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Critiques de Gabriel Fauré (3)
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Ames et décors romanesque

"Un paysage n'est qu'un homme ou une femme. Qu'est-ce que le Vaucluse sans Pétrarque, Sorrente sans le Tasse, Annecy sans Jean-Jacques Rousseau ?"

La nature est souvent impuissante à séduire complètement nos cœurs.

Un besoin impérieux nous incline à chercher l'homme parmi les choses.

Porté par ce postulat, l'écrivain Gabriel Faure, l'homonyme du célèbre musicien, nous offre, en 1925, avec "Âmes et décors romanesques" une série de promenades champêtres entremêlées de littérature.

Cet ouvrage est le troisième de la série.

Il fait suite à "paysages littéraire" et à "mes pèlerinages passionnés".

Il faut se laisser porter, par la langue de l'auteur, à Rochefort près de Loti, à Tournon chez Mallarmé. Il faut relire doucement Virgile qui aimait les eaux vives et le repos sous un arbre. Il faut prendre le temps de découvrir la Provence de Mme de Sévigné, de se lancer, sans aucune hâte ni certitude à la recherche de l'occitanienne de Chateaubriand.

Dans ce livre tout est poésie.

Il n'y est question que de vieilles lettres et de paysages.

Mais le plus bel instant de l'ouvrage est cette visite aux jardins italiens, de Rome ou de Lombardie.

"Nulle part, mieux que sur ces terrasses de Tivoli, un jeune écrivain ne peut rêver, méditer, composer.

Presque tous ses aînés y vinrent s'exalter, surtout depuis que Chateaubriand révéla la grandeur et la poésie de la campagne romaine..."

"Âmes et décors romanesques" est une parenthèse, fine et agréable.

Elle est faite d'un authentique style élégamment vieillot.

Gabriel Faure nous offre un ouvrage à savourer, sous le poirier du jardin, entre thé vert et sieste au soleil.

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Le visage de l'Italie

Qui se souvient-il que Mussolini fut un instigateur convaincu (et peut-être efficace) du tourisme étranger en Italie, notamment par le truchement d'un organisme étatique, l'ENIT (Ente Nazionale Industrie Turistiche) ? Mais qu'entend-on par tourisme dans ces années 1920-1930 où l'on ne voyageait pas en avion et, si on le faisait en automobile, cela méritait d'être spécialement mentionné ? Et surtout qu'entendait-on alors par guide touristique ? Ce « beau-livre », deuxième tirage d'un ouvrage datant de 1929, certainement impossible à transporter (il pèse près de 2,5 kg!), se compose, pour ce qui est des textes, de récits de voyages par des auteurs français (et une autrice, les femmes voyageuses étant encore exceptionnelles...), pour moi tous des inconnus – même l'académicien – qui décrivent chacun une région d'Italie, ainsi que d'environ 700 illustrations photographiques de monuments et de paysages, en noir et blanc naturellement.

Dès la préface, la question de fond la plus importante est posée : le fascisme est pétri d'idéologie moderniste, il a le futurisme pour esthétique d'État, il veut donner de l'Italie l'image d'un grand pays jeune, robuste, qui est en train de réaliser d'imposants changements et dans lequel d'énormes chantiers de rénovation sont en cours. En revanche, la littérature de voyage en Italie, surtout celle des écrivains-voyageurs français, qui narrent des expéditions antérieures parfois de quelques décennies à leur rédaction, est encore nettement sous l'influence du Grand Tour, et en particulier des auteurs romantiques : Stendhal, Chateaubriand, et Byron en premier lieu... Le style des textes ici rassemblés ne démentit pas cette influence, aussi bien dans la description de cette Italie monumentale immémoriale du tournant du XXe siècle, que dans la manière d'y voyager en prêtant si peu d'attention à la population locale mais beaucoup à l'Histoire et aux arts, et aussi en prenant son temps pour contempler et méditer. Il est question d'une prose qui a pour nous un délicieux goût suranné : le lecteur y est interpellé et tutoyé, on ne saurait s'abaisser à lui fournir aucun renseignement pratique ni même à décrire les pièces des musées qu'il visitera, ni à douter qu'il ne soit entièrement familier de la mythologie grecque et des auteurs romains, des péripéties biographiques de Dante, des innovations picturales de Giotto ou du Tintoret ni de la gourmandise de Rossini... On devise entre connaisseurs, on partage des sentiments, d'où l'intimité !

De manière complémentaire et cohérente, on peut observer que l'esthétique des illustrations est celle des cartes postales de l'époque – j'allais presque dire des estampes fin XIXe qui succédèrent aux tableaux de ruines –, splendides photos d'où sont absents personnages et toute scène vivante, pas même un marché ou un port animé ou une avenue passante. Cela à l'exception tout à fait significative des seuls chapitres sur la Sicile et la Sardaigne, dans lesquels, outre les monuments et les paysages, figurent presque autant d'images « ethnographiques ». Elles représentent des métiers traditionnels (filature, tissage, etc.), une jolie petite paysanne farouche et sans souliers, un vieillard chenu au regard profond, des charrettes tractées par des équidés ou des bovidés, des riches costumes féminins et masculins qui ne relevaient peut-être pas encore du folklore, des processions, des troupeaux au pâturage, des cadres de « vie familiale », des panoramas avec enfants déguenillés et gallinacés qui courent sur des rues non pavées...

Voilà donc un visage magnifique d'une certaine Italie déjà historique à la parution du livre, en antithèse vis-à-vis de la propagande du régime, visage dans lequel par ex. apparaît encore le majestueux château de Reggio de Calabre, entièrement démoli par le tremblement de terre de 1908, mais visage qui inclut par contre les villes et villages d'Istrie qui aujourd'hui n'appartiennent plus au territoire italien (et ne portent même plus le même toponyme).

Quelle était la teneur de l'Introduction par Benito Mussolini ? À mon grand regret, je ne le saurai pas, car les quelques pages introductives ont été soigneusement découpées et retirées de cet ouvrage – qui a été un vrai trésor acquis pour 1 euro dans une brocante en Italie. L'ont-elles été au lendemain de la chute du fascisme par un propriétaire soucieux de ne pas se compromettre (je l'espère) ou bien beaucoup plus récemment, par un brocanteur véreux qui a pensé et peut-être réalisé son seul vrai profit par la vente séparée de quelques feuillets portant une signature qui n'est plus stigmatisée (je le crains) ?

Et les auteurs, les Français, hormis leur passion pour l'Italie, que pensaient-ils du fascisme en écrivant ces pages ? Assurément pas un mot d'opposition n'y est contenu ; au contraire, le chapitre sur l’Émilie mentionne la ville de Forlì qui « […] s'enorgueillit plus encore aujourd'hui d'être celle de Mussolini, le "duce" qui a sauvé l'Italie de l'anarchie, pour la conduire vers de nouvelles et glorieuses destinées. » (p. 120) ; de plus, certains articles se terminent par des petites phrases élogieuses du chef et/ou influencées par sa rhétorique (cf. cit 5). Mais cela peut très bien n'avoir été que rajout et opportunisme, éventuellement par les soins du directeur littéraire de l'ouvrage, Gabriel Faure, voire même de l'éditeur italien...
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Chateaubriand et l'Occitanienne

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