît XVI, allant jusqu'à oublier les victimes.

Le propos du livre dénonce l'hypocrisie entourant cette homosexualité non assumée à l'extérieur, allant jusqu'à la condamnation violente tout en étant (souvent) vécue et/ou pratiquée (parfois jusqu'à l'excès) derrière les murs du Saint-Siège ou dans les quartiers, bars, hôtels et autres lieux de la prostitution. Un schéma presqu'identique se retrouve dans beaucoup de grandes villes des pays évoqués dont l'Amérique latine constitue le fleuron.

Les nombreux motifs qui tentent de justifier ce refus de la vérité sont développés : hiérarchie, jalousie, argent, peur de s'assumer, etc…

Se dressent rivalités, magouilles, injustices, mépris, compétitions qui transparaissent dans les témoignages et la logorrhée de certains cardinaux, évêques, nonces, monsignori, prêtres… qui contribuent à ternir l'image sacrée maintenue à regret depuis des siècles.

Protections liées parfois à la politique, souvent à l'argent (luxe effréné), guerres entre clans homosexuels, caricatures (ex. la capa magna du cardinal Burke), manipulations et j'en passe sont le lot de ce monde cloisonné dont on ne peut que se réjouir de son éclatement.

Un fil rouge dans ce livre, celui du « Poète », Arthur Rimbaud, l' « extra-lucide »dont les citations montrent à quel point, plus d'un siècle plus tard, la difficulté de révéler et de mettre à mal ce système qui brisa tant d'existences est difficile.

Un livre qui permet de comprendre les positions, les déclarations alambiquées de l'église catholique.

Un livre qui peut déranger car il rappelle que :



1. le pis est non seulement l'hypocrisie mais aussi le combat que ces religieux mènent contre ce qu'ils sont et les interdictions et condamnations qui en découlent.

2. ce combat de façade contre l'homosexualité masque la lutte contre la pédophilie avec une évolution positive depuis l'arrivée de François.

3. le refus de reconnaître l'évolution de la société (famille recomposée, mariage des prêtres, ordination des femmes, contraception…)



Une des conséquences est que l'église catholique en perte de vitesse depuis quelques décennies continue de perdre du crédit (il suffit de voir les derniers scandales depuis la parution du livre pourtant récent) et comme dit l'auteur, bien des choses restent à écrire !!!

Tous ces problèmes conduisent à des problèmes de corruption (politique, financière…) et aboutissent à un affaiblissement de la croyance pratiquante en cette église.

Ce livre me renforce dans l'idée qu'il m'est difficile d'accepter qu'un poids culpabilisateur puisse encore peser sur la conduite morale à adopter.

Que ce livre soit un révélateur, une prise de conscience, une réflexion donnant lieu à une « parole habitée » et Frédéric Martel aura gagné la récompense suprême de ces années de recherches sociologiques intenses.









Commenter  J’apprécie          304
De la culture en Amérique

L’ouvrage de Frédéric Martel intimide : plus de 600 pages d’une écriture serrée pour rendre compte d’une immense enquête menée pendant quatre années « à partir d’archives et de 700 interviews dans 35 Etats et 110 villes américaines » (p. 575). Pourtant cet essai sur la politique culturelle américaine, qui fourmille de portraits et d’anecdotes et qui est servi par une plume alerte, se lit d’une traite. Son plan est d’une remarquable limpidité. Dans une première partie, Frédéric Martel narre l’histoire de la politique culturelle américaine décrivant tour à tour la naissance, l’épopée et le déclin du National Endowment for the Arts (NEA), en insistant sur ce qui le différencie des administrations culturelles européennes. Dans la seconde, il décrit les acteurs étonnamment divers de la vie culturelle aux Etats-Unis : fondations, associations à but non lucratif, universités, etc.



Menée sans a priori par un « intellectuel de gauche » qui ne parvient pourtant pas à dissimuler la séduction qu’opère sur lui une vie intellectuelle organisée si différemment de la nôtre, cette enquête foisonnante a eu un grand retentissement à sa sortie en France à l’automne 2006. Car éclairant un vieux débat franco-français, elle montre qu’une vie culturelle intense est possible sans que l’Etat s’en mêle. Rien n’est plus contraire en effet aux mentalités américaines que l’interventionnisme d’Etat exercé par la rue de Valois que les Américains considèrent comme une menace inquiétante sur la liberté d’expression.

Cela ne signifie pas pour autant que l’Etat ne fasse rien pour la culture. Il préfère à l’imposition d’une norme artistique une action moins directe, qui prend la forme notamment d’invitations fiscales. Ces exonérations bénéficient à une myriade d’associations à but non lucratif et reconnues d’utilité publiques, les associations « 501 c 3 » du nom de l’article du code des impôts qui les exempte de la plupart des taxes et qui offre à leur donateurs des exonérations fiscales importantes. Les universités, qui sont des acteurs de premier plan de la vie culturelle, bénéficient d’un régime similaire. Ce système encourage les donateurs qui, dans un élan philanthropique inconnu en Europe dont Frédéric Martel analyse les ressorts sociologiques et psychologiques, financent l’essentiel de la vie culturelle.



