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Citations de Georges Ifrah (16)


La rencontre entre deux civilisations ne se fait jamais de manière passive ou sereine. Sans avoir besoin de faire appel à l’Histoire, il suffit de constater les bouleversements provoqués dans le monde par l’intrusion de telle ou telle idéologie, qu’elle soit souhaitée ou imposée. A l’évidence, l’homme ne se manipule pas comme une machine, n’en déplaise aux théoriciens et philosophes de la modernité. Un siècle de colonisation française n’a pas créé de mutation définitive au Maghreb, malgré les différents changements constatés : c’est dans une constante dynamique entre la culture traditionnelle et les éléments importés que se fait la culture mouvante et sans cesse enrichie du Maghreb.
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L'écriture est en effet un remarquable moyen d'expression et de communication durable. Et à chacun de ses utilisateurs, elle donne la possibilité de conserver un témoin permanent d'une ou de plusieurs paroles absentes. C'est la peinture de la voix, comme le disait Voltaire.
Mais l'écriture est bien plus qu'un simple instrument. " En rendant la parole muette, elle ne la garde pas seulement, elle réalise en outre la pensée qui, jusque-là, reste à l'état de possibilité. Les traits les plus simples dessinés par l'homme sur la pierre ou sur le papier ne sont pas qu'un moyen, ils enferment aussi et ressuscitent à tout instant sa pensée. Au-delà d'un mode d'immobilisation du langage, muet certes, mais qui discipline la pensée et l'organise en la structurant. L'écriture est non seulement un procédé destiné à fixer la parole, un moyen d'expression permanent, amis elle donne aussi directement accès au monde des idées; elle reproduit bien le langage articulé, mais elle permet encore d'appréhender la pensée et de lui fairetraverser l'espace et le temps"(Ch. Higounet, L’Écriture )
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Armé de mes quelques connaissances et fort de toute mon angoisse, je reçus un homme d’une quarantaine d’années dont le dossier médical me disait qu’il était en placement d’office pour une bagarre dans un bureau de poste. Il croyait que tous les fonctionnaires lui en voulaient (il était fonctionnaire), qu’ils s’étaient ligués contre lui pour le faire muter, et s’en était pris violemment à un policier, ce qui l’avait conduit à l’hôpital. Aux premières questions que je posai en français, je n’eus aucune réponse; le patient restait figé sur sa chaise, lointain et tendu. Je m’adressai alors à lui en arabe, cherchant le mot juste, dans mon ignorance d’un entretien thérapeutique, dans ma langue maternelle. C’était la première fois que j’utilisais l’arabe pour m’adresser à un patient. A ma grande surprise, il me parla, mais en français, un français approximatif, mal¬ habile et insuffisant pour mener une discussion.
Que s’était-il passé pour que, soudain, le patient me réponde, et en français? Plusieurs réponses sont possibles : en me défaisant de ma langue « scientifique » (le français) et de son aspect rassurant, défensif, j’apparais plus vulnérable et plus proche, je lui parle l’arabe et, de ce fait, me dévoile encore plus à lui. La surprise créée par ce changement de langue intervient comme une interprétation, comme une intrusion dans son monde. Sa réponse en français, en miroir, est une manière d’accepter ma présence et d’entamer le dialogue, mais aussi de continuer à se protéger car, en parlant français de manière approximative, il s’engage moins qu’en arabe.
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« Du VIIIe au XIIe siècle s'écoule une des périodes les plus brillantes de l'histoire de la science. Dans tout le monde musulman, les œuvres scientifiques se répandent, de riches bibliothèques se fondent à Bagdad, au Caire, puis en Espagne. »  Mais, « Au XIIIe siècle, avec la division de l'empire, l'invasion mongole, les croisades, la période brillante de la civilisation arabe se termine. »  (R Taton [Histoire du calcul. Coll. « Que sais-je ? »  n°198. Presses universitaires de France. Paris 1969])
Page 491
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À partir de 2800-2700 avant J.-C., le système pictographique sumérien et son homologue élamite accomplissent en effet les pas décisifs dans le sens de la clarté, de la précision et de l'universalité : on les rattache à la langue parlée, le moyen le plus parfait d'analyser et de communiquer le réel. Et pour cela, on a l'idée d'utiliser les images-signes, non plus pour leur valeur picturale ou idéographique, mais plutôt pour leur valeur phonétique relativement à la langue sumérienne (ou élamite).[...]
L'écriture vient de naître pour la première fois au cours de l'Histoire. et ce sont peut-être des comptables qui l'ont inventée pour répondre à des besoins essentiellement économiques.
Issue du système des "calculi" et des bulles d'argile, la transcription graphique des nombres a donc bien précédé celle du langage articulé. autrement dit, l'invention des chiffres s'est faite bien avant la découverte de l'écriture...
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Cette méthode ("tas de cailloux") a joué un rôle d'autant plus important dans l'histoire de l'arithmétique que que ce sont les cailloux qui ont véritablement permis à l'homme de s'initier à l'art du calcul. Et quand nous disons "calcul", le mot lui-même nous renvoie à ce procédé venu du fond des âges, puisque, en latin,calculus signifie précisément "petit caillou".
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De nos jours plusieurs peuplades" primitives" en sont encore, si l'on ose dire, à ce "degré zéro" de la connaissance des nombres. C'est le cas par exemple des Zoulous et des Pygmées d'Afrique, des Aranda et des Kamilarai, des aborigènes des îles Murray et Botocoudous du Brésil.
Un, deux, et ...beaucoup, constituent les seules grandeurs numériques de ces indigènes qui vivent encore à l'âge de pierre.
Ils ne connaissent que deux "noms de nombres" proprement dits : un pour l'unité et un autre pour la paire. Les plus forts arithméticiens d'entre eux parviennent certes à exprimer les nombres trois et quatre en articulant quelque chose comme : deux-un et deux-deux. Mais cela ne va guère plus loin. Au-delà c'est l'imprécision : ils emploient alors des mots ou expressions que l'on pourrait traduire par beaucoup, plusieurs, une foule, une multitude, etc.
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Les Malinké du Haut Sénégal et de Guinée, quant à eux, disent "un homme complet" pour vingt et "une couche" pour quarante ( en allusion à la réunion des doigts et des orteils d'un homme et d'une femme allongés sur une même couche).

