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Citation de GerydePierpont


Géry de Pierpont
Ulysse a quitté la fête et s’égare dans la nuit. Cette fois, il n’en peut plus. Trop de choses bouillonnent en lui. À commencer par cette pulsion animale, cet appel de la chair, encore une fois réprimé. Puis cette avalanche d’événements, ces derniers jours, les vexations de Fondry, le poids de ses nouvelles responsabilités, au pied levé, la fatigue du voyage, les sermons philosophes d’un De Puydt désillusionné…
La tête dans les étoiles, il respire à pleins poumons, quitte le chemin, tourne sur lui-même. Voilà qu’il se met à courir, à crier vers la voie lactée. Est-ce l’excès de vin qui le rend soudain malade ou ce trop-plein d’émotions ? Un vicieux haut-le-cœur s’empare de lui, retors et acide. Ulysse ne peut retenir une gerbe de vomissements. Son barrage intérieur viendrait-il de lâcher brusquement ?
Comme les eaux d’un lac, tout à coup libérées, jaillissent follement vers la vallée, ainsi s’épanchent ses tensions, ses contradictions, ses interrogations. Elles s’élancent, bouillonnantes, vers l’air libre, bousculent tout sur leur passage… Puis l’intensité du courant décroît progressivement, les flots perdent de leur hargne et finissent par s’écouler, fuyants, au ras du sol.
Ulysse, vaseux, rejoint lentement la rivière. Il se rince la bouche, s’asperge le visage d’eau. À tâtons, il s’assied sous un petit saule. Près de lui, l’Ourthe glisse, fraîche et insouciante, murmurant son doux gazouillis. Si elle savait le grand voyage qui l’attend, à travers l’inconnu… Elle se répand dans les anfractuosités de son lit, le long des méandres tracés par le temps, ignorant encore les berges de pierre et les écluses que les hommes ont aménagées pour corseter son cours. Ulysse se prend à envier cette eau innocente. « Elle n’a d’autre choix que de s’abandonner à la pente, en confiance », se dit-il naïvement. Puis il ferme les paupières, emplit ses poumons d’air humide et se laisse enlacer par la nuit fauve.
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