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Citations de Gene Wolfe (63)


Ce sont les dieux qui possèdent ce monde, pas nous. Nous ne sommes que des hommes sans terre, même le plus puissant des rois. Les dieux nous permettent de cultiver leurs champs puis nous prennent la récolte. Nous nous rencontrons et nous aimons, parfois quelqu’un nous élève un tombeau. Peu importe – un autre le pillera et les vents disperseront notre poussière, puis on nous oubliera. Il en va de même pour moi, plus vite. J’ai écrit dans mon parchemin comment Pharétra m’a souri. Tant que le papyrus sera conservé, elle sera présente, alors que même la petite Io ne sera que poussière brune pleurant au vent nocturne avec tout le reste.
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Nous, Amazones, sommes les filles du Dieu de la Guerre ; et bien que nous l’aimions, c’est un père rigoureux qui nous imposent des lois que nous n’oserions pas enfreindre. L’une d’elles exige de nous que nous ne déposions jamais les armes, à moins de vouloir ressembler aux filles des hommes. A ce jour jamais une Amazone n’a violé cette loi qui n’a pas été édictée par des femmes ou des hommes mais par le dieu qui est notre père. Le roi doit comprendre que nous ne la violerons pas davantage.
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Les enfants, ne sachant distinguer l'extraordinaire du plus banal, se tiennent habituellement au milieu des deux ; ils trouvent de l'intérêt à des incidents que les adultes ne se soucient même pas de remarquer et acceptent avec sérénité les événements les plus improbables. Mon frère et moi nous étions fascinés par les antiquités frelatées et les bonnes affaires de la rue de l'Asticot, mais le marché aux esclaves où Mr Million insistait souvent pour s'arrêter une heure nous laissait totalement indifférents.
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- Nous avons tous notre cerveau dans le ventre, quand nous avons faim.
(Coureur des sables)
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Il n'y a pas d'hommes ordinaires. Rien que des hommes considérés comme tels par les autres.
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Malheur aux forts quand le dieu frappe le dieu,
Hurlent les chiens, plane un milan aux cieux,
Colombes en éperviers s’abattent, bœufs éventrent la terre,
L’enfant chevauche en armes et filles font la guerre,
Lors Bendis veut du soleil arrêter le cours,
Mais vois donc, vif éclair, comme le lion court !
Le Seigneur des Batailles la bataille apporte,
Qui boit le sang d’autant de rois que terre en porte.
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 -En me menaçant tu ne rencontreras que la Mort. Alors tu m’appartiendras, comme tant d’autres ; ta demeure sera en mon royaume, tes amis mes esclaves.
-Cela vaut toujours mieux que de vivre ainsi.
La puanteur de la tombe a envahi la salle, tellement puissante qu’elle a couvert l’odeur de cèdre qui montait du foyer. La Mort est montée tout droit du sol et venue se tenir à côté de la déesse, sa main de squelette étreignant son manteau noir.
-Il me suffit de dire : Il est à toi. Et ta vie sera terminée.
-S’il le faut, je la regarderai en face.
Son sourire s’est fait plus chaleureux : -Quand enfin tu mourras, on lira sur ton monument : ci-gît un homme qui osa défier les dieux. J’y veillerai. Je préférerais cependant ne pas faucher un tel héros dans sa jeunesse.
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Les enfants, garçons ou filles, avaient un cours extraordinairement bas à Port_mimizon ; et Pon m'avait dit que mon père, qui jadis en faisait commerce, ne s'intéressait plus à cette branche d'activité en raison de la précarité du marché. Que ce fût vrai ou pas, tout le monde - ou presque tout le monde - connaissait un professionnel prêt à fournir ce qu'on lui demandait, dans des limites raisonnables, pour un prix très peu élevé.
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« Il y a quelqu’un à l’extérieur, dis-je. Quelqu’un qui se tient sur le seuil. »
Casdoe fit un signe affirmatif de la tête. « J’ai fermé les fenêtres juste à temps. Jamais il n’est venu d’aussi bonne heure. C’est peut-être l’orage qui l’a réveillé.
— Mais… ne pourrait-il pas s’agir de votre mari ? »
Avant qu’elle ait pu me répondre, une voix, plus haut perchée encore que celle du jeune garçon, appela : « Laisse-moi entrer, maman ! »
Même moi, qui ne savais pas quel était l’être en train de parler, j’eus une effrayante impression d’irréalité en entendant ces simples mots. Peut-être s’agissait-il d’une voix d’enfant : mais pas d’un enfant humain.
