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Critiques de Gabrielle Tuloup (110)
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Sauf que c'étaient des enfants

C’est une sombre histoire d’une dignité bafouée, et d’un corps utilisé salement. Par des petits cons qui ne mesurent pas non seulement les dégâts psychologiques de leur victimes mais aussi l’anéantissement de leurs plus vagues projets d’avenir. Même si ce sont des enfants.



Dans cette banlieue qui fait partie des zones d’éducation prioritaire, les adultes aussi se sentent en faute : qu’ont-ils raté pour ne pas avoir prévenu, repéré, éduqué? C’est une immense remise en question . Et c’est avec un grand courage que le proviseur qui avait préalablement demandé sa mutation revient sur cette décision, pour assumer, et être là auprès de son équipe.



La victime n’est pas oubliée, et on souligne son courage d’aller jusqu’au bout de la dé marche, au risque que la révélation du crime ne la pointe du doigt comme coupable! C’est ainsi avec le viol, on ne peut empêcher les suspicions de consentement, voire de complaisance.



Le roman se s’attarde pas sur les jeunes violeurs. C’est vraiment sur les proches, famille, et enseignants que se concentre l’auteur.,





Un récit qu’on voudrait classer dans les pures fictions, tant il est dérangeant, et transforme l’avenir de ceux qui subiront les retombés en séparant leur temps en avant et après.





Pas de surenchère dans le pathos, juste une belle analyse.
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Sauf que c'étaient des enfants

Un roman qui m'a vraiment interpellé autant qu'il m'a dérangé. Pour tout vous dire , je l'ai lu deux fois à la suite . D'abord parce que la garde de notre petit- fils suspendait souvent ma lecture et que , d'autre part , étant ancien prof , j'ai replongé dans un univers que je connaissais bien pour y avoir consacré toute une vie professionnelle .

Je tiens à dire tout de suite que je n'ai pas connu un tel drame, à savoir le viol d'une jeune fille par plusieurs collégiens, dont certains simples " spectateurs " . La victime , elle s'appelle Fatima et ...ose parler . Aussitôt, la machine se met en marche . Qui est qui ? Pourquoi ? Emma , sa prof , se pose des questions jusqu'à s'en poser pour elle même et s'identifier .... Emma a ses convictions et ...sa vie personnelle. ...vous verrez bien par vous même.

Bien des questions vont être posées dans ce petit livre court , facile à lire . L'école. La police à l'école , l'interpellation en milieu scolaire , l'utilisation des " auxiliaires d'éducation " , les menottes ? Les associations , le doute , les profs , ce qu'on voit , ce qu'on ne voit pas ou qu'on ne veut pas voir ....Emma s'identifie à Fatima ....mais est - ce aussi facile ?

Comme je vous l'ai dit , j'ai lu et relu ce roman et ma perplexité reste vive .C'est bien là le mérite de cet ouvrage, porteur d'un message auquel il faudra porter un grande , très grande attention .

La société évolue et vomit des comportements qui doivent nous choquer , nous heurter , nous alerter . nous ouvrir les yeux . Relaté en 160 pages , le message est fort , brutal , violent .

Eux , ce n'étaient que des enfants ........
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Sauf que c'étaient des enfants

Les éditions Philippe Rey offrent souvent de belles choses. A la fois dans le contenu de romans, atypiques et marquants, mais également dans l'objet-livre en lui-même. Souvent, les couvertures me marquent et m'appellent.

Et ici, ce sont des enfants.



Oui, les « héros » de cette histoire son tous des enfants. Des collégiens.

Les bourreaux. Comme la victime.



Le délit en question, ce terme, atroce. Viol en réunion.



Un roman au sujet terrible mais tellement bien traité. Gabrielle Tuloup pénètre au coeur du drame, d'un fait divers.



Immersion dans le milieu scolaire. le regard de ces professionnels face à l'insupportable. Immersion dans ce collège de banlieue où professeurs, surveillants et principal vont devoir faire face. Immersion dans une communauté de banlieue où chacun à son avis sur la question. Chacun avec sa conscience. Chacun avec son sens des responsabilités.



Une réflexion sur les victimes et les bourreaux. Sur les vérités qu'il vaut mieux taire. Sur l'horreur de notre époque. Sur le consentement. Qui ne dit mot …



Un portrait de femme également, ce professeur qui, à travers le drame, va partir à la rencontre de ces fantômes à elle.



Une lecture qui donne à réfléchir. Qui fait souvent mal. A travers une plume digne, sur un sujet qui aurait pu être racoleur, Gabrielle Tuloup interroge notre société de façon intelligente. Interroge son lecteur. Sans être moralisatrice mais en donnant pourtant une réflexion sur le vivre ensemble.


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La nuit introuvable

La sublime et touchante histoire d’une rencontre entre un fils de quarante ans et sa mère dont la maladie d'alzheimer prend le dessus.



Nathan vit en Slovénie depuis la mort de son père, il y a quatre ans. Il n’avait plus d’attache à Paris, divorcé et a souffert du comportement de sa mère envers lui. On peut même dire que leur relation depuis la naissance de Nathan s'apparente à de l’indifférence voire de la froideur..



Quand Jeanne, une amie et voisine l’appelle pour lui annoncer la maladie de Marthe, il est déjà presque trop tard, il aurait préféré l’annonce de sa mort. Mais Marthe a tout prévu, elle raconte l’histoire de sa vie, son terrible secret, dans huit lettres que Jeanne lui remettra, une par une, à chacune de ses visites.



D’abord très énervé et n’ayant aucune envie de rendre visite à sa mère, il pense que le déni et la fuite ont des limites et qu’il est temps d’affronter son passé, sa vie, sa mère.



