Beethoven est un Allemand à l'aurore du dix-neuvième siècle comme Wagner en est un du dix-neuvième accompli, comme Bach est un Allemand du dix-huitième. A vouloir méconnaître de tels génies, nous ne risquons que le ridicule. Faudra-t-il haïr Haydn, Mozart et Schubert qui furent d'Autriche, et dénier à Liszt, parce qu'il fut hongrois, l'honneur d'avoir été la plus abondante source musicale de tout le dix-neuvième siècle ?
D'autres artistes enfin, sans être les universels confidents de l'âme humaine, embrassent en leur œuvre plus que le charme même d'une existence médiocre et d'une étroite vision : ils ne dominèrent pas la vie, ils ne confèrent pas leurs aventures, leurs goûts, ni leurs usuelles sympathies. Il semble que la réflexion ait eu d'abord peu de pouvoir sur la conduite de leur œuvre. Ils sont l'image d'un lieu, d'une ville, d'un pays, "possédés" qu'ils sont de leur contrée natale : et ils parcourent le monde d'un regard qui ne peut plus voir les choses qu'à travers l'émouvante obsession de leurs premiers sentiments.
Il en est parmi les grands artistes, et ce sont les plus grands, qui semblent n'avoir reflété durant leur vie que la constance de l'âme humaine. Ils apparaissent inopinément : rien dans le temps où ils vivent, ni dans celui qui les précéda, n'en peut convenablement expliquer l'apparition. Ils éprouvent sans cesse le grave fardeau de leur isolement et pour s'en divertir, promènent leurs tristesses de rois solitaires, sur les plus hauts sommets de l'humanité.
Il n'y a point rie pays qui n'aie quelque chose de singulier. Nous composons
admirablement bien les airs de mouvement; et les Italiens merveilleusement bien la musique de Chapelle. Nous jouons fort bien du Luth et les Italiens très bien de l'Archiluth. Nous sonnons l'orgue très agréablement et les Italiens très savamment. Nous touchons l'Espinette excellemment, et les Anglais touchent la Viole parfaitement...
Soyons orgueilleux de nos gloires, répandons-en les vertus, mais sachons préparer le chemin de celles qui leur succéderont en tirant profit de ce qui se fait au dehors. Là est la véritable tradition française, on ne saurait la découvrir dans la craintive aigreur d'un protectionnisme hargneux.
Aube, tout ensemble et crépuscule, lueurs plutôt que lumières, passants si doux que l'on cause aux soirs lourds de confidences comme de quelque mort lointaine qu'on a beaucoup aimée.
Plus l'adversaire est haïssable plus il convient de reconnaître ce par quoi il eût mérité quelque estime, si l'étendue de ses tares ne venait compromettre et ruiner ses vertus.