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Citations de Georg Trakl (93)


“Dans une chambre abandonnée

Fenêtres, parterres multicolores,
Entrent les sons d’un orgue.
Des ombres dansent sur les tapisseries,
Etrange ronde folle.

Embrasés les buissons s’agitent
Et vibre un essaim de moucherons,
Au loin dans les champs passent les faux
Et une eau vieille chante.

Le souffle de qui vient de me caresser ?
Des hirondelles tracent des signes fous.
Doucement se dissipe dans l’illimité
Là-bas le pays des forêts dorées.

Des flammes dansent dans les parterres.
Extase confus de la ronde folle
Sur les tapisseries jaunâtres.
Quelqu’un regarde par la porte.

L’encens répand son odeur douce, et les poires,
Et s’assombrissent verre et coffre.
Lentement s’incline le front brûlant
Vers les étoiles blanches.
***
In einem Verlassen Zimmer

Fenster, bunte Blumenbeeten,
Eine Orgel spielt herein.
Schatten tanzen an Tapeten,
Wunderlich ein toller Reihn (…)”
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Printemps de l'âme
(...)
La vie fleurit dans le péril,
Doux repos cernant croix et tombe.
Une cloche éteint son chant.
Tout apparaît miraculeux.

Le saule, doux plane en l'éther,
Ici et là quelque lueur tremblante.
Le printemps murmure et promet
Et le lierre humide frémit .(...)

Ô ! comme ils sont beaux, ces jours.
Des enfants traversent le crépuscule ;
Plus bleu est le souffle des vents.
Au loin cri railleur de la grive.
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Crépuscule

Toute souffrance te saccage, te déchire
Et tremble du désaccord de toutes les mélodies
Toi harpe brisée - pauvre cœur
d’où fleurissent les fleurs malades de la mélancolie

Qui a convoqué ton ennemi, ton meurtrier
Qui a volé la dernière étincelle à ton âme,
comme il enlève le divin de cette terre mesquine
Et l’a fit putain, détestable, malade, en dissolution.

Tu es dans le milieu de la nuit profonde
Un rivage mort à la mer muette,
Un rivage mort:
Jamais plus
Tu es dans le milieu de la nuit profonde

Tu es dans le milieu de la nuit profonde

Le ciel dans lequel, astre, tu brûlas,
Un ciel où nul dieu jamais plus n'éclôt,
Tu es dans le milieu de la nuit profonde

Tu es dans le milieu de la nuit profonde

Un non-né dans un doux sein
Et qui jamais ne fut ni jamais ne sera,
Tu es dans le milieu de la nuit profonde
Silence

Au-dessus des forêts luit blafarde
la lune qui nous fait rêver
Le saule au bord de l’étang sombre
pleure sans bruit dans la nuit;

Un cœur s’éteint - et insensiblement
les brouillards débordent et montent -
Silence, silence!

Au soir, ils portèrent l’Étranger dans la chambre des morts ;
une odeur de goudron, le doux soupir des platanes roux ;
le vol noir des choucas ; sur la place on a relevé la garde,
le soleil aura sombré derrière une toile noire ; toujours reviendra cette soirée enfuie.
Dans la chambre voisine, la sœur joue une sonate de Schubert,
très doucement son rire coule sur la fontaine délabrée.
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La descente aux profondeurs
(quatrième version)

Sous les sombres voûtes de notre mélancolie
Les ombres d'anges morts jouent dans le soir.
Au-dessus de l'étang blanc
Se sont envolés les migrateurs.

Rêvant sous des saules d'argent
Des étoiles jaunies caressent nos joues...
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Les trois étangs de Hellbrunn

Les eaux brillent d'un bleu verdâtre
Paisibles les cyprès respirent
Et leur nostalgie sans mesure
Déborde dans le bleu du soir.
Des tritons surgissent du flot,
Le déclin ruisselle à travers les murs
La lune se drape de voiles verts
Et marche à pas lents sur le flot.
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Seul celui qui méprise le bonheur aura la connaissance.

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. . . L’obscur se calme au murmure du ruisseau, aux ombres humides
Et aux fleurs de l’été, à leur tintement si beau dans le vent.
Déjà s’auréole de crépuscule le front du songeur.
Et s’éclaire une petite lampe, le bien, dans son cœur,
. . . et il te regarde de ses yeux de nuit
Le frère silencieux, pour que l’errance d’épine trouve repos.
. . .
Car il croit en la lumière et toujours s’éveille des minutes noires de la démence
Lui qui souffre sur le seuil pétrifié
Et s’enlacent avec violence la bleuité fraîche et la chute étincelante de l’automne,
La maison silencieuse et les légendes de la forêt,
Mesure et loi et les sentiers lunaires des Séparés.
 