La spécificité américaine est là, où on ne l’attendait pas. Contrairement aux idées reçues, la culture aux Etats-Unis n’est pas abandonnée aux seules forces du marché. Pas plus aux Etats-Unis qu’en Europe, les œuvres d’art ne constituent un produit comme un autre. Cette réalité méconnue révèle l’hypocrisie du débat transatlantique sur « l’exception culturelle ». L’art est subventionné aux Etats-Unis ; l’Etat intervient mais sans dicter des normes. « Il n’y a pas de « pilote » dans l’avion (…). Il y a mieux : des milliers d’acteurs » (p.523) dont l’activisme désordonné garantit paradoxalement la diversité de la vie culturelle. Ce « civisme culturel » est l’aspect le plus éloigné et le plus fascinant de la culture américaine, loin des clichés auxquels elle est souvent réduite.
Commenter  J’apprécie          240
Mainstream

Nos films sont américains, nos séries sont américaines, nos artistes favoris sont américains. Depuis quelques générations déjà, nous avons appris à nous méfier des russes sournois, des asiatiques fourbes, et à admirer les soldats américains prêts à se sacrifier pour défendre les justes causes. Et si cette propagande pas très subtile parvient à passer, c’est parce que les États-Unis ont trouvé la recette du mainstream : proposer des contenus lisses et universels qui peuvent plaire à tout le monde, quel que soit sa culture, avec juste assez de particularités pour donner une touche d’exotisme sans braquer personne.



Ce livre est un reportage qui explore les États-Unis, pour tenter de comprendre le phénomène, mais aussi la Chine, l’Inde, le Qatar, le Brésil, … qui tentent d’appliquer les mêmes recettes, car le « soft power » est aujourd’hui très recherché. Avec peu de succès toutefois : s’il est possible d’être populaire chez soi ou dans sa région du monde, une fois que ces pays essaient de gommer leurs différences pour s’exporter encore plus loin, ils se retrouvent à faire de l’américain, avec moins de budget, et donc en moins bien.



Le reportage est exhaustif, mais j’ai quand même eu l’impression de tourner rapidement en rond : après tout, les pays ont plus ou moins tous les mêmes ambitions (devenir l’Hollywood d’Asie, du Moyen-Orient, d’Afrique, d’Amérique du Sud, …) , et les mêmes problèmes pour les concrétiser (si je supprime mes spécificités culturelles, je ne vends plus chez moi et mal chez les autres, et si je les conserve, je vends bien chez moi, mais les autres trouvent ça ringard ou kitsch).



J’ai été parfois agacé par le format du reportage, qui apporte son lot de subjectivité : jugements de valeur, commentaires sur la prestance des hommes, mais sur la beauté des femmes interrogées, un besoin de décrire systématiquement les boissons consommées durant l’entretien, et volonté de montrer qu’on a recueilli des confidences exclusives qui donnent l’impression que l’auteur est du genre à jouer des coudes lors des réceptions pour être pris en photo au plus près de la star de la soirée. Rien de dramatique, mais ça provoque quelques soupirs.



Le livre m’a cependant beaucoup interrogé sur mon propre rapport à la littérature et à la culture en général. L’auteur présente l’Europe comme une résistante, où le mainstream se fait aussi, mais avec toujours un soupçon de honte, car consciente de la valeur de l’art et de sa différence profonde avec le divertissement. Le mainstream est d’ailleurs née aux États-Unis en réaction à la culture européenne, jugée trop élitiste et snob, qui ne permet que de valoriser des œuvres complexes et ennuyeuses, là où la culture américaine accepte tous les genres à bras ouverts.



J’ai quand même quelques doutes sur ce statut de l’Europe. Il me semble qu’il est un peu trop facile d’imaginer un passé parfait où tout le monde avait du goût. Et après tout, des auteurs « classiques » ont accepté en leurs temps des commandes, ou de formater leurs œuvres pour être facilement éditables en feuilletons dans les journaux, … Ce qui leur a valu des critiques parfois acerbes à l’époque, sans qu’on leur en tienne pourtant rigueur aujourd’hui.



Je me demande quand même si l’éclosion des nouveaux genres littéraires (policier et polar, fantasy et fantastique, …) ces dernières décennies ne serait finalement pas qu’une nouvelle conquête de la culture américaine en Europe, en imposant l’idée que les hiérarchies n’existent pas (soit dit sans jugement, étant moi-même amateur de fantasy par exemple). Avec le risque que si tout a de la valeur, plus rien n’a de valeur.
Commenter  J’apprécie          191
Global Gay : Comment la révolution gay change..

Frédéric Martel est directeur de recherches à l'Institut de relations internationales et stratégiques; Il est journaliste, animateur à Radio France.

Pendant cinq ans il a mené une enquête et rencontré bon nombre d'acteurs de ce qu'il appelle une "révolution".

Tout démarre selon lui une nuit de fin juin 1969 à l'occasion d'une émeute à New York au cours de laquelle les premières revendications de la communauté homosexuelle sont apparues.

Tout va s'enchaîner vite. Le fait marquant est la mondialisation de la question homosexuelle, même si de grandes disparités existent entre les pays quant aux législations et mentalités.

Ainsi en Iran les homosexuels risquent la pendaison alors que les transexuels se font opérer légalement. Dans huit pays, les homosexuels risquent la peine de mort et dans soixante-seize pays, la prison.

Au travers de cette diversité de situations, l'auteur analyse de manière intéressante la dynamique qui se met en place et la manière dont ce sujet est perçu au cours des trente dernières années.

