Au temps des trop fameuses luttes entre les compagnies du Nord-Ouest et de la Baie d 'Hudson, le plus beau titre de gloire, pour un voyageur du Nord, c'était d'avoir un poing solide. Parmi ces hommes, on n'enviait pas d'honneur plus grand que celui d'être proclamé le boulé de tout un fort et le coq d'une brigade.
La compagnie de la baie d'Hudson, qui avait ses comptoirs établis sur les bords de la mers depuis 1670, n'avait jamais, quoique le contraire ait été dit, pénétré dans l'intérieur du pays. Cette compagnie avait pour but de faire, non des découvertes, mais simplement du commerce.
Au printemps de 1822, la disette des vivres était grande à Pembina et les troupeaux de buffalos se tenaient sur les bords du Missouri, dans le pays des Sioux, à plusieurs centaines de milles de la frontière du territoire anglais.
Bien peu, parmi ces voyageurs du Nord, retournèrent au pays ; les uns périrent dans ces expéditions et laissèrent leurs os dans les déserts ; les autres se marièrent, et leurs familles furent l'origine des Métis de la Rivière-Rouge.
Aux misères physiques qu'ils eurent à endurer se joignit pendant longtemps le triste sort de mourir sans les secours de la religion. Puis, cette vie vagabonde les rendit presque tous aussi insouciants sur leur avenir que le sont les hommes de la race indienne ; de sorte que, après bien des années passées dans un travail pénible, ils n'avaient rien économisé pour mettre leurs vieux jours à l'abri de la pauvreté.
De plus, le peuple métis, par sa protestation, a reculé de vingt ans la persécution dont les catholiques sont aujourd'hui les victimes, au sujet de leurs écoles.
Il n'y a pas de doute que le sort subi actuellement par la minorité catholique du Nord-Ouest est celui-là même qu'on lui eût imposé si les choses, en 1869, fussent arrivées comme le gouvernement canadien l'avait d'abord réglé. La loi de 1890 n'a été qu'une revanche et la reprise d'un plan conçu d'avance.
En écrivant cette histoire de l'Ouest-Canadien, nous avons cherché à porter, sur les faits que nous racontons, un jugement exempt de toute partialité. Il est très difficile d'écrire l'histoire d'une manière impartiale ; on est porté, généralement, à excuser les fautes de ses compatriotes. Si nous eussions voulu nous laisser guider par de tels sentiments, nous aurions porté sur certains événements un jugement tout autre que celui que nous portons.
Le lecteur, en suivant mon voyageur dans ses longues et pénibles marches, si souvent accompagnées de privations et de dangers, se demandera : d'où venait cet attrait que trouvaient presque tous nos coureurs des bois à un tel genre de vie ? quel charme les attachait donc à ce pays où ils avaient à essuyer tant de misères ? comment se fait-il que la plupart d'entre eux oublièrent le sol natal et ne songèrent plus à revoir le Canada ?
A tous, j'ai dit la vérité, sans rien exagérer, J'ai parlé les inconvénients comme des avantages qui se rencontrent à Manitoba, et je suis persuadé que les colons dirigés par moi à Manitoba ne m'accuseront pas de les avoir trompés. Toute personne n'est pas en état d'aller s'établir au Nord-Ouest : j'ai dû nécessairement conseiller à quelques-uns d'y renoncer mais à la plupart j'ai dit : Allez vous établir à Manitoba !
A peine l'existence du Nouveau-Monde eut-elle été signalée à l'Europe par Christophe Colomb que l'ambition poussa immédiatement les navigateurs jusqu'à de très hautes latitudes le long des côtes de l'Amérique Septentrionale. Ils espéraient trouver, au nord de ces nouvelles terres, un passade pour aborder aux riches contrées de l'Inde où les Portugais se rendaient par la route de l'Orient.
Le peuple disait: c'est l'homme de la compagnie, il ne peut pas être notre homme, et il ajoutait: la compagnie a déjà un aviseur, il faut pour que la partie soit égale que nous ayons le nôtre. Il faut un avocat des deux côtés, sans quoi pas d'équilibre. D'autres disaient: il a voulu faire pendre les partisans de Papineau, il ne sera jamais favorable aux Métis canadiens-français.