 
Extraits de « Chant du Séparé » / « Gesang des Abgeschiedenen », début 1914
Traduit de l'allemand (Autriche) par Michèle Finck.
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DANS UN VIEIL ALBUM (septembre 1912)


Toujours tu reviens, mélancolie,
Ô douceur de l’âme solitaire.
Un jour d'or embrase sur sa fin.

Humble se courbe à la douleur le patient
Résonnant d’harmonie et de tendre folie.
Vois ! Le soir déjà s'est assombri.

Revient la nuit, et lamente un destin mortel,
Avec lui un autre endure.

Tressaillant sous les étoiles d’automne
Penche plus profond chaque année la tête.

p.64
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Trois Rêves
 
I
Je rêvais, il me semble, de chute de feuilles,
De lointaines forêts et de lacs sombres,
De l’écho de paroles tristes —
Mais je n’en pouvais comprendre le sens.
 
Je rêvais, il me semble, de chute d’étoiles.
Des larmes implorantes d’yeux pâles,
De l’écho d’un sourire —
Mais je n’en pouvais comprendre le sens.
 
Pareil à la chute de feuilles, à la chute d’étoiles,
Je me voyais venir et m’en aller sans cesse,
Écho impérissable d’un rêve —
Mais je n’en pouvais comprendre le sens.
 
 
II
Dans le miroir sombre de mon âme
Il y a des images de mers jamais vues,
De pays abandonnés, fantasmes tragiques,
Se dissipant dans le bleu, dans l’indécis.
 
Mon âme enfantait des ciels pourpres de sang
Embrasés de soleils géants qui crépitaient,
Et des jardins étrangement peuplés, étincelants,
Qui exhalaient des délices oppressantes, mortelles.
 
Et le puits sombre de mon âme
Engendrait des images de nuits insolites,
Agitées de chants indicibles
Et des souffles de forces éternelles.
 
Mon âme frissonne, sombre de souvenirs,
Comme se retrouvant en toute chose —
Dans des mers et des nuits insondables,
Et dans des chants profonds, sans commencement ni fin.
 
 
III
Je vis beaucoup de villes en proie aux flammes
Et les temps entasser horreur sur horreur,
Et je vis beaucoup de peuples tomber en poussière
Et le vent disparaître dans l’oubli.
 
Je vis les dieux s’abîmer dans la nuit,
Les harpes les plus sacrées, impuissantes, se fracasser,
Et, de nouveau attisée dans la pourriture,
Une nouvelle vie se gonfler vers le jour.
 
Se gonfler vers le jour pour à nouveau périr,
La sempiternelle tragédie
Que nous jouons sans la comprendre,
 
Et dont le tourment ténébreux de folie
Se couronne des douces gloires de la beauté
Comme d’un souriant univers d’épines.
 
 
Deuxième partie – Recueil de 1909 (non publié)
Traduit de l’allemand (Autriche) par Marc Petit et Jean-Claude Schneider.
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Un soir d'hiver
Lorsque la neige aux vitres frappe,
Que l’angélus longuement sonne,
La table est mise pour beaucoup
Et la maison est bien garnie.
Maint compagnon en cours d’errance
Arrive par d’obscurs chemins.
L’arbre de grâce a des fleurs d’or,
Puisés au suc frais de la terre.
Le voyageur entre en silence ;
La douleur pétrifia le seuil.
Et l’on voit luire sur la table
Clair et pur le pain et le vin.
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CHANT D’UN MERLE CAPTIF,
                Pour Ludwig von Ficker


Souffle obscur dans les branchages verts.
Des fleurettes bleues flottent autour du visage
Du solitaire, du pas doré
Mourant sous l’olivier.
S’envole, à coups d’aile ivre, la nuit.
Si doucement saigne l’humilité,
Rosée qui goutte lentement de l’épine fleurie.
La miséricorde de bras radieux
Enveloppe un cœur qui se brise.

p.170
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LA NUIT *



C'est toi que je chante, ravin sauvage,
Montagnes dressées
Dans la tempête de la nuit ;
Ô tours grises
Débordant de grimaces infernales,
De faune ardente,
De rêches fougères, de pins,
De fleurs cristallines.
Tourment infini
D'avoir traqué Dieu,
Doux esprit,
Poussant des soupirs dans la cataracte,
Dans le balancement des pins.

D'or embrasent les feux
Des peuples alentour.
Sur des écueils noirâtres
Se jette ivre de mort
La rougissante fiancée du vent,
La vague bleue
Du glacier
Et gronde
Puissamment la cloche dans la vallée :
Flammes, malédictions,
Et les sombres
Jeux de volupté,
À l'assaut du ciel
Une tête pétrifiée.