Un livre intéressant, d'actualité, qui pose de vraies questions....;
Commenter  J’apprécie          170
Mainstream

Qui n’a jamais cédé au blockbuster estival ? au dernier best-seller de untel ? à la rengaine d'une ennième “queen of pop” ? (fouillez bien au fond du tiroir…) Bravo ! vous consommez mainstream.

Populaire ? de masse ? du plus grand nombre ? dominante ? formatée ?… comment qualifiez-vous la culture dite “mainstream” ? Ne comptez pas sur ce livre pour vous pré-mâcher un avis tout fait et c’est tant mieux, gardons notre libre arbitre.

C’est une enquête, du pur journalisme d’investigation dans les coulisses des multinationales et des groupes de médias qui font et exploitent la culture du plus grand nombre. Cette enquête mérite bien son nom tant l’ouvrage est captivant, suscitant l’interrogation sur notre propre “consommation ” sans faire de procès (et c’est la sa force) mais pointant tout de même du doigt les dérives et les petits arrangements avec la légalité.

Le point de départ de Frédéric Martel est simple, c’est l’éternelle question sur l’œuf ou la poule : les grands groupes producteurs de contenus audiovisuels ont-ils créé le “mainstream” ou bien se sont ils contenté d’exploiter à leur profit un phénomène de société naturel, né des échanges mondiaux, de la porosité des cultures, des nouveaux courants d’expression ? Toujours est il que la culture “mainstream” est devenue un marché mondial colossal que se disputent les gouvernements (pas moins) tant elle est vecteur de souveraineté, un “ soft power”.

Alors, tueuse ou génératrice de diversité ? fuyant ou en quête d’originalité ? menace ou chance pour la création individuelle ? Pas si simple, on apprendra qu'une certaine diversité la caractérise aussi.

Ce livre très bien documenté n’analyse pas le talent (ça c’est notre job) mais les mécanismes économiques de ce marché. Il ne juge pas, il rend compte des méthodes de fabrication des “contenus de consommation de masse”, de leur formatage, des grossières recettes d’apprenti sorcier, des deals de mafieux qu’emploient les magnats de l’entertainment. Nous en sommes tous un peu complices, aujourd’hui par paresse, et demain ? par défaut de choix ?
Commenter  J’apprécie          120
Sodoma

629 pages de verbiage et de digressions pour n'apprendre que très peu par rapport à ce que l'on sait déjà. Comme pour Orpea, il faut quand même dire que ces ouvrages ne doivent leur existence que de par la stricte volonté des structures qu'ils sont supposés salir. Le pape actuel n'est-il pas en train de vouloir autoriser le mariage des prêtres, de vouloir permettre l'union de couples homosexuels? Quant à Orpéa qui vu des maltraitances et qui dit qu'il n'y en a plus? Par contre l'action a plus de 100 euros ne vaut plus que 0,30 euro aujourd'hui. Pour qu'il y ait des gagnants, il faut des perdants. (simple opinion) A quand un livre sur les dérives de l'Islam????????
Commenter  J’apprécie          110
J'aime pas le sarkozysme culturel

Frédéric Martel, journaliste de Radio-France, est un bon connaisseur des médias et des politiques culturelles contemporaines. Il nous livre ici un pamphlet contre la politique culturelle de Nicolas Sarkozy. Ou plutôt un pamphlet contre les postures culturelles du président de la République.

Car, s'il y a bien un domaine où Nicolas Sarkozy n'a aucune politique, c'est bien celui de la culture. Au fil de ces presque 5 ans de mandat, il aura détricoté ce qui restait de politique culturelle et, cela va de pair, et réussi à instrumentaliser la culture.

Pour Sarkozy, la culture est d'abord une affaire d'image au service de ses intérêts. Le premier sarkozisme culturel, comme l'appelle Frédéric Martel, est marqué du sceau - du sot ? - de la culture populaire dans ce qu'elle a de plus plouc et industriel : seront mis sur le devant de la scène les Johnny Halliday, Christian Clavier mais aussi les films cultes comme Rambo. D'où cette interrogation de Martel : Sarkozy n'a-t-il pas cherché à paraître plus inculte qu'il n'est afin de bien souligner la rupture avec le quinquennat précédent ? Possible, mais probable aussi que là soit bien la vérité de ce président bourré de tics...

Le second sarkozysme culturel est un retour vers les intellectuels, c'est donc un peu plus classique. Mais là encore, Sarkozy de moque bien de tous ces penseurs : il s'agit avant tout qu'ils arrêtent de dire du mal de sa personne et de sa politique. Sarkozy emprunte alors le concept de civilisation à Edgar Morin, reçoit toutes les semaines un aéropages d'intellectuels, se convertit à l'art contemporain. Savoureuse relation d'un de ces déjeuners où l'on voit le président exhiber sa montre de luxe à tous les commensaux...

Au total, la culture de Sarkozy est une culture "middlebrow" comme le dit Frédéric Martel : une espèce de culture populaire non assumée, mais qui se concentre sur des formes accessibles d'art. Une pointe d'élitisme mâtine le tout...

Ce qui rend ce pamphlet intéressant, outre sa construction sur le mode des "J'aime/je n'aime pas" de Facebook, c'est l'affirmation que la culture est instrumentalisée afin d'assurer la ré-élection de Nicolas Sarkozy. Car si Sarkozy est particulièrement inculte - les humanités ne font pas partie de son univers - il n'en reste pas moins qu'il adopte une position gramsciste : la bataille politique est d'abord une bataille des idées et une guerre culturelle. Afin de triompher, il convient de tout mettre en oeuvre pour la gagner.