Nathan a attendu, toute sa vie, un geste de tendresse de sa mère. Marthe, déjà ailleurs, le prend pour son père et l’accueille avec deux mots tendres, puis repart dans un monde différent du sien, les yeux dans le vague. Il rentre en Slovénie avec la première lettre.



Il va comprendre au fil de ses visites, la distance de sa mère, le drame vécu bien avant sa naissance, sa propre incapacité à vivre pleinement sa vie. Marthe ne lutte pas contre sa maladie car l’oubli est peut être la plus belle chose qui puisse lui arriver en cette fin de vie. Pourtant, Nathan va enfin faire connaissance avec sa mère.



C’est une histoire bouleversante avec une écriture délicate et addictive. Je n’aurais jamais pensé lire avec une telle avidité un livre sur la maladie d'alzheimer.
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La nuit introuvable

Le sujet de ce premier roman est assez douloureux. Un enfant unique qui n'a jamais accroché avec sa mère, et "apparemment" une relation réciproque. Elle vit à Paris. Lui, quarante ans, vit et travaille en Slovénie, et depuis la mort de son père préfère l'ignorer. Et un beau jour un coup de téléphone va les remettre en contact.



Huit lettres écrites par la mère au fils, qui lui parviendra à chacune de ses visites et où elle dévoile une intimité non partagée avec le mari, le père adulé du fils. Huit lettres pour se confesser, huit lettres pour comprendre et compenser un manque d'amour crucial. Huit lettres pour déchiffrer sa mère, une inconnue. Huit lettres qui donnent la complexité de l'être humain, tout ce qu'on cache à autrui et à soi-même. Huit lettres pour déjouer le piège «  des trop-tard ». Huit lettres qui ne m'ont pas convaincue.



Un livre douloureux aussi parce que le sujet en fin de compte est la vieillesse et tout son lot qui l'accompagne....finalement existe-t-il un bilan de la Vie ? Ou passe-t-on dans la vie, comme ça....on vit ce qu'on vit, on disparaît et souvent dans un état triste, ....et qu'en reste-t-il ?

Une jolie prose tout en couleur, excepté les passages concernant Nathan le fils et sa libido. Pour le reste, un sujet peu original , trop romanesque, du moins pour moi et des personnages -mère-fils-, pour lesquels je n'ai ressenti aucune empathie.

Et pour terminer, la petite histoire d'amourette et autres références légèrement grotesques sur le même thème, concernant sieur Nathan, coincées dans cette histoire tragique, m'ont parue sans intérêt. Un premier roman qui malheureusement ne m'a pas touchée.



"C'est difficile de croire que la vie ne s'arrête pas avec la voix."
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La nuit introuvable

Bon, comment dire…

Comment dire mon désarroi et ma légère déception face à ce roman dont le thème m’attirait ?

Comment dire ma légère exaspération face à ce style poétique que j’aime beaucoup en général ?





Nathan n’a plus vu sa mère depuis 4 ans, depuis la mort de son père. Il est bien là où il est, en Slovénie, pour son travail. Mais l’appartement de la rue du Cherche-Midi, à Paris, le rattrape dans ses rets. En effet, sa mère est atteinte de la maladie d’Alzheimer, et elle a chargé sa voisine de lui donner à chaque visite une lettre écrite avant le naufrage de sa mémoire. Ces huit lettres relatent le passé de la vieille dame, et révèlent à Nathan pourquoi il n’y a eu aucune tendresse entre eux, aucune complicité entre la mère et le fils.





Mwoui…Je ne suis pas du tout convaincue de ce qu’elle relate, la mère. J’ai l’impression que les problématiques s’emmêlent, et finalement déteignent. J’ai l’impression que tout est dilué, malgré quelques passages très profonds, qui m’atteignent.

Le deuil, l’amour entre les parents et leur enfant, la tendresse ou la froideur, l’amour conjugal, l’amour filial, l’accompagnement en fin de vie, la maladie…

Tout cela me passionne, mais curieusement ici, cela ne me touche pas, d’autant plus qu’à ces thèmes essentiels, se greffe le désir d’amour avec une des femmes, ce qui à mon sens n’apporte rien, rien du tout.

Et puis l’auteure écrit bien, trop bien, je dirais. Ses innombrables expressions poétiques noient tous les personnages, comme s’ils parlaient tous de la même façon. Le surplus de poésie, ici, tue la simplicité de la vie.





Bref, mon avis est mitigé, et je m’aperçois que cela m’est très difficile d’en faire part.

N’en tenez donc pas compte, allez vous-même à la rencontre de cette « Nuit introuvable », votre rendez-vous sera peut-être plus abouti que le mien.

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La nuit introuvable

Professeure de français et slameuse, Gabrielle Tuloup m'a d'abord enchantée par sa participation au hors-série du Un intitulé "Le Français a-t-il perdu sa langue?". J'y découvris alors une langue riche, expressive et pleine d'énergie. Quand je vis qu'elle avait publié un premier roman, je me ruai à la librairie. Et pourtant, comme Marthe le fit avec le livre de Jacques à l'intérieur du récit, je laissai s'écouler un moment avant d'en entamer sa lecture. Je sentais que j'en sortirais fortement émue.



Le temps est venu. La beauté démarre dès la couverture grâce à la superbe illustration de Stephan Zimmerli. Les teintes de bleus, qui s'assombrissent plus ou moins, cet arbre aux longues et multiples racines, tout incite à la contempler longuement.

Une fois le roman commencé, je n'ai pu le lâcher avant la dernière phrase. Ce serait très exagéré d'affirmer que je l'ai lu en apnée. Ça frôle pourtant la vérité.