* fait partie des Poèmes publiés dans la revue Le Brenner (1914-1915)

/ Traduction de Marc Petit et Jean-Claude Schneider
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Puis une voix sombre jaillit en moi : Au fond de la forêt nocturne, j'ai brisé l'échine de mon coursier, car la folie fulgurait dans ses yeux empourprés; les ombres des ormeaux, le rire bleu de la source et la noire fraîcheur de la nuit s'abattirent sur moi, tandis qu'en chasseur féroce je poursuivais une proie couleur de neige; et mon visage s'abîma dans un enfer de pierre.
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Toujours tu reviens, mélancolie,
Ô douceur de l'âme solitaire.
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LE SOMMEIL


Soyez maudits, sombres poisons,
Blanc sommeil !
Ce très étrange jardin
D'arbres crépusculaires
Empli de serpents, de phalènes
D'araignées, de chauve-souris.
Étranger ! Ton ombre perdue
Dans le couchant,
Ténébreux corsaire
Dans la mer salée de l'affliction.
S'envolent des oiseaux blancs à l'orée de la nuit
Sur des villes d'acier
Qui s'écroulent.

p.194
POÈMES PUBLIÉS DANS LA REVUE LE BRENNER (1914-1915)
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CHANT DES PROFONDEURS
  
  
  
  
Du fond de la nuit je fus libéré.
Mon âme s’étonne dans l’immortalité,
Mon âme écoute par-delà espace et temps
La mélodie de l’éternité !
Elle n’est pas le jour et la joie, ni la nuit et la douleur,
La mélodie de l’éternité,
Et depuis que j’ai écouté l’éternité
Je ne sens plus jamais ni la joie ni la douleur !


/ Traduction de l’allemand par Marc Petit et Jean-Claude Schneider
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LE PROMENEUR



Toujours s'appuie sur la colline la nuit blanche,
Où se dresse en sons d'argent le peuplier,
Où sont étoiles et pierres.

En sommeil se voûte au-dessus du torrent la
  passerelle.
Un visage exsangue suit le garçon,
Croissant de lune dans le ravin rose

Loin des pâtres qui célèbrent. Dans la pierraille vieille
Le crapaud regarde de ses yeux de cristal,
S'éveille la floraison du vent, la voix d'oiseau du
  presque mort
Et les pas verdissent sans bruit dans la forêt.

Cela rappelle l'arbre et la bête. Lents degrés de
  mousse ;
Et la lune
Qui s'enfonce étincelante dans des eaux tristes.

Lui s'en retourne et chemine sur la rive verte,
Traverse, bercé par une gondole noire, la ville en
  ruine.

/traduction de Marc Petit et Jean-Claude Schneider
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GRODEK


Le soir, les forêts automnales résonnent
D’armes de mort, les plaines dorées,
Les lacs bleus, sur lesquels le soleil
Plus lugubre roule, et la nuit enveloppe
Des guerriers mourants, la plainte sauvage
De leur bouches brisées.
Mais en silence s’amasse sur les pâtures du val
Nuée rouge qu’habite un dieu en courroux
Le sang versé, froid lunaire;
Toutes les routes débouchent dans la pourriture noire.
Sous les rameaux dorés de la nuit et les étoiles
Chancelle l’ombre de la sœur à travers le bois muet
Pour saluer les esprits des héros, les faces qui saignent ;
Et doucement vibrent dans les roseaux les flûtes
 sombres de l’automne.
Ô deuil plus fier ! Autels d’airain !
La flamme brûlante de l’esprit, une douleur puissante
 la nourrit aujourd’hui,
Les descendants inengendrés.
(septembre-octobre 1914)

p.208
CHOIX DE POÈMES ÉPARS (1912-1914)
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Georg Trakl
Alentour une douce vie pousse en secret,
À travers la verdure se hâtent pas et cœur.
L’amour s’attarde aux haies
Qui s’emplissent d’odeurs.
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Silencieux, je restais assis dans une auberge abandonnée, sous les solives enfumées, seul avec mon vin ; radieux cadavre penché sur une forme ténébreuse ; à mes pieds gisait une brebis morte. Surgissant de l'azur décomposé, la silhouette blême de ma sœur apparut, et voici comment parla sa bouche sanglante : Blesse, ronce noire. Ah ! mes bras d'argent résonnent encore de furieux orages. Sang, coule de mes pieds lunaires, et fleuris sur les sentiers nocturnes où le rat file en piaulant. Flamboyez, étoiles, sous mes sourcils arqués ; et dans la nuit, mon cœur bat doucement. Une ombre rouge, au glaive étincelant, fit irruption dans la maison, et s'enfuit, le front neigeux. Ô mort amère.

(Révélation et anéantissement)
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