Les mots, comme la vie, ne reviennent pas en arrière. Ils se donnent dans l'instant. Ils ne retiennent rien. Pauvres et profonds à la fois.
Nous avons une place à tenir, transformant nos failles en richesses, empruntant le chemin de nos insuffisances pour fleurir. Ce sont les cailloux qui font chanter la rivière. A vouloir être parfait, à vouloir faire la course en tête, on s’épuise et on se perd de vue. Surtout, on lime cette part de soi qui relie, ouvre libère. Qui fait de nous des frères et sœurs en humanité. Cette part souvent cabossée, abîmée, ternie, mais vivante !
« Laisse ta blessure ouverte » écrivait Jean Sulivan. C’est ta chance, ne passe pas à côté. Défais-toi de ton armure, expose-toi, accueille la vie. C’est sûr, tu ne maîtriseras plus tout, tu ne tireras plus toutes les ficelles. Il te faudra de la confiance pour avancer dans l’inconnu.
L’essentiel est de marcher avec nos blessures, toutes nos blessures. Et, en avançant pas à pas, de suivre une étoile.
Je suis une femme de longue patience. Cœur en éveil, mots en offrande. Chaque aube m'y invite. Douleur et douceur mêlees. Je regarde l'arbre :il puise dans ses racines la force de s'élancer vers le ciel ; je suis l'oiseau des yeux : il quitte son nid pour l'horizon.
Les mots, je dois les fréquenter longtemps, les apprivoiser longuement, les caresser souvent, les faire miens avant de les offrir.
Certaines critiques de nos vrais amis sont une chance à ne pas manquer. Même excessives ou débordantes, elles nous rappellent que la relation est au centre du mystère de la vie.
Car les mots des poètes sont des aiguillons, ils aident à traverser. Comme ceux de la prière, fragiles passerelles jetées entre terre et ciel dans l'assurance d'être entendus.
L'amitié n'est-elle pas accueil et gratuité, audace et liberté?
Les mots ne peuvent-ils pas recoudre nos plaies?