L'histoire tient en peu de mot. Nathan, le narrateur, ne parle plus à sa mère depuis des années. Il garde de son enfance le manque d'affection maternelle, sa froideur,  certes compensés par les démonstrations et l'amour du père. N'en demeurent pas moins des blessures d'enfance et des cicatrices mal refermées. Parti travailler en Slovénie, il reçoit un jour un appel de Jeanne, une voisine de sa mère. Celle-ci souffre d'Alzheimer et Jeanne doit lui remettre à chaque visite une enveloppe. Huit lettres en tout que sa mère lui a écrite avant que la maladie n'ait fait trop de ravages.



Avec ces lettres, Nathan se retrouve à découvrir une mère méconnue. Et à devoir apprendre à ouvrir les yeux sur lui-même et sur sa vie, parvenu à quarante ans, l'âge des premiers bilans. Constat amer de solitude et d'incomplétude.



Pour son premier roman, Gabrielle Tuloup démontre avec maestria sa maîtrise des mots. Son récit se révèle profondément émouvant. Elle nous fait pénétrer dans l'intimité intérieure de cette mère et de son fils.



J'en ressors comme prévue émue et ébranlée par les tours que la vie joue. Il est si facile de perdre contact avec ses proches. Comme Nathan le dit au départ : "Brouillés? Non. Je ne me rappelais pas une seule dispute. Je crois plutôt que nous nous étions oubliés à force d'indifférence." Ce qui est sans doute encore pire que la brouille.



Merci beaucoup à Gabrielle Tuloup pour ce bouleversant récit et pour l'élégance de son écriture. J'espère avoir le plaisir de la relire rapidement, poème, article ou roman. Elle est de ces auteurs au style si beau qu'on ne peut que s'en éprendre.
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La nuit introuvable

Nathan, la quarantaine, Parisien, vit seul après un divorce sans histoire. Son travail l'amène à vivre en Slovénie, avec de rares allers et retours à Paris.

Alors lorsqu'il entend la voix de Jeanne, une amie de sa mère, lui demander de passer chez elle à l'occasion de son prochain passage à Paris, il rechigne. Il faut dire que les relations avec sa mère sont loin d'être chaleureuses.

Une curieuse surprise l'attend : au-delà d'une visite à la vieille femme, désormais atteinte de la maladie d'Alzheimer, il entend de la bouche de Jeanne qu'il recevra d'elle huit lettres écrites de la main de sa mère, avant que celle-ci ne tombe malade, mais qu'elle les lui remettra à chaque passage, soit une fois tous les deux mois environ …

Étonnant roman que celui de Gabrielle Tuloup, qui va dire pudiquement la déchéance dans la maladie de Marthe, très bien accompagnée à domicile par Carolina, mais surtout la vie de cette femme très éprise de son mari, mais qui semble n'avoir eu aucune tendresse pour son fils Nathan. Au fil des six lettres, que Nathan lit d'abord avec rancoeur, puis peu à peu avec intérêt, se tisse en effet la vie d'une femme malheureuse – et on comprendra à la fin pourquoi - et particulièrement maintenant que son mari, le père pour qui Nathan éprouvait beaucoup de tendresse, s'est éteint dans son sommeil.

Nathan renouera le fil interrompu dès son enfance, mais ne sera-t-il pas trop tard pour montrer à sa mère les sentiments qu'il éprouve désormais pour elle, maintenant qu'il connaît son secret ?

D'un style par moment un peu chaotique au début, l'écriture se fluidifie peu à peu, pour délivrer un récit pudique, plein de finesse et d'émotion sur une maladie qui nous désarme tous.





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Sauf que c'étaient des enfants

Gabrielle Tuloup ouvre une porte sur la banlieue, sa ghettoïsation, son manque de perspectives, son école, la place des femmes.



Il faut un drame et la force d'une jeune fille pour vaincre l'omerta habituelle dans la cité pour ouvrir au sein du collège un débat, une faille. Fallait-il agir différemment ? Le proviseur est acculé, il n'a d'autres choix que de laisser agir la police au sein de son établissement pour que justice soit rendue à Fatima. 8 gamins, plus tout à fait des enfants, pas encore des adultes. Viol en réunion. Des vies brisées avant même d'avoir eu le temps de les aider à se construire.



L'équipe est bouleversée, voir les policiers embarquer des gamins, les mettre en fil indienne pour les extirper du collège, cela n'est pas acceptable. Chacun y va de son point de vue, les pions nés dans la cité laissés à l'écart sont furieux de la perte de confiance que cela génèrera après cela, les enseignants sont partagés et puis Emma...



L'adulte salue le courage de la jeune fille. Chacun a un avis en conscience sur les évènements survenus, élèves, parents, enseignants, "grands frères".



Sans pathos, d'une plume factuelle, l'auteure nous plonge dans la réflexion d'une femme qui décide de marcher pour se comprendre, se pardonner, accepter qu'elle aussi soit une victime. Une différence "sauf que c'étaient des enfants" au collège, alors que pour elle se fut un homme ayant perdu son humanité.



Un roman bouleversant qui oblige à s'interroger sur la place des femmes dès l'adolescence dans une société confrontée à la violence. Un flamboyant portrait de femme. Une communion entre deux victimes l'une assumée, l'autre obligée de s'interroger sur son statut parce qu'elle est adulte.



Un second roman nécessaire qui ne laisse pas indemne, sous tension, pour nous parler du consentement.
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Sauf que c'étaient des enfants

Fatima, jeune fille de 15 ans, a subi ce que la justice appelle pudiquement un "viol en réunion"... Pas moins de huit de ses condisciples ont pris part plus ou moins activement à cet outrage sur sa personne, son intimité, son équilibre le plus profond.