« Mère, reprit la voix, il commence à pleuvoir.
— Nous ferions mieux de monter, dit Casdoe. Si nous retirons l’échelle, il ne pourra pas nous atteindre, même s’il pénètre à l’intérieur. »
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Je n’avais jamais vu la guerre, ni même n’en avais parlé longuement avec quelqu’un qui y aurait participé ; mais j’étais jeune et, ayant quelques connaissances de la violence, je m’imaginais que la guerre n’était qu’une nouvelle expérience à faire, comme tout autre chose – comme de disposer d’une certaine autorité à Thrax, ou de m’évader du Manoir Absolu.
Or la guerre n’est pas une nouvelle expérience : c’est un monde nouveau. Ses habitants en sont plus différents des êtres humains que Famulimus et ses amis. Ses lois sont nouvelles, et même sa géographie est différente, car il s’agit d’une géographie dans laquelle le moindre vallon et la plus humble colline peuvent acquérir l’importance d’une grande ville. Et de même que Teur, qui nous est pourtant si familière, recèle en son sein des monstruosités comme Erèbe, Abaïa et Arioch, le monde de la guerre est parcouru d’autres monstres appelés batailles, dont les cellules sont des individus mais qui possèdent une vie et une intelligence qui leur sont propres, et que l’on approche à travers un nombre toujours croissant de présages.
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Une fille appelée Vent dans les cèdres vivait au pays des pierres qui s’éboulent là où les années sont plus longues, et il lui arriva ce qui arrive aux femmes. Son corps devint lourd et maladroit, et ses seins se durcirent et laissèrent perler du lait. Quand ses cuisses furent mouillées, sa mère la conduisit à l'endroit où naissent tous les hommes, là où deux longues avancées rocheuses se rejoignent. On y trouve une étroite bande de sable lisse, et une pierre nouvellement placée au milieu de quelques buissons à l'intersection. À cet endroit, où les invisibles sont favorables aux mères, elle mit au monde deux garçons.
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Je ne saurais dire combien de peltastes j’ai tués. Il y a eu beaucoup de morts ; mais l’homme noir a combattu avec l’épée du prêtre, il serait difficile de démêler les blessures laissées par Falcata et celles dues à la hache d’Hégésistratos, et certaines Amazones se sont servies de leur épée, je crois. Hippéphode redoute qu’elles n’épuisent leurs flèches mais elles ont récupéré toutes celles tirées au cours de cette bataille, ou presque.
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Cloîtré depuis l'enfance entre les murs austères de la tour Matachine, l'apprenti bourreau Severian ignore tout des ruelles bruissantes de Nessus, des coupoles et minarets, des jardins et des auberges, des bateleurs et des boutiquiers. Jusqu'au jour de son bannissement. Car l'amour que lui inspire la trop belle Thécla, condamnée à la Question, l'amène à trahir ses maîtres. Exilé dans une lointaine province, ignorant tout des usages du monde, le jeune homme part à la découverte de l'étrange univers de Teur, dans la lumière crépusculaire d'un soleil moribond qui favorise les illusions et les mirages, dans une atmosphère de fin du monde qui donne à l'amour même une saveur d'absolu.
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« Ah, eux, nous les appelions les abos, ou les sauvages. Ce n’étaient pas des personnes, voyez-vous. Seulement des animaux qui avaient l’apparence de personnes. »
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Dorcas fit tout ce qui était en son pouvoir pour me réconforter et m’aider ; je pouvais cependant me rendre compte qu’elle avait conscience du brusque changement intervenu dans nos relations, et qu’elle en était encore plus perturbée que moi. J’ai constaté que de tels changements sont toujours déplaisants, ne serait-ce que parce qu’ils ne font qu’annoncer la venue probable de changements plus grands encore. Tant que nous avions voyagé ensemble (et nous n’avions pas cessé de nous déplacer, plus ou moins vite, depuis l’instant où Dorcas, dans le jardin du Sommeil sans Fin, m’avait aidé à grimper, àmoitié noté, sur le sentier de roseaux flottants), nous étions restés des compagnons ayant un statut identique : c’était sur nos jambes ou sur nos montures que nous franchissions chaque lieue de notre itinéraire. Si j’avais pu assurer, à plusieurs reprises, une certaine protection physique à Dorcas, elle m’avait également fourni un véritable réconfort moral, et même une protection, dans la mesure où il était difficile de garder une attitude de mépris devant tant d’innocente beauté, ou de manifester de l’horreur devant ma profession, lorsque, en me regardant, on la voyait à mes côtés. Quand j’étais dans le doute, elle m’avait conseillé ; en cent lieux déserts, elle m’avait tenu compagnie.
