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Citation de Surbookee


L'affaire Ranucci, si tragique qu'elle soit dans ses conséquences, est sur le plan des faits, du point de vue policier, une affaire simple : les preuves ne cessent de s'accumuler contre le suspect et en outre il passe des aveux complets qu'il réitère. Quoi qu'en disent les partisans de l'innocence de Ranucci, leurs arguments buteront toujours sur ce fait objectif et têtu que l'arme du crime lui appartenait et qu'il a désigné verbalement - et physiquement lors de la reconstitution - l'endroit précis où il était caché. Mais la conclusion de cette affaire (la décapitation de Ranucci) a faussé totalement le regard qu'on avait sur elle. Ce n'était pas la culpabilité de Ranucci qu'il fallait contester, mais sa condamnation à mort : les partisans de Ranucci se sont trompés de combat. Ranucci ne méritait sans doute pas la mort : au regard de son passé, il aurait dû bénéficier de circonstances atténuantes. Et ce n'était pas un assassin : son meurtre n'était pas prémédité. Si l'ombre d'un doute pèse - et pèsera toujours - dans cette affaire, c'est bien sur les conditions du meurtre : était-il conscient ou non de son acte au moment où il l'a accompli ? Mais dans ce cas-là, on plaide la démence, pas l'innocence. L'entêtement suicidaire de Ranucci, et les maladresses, voire les absences d'une défense qui luttait contre ses propres convictions (car comment expliquer autrement l'absence des avocats de la défense à un moment aussi crucial de l'instruction que l'interrogatoire récapitulatif, ce jour où Ranucci seul devant Melle Di Marino se rétractera ?), les démarches ambiguës d'une mère au désarroi, l'ont conduit à sa perte bien plus sûrement que les erreurs de datation et les fautes de frappe des policiers ou les zones d'ombre des témoignages. L'oeuvre du temps, ce grand fleuve de l'oubli, les comptes rendus erronés de la presse, quand il ne s'agissait pas carrément d'affabulations, la publication du livre de Gilles Perrault et, en dépit de ses erreurs, l'ampleur de son écho médiatique ont substitué à la réalité de l'enquête une rumeur où la passion et l'émotion ont définitivement pris le pas sur la raison. Avec un tel aveuglement que toute vérité en est devenue inextricable. Comme si l'amnésie progressive de Ranucci avait gagné l'ensemble de la société.









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