Dans cette école de banlieue où les jeunes sont principalement issus des cités, c'est la loi du silence qui prévaut. Comment a-t-elle pu les dénoncer... le déshonneur retombe sur elle. Ce sont les agresseurs que l'on plaint parmi les autres élèves, mais aussi au sein de l'équipe d'éducateurs, du principal, des profs,... enfin pour ceux qui se sentent concernés...

Emma est une jeune professeure et semble être la seule à s'offusquer de ce qu'on peut reprocher à Fatima de "l'avoir cherché" ou du manque d'implication du personnel éducatif.

Mais Emma est plus impliquée qu'elle n'a bien voulu se l'avouer à elle-même... Le silence qui entoure les victimes vient parfois d'elles-mêmes, tant le déni agit parfois comme un bâillon puissant.



Bien que la thématique soit intéressante, j'ai été très déçue par la manière dont l'auteure a traité ce sujet. Ce livre se compose de deux parties, la première qui concerne Fatima, ou plutôt l'étrange et dérangeante empathie dont jouissent les agresseurs. Et dans la deuxième, c'est la résonance que cette histoire a sur Emma qui est traitée... Mais le tout manque de liant et de cohérence, ce qui donne un sentiment assez brouillon à la narration. Et surtout, je n'ai personnellement pas été touchée par cette histoire où les émotions m'ont semblé trop tenues à distance.



Un message que nous adresse le livre s'avère toutefois intéressant : pour la victime d'un viol, quelles que soient les circonstances de ce viol - qui peuvent être d'une violence inouïe ou au contraire beaucoup plus insidieuses - il n'y a pas d'échelle de gravité à vouloir imposer. L'entreprise de destruction de la personne peut dans les deux cas être absolue.
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Sauf que c'étaient des enfants

Fatima et les huit garçons



Pour son second roman Gabrielle Tuloup analyse un fait divers, l’inculpation de huit collégiens pour viol en réunion. Et fait de «Sauf que c’étaient des enfants» un drame finement ciselé.



Gabrielle Tuloup nous avait impressionnés dès son premier roman, La Nuit introuvable dans lequel un fils retrouvait sa mère atteinte de la maladie d’Alzheimer et qui, avant de sombrer, lui avait laissé une confession épistolaire émouvante qui allait modifier son jugement et sa vie. Pour son second roman, changement d’atmosphère complet, même si là aussi il est question de remise en cause, de jugement trop rapide et de vies qui basculent.

Nous sommes dans un collège de banlieue au moment où, pour les besoins d'une enquête judiciaire, la police demande au principal l'autorisation de consulter les photos des élèves. Devant la gravité de l'affaire – il s'agit d'un viol en réunion – l'homme obtempère. Fatima, la victime, reconnait l'un de ses agresseurs, puis un autre... Au total se sont ainsi huit élèves de l'établissement qui auraient participé à ce fait divers sordide. Et qu'il va falloir mettre en garde à vue, parce que, avec le soutien de sa mère, la jeune fille a porté plainte.

Le principal négocie une façon discrète d’appréhender les suspects: les surveillants iront chercher les élèves dans leur classe et ils seront alors remis aux policiers en civil qui les attendent.

Si les choses se passent sans heurts apparents, on imagine l'onde de choc ainsi créée.

Au plus proche des différents acteurs impliqués dans ce drame, le personnel de l'établissement, du principal aux surveillants, en passant par les enseignants et les élèves, Gabrielle Tuloup décrit cette atmosphère de plus en plus pesante, ces rumeurs qui enflent, cette suspicion qui se généralise.

Il y a ceux qui minimisent, ceux qui font de la victime la première coupable, ceux qui ne veulent pas se prononcer et ceux qui jugent immédiatement les huit élèves. Et puis, il y a ceux qui, après la sidération, sont touchés en plein cœur comme Emma, prof de français. Cette affaire va raviver des souvenirs, remettre à vif une plaie qui n'était pas vraiment cicatrisée. «Ça lui explose au visage. Ils ont fait ça. Ses mômes ont fait ça. Elle l’entend de nouveau, nettement, le rire collectif. Ils savaient donc, les copains. Et Nadir qui frimait, les yeux brillants, les épaules sorties. Nadir qui, d’habitude, s’arrête toujours au bon moment. Qu’on n’aille pas lui expliquer que ce sont des gosses, qu’ils ne se rendent pas compte. Leur foutue présomption d’innocence, ils peuvent se la garder.» Elle va avoir beaucoup de mal à retrouver les élèves au terme de leur garde à vue. Car bien entendu, le temps judiciaire n'a rien à voir avec celui des médias et des réseaux sociaux. Dans l'attente du procès la présomption d'innocence devrait pourtant prévaloir.

C'est aussi ce que les parents des adolescents incriminés espèrent. Vœu pieux! En quelques jours tout va voler en éclats. La défense s’organise, le clan se resserre : «Cher Juge, je connais bien ces huit garçons, je les connais depuis longtemps et je peux vous garantir que ces jeunes hommes sont innocent. Ils sont comme des frères pour moi et m’imaginer les voir faire une tel chose m’est aussi insupportable qu’incrédible. Je suis contre le fais que ces jeunes soit pénaliser or que certains ne l’on pas toucher. ni même parler. De plus cette jeune elle a déjà une réputation car il y a des rumeurs sur cette personne et ce jour-là je ne doute pas qu’elle était consentante. Je compte sur vous pour prononcer la sentence la plus juste en espérant avoir un jugement clément pour mes amis. Merci d'avance.»