C'est pourquoi Nicolas Sarkozy a soin de cultiver ses amitiés dans la sphère des médias - télévision, internet, journaux papier etc... et des instituts de sondage. Tout est donc prêt pour la production d'un déluge d'images et de contenus politiques censés emporter tous ses adversaires. C'est la thèse de Frédéric Martel. Vive la politique à l'heure de l'advertainment !

Face à cela, il y a bien longtemps qu'il n'y a plus de ministre de la culture : Albanel réduite à rien avec la création d'un ministère bis dirigé par Martin Karmitz, puis "Mitterand le petit" dont l'ego démesuré sert de fumée envoûtante.

Hilarant est le chapitre consacré à "Sarkozy et l'école" où l'on voit un député taquin demander, en 2010, de manière tout ce qu'il y a de plus officielle, comment le gouvernement compte remédier aux difficultés grammaticales du président...Je vous laisse lire la réponse 9 mois après de Luc Chatel, c'est impayable.

Voici donc un livre qui tombe bien à propos à moins de trois mois de l'élection présidentielle, et dont la thèse centrale se révèle tous les jours plus pertinente. Cela n'augure rien de bon.
Commenter  J’apprécie          110
Sodoma

Autant le dire tout de suite, résumer une enquête de près de 5 ans aboutissant à un document de 960 pages est mission impossible. Aussi je ne vais pas m’évertuer à en dire le plus possible pour montrer à quel point Frederic Martel m’a embarqué.

Sodoma n’est ni un brûlot contre l’Eglise, ni un livre militant pro-LGBT. C’est même peut-être tout le contraire. Il ne s’agit pas ici d’attaquer des croyances, mais plutôt l’hypocrisie d’un milieu homosexuel particulier, celui du clergé catholique. Soit, apprendre qu’il y a des ecclésiastiques homosexuels n’est pas la surprise du siècle mais découvrir l’ampleur de ce qui se trame dans les coulisses du Vatican m’a littéralement scotché.

Amis qui ouvrez ce pavé, prenez garde, vous vous apprêtez à entrer dans une série de guerres intestines que se livrent avec acharnement différents clans gays au sein de l’Eglise Catholique.

Construite en quatre parties s’attardant chacune sur une époque pontificale (François, Paul, Jean-Paul et Benoît), l’enquête de Frédéric Martel est une plongée extrêmement documentée dans la schizophrénie vaticane, grande adepte du « faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais ». Ici, plus un prélat inonde foules et médias de toute sa hargne contre ces dangereux homos dont les pratiques ou les unions ne sont que péchés et perversions, plus il y a de chance que dans le secret des alcôves catholiques, il inonde quelques torses virils de ses immaculées projections ou au moins qu’il en est le si puissant (et parfois détesté) désir qu’à défaut de décharger ses pulsions sexuelles auprès du nombre phénoménal de jeunes migrants prostitués qui sillonnent les rues adjacentes au Vatican, il décharge toute sa haine sur ces homos qui assument et pratiquent leur sexualité au grand jour. Quel meilleur moyen pour cacher cette homosexualité qui suinte des pores de l’Eglise que de clamer haut et fort qu'elle est une abomination ?

Le raisonnement pourrait paraître simpliste mais les langues qui se délient et les documents découverts sont révélateurs. Oui, il y a historiquement beaucoup d’homos au séminaire : il y a quelques dizaines d’années, en Italie et ailleurs, être homosexuel était, dans l’interprétation traditionnelle des Saintes Ecritures, péché, alors se découvrir gay était se confronter à une famille qui vous imaginait déjà mari et père et vous rejetterait si elle découvrait que vous préfériez les sucettes à l'Annie. Le seul moyen d’échapper à la vindicte familiale était d’entrer au séminaire, de se retrouver dans ce milieu d’hommes dans lequel on ne vous reprocherait ni votre célibat, ni votre désintérêt pour la gent féminine. Mais il fallait, hors des murs, conserver le secret de ces attirances, de ces élans du cœur. Et c’est ce culte du secret qui ronge l’Eglise depuis si longtemps.

Les Papes n’ont jamais fait le distingo entre tout ce que l’Eglise considère comme péchés, d’un côté les relations sexuelles entre adultes consentants (légales) et de l’autre les relations avec mineurs ou sous la contrainte de l’autorité (pédophilie, viol de séminariste… évidemment illégales). A force de tout mettre dans le même panier pour le recouvrir du voile opaque du secret, l’Eglise a créé ses propres amalgames et n’arrivent plus à s’en dépêtrer. Il faut tout cacher, de peur que soulever un coin du voile ne dévoile tout le contenu du panier.

Et tout cela n’est qu’une petite part de l’enquête. On découvrira les fouilles archéologiques de la Sodome Biblique et l’analyse du texte qui n’a en réalité jamais condamné l’homosexualité ; on verra que les plus ouverts sur l’homosexualité sont souvent les plus hétéros ; on sera effaré devant les relations particulières de certains prélats haut placés au Vatican avec Pinochet, devant l’aveuglement de Jean-Paul II, qui obsédé par sa lutte contre le communisme, couvrira les horreurs commises par le Père Marcial Maciel ou écoutera ses conseillers en faisant campagne contre le préservatif, permettant ainsi au VIH de faire des millions de morts partout dans le monde et surtout en Afrique ; on ne sera guère étonné de réaliser que c’est dans l’Evêché de Lyon et de son Barbarin que sont nées les premières idées de manifestations contre le mariage pour tous. Tout cela est tellement d'autres choses encore...

