Pour les Grecs en général et les stoïciens en particulier, on apprend à penser pour se transformer soi-même et atteindre la paix intérieure, la maîtrise des passions par la raison, en un mot, la sagesse. En ce sens, la philosophie est une ascèse, voire un exercice spirituel. Il s’agit de vivre conformément à la raison universelle (ou Nature) et de viser, autant que faire se peut, l’ataraxie, l’état de non-trouble par les passions. Le progressant-philosophe cherche à réaliser la raison en acte. « Il faut vivre les principes et non les réciter », martèle Épictète. « Il ne s’agit plus du tout de discourir sur ce que doit être l’homme de bien mais de l’être », lance son disciple Marc Aurèle.
Dans la vision stoïcienne, l’unité de l’univers est assurée par le logos (divin). Une même force spirituelle intelligente anime et organise la matière sous d’innombrables formes et selon des lois causales immuables.
Nous vivons une époque formidable. Hommes politiques, économistes, sociologues, experts et journalistes ne cessent de nous le répéter : les sociétés occidentales traversent une mutation sans précédent. Mieux : elles connaissent une véritable crise de civilisation. Chacun y va de son diagnostic sur la nature et la portée des transformations actuelles, en soulignant, à juste titre, que la Krisis (du grec, « décision ») est à la fois un redoutable défi et une formidable opportunité.
Le logos stoïcien est l’agent actif et intelligent par excellence. Dynamique, vivant, c’est un « feu artiste » à l’origine du cosmos, un principe ordonnateur/organisateur des éléments (le feu, l’air, la terre, l’eau…). C’est un principe de cohésion, car dans l’univers tout se tient, tout est un. Le Logos c’est encore Dieu lui-même en action dans l’univers, l’esprit qui organise et anime la matière.
La connaissance du logos est d’abord l’objet d’une intuition, d’une révélation intérieure dans la conscience du penseur, au sens d’une expérience de type religieux. Penser le logos, c’est le reconnaître en soi et hors de soi. Pareillement au croyant qui a la certitude de Dieu comme Absolu, en lui-même comme âme, et en dehors de lui comme univers manifesté.
Quand vas-tu enfin commencer à vivre vertueusement, disait Platon à un vieillard qui lui racontait qu’il écoutait des leçons sur la vertu. Il ne s’agit pas de spéculer toujours, mais il faut une bonne fois penser à passer à l’exercice. Mais aujourd'hui on prend pour un exalté celui qui vit d’une manière conforme à ce qu’il enseigne.
C’est dire si la réduction du stoïcisme à une doctrine morale pour surmonter les aléas du quotidien frise le contresens.
...le stoïcisme est un peu la version occidentale du bouddhisme...