Si ce roman s’inscrit dans la lignée des romans qui, après #metoo, traitent des violences faites aux femmes – on pense à Karine Tuil et Les choses humaines, à Mazarine Pingeot et Se taire ou encore au tout récent Le Consentement de Vanessa Springora – il est avant tout la chronique d’une dérive ordinaire, un témoignage qui n’oublie aucune des pièces du dossier. On y retrouve du reste les rapports de l’assistante sociale, les bulletins scolaires annotés ou encore un compte-rendu de la réunion de l’association SOS victimes.

On y voit le courage qu’il faut pour briser le silence, pour oser porter plainte. On y voit aussi le long chemin que parcourent les victimes jusqu’à dire les choses. Grâce à la belle construction du roman, on bascule alors de l’histoire de Fatima à celle d’Emma. Et l’on comprend que le combat est loin d’être terminé. Loin de tout manichéisme, Gabrielle Tuloup réussit ici un roman délicat et solidement documenté, un réquisitoire contre les à priori et jugements péremptoires, une réflexion sur la vie ordinaire dans un collège. Utile, forcément utile.




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Sauf que c'étaient des enfants

Ce que j’ai ressenti:



▪️Sauf que c’étaient Eux, Elle et puis Toi…



On n’a pas idée des fois, comme un matin, tout peut changer. Comme dans une seule scène de vie, tout peut exploser en mille morceaux. Comme dans l’insouciance on peut vite basculer au drame, comme de l’enfance on peut passer au monde adulte, comme du silence on peut ressentir le poids des mots…Eux, c’est ces huit garçons qui ont commis ce crime immonde, mais Sauf que c’étaient des enfants. Elle, c’est Fatima, celle qui ne pourra jamais oublier, sauf qu’elle brise cette loi du silence en dépit de tout…Et Toi, c’est Emma, celle qui raconte tout en nuances son intérieur blessé, mais sauf que ça sent le vent de la révolte…Un matin, tout peut changer. On peut choisir de parler enfin pour réparer les blessures à l’intérieur…



L’enfance a une date de péremption, pas la même que celle indiquée sur les paquets. Elle pensait qu’elle avait le temps de voir venir. On ne voit jamais rien venir.



▪️Sauf que c’était compliqué…



Gabrielle Tuloup écrit sur un sujet difficile, soumis à controverse, et pourtant, j’ai trouvé qu’elle nous donne à lire un texte fort, sensible et intelligent. Dans cette dénonciation, elle remue de multiples émotions, donne des voix et des réactions diverses. Les adultes face aux enfants, le corps enseignant face aux élèves, les adolescents avec leurs hormones exacerbées, les règles tacites de la cité, les familles et leurs traditions: en fait toute une communauté face à un acte odieux. En ayant comme cela un aperçu de l’ensemble des personnes touchées de près ou de loin par ce viol, Gabrielle Tuloup nous met face à une polyphonie de mots, de vies et de réactions. Elles éclatent sur le papier comme leurs quotidiens pour nous atteindre au plus profond de notre intimité. C’est très intense comme lecture, elle ne peut laisser indifférent. Je n’ai pas pu reposer le livre avant le point final, parce que c’est trop d’émotions et un sujet si sensible que ça me semblait trop terrible de les laisser, tous, mais surtout certaines, à leurs tourments…Alors j’ai écouté leurs cris silencieux et j’ai admiré leur courage à prendre la parole pour dénoncer la violence subie.



Le réel ne prend pas de gants.



▪️Sauf que c’était terriblement beau…



Et dans tout ça, la beauté de la plume de Gabrielle Tuloup. Les mots et le cœur sont peut-être à vif, le corps et l’esprit marqués profondément dans l’intime, il n’en reste pas moins que la poésie s’invite aussi dans ses pages. C’est une alchimie particulière qui se joue dans ce livre entre douleur et résilience, mais j’ai été touchée par cette façon originale de mener cette fiction. Dans le poids des mots, Emma va trouver sa propre enclume qui l’empêche d’avancer, dans un seul mot, la douleur qui l’anéantit…Alors peut-être bien, que l’écriture sera sa guérison…Je vous laisse découvrir cette très émouvante lecture, sauf que moi, j’ai le cœur un peu fêlé, maintenant…



Et on s’abîme à vouloir réparer. On s’érode encore et encore pour une miette d’intact. On s’essouffle à disperser la poussière, on ratte et griffe l’habitude pour retrouver l’avant et l’éclat. En vain, forcément.



Ma note Plaisir de Lecture 9/10
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Sauf que c'étaient des enfants

****



Il était une fois, dans un collège de Stains, une jeune fille ose parler. Malgré la peur des représailles, les violentes menaces ou les images qu'on lui attribuera, Fatima désigne un à un les huit garçons qui l'ont violé. Consternation au sein du corps enseignant, des familles, des surveillants... Comment gérer cette situation ? Comment parler aux élèves ? Comment les protéger encore un peu de ce monde terrifiant qui les gifle de plein fouet ?



Gabrielle Tuloup a un talent certain pour nous raconter des histoires. Elle a un style si particulier pour évoquer des situations compliquées, dures et perturbantes. Elle possède une écriture poétique et douce, qui donne encore plus de poids aux mots qu'elle choisit.



Parce qu'au delà du fait divers, dans son second roman, l'auteur réussit avec succès à nous plonger dans une ambiance pesante, oppressante et déstabilisante. Car c'est avant tout à l'entourage de ces garçons qu'elle s'attache : le principal du collège, les surveillants, les professeurs, la CPE et bien entendu les familles. Sans ajouter de détails sordides, Gabrielle Tuloup évoque les conséquences d'une telle arrestation.