J’en dis déjà trop, j’avais dit que j’en dirai peu. On l’a compris, l’ouvrage, qui ne donne qu’une des clés pour mieux comprendre ce qui se passe dans les coulisses du pouvoir vaticanais, est long, certes, mais passionnant, étayé, bien écrit et surtout jamais dans le jugement. Le journaliste livre des faits, rien que des faits en faisant entendre les voix de ses témoins dont la grande diversité apporte les nuances. L’Eglise n’a jamais attaqué ce qui y est écrit, le pape François a dit, après l’avoir lu qu’il « savait tout ça ».
Commenter  J’apprécie          90
Mainstream

En abordant Mainstream, je m’attendais à une analyse géopolitique fine du soft power, qui en opposition au hard power, c’est-à-dire l’emploi de la force et de la contrainte, vise à étendre l’influence d’un pays sur les autres en influençant les esprits adverses par des contenus culturels.



Il n’en fut rien avec cette enquête journalistique complète qui a amené Frédéric Martel, pendant cinq ans, à parcourir toutes les zones mondiales de production de l'Entertainment. Sectorisant son chapitre par continent et par région, il nous immerge dans les business plans et les stratégies des groupes de diffusion culturelle, principalement cinématographiques et hollywoodiens, sans conteste les leader mondiaux et référents en la matière. Car même si les pays émergents, ceux du Golfe et l’Europe cherchent à s’émanciper des Américains, nous n'en restons pas pour autant demandeurs et copieurs des produits des Etats-Unis. Il est cependant intéressant de découvrir les particularités régionales et les politiques d’influence promouvant les valeurs de chaque société à travers la conception de leur produits. Du « dance&songs » de Bollywood à la promotion des valeurs confucianistes des coréens dans leurs « dramas » et K-pop, on découvre la difficulté de produire des contenus accessibles au plus grand nombre. C’est en cela que les Américains sont les plus forts.



Cet essai est très complet mais soufre d’être trop long à mon sens. Ne serait-ce que la conclusion qui aurait mérité d’être plus courte. En effet, plutôt que de rebalayer par un résumé chaque caractéristique régionale, une synthèse aurait été plus appropriée débouchant uniquement sur l'ouverture vers le bouleversement Internet et son effet sur le cinéma, la télévision, la musique et les livres que propose heureusement Frédéric Martel D'autant qu'il pressent, en 2010 lorsqu'il rédige cette enquête, ce vers quoi nous nous dirigeons sans pour autant réussir à le définir, comme le développement du streaming vidéo ou musicale, accéléré par les confinements successifs.



Mon avis personnel est que Mainstream reste une enquête intéressante à lire (qu’est-ce qui n’est pas enrichissant dans la lecture ?) mais beaucoup trop long. Dommage.
Commenter  J’apprécie          80
Sodoma

Quelles que soient les intentions de l'Auteur, quel que son passif puisse être, son livre est solidement étayé et m'a appris des choses très neuves, alors que j'étais - je le constate à ma surprise et à mon intérêt dans la lecture - inconsciemment persuadé d'à peu près tout connaître sur certains sujets. J'avais tort.



Je ne citerai que le cas de Montini, alias Paul VI (très officiellement "saint de l'Église catholique" depuis Bergoglio!) Paul VI, l'artisan résolu du désastre de Vatican II dont les statistiques nous montrent qu'il a provoqué, dès les dix premières années de la "réforme", un effondrement suicidaire de la pratique – laquelle pratique passait en France de 57 pour cent à 21 pour cent (rapport Marty) pour dégringoler aujourd'hui à... 1 pour cent! Effondrement conscient, et contre lequel non seulement le Vatican ne prit aucune mesure de redressement doctrinal, mais qu'il chercha très visiblement à accélérer, ce qui en dit long - les alibis invoqués en 1962-1968 ne tenant plus du tout - sur la volonté destructrice des instigateurs.



Avec ce livre, j'ai découvert un certain nombre d'éléments, dont j'ai personnellement vérifié l'exactitude, et qui étaient pour moi tout à fait nouveaux. Ainsi, concernant Paul VI, je n'ignorais pas les archives de l'Ispettorato speciale di Polizia, dépendante de la Direzione Generale della Pubblica Sicurezza, la "GESTAPO" ("OVRA") du Duce sur les frasques de Montini, à l'époque "Primo Minutante" à Rome, qu'on raflait en plein ébat dans les bordels. Je n'ignorais pas les dossiers déclassifiés du C.I.A. sur Paul VI, où visiblement, les Américains se réjouissent d'avoir sur Paul VI un puissant moyen de pression: ses turpitudes sexuelles avec de jeunes et beaux garçons (grasses plaisanteries, au passage, de salle de police: après son élévation au pontificat, en 1963, le nom "Paolo Sex" émaille les rapports du CIA. le SDECE - prononcer "sdeck" - quant à lui, l'appelait... "Popaul"!) Toutes choses qui sont brutalement remontées à la surface quand le scandale des réseaux pédophiles du diocèse de Cloyne a éclaté en 2010-2011, et que la très courageuse juge d'instruction Yvonne Murphy a établi le Cloyne Report.