Lorsque nous étions finalement arrivés à Thrax, et que j’eus présenté la lettre de maître Palemon à l’archonte, cette forme de compagnonnage prit nécessairement fin. Je n’avais plus rien à craindre de personne lorsque je fendais la foule dans mon habit de fuligine – en réalité, c’était plutôt la foule qui me craignait, voyant en moi le plus haut représentant de la branche la plus redoutée de la force publique. L’existence que menait maintenant Dorcas n’était plus celle d’une égale, mais selon le terme employé par la Cuméenne, d’une maîtresse, partageant le domicile officiel du licteur. Ses conseils étaient devenus pratiquement inutiles, car les difficultés auxquelles je devais faire face relevaient de problèmes d’administration, ceux précisément que ma formation m’avait appris à traiter, des années durant, et auxquels elle n’entendait rien ; en outre, je dois dire que j’avais rarement le temps et l’énergie de les lui exposer suffisamment en détail pour que nous puissions en discuter.
C’est donc ainsi que, tandis que je passais veille après veille à suivre les débats de la cour de justice de l’archonte, Dorcas prit l’habitude de se promener dans la ville ; et que nous, qui avions été tout le temps ensemble pendant toute la fin du printemps, ne nous voyions qu’à peine cet été, sinon pour partager le repas du soir, avant de nous écrouler, épuisés, dans un lit où, la plupart du temps, nous ne faisions guère autre chose que de dormir dans les bras l’un de l’autre.
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Nous croyons inventer les symboles. La vérité est que ce sont eux qui nous inventent ; nous sommes leurs créatures, nous sommes modelés par leurs arêtes dures et bien dessinées. Quand les soldats prononcent leurs voeux, on leur donne une pièce, un asimi frappé à l’effigie de l’Autarque, vu de profil. En acceptant cette pièce de monnaie, ils acceptent également les devoirs et les charges de la vie militaire ; dès cet instant les voilà soldats, quand bien même ils ne connaîtraient rien au maniement des armes. J’ignorais encore tout de cette coutume, mais c’est une grande erreur que de s’imaginer ne pas être influencé par de telles choses parce que nous n’en savons rien ; et croire cela, en réalité, c’est croire en la forme la plus triviale et la plus superstitieuse de magie. Seul celui qui voudrait être sorcier met toute sa confiance dans le pur savoir et attend tout de son efficacité ; les personnes rationnelles, quant à elles, savent que les choses se produisent d’elles-mêmes ou pas du tout.
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Je ne saurais dire combien de peltastes j’ai tués. Il y a eu beaucoup de morts ; mais l’homme noir a combattu avec l’épée du prêtre, il serait difficile de démêler les blessures laissées par Falcata et celles dues à la hache d’Hégésistratos, et certaines Amazones se sont servies de leur épée, je crois. Hippéphode redoute qu’elles n’épuisent leurs flèches mais elles ont récupéré toutes celles tirées au cours de cette bataille, ou presque.
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Je note ce qui vient de se passer. A l’aube, le guérisseur est venu dans cette tente et m’a demandé si je me souvenais de lui. Quand je lui ai répondu que non, il m’a expliqué. Il m’a donné ce rouleau, ainsi qu’un stylet de métal pour pierre à fronde, qui laisse des marques comme sur de la cire.
Je m’appelle Latro. Je ne dois pas l’oublier. Le guérisseur m’a dit que j’oubliais très rapidement, à cause d’une blessure reçue au cours d’une bataille. Il l’a appelée d’un nom qui était comme un nom d’homme, mais je ne me le rappelle plus. Il m’a dit que je devais m’exercer à écrire le plus de choses possible, afin de pouvoir les relire quand j’aurais oublié. C’est pourquoi il m’a donné le rouleau et le lourd stylet en métal pour pierre à fronde.
J’ai d’abord écrit quelque chose pour lui dans la poussière, du bout du doigt. Il a eu l’air content que je sache écrire, car la plupart du temps les soldats en sont incapables, m’a-t-il dit. Il a aussi ajouté que mes lettres étaient bien formées, même si certaines avaient des formes qu’il ne connaissait pas. J’ai pris la lampe, et à son tour il m’a montré son écriture ; elle m’a paru très étrange. Il est de Terre-du-Fleuve.