Elle nous pousse à nous interroger sur les notions de victime, de bourreaux, et de simples spectateurs. Elle mêle ensuite les histoires et tout ce qu'une telle agression pour éveiller en chacun de nous.



Mettre des mots sur l’indicible... Avoir la force et le courage de sortir du déni... Nommer un acte sordide et l'empêcher de tomber dans l'oubli... Et enfin se reconstruire...



Un grand merci aux 68 premières fois pour cette sélection qui démarre sur le ton de la sensibilité et de l'émotion...
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Sauf que c'étaient des enfants

Peu de détails sur les circonstances du viol de Fatima sont abordés dans ce roman : ici, ce sont les répercussions sur son entourage et celui des violeurs qui sont évoquées : le ressenti des professeurs des élèves accusés (et ce que cette histoire renvoie de leur vie), du principal, des surveillants, de la mère d’un des garçons emprisonnés. En fait, accusés et victime sont dévoilés à travers le regard de leur entourage et la bienveillance n’est pas toujours du côté où on l’imaginait...Un roman intéressant, à l’écriture fluide, divisé en 2 parties (une centrée sur le collège et l’autre sur Emma, professeure de français) qui met en évidence la difficulté pour les victimes de se poser en tant que telle et de dénoncer leur abuseur. Terrible.
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La nuit introuvable

Face à l'attitude distante et sans effusion de tendresse de sa mère Marthe, Nathan qui a aujourd'hui 40 ans s'est barricadé le coeur, aimant doublement son père et recevant de lui par procuration toute la part d'amour manquante.



Quatre ans après la mort de son père pendant lesquels tous les liens sont rompus entre sa mère et lui, Nathan est mis tout à coup en face de celle qu'il avait fini par enterrer dans sa mémoire.





J'ai beaucoup aimé ce texte très poétique et délicat qui dit les empêchements d'aimer que l'on s'impose quand des expériences passées montrent que le total abandon de l'amour peut faire du mal et détruire, celui qui aime ou celui qui est aimé.



Le roman éblouit par l'amour absolu, l'amour qui ne se dit pas, ne peut s'écrire que sur des pages encore vierges de l'oubli. Sur du papier buvard comme utilisaient autrefois les écoliers pour estomper ici les traces des larmes d'une mère.



J'ai aimé entendre les deux voix à l'intérieur du texte, la voix du fils moderne et rieuse, se moquant de lui-même parfois qui allège le poids de la dureté de ce qu'il vit et la voix de cristal d'une mère qui ose enfin s'affranchir de la culpabilité d'aimer.



Gabrielle Tuloup éprise de slam évoque ici la poésie de René Char à plusieurs reprises dans le roman : dans son titre « La nuit introuvable » tirée du poème « Fureur et mystère », en utilisant comme prénom Marthe et par le frontispice du livre avec une très belle couverture bleu nuit d'arbres en miroir des éditons Philipe Rey.





Je ne résiste pas à écrire ce très beau poème dans son intégralité en cette année commémorative des 30 ans de la disparition de René Char :



Marthe



Marthe que ces vieux murs ne peuvent pas s'approprier, fontaine où se mire ma monarchie solitaire, comment pourrais-je jamais vous oublier puisque je n'ai pas à me souvenir de vous : vous êtes le présent qui s'accumule.

Nous nous unirons sans avoir à nous aborder, à nous prévoir comme deux pavots font en amour une anémone géante.

Je n'entrerai pas dans votre coeur pour limiter sa mémoire.

Je ne retiendrai pas votre bouche pour l'empêcher de s'ouvrir sur le bleu de l'air et la soif de partir.

Je veux être pour vous la liberté et le vent de la vie qui passe le seuil de toujours avant que la nuit ne devienne introuvable.

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La nuit introuvable

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Nathan est seul en Slovénie. Il a divorcé, son père est mort et il n'a plus aucun contact avec sa mère depuis quelques années... Mais quand une voisine de cette dernière l'appelle pour lui demander de revenir rapidement, il ne sait pas comment réagir. Entre sa mère et lui, tout a toujours été compliqué, froid, sec et sans tendresse. Mais c'est peut être l'occasion pour eux de s'expliquer, de se rapprocher et peut être de se comprendre...



Gabrielle Tuloup signe ici un premier roman particulier. Bien écrit, il nous touche par cette absence de relation. Une mère ne peut pas être insensible à son enfant, elle le déteste ou elle l'aime à en mourir mais rester hermétique aux besoins de son petit garçon semble totalement cruel... Heureusement, la figure paternelle est solide et chaleureuse, et elle permet à Nathan de se construire.

Gabrielle Tuloup écrit avec sensibilité et même si certaines parties de l'histoire ne m'ont pas semblé à leur place, elle nous pousse à croire au pardon et à la force des mots...
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La nuit introuvable

Il y a des livres qui vous cueillent dès les premiers mots et qui vous font vivre une expérience qui dépasse le cadre de la lecture ; des phrases qui résonnent de façon singulière, parce que c'est le moment, parce que soudain l'auteur exprime comme par magie toutes les sensations qui vous brûlent à l'intérieur de ne pas pouvoir sortir. Ce n'est pas un hasard s'il s'agit d'un premier roman, une percussion (une de plus) dans le cadre des 68 premières fois tant cette aventure s'avère révéler de nouvelles facettes au fil des années. La nuit introuvable est un petit bijou de finesse, de justesse et d'émotion.