Je n'ignorais pas les rapports de Paul Hoffmann, le très respecté journaliste du New York Times, correspondant à Rome de l'organe de presse américain, sur la sexualité active de Montini. Ni les révélations de Franco Bellegrandi, chambellan du Vatican et correspondant de l'Osservatore romano, révélations prouvées par la suite, et dont il n'est pas permis de douter. Ni l'autobiographie de l'écrivain anglo-irlandais Robin Bryans. Ni, évidemment, les scoops à sensation de Roger Peyrefitte qui, le premier, s'était délecté, conformément à sa triste habitude, à dévoiler les moeurs de Montini et l'identité de ses amants les plus célèbres: l'acteur Paolo Carlini, d'abord, qui joue le rôle du coiffeur dans les Vacances romaines avec Gregory Peck (Carlini, décédé en 1979, n'a jamais démenti), et Hugh Montgomery ensuite.



Ce qui j'ignorais complètement, en revanche, c'était tout ce qu'explique M. Martel relativement au langage codé du "catéchisme de l'amour". Il est vrai que l'Église ne parlait jamais d'amour avant Vatican II, elle parlait de Charité (caritas, agapé). le mot très "malaisant" d'amour dans la bouche des curés post-conciliaires, mis à toute les sauces, et rabâché constamment, m'était seulement apparu, pendant cinquante ans, comme une ridicule adaptation de l'Église, via son aggiornamento, au vocabulaire des hippies californiens, ce que semblaient confirmer le statut de Jésus Christ superstar (opéra rock très Vatican II) – sottise dont Jean Yanne s'amusait au cinéma – et l'encouragement par Paul VI du courant soi-disant charismatique qui est en fait du pentecôtisme californien (ce que Jean Raspail, dans ses articles du Figaro, appelait la "religion vaudoue"). le mot "charismatique" dans ce sens était d'ailleurs une invention de Paul VI en personne.



Sans doute, il y avait du vrai dans ce que je croyais savoir. Cependant, mes observations restaient très superficielles. le livre de M. Martel brise les tabous et dévoile le fond de l'affaire. On apprend ainsi que Paul VI entretenait une correspondance avec deux théologiens homosexuels français, Jean Guitton et Jacques Maritain, usant de langage codé pour évoquer "l'amour-amitié entre hommes". Naturellement, avec cet "amour"-là, nous ne sommes plus DU TOUT dans le registre de la Caritas! Or, c'est au cours de tels échanges, nous explique M. Martel, qu'on fait allusion à Pierre et Jésus comme à un couple tout ce qu'il y a de physique. le livre m'a tellement ouvert les yeux que j'ai interprété de façon totalement neuve, dernièrement, la diffusion d'un documentaire absolument lamentable de Bern – comme tous les documentaires de Bern à mon goût, mais celui-ci était particulièrement gratiné – où Marie-Madeleine est présentée comme étant jalouse du lien qui unit Jésus à Pierre! Ai-je surinterprété? Eh bien, si je m'en tiens aux révélations de M. Martel, je ne le crois pas. Autrement dit, pour moi, il y aura eu un avant et un après la lecture de Sodoma, ce que je peux dire de bien peu de livres.



En somme, le livre de M. Martel m'a donné à réviser une foule de notions et d'objets que je connaissais superficiellement: les dédicaces à saint Pierre dans les lieux de débauche de Jean Cocteau, l'étrange catéchisme Pierres Vivantes des évêques de France publié au début du premier septennat de Mitterrand, puis rejeté par le Vatican lui-même pour impudicité. Bref, je conçois désormais les choses sous un autre angle absolument. En épilogue de cette critique, un paradoxe. Peu de temps avant ce livre, j'avais lu les mémoires de Henri Guillemin dont la malhonnêteté intellectuelle est proverbiale. C'était une époque où la gauche bourgeoise, dont il était un pilier de bien-pensance malgré ses protestations d'esprit révolutionnaire (prononcées du fond de sa villa suisse), était volontiers homophobe, comme on dit aujourd'hui. Approuvant, on s'en doute, Vatican II, Guillemin ironise implicitement contre les résistants à ce bouleversement et lâche un de ces sarcasmes venimeux et gratuits qui étaient sa marque de fabrique contre deux catholiques notoirement homosexuels, Julien Green et Jacques Maritain, supposés se plaindre que le nihilisme de Vatican II fasse table rase de l'essentiel. Or la lecture de Sodoma prouve que l'ironie n'est certainement pas dans le camp de Guillemin, et que c'est plutôt ce dernier qu'on serait en droit d'accabler de ses sarcasmes!



Ce livre m'a indigné. Il ne m'a pas indigné à cause de sa démarche que je trouve au contraire salutaire. Il ne m'a pas indigné parce que je serais homophobe. L'homosexualité ne m'a jamais posé de problème. Non, ce qui est indigne et révoltant n'est absolument pas à ce niveau. Comme pour M. Christian Combaz qui, lui non plus n'a aucune raison d'être homophobe – Combaz, dont j'écoutais récemment une émission intéressante, le scandale est pour moi celui de l'imposture. de l'immense, de la colossale imposture de Paul VI et de Vatican II: voilà l'infamie.
Commenter  J’apprécie          70
Sodoma

Le livre est une véritable somme.

On ne peut que saluer l'extraordinaire travail de l'auteur, qui par ailleurs démontre page après page son objectivité et son travail de fond.

Toutefois je n'ai pas été séduit par les éléments suivants :

- Je n'ai pas bien compris la problématisation du propos.

