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Citation de sonatem


     
Le jardin de la Vallée se présente comme une clairière subite, à la fois détachée du monde et reliée à lui par un chemin de terre. En apparence, un chemin ordinaire, entouré de champs et de fruitiers alignés, mémoire d’une haie de bocage. En réalité, il constitue la dernière étape d’un paysage organisé. Si l’on vient de la ville et des grands axes routiers, on suit un itinéraire de voies décroissantes dans un ordre logique : autoroute, route nationale, route départementale, villages, chemin vicinal, hameaux, chemin communal, chemin de terre (…)
     
Pour Arnaud, cette progression fait référence à l’entrée calculée des instruments de musique dans une partition d’orchestre. À aucun moment il ne parle de jardin, d’architecture ou de forme ; il tient son discours à propos de musique, note les crescendos d’azalées, la concordance des sons, la solitude d’une molène blanche isolée dans un semis de double croches et de pissenlits, s’interroge sur un pizzicatto ténu mais haut placé dans la sphère des lianes et signale l’emplacement des tambours-gunneras en insistant sur la gravité des basses. Mais plus que tout il s’enchante d’un fond soutenu par les cordes où je reconnais les charmes, les chênes, l’ensemble formée par la flore naturelle…
« Vous comprenez, dit-il, il ne s’agit pas d’un jardin, mais d’une symphonie concertante. »
     
Je comprends le discours de celui qui fixe les règles de la dialectique et s’y tient coûte que coûte afin de conclure en apothéose pour démontrer le bien-fondé de son analyse. Mais Arnaud n’use pas de métaphores par un simple jeu de l’esprit, il aime la musique et la nature. Plusieurs années après cette entrevue, il m’avouera s’être détaché des artifices obtenus avec les plantes et l’architecture. Pour ne plus éprouver de malaise en ces lieux de maîtrise, il dira se détourner des jardins afin de se consacrer à ce que la planète offre de plus étonnant sans intervention de l’homme. (…)
     
Concernant la Vallée, Arnaud émet des réserves : ce n’est pas tout à fait un jardin. La combinaison du travail produit par le jardinier et de celui produit par la nature donne préséance à cette dernière. Il trouve en ce lieu une orchestration à sa convenance. Comme pour la musique, des mots cadencés dans une phrase lue, Arnaud démontre que le jardin se compose à l’oreille dans la lecture immédiate de l’espace.
     
(pp. 173-175)
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