"J'ai regardé ma ridicule petite valise pour voyage en cabine, celle des gens qui ne restent jamais bien longtemps et je me suis demandé comment j'avais pu rapporter autant de chagrin dans un si petit volume (...). J'ai voulu en avoir le cœur net. J'ai fait glisser la fermeture éclair. C'était le vide, tout un chargement de rien qui me tirait sur le bras et m'essoufflait le cœur."



Nathan Weiss promène sa quarantaine désenchantée entre Paris et la Slovénie où il a accepté un poste à la mort de son père dont il était très proche, contrairement à sa mère, Marthe, qui a toujours entretenu une distance un peu froide entre eux. Nathan est ainsi très contrarié lorsqu'une amie de sa mère qu'il ne connait pas lui demande de venir voir Marthe et lui annonce que celle-ci, atteinte de la maladie d'Alzheiner a laissé huit lettres pour lui et qu'elle est chargée de lui en remettre une lors de chacune de ses visites. Tenu de jouer le jeu, bien que très réticent, Nathan va peu à peu découvrir ce que sa mère tient à lui dire avant d'en être définitivement empêchée ; elle lui livre sa mémoire, ses souvenirs et un éclairage précieux sur leur relation.



A travers ces lettres, Marthe se dévoile d'une écriture élégante ; d'abord la jeune fille "prisonnière" d'une mère nécessitant une assistance permanente, puis la femme amoureuse, magnifiquement amoureuse et le couple fusionnel qu'elle formait avec Jacques... Et puis les failles, les drames qui éclairent son impossibilité à laisser parler son amour maternel. Et le cœur se serre, face à ces témoignages poignants, si sincères et face à cette course contre la montre puisque la mémoire passe de l'un à l'autre, que la connaissance du passé nourrit peu à peu Nathan, comble ses vides tandis qu'elle s'évapore du cerveau de Marthe.



Il y a des pages et des moments sublimes dans ce livre. La rencontre de Marthe et Jacques racontée dans la lettre N°4, qui ne pourra que séduire les amoureux de la littérature. Et puis la page 115. Ces mots qui disent le désarroi face à l'absence de l'être aimé, ces mots qui disent si bien l'indicible face à la perte...



"On n'a pas idée de ce que c'est qu'une chemise sans les épaules de l'homme qu'on aime. On n'a pas idée du monde infiniment plat et chiffonné, roulé en boule, qui reste quand l'autre déserte la vie, quand son corps est soustrait aux étoffes et aux caresses. L'existence n'a plus d'odeur. On marche le ventre en creux, encore et encore (...). On arrose quand même les fleurs une fois par semaine parce qu'elles n'y sont pour rien et que le monde est assez fané comme ça. (...)"



Tout est beau et élégant dans ce livre, l'écriture, la couverture. Je l'ai terminé sous le charme et dans l'émotion la plus totale, le ventre noué par les derniers mots. C'était un exemplaire qui circulait entre nous, j'ai eu du mal à m'en séparer et je n'ai qu'une hâte, m'en procurer un pour moi toute seule (il sort aujourd'hui) et me replonger dans ces mots si justes et si sensibles. Un très beau coup de coeur !
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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La nuit introuvable

Oh, la belle plume que celle de Gabrielle Tuloup… Comme c'est agréable de se laisser envelopper par cette prose sensible et élégante qui m'a comblée d'émotions et m'a laissée le coeur chaviré et les yeux pleins de larmes.

Nathan Weiss, quarante ans, vit et travaille en Slovénie. Son père qu'il aimait tant ayant disparu, il lui reste une mère, Marthe, qu'il ne voit que très rarement. Froideur, distance, incompréhension sont les termes qui définissent le mieux leurs relations. Depuis toujours... Contrairement au rapport fusionnel qu'elle entretenait avec son mari, Marthe a vécu comme loin de son fils, dans l'incapacité, semble-t-il, de l'aimer... Nathan n'attend maintenant plus rien de sa mère et une ou deux visites annuelles entretiennent artificiellement une relation morte depuis bien longtemps.

Un jour, il reçoit l'appel d'une certaine Jeanne Silet, une vieille amie de sa mère : elle lui apprend que cette dernière, atteinte de la maladie d'Alzheimer, a laissé huit lettres qu'elle a écrites avant de perdre tout à fait la mémoire. Huit lettres qu'elle doit donner au compte- gouttes à Nathan. Celui-ci trouve ce petit jeu complètement puéril. Donc, c'est de très mauvaise grâce qu'il s'y soumet, n'en attendant évidemment pas grand-chose.

Qu'est-ce qui pourrait rattraper une vie dépourvue de tendresse et d'amour, une vie d'indifférence et d'éloignement ? Et pourtant, ce que va découvrir Nathan au fil des lettres va changer son regard sur sa mère. Qui était Marthe, l'a-t-il bien connue au fond, n'ont-il pas vécu sur une espèce de méprise, de malentendu qui les a empêchés de se rencontrer vraiment ? Quels sont les secrets de cette femme dont la mémoire s'est envolée ?

Ce texte m'a beaucoup, beaucoup touchée, tout d'abord parce que je sais que l'on peut, comme cela, entretenir de mauvais rapports tout simplement parce que la parole a fait défaut, qu'on n'a pas pris le temps ou qu'on n'a pas eu le courage de dire ce que l'on avait sur le coeur de peur d'envenimer une situation délicate… Et les années passent, de proches, on devient petit à petit des étrangers et à un moment donné, c'est trop tard, on ne peut rattraper le temps perdu. En prendre conscience soudain est tout simplement déchirant…

Par ailleurs, et pour aborder un autre thème du roman, je sais qu'il est difficile de traduire par des mots ce que l'on ressent quand on se trouve face à un parent malade qui a perdu tous ses souvenirs et qui ne sait même plus qui vous êtes.