Qu'il y ait de nombreux homosexuels au Vatican, ce n'est pas une grande nouveauté. Que ces homosexuels au plus haut niveau aient pu influer sur la doctrine récente de l'Eglise, notamment de par le contenu des Encycliques très clairement homophobes, ce n'est pas nouveau non plus.

- Un name droppring qui confine à de l'outing, alors bien qu'on sait que nombre de ces prélats sont très évidemment de pratique homosexuelle tout en crachant sur le principe de l'homosexualité, cela depuis longtemps aussi.

Bref : à quoi sert ce livre ?



Commenter  J’apprécie          70
La Longue Marche des gays

Cette monographie, parue dans l'excellente collection "Découvertes Gallimard", retrace l'histoire récente des homosexuels (en France notamment). La cause gay devient un vrai sujet de société dans les années '70, avec des intellectuels célèbres comme M. Foucault, J. Genêt, P. Chéreau, etc (par exemple), mais aussi Guy Hocquenghem, qui était à la fois révolutionnaire gauchiste et militant de la cause homosexuelle. La fête de la Gay Pride est lancée. Mais, dans les années '80, le sida menace directement les gays: ces années sont très dures pour cette communauté. Après une phase de déni, vient le temps de la solidarité avec l'association "Aides"; une autre association très portée à la provocation nait aussi: "Act Up". Mais ensuite une normalisation intervient: le PACS est institué en 1998, puis c'est la loi sur le mariage pour tous. Peu à peu, la société devient plus tolérante; des personnalités connues font leur coming-out sans coup férir. C'en est fini de l'époque "héroïque"...

L'auteur conclut avec cette question ouverte: « L'homosexualité pourra-t-elle se vivre désormais sans fierté ni honte ? Une sexualité comme les autres ? »
Commenter  J’apprécie          60
Sodoma

Frédéric Martel nous livre une somme remarqauable de travail et d'enquêtes à travers le monde (1500 entretiens, 30 pays) menée avec une équipe de plus de 80 collaborateurs pendant plusieurs années.

L'auteur ne juge pas mais pose les faits. Il éclaire comment et pourquoi l'église s'est fourvoyée et hystérisée dans une dénonciation artificielle de l'homosexualité, s'est éloignée de nombre de chrétiens plus attentifs à l'évolution de la société et s'est repliée sur une hypocrisie un temps protectrice.

Mis à jour les méandres du Vatican et de la curie peuvent désespérer légitimement ceux pour qui la foi représente quelque chose d'important.









Commenter  J’apprécie          60
Sodoma

Je trouve en Sodoma un portrait implacable de l'hypocrisie, du mensonge, de la décadence de l'Église de Rome. L'enquête de Frédéric Martel décrit l'inhumanité de la morale catholique imposée par les plus conservateurs des clercs du Vatican. Il étoffe ainsi l'hypocrisie et la perversion du Vatican.

Une hiérarchie vaticane où on pratique une double vie, assuré d'être protégé par la culture du secret qui y règne. L'auteur décrit des prélats qui le soir vont draguer de jeunes prostitués – souvent des réfugiés – à la gare de Rome-Termini.

On sort écoeuré et triste de notre lecture qui expose au grand jour les comportements de ces représentants du Christ à qui les catholiques confient leur âme. Non mais quelle imposture !

Il est par ailleurs très difficile de croire que Frédéric Martel a tout faux comme nous suggère la réaction de l'Église.

Est-ce que l'avenir est sombre pour l'Église de Rome? Je crois bien que oui … Tant et aussi longtemps que cette dernière pratiquera le goût du luxe et une immoralité de style « Renaissance ». Il faudrait avisé le Vatican que nous sommes maintenant au XXIe siècle!

Merci à Frédéric Martel pour cette enquête très pertinente.
Commenter  J’apprécie          60
J'aime pas le sarkozysme culturel

Avec "J'aime pas le sarkozysme culturel", je m'essaye à l'exercice un peu casse-gueule de chroniquer un ouvrage politique alors que je suis néophyte en la matière. Je ne suis pourtant pas dépourvue de conscience politique : j'ai des idées, des principes, j'essaie de me renseigner quotidiennement mais le fait est là, la politique n'est pas quelque chose qui me passionne (encore). Je suis entourée d'amis extrêmement actifs : syndiqués, manifestants, membres de divers mouvements, j'ai donc tout de même la chance de baigner dans une atmosphère propice aux dialogues et débats d'idées. En revanche, et ce n'est d'ailleurs pas toujours facile à vivre, je ne suis pas du tout impliquée dans quelque action que se soit ; je passe donc systématiquement pour l'effacée, la sans-opinion, voire même le gentil mouton qui suit le reste du troupeau. Postuler à Masse Critique de Babelio pour ce titre, c'était à la fois un défi pour moi-même (toujours dans l'objectif de varier un maximum mes genres de lectures) et une sorte de preuve : non, ce n'est pas parce que je ne manifeste pas que je suis complètement passive et détachée. Je ne vous cache pas que j'avais tout de même quelques appréhensions relatives à la rédaction d'un avis sur un sujet que je maîtrise assez mal.