Il m’a demandé mon nom, mais j’ai été incapable de le lui dire ; puis il a voulu savoir si je me souvenais de lui avoir parlé la veille, et j’ai répondu que non. Il m’avait pourtant parlé à plusieurs reprises, a-t-il assuré, mais chaque fois j’avais oublié sa visite précédente.
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Ce fut alors que Herr Hitler, dans l’une de ces décisions inattendues et d’ailleurs totalement imprévisibles pour lesquelles il est célèbre (l’ordre, envoyé de Berchtesgaden à un moment où nul n’attendait rien de tel et où, d’ailleurs, tous les commentateurs croyaient que l’Allemagne se satisferait au moins pour un temps d’exploiter la suprématie économique qu’elle avait déjà gagnée en Europe de l’Est et ailleurs, l’ordre, donc, d’équiper toutes les “Voitures du Peuple” vendues en mai, juin et juillet d’enjoliveurs scandinaves sans surcoût vient aussitôt à l’esprit), ayant épuisé, sinon l’intérêt, du moins les rangs de la noblesse, se tourna vers l’estrade de la presse et proposa une démonstration à tout journaliste qui voudrait se présenter.
Comme je l’ai indiqué, l’offre englobait toute l’estrade ; mais il n’y avait — il ne pouvait y avoir — aucun doute quant à l’identité de son destinataire ; ces yeux brillants d’une énergie fanatique et de la fierté naturelle du chef d’une formidable machine industrielle étaient rivés sur une figure placide bien précise. L’objet de cette attention se leva et, lentement, sans prononcer un mot avant de se retrouver face à face avec l’homme le plus puissant d’Europe, alla accepter le défi. Je n’oublierai jamais la manière avec laquelle il exhala la fumée de son cigare en disant :
— J’imagine que ceci est une automobile ?
Herr Hitler acquiesça.
— Et vous, dit-il, je crois que vous avez appartenu au Haut Commandement de ce pays. Vous êtes Herr Churchill ?
Churchill acquiesça.
— Pendant la Grande Guerre, dit-il tout doucement, j’ai eu — quelque temps — l’honneur d’occuper un poste dans l’Amirauté.
— Pendant ce temps, dit le chef allemand, j’étais moi-même caporal dans l’armée du Kaiser. Je ne me serais guère attendu à vous retrouver travaillant pour un journal.
— J’étais journaliste avant d’embrasser la carrière politique, l’informa Churchill d’un ton uni. En fait, j’ai couvert la Guerre des Boers comme correspondant en toute liberté de manœuvre. Aujourd’hui, j’ai repris mon ancien métier, comme tout politicien inactif le devrait.
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Une règle très ancienne veut qu'il y ait, dans chaque bibiothèque, une salle réservée aux enfants; on y trouve des livres d'images vivement colorés, comme les aiment en général les enfants, ainsi que quelques contes de fées et récits d'aventures fantastiques. De nombreux enfants viennent dans cette salle, mais on ne s'y intéresse pas tant qu'ils y restent confinés.
Il hésita un instant, et quoique l'expression de son visage n'ait pas changé, j'eus l'impression qu'il craignait de faire de la peine à Cyby avec ce qu'il s'apprêtait à dire.
Mais, de temps en temps, l'un des bibliothécaires remarque chez un enfant solitaire et d'âge encore tendre, un comportement différent : il quitte de plus en plus souvent la salle de lecture en question, et arrive même à ne plus jamais y mettre les pieds. Un tel enfant finit toujours par découvrir, sur quelque étagère basse mais mal éclairée, Le livre d'Or. Tu n'as jamais vu ce livre, et tu ne le verras jamais, car tu as dépassé l'âge auquel on le trouve.
Il doit être magnifique, dis-je.
C'est vrai, en effet. A moins qeu ma mémoire ne me trahisse, il est relié en bougran noir, et le dos est très décoloré. Plusieurs des feuillets se dont détachés, et certaines planches ont disparu. Mais c'est un livre absolument délicieux; j'aimerais pouvoir le retrouver, même si pour moi, tous es livres resteront toujours fermés, maintenant.
En temps opportun, l'enfant découvre donc le livre, disais-je. C'est alors qu'interviennent les bibliothécaires - comme des vampires, prétendent certains, mais d'autres préfèrent les voir comme ces fées qui se font marraines à l'occasion d'un baptême. Ils parlent à l'enfant, qui se joint à leurs rangs. Il fait désormais partie du personnel de la bibliothèque, quoi qu'il advienne, et bientôt ses parents n'en entendent plus parler.
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