C'est le cas de mon père.

Je me souviens de ses premières errances, de ses marches qui l'entraînaient au-delà de ses forces et des espaces connus alors que la maladie n'était pas encore diagnostiquée. On le retrouvait déshydraté, exténué et complètement hagard dans un commissariat où les pompiers avaient fini par le déposer.

Il nous a fallu du temps pour comprendre et admettre que s'il était encore vivant, plus rien de lui ne survivait. Et l'on tentait d'entrer en contact avec lui en parlant en espagnol, langue qu'il avait tant aimée, en lui rappelant quelques bons souvenirs qui nous faisaient pleurer tandis qu'il nous regardait fixement, sans émotion, le regard dans le vide.

Pour ma part, j'ai cessé d'attendre quelque chose.

Je ne le vois pas souvent. Je pense à lui quand il fait beau comme ces jours-ci, je pense aux endroits près de chez moi où il aimait aller se promener. Je le sais enfermé dans sa chambre, incapable de lire, d'écouter la radio ou de discuter. Incapable de rien et toujours vivant…

Alors, il va sans dire que les passages du roman où il est question de cette terrible dépossession de soi qu'entraîne cette maladie m'ont beaucoup touchée, les dernières pages du livre m'anéantissant tout à fait. Les résonances sont parfois trop fortes… Je vous les espère moins douloureuses…

« Aujourd'hui ma mère est là, à contre-jour, une silhouette de colombe fragile endormie dans la lumière. A l'intérieur, quelque part, son âme aussi bat de l'aile. Et, si j'osais poser ma main sur elle, je crois que son pouls battrait très fort et vite d'être ainsi prise au piège... »

Un livre magnifique et d'une très grande beauté que je vous recommande vivement.
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Sauf que c'étaient des enfants

En janvier 2015, dans un collège de Seine Saint Denis, une jeune fille de 15 ans, Fatima, porte plainte contre 8 élèves pour viol en réunion. Toute l'équipe pédagogique est stupéfaite alors que du côté des élèves, les avis sont partagés et accusent Fatima d'avoir "cherché". Emma Servin, professeur de français, réagit elle aussi, d'autant plus que ce drame lui fait revivre un souvenir douloureux que jusqu'ici elle s'était efforcée d'oublier. Elle décide de prendre du recul pour faire le point en parcourant une partie du chemin de Saint Jacques de Compostelle. Fatima et sa famille elles, sont contraintes de déménager pour fuir les menaces qui pèsent sur elles.



Je remercie tout d'abord Babelio et la maison d'éditions Le Livre de poche pour m'avoir donné l'occasion de découvrir ce texte récent noté dans mes pense-bête depuis quelque temps.

Ce roman se lit très rapidement car il est très court (140 pages) avec des chapitres brefs. L'écriture qui se veut le reflet du langage d'adolescents de banlieue, est moderne, vive, sans ambiguïté.

Il y a plusieurs parties dans ce roman, la première se déroule dans le collège, la 2ème est le pèlerinage d'Emma sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle et la dernière, très courte, est le dépôt de plainte. J'ai trouvé ces parties inégales et très différentes, la 1ère ressemble à un reportage télévisé tandis que la seconde est beaucoup plus littéraire, travaillée sur le plan de l'écriture et m'a d'ailleurs étonnée. Sur le coup, on ne voit pas vraiment où l'auteur veut en venir avant que le lien apparaisse.

J'ai vraiment préféré la première partie qui pour moi représente bien le livre. J'aurais d'ailleurs apprécié que le livre s'attarde plus là dessus, aborde le procès par exemple ou comment la vie des autres élèves pourrait être impactée par ce drame. Finalement cette partie a été un peu moins développée que ce que j'aurais aimé.

Ce roman aborde aussi la question des violences faites aux femmes et nous pousse à réfléchir au regard que la société porte là-dessus : sommes-nous vraiment toujours dans le non jugement ? Laisse t'on vraiment toute la place aux victimes pour s'exprimer ?
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Sauf que c'étaient des enfants

L'histoire se passe en Février 2015, dans un collège Stains où vont être appréhendés huit collégiens. 



Le Principal, Ludovic Lusnel, est averti par la Capitaine Marnin, que Fatima, qui réside dans une cité avoisinante, a été violée et va venir identifier les responsables. Elle en reconnaîtra huit. Une semaine plus tard, ils seront arrêtés.



Cet événement va déclencher divers sentiments et impacté les différents acteurs de cette histoire. La parole est donc donnée à chaque interlocuteur du Principal Ludovic Lusnel, à toute l'équipe pédagogique, la CPE, les professeurs et les surveillants , en incluant  victime, parents et camarades de classe. Chacun va donner son opinion et réagir à  sa façon.

Une des professeur aura de ce fait une réaction excessive . Elle va s'interroger sur ce qu'a subi Fatima et  ce qu'elle a pu ressentir.

Ce livre est diviser en deux parties. La première partie évoque la vie du collège, l'arrestation, les élèves et le ressenti de chacun des protagonistes.

La deuxième partie concerne un professeur avec son ressenti sur les événements et ses pensées sur sa vie privée.



Dans ce récit, on trouvera également des encarts avec des bulletins d'élèves, des messages de la CPE ainsi que des observations de professeurs et des compte rendus de réunion.



Un sujet difficile à  traiter mais très intéressant et qui provoque des débats. L'auteure nous livre son récit  simplement et sans prendre partie. 



Merci aux 68 premières fois et aux Éditions Philippe Rey de m'avoir permis de lire ce livre.



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