Le sarkozysme culturel est néanmoins un concept qui me touche directement, au regard de mes études et de mes perspectives d'avenir. Cette maigre légitimité acquise, je me suis plongée dans la lecture en tentant de ne pas me dire "mais bordel zut, comment je vais bien pouvoir chroniquer ce truc ?!" à toutes les pages. J'ai même eu la peur de la peur, celle qui nous fait craindre de passer à côté du plaisir de la lecture parce que l'on est trop focalisé sur autre chose. Et bien figurez-vous que toutes ces inquiétudes se sont envolées bien vite. J'aime pas le sarkozysme culturel se révèle être un essai très clair et simple, qui ne nécessite pas de connaissances poussées du paysage politique. Bien documenté, sa forme est originale et l'écriture très agréable. On pourrait même dire que Frédéric Martel signe un exercice de style : en se basant sur le principe des "like" et "unlike" de Facebook, il rédige de courts paragraphes qui expliquent, soulignent et décortiquent le système culturel du gouvernement de Sarkozy, organisés en chapitres thématiques plutôt que chronologiques.



Frédéric Martel mène une étude poussée des deux grandes phases de ce qu'il appelle le sarkozysme culturel. La première est placée sous le signe de la "beaufitude" : le président séduit par sa décontraction, sa proximité avec les gens ordinaires ; il adore Rambo, est fan de Bigard et connaît par cœur les paroles des chansons de Johnny Hallyday. La seconde phase est marquée par un retour aux classiques, à l'intellectuel. Poussé par sa nouvelle épouse, Sarkozy engrange de la culture, se gave de rencontres d'artistes, d'écrivains, de penseurs. Le fil rouge de ces deux attitudes qui semblent complètement opposées est bien entendu l'occupation visuelle permanente et la stratégie progressive d'envahissement des médias. C'est d'ailleurs la trame de fond de l'essai de Frédéric Martel qui, au delà de simples billets d'humeurs, s'attache à nous démontrer comment le président, en plaçant des personnalités clés à la tête des grands groupes multimédias (radios, chaînes de télé, presse...) est en position de gagner les prochaines élections grâce à une guerre de l'image totalement maîtrisée. Sous l'apparente inculture de Nicolas Sarkozy, faite de bric et de broc, mettant au même plan Houellbecq et Zola, Bach et Polnareff, se cache en réalité une mécanique parfaitement rodée. Le président s'impose en fin stratège en faisant de l'instrumentalisation de la culture sa principale tactique pour rester au pouvoir.



Au final, j'ai beaucoup aimé cette lecture. J'ai apprécié la variété des sujets abordés et la finesse des analyses. Moi qui m'attendait à quelque chose de très (trop) sérieux, j'ai été surprise par l'humour de Frédéric Martel, qui a décidément le chic pour mettre en évidence les travers du gouvernement avec une prose grinçante à souhait. Outre le fait que je partage globalement les mêmes idées et que je sois du même "bord" que l'auteur, c'est la façon dont cet essai est conçu et écrit qui a achevé de me convaincre. J'ai beaucoup appris, beaucoup réfléchi, pas mal rigolé (même jaune), beaucoup cité à haute voix (Choupi, toutes mes excuses pour t'avoir interrompu dans tes lectures toutes les deux minutes). J'aime pas le sarkozysme culturel est un ouvrage qui, à trois mois des élections, apporte un regard particulièrement intéressant sur les rouages de la politique (culturelle... ou pas!) du président actuel.
Lien : http://livr0ns-n0us.blogspot..
Commenter  J’apprécie          60
Sodoma

Frederic Martel est un écrivain ,sociologue, journaliste d'investigation qui se décrit lui-même comme "catholique athée". Il fait dans ce livre une enquête approfondie,elle a duré 4 ans , sur le Vatican et l'homosexualité répandue dans toutes les strates du clergé catholique depuis les simples curés jusqu'aux cardinaux ,évêques , monsignori.

C'est une enquête à charge contre l'hypocrisie ,la schizophrénie de tous ces prètres qui prêchent à leurs ouailles de faire ce qu'ils disent et, surtout pas ,ce que eux mêmes, font, en cachette, la plupart du temps !

C'est une critique des pontificats de Jean-Paul II et Benoit XVI , entourés de prélats homosexuels pratiquants ou non , qui n'ont pas réussi à réformer l'église et ont couverts la pédophilie de certains prètres .

C'est la description d'un Etat exclusivement habité et dirigé par des hommes ,souvent misogynes ,qui s'arrangent et profitent des dérives de cet organisation .

Il faut espèrer que ce document ouvrira les yeux au clergé , lui permettra de se réformer ,de se moderniser ,d'ouvrir l'église ,donner des responsabilités aux femmes ,divorcés ,homosexuels etc ...
Commenter  J’apprécie          50
Sodoma

Livre très instructif sur les magouilles et les secrets couverts par la religion au Vatican, notamment sur la communauté homosexuelle très présente chez les prélats. On voit bien que l'enquête a été sérieuse et approfondie mais au 3/4 du livre, j'ai commencé à trouver les chapitres répétitifs. J'en avais assez lu pour me faire une idée de l'ampleur du phénomène.
Commenter  J’apprécie          50




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Frédéric Martel (518)Voir plus

Quiz Voir plus

Hunger Games

Quelle est le plus grand atout de Katniss dans le jeu?

Sa force physique
son don pour le tir à l'arc
sa connaissance des plantes médicinales
Son sens de l'humour

6 questions
5377 lecteurs ont répondu
Thème : Hunger Games, tome 1 de Suzanne CollinsCréer un quiz sur cet auteur

{* *}