Ma famille et autres animaux de
Gerald Durrell
LORSQUE L’ÉTÉ TOUCHA À SA FIN, je me trouvai une fois de plus, à ma grande joie, sans précepteur. Mère avait découvert, ainsi qu’elle l’exprimait avec délicatesse, que Margo et Peter avaient « trop d’affection l’un pour l’autre ». Comme, à l’unanimité, la famille se refusait à voir en Peter un futur gendre ou beau-frère, il fallait évidemment faire quelque chose. Leslie suggéra d’abattre Peter d’un coup de revolver, idée qui ne fut pas retenue. Pour ma part, je la trouvais magnifique, mais je représentais la minorité. Larry, lui, proposa d’envoyer l’heureux couple vivre à Athènes pendant un mois, afin, expliqua-t-il, de les guérir de ce caprice.Mère s’y opposa catégoriquement et, finalement, congédia Peter, qui disparut furtivement. Nous eûmes à faire face à une Margo tragique, éplorée, pleine d’une farouche indignation, qui, vêtue pour la circonstance de ses vêtements les plus sombres, joua magnifiquement son rôle. Mère l’apaisa et l’abreuva de douces platitudes, Larry lui fit un cours sur l’amour libre et Leslie, pour des raisons connues de lui seul, décida de jouer le rôle du frère outragé.Il ne cessait de brandir un revolver et de menacer d’abattre Peter comme un chien s’il remettait les pieds dans la maison. Au milieu de tout cela, Margo pleurait et nous affirmait que sa vie était finie. Spiro, qui avait le goût des situations dramatiques, passait son temps à pleurer avec elle et postait ses amis le long des docks pour s’assurer que Peter ne tenterait pas de revenir dans l’île. Tout le monde s’amusait beaucoup.
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