Nul doute, dans ces conditions : ces peuples ont adopté la base vingt, parce qu'ils se sont rendus compte qu'en se penchant un petit peu, on pouvait aussi compter ses dix orteils.
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Il faut toujours faire attention aux questions prétendues "naïves" des enfants. il faut toujours s'efforcer d'y répondre. Mais pour peu que votre curiosité soit en éveil, elles risquent de vous emmener très loin, beaucoup plus loin que vous n'imaginez d'aller. Et en cela, les élèves peuvent parfois se révéler d'excellents professeurs.
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Et il a fallu la révolution française pour trancher dans le vif et s’apercevoir enfin que « tout l’avantage qu’a un piéton libre sur celui qui est lourdement chargé, le calcul avec les chiffres l’a sur le calcul avec les jetons de la planche à compter ». Car c’est bien elle qui a interdit l’usage de l’abaque dans les écoles et les administrations.
Le calcul et la science modernes purent dès lors se développer sans entraves. Ils venaient de terrasser pour toujours leur redoutable et coriace adversaire…
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Il faut dire que ce berger était très superstitieux. Il était rongé par la crainte ancestrale du "péché du dénombrement", qu'exprime l'adage bien connu : "Enfants ou brebis comptés, le loup les mange."

Encore répandue de nos jours, cette vieille croyance (dont la superstition relative au 13 constitue des survivances en France) traduit en effet la crainte et la répugnance que, de temps immémorial, les traditions populaires ont eues (et ont parfois encore) pour le nombre et l'art de compter.
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Merveille de mobilité et d'efficacité, la main est certainement le plus ancien et le plus répandu des auxiliaires de compte et de calcul employés par les peuples au court des âges...
La main, c'est donc, pourrait-on dire, la plus vieille "machine à calculer" de tous les temps. Ce qui suit montre comment l'homme, une fois qu'il eut largement acquis le principe de la base, a su considérablement étendre au cours des âges, les étonnantes possibilités numériques de ses doigts. Certains détails sont même révélateurs de contacts et d'influences, que l'on aurait peut-être pas décelés sans eux...
(P119 & 120)
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Reconquérir la science et la culture n’était pas tout à fait l’objet des Croisades. Et pourtant ce fut là exactement le résultat de ces guerres insensées. De 1095 à 1270 environ, les puissants princes et chevaliers essayèrent, par le glaive, d’imposer leur tradition et leur religion aux infidèles de l’Orient. Mais à l’encontre du résultat escompté, les croisés revinrent chez eux enrichis par le fonds de la culture qu’ils étaient venus combattre en Terre Sainte. Cela permit en fin de compte de réaliser le progrès que ni la science ni la pédagogie de Gerbert d’Aurillac n’avaient réussi, deux ou trois siècles plus tôt à imposer à l’occident.
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Ainsi certaines autorités ecclésiastiques firent-elles courir le bruit que, pour être si facile, si ingénieux, le calcul à la manière arabe devait sûrement avoir quelque chose de magique, voir de démoniaque : il ne pouvait provenir que de Satan lui-même ! [...]

Il semble bien en effet que l’Église ne veuille rien faire pour favoriser une démocratisation du calcul qui entraînerait sûrement pour elle la perte de son monopole en matière d'enseignement, et par conséquent une perte de pouvoir. Elle préfère que le calcul reste du ressort exclusif des spécialistes, qui d'ailleurs, sont presque tous ses clercs.
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Définition 1 : Un ordinateur est un ensemble électronique de calcul qui permet d'efectuer de très nombreuses opérations en un temps très court... Ceci nous permet d'ailleurs de classer les différents types d'ordinateurs : les ordinateurs digitaux, utilisant principalement le calcul binaire, sont capable de traiter des opérations simples et répétitives ; les ordinateurs analogiques, employés pour les calculs scientifiques, font circuler l'information dans des circuits complexes.
(P654)
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Tous ces échos du passé montrent que les chiffres, loins d'être ces symboles secs et arides que bien des gens dénoncent comme étant les armes et les vecteurs de notre société technicienne, ont été de tous temps aussi supports de rêve, de fantasme, de la spéculation métaphysique, matériaux de la littérature, sondes de l'avenir incertain ou du moins du désir de prédire. Les chiffres sont d'une substance poétique.
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