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Citations de Giorgio Vasari (57)


J’éprouve souvent un vif plaisir à considérer la facilité avec laquelle quantité de nos artistes se sont développés, surtout dans l’architecture. Depuis maintes années déjà, cet art n’a été exercé que par des sculpteurs ou des personnes qui en ignoraient jusqu’aux termes techniques et ne possédaient pas même les éléments de la perspective. Il est vrai qu’on ne saurait exceller dans l’architecture sans un jugement solide , sans la science du dessin ou la pratique habituelle de la peinture ou de la sculpture , soit en marbre , soit en bois. Ces dernières conditions expliquent la facilité qu’ont les sculpteurs et les peintres à devenir architectes. En effet, les sculpteurs, à cause des rapports des statues et de l’ornement avec les édifices ; les peintres, à cause de la nécessité de composer dans les tableaux des fonds d’édifices , sont forcés de connaître l’architecture et d’étudier les mesures qui y sont relatives.
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Aux personnes qui me reprocheront d’avoir trop loué les maîtres anciens et modernes, et de les avoir comparés entre eux, je répondrai que j’ai distribué des louanges, non d’une manière absolue, mais en ayant égard aux lieux et aux temps, et à d’autres semblables circonstances. Ainsi Giotto, par exemple, mérite les plus grands éloges, en raison de l’époque où il vécut ; peut-être n’en serait-il pas de même s’il eût été le contemporain du Buonarroti. Il faut considérer, en outre, que les hommes de notre siècle ne seraient point arrivés au point où ils sont, si leurs prédécesseurs n’eussent point été ce qu’ils furent. En somme, on doit être persuadé que dans mes éloges et mes critiques je me suis uniquement appliqué à obéir à la vérité, ou du moins à ce que j’ai cru vrai. On ne peut avoir constamment en main la balance de l’orfèvre : ceux qui savent par expérience combien il est difficile d’écrire, surtout lorsqu’il faut prononcer des jugements et faire des comparaisons qui, de leur nature, sont toujours odieuses, m’excuseront donc facilement, je l’espère.
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Paolo décora ensuite le devant de l’autel de saint Cosme et de saint Damien, de la chapelle de San-Girolamo, dans l’église del Carmine.

Il avait un goût particulier pour les oiseaux, ce qui lui valut le surnom d’Uccello (oiseau). Sa maison était pleine d’études de chiens, de chats et d’autres animaux que sa pauvreté l’empêchait d’avoir vivants.

Chez les Médicis, il peignit des Lions s’attaquant avec une fureur épouvantable. Mais on admire surtout un tableau où il représenta le Combat d’un lion contre un serpent dont les yeux et la gueule lancent un noir venin. Dans le lointain, on aperçoit une paysanne qui s’enfuit épouvantée, oubliant le bœuf confié à sa garde.

Nous conservons dans notre recueil le dessin de ces deux dernières figures, exécuté par Paolo lui-même. Il couvrit ses autres toiles du palais de Médicis, de portraits de cavaliers de son temps.

Dans le cloître de Santa-Maria-Novella, il laissa plusieurs tableaux, parmi lesquels on remarque la Création des animaux, des poissons et des oiseaux. Il exprima parfaitement, dans cette composition, la fermeté des lions, la vélocité et la timidité des cerfs et des daims. La création de l’homme et de la femme, et leur désobéissance, lui fournirent les sujets de deux autres tableaux, où il traita les paysages avec talent. Le premier, il perfectionna cette branche de l’art, qui, de nos jours, est arrivée à une si grande perfection. Il reproduisit soigneusement en perspective les divers objets que lui offrait la nature ; mais il tomba dans une manière sèche et coupante, qu’il aurait évitée s’il ne se fût pas attaché à des détails mesquins et superflus. Dans le même cloître, il représenta l’Arche de Noé flottant sur les eaux soulevées par la tempête. À la lueur des éclairs et de la foudre, on voit les arbres qui se brisent, un corbeau déchiquetant les yeux d’un cadavre, un enfant noyé, dont le corps gonflé d’eau forme un arc livide ; deux cavaliers qui assouvissent leur rage l’un contre l’autre, sans songer à la mort qui les menace ; un homme et une femme montés sur un buffle qui bientôt va s’engloutir dans les flots. Au-dessous de cet ouvrage, qui fut justement admiré, Paolo peignit Noé ivre et tourné en dérision par son fils Cham, sous les traits duquel on reconnaît Dello, peintre et sculpteur florentin. Il représenta aussi le Sacrifice offert à Dieu par Noé et ses enfants, pendant que des chambres de l’arche s’échappent toutes sortes d’oiseaux. Au-dessus de l’autel de Noé, plane le Seigneur. Cette figure, en raccourci, est exécutée avec une vigueur étonnante. Noé est entouré d’une foule d’animaux d’une rare beauté. C’est là, sans contredit, le chef-d’œuvre de Paolo.
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Les premières peintures de Paolo furent un saint Antoine, abbé ; un saint Cosme et un saint Damien, qu’il exécuta à fresque, dans une niche oblongue de l’hôpital de Lelmo. Dans un monastère de femmes, connu aujourd’hui sous le nom d’Annalena, il laissa deux figures. À la Santa-Trinità, il peignit à fresque plusieurs traits de la vie de saint François, au-dessus de la porte que l’on rencontre à gauche en entrant dans l’église. À Santa-Maria-Maggiore, dans la chapelle qui renferme le tableau de Masaccio (2), près de la porte latérale qui conduit à San-Giovanni, il fit à fresque une Annonciation où l’on remarque un édifice qui, dans un petit espace, offre l’illusion d’une grande étendue ; artifice jusqu’alors inconnu aux peintres de l’ancienne école. À San-Miniato, hors de Florence, il représenta, dans un cloître, la Vie des saints Pères. Ces compositions sont loin d’être harmonieusement coloriées ; car il imagina de faire les paysages bleus, les fabriques et les maisons rouges et de diverses couleurs.

On raconte que, pendant qu’il était occupé de ce travail, l’abbé du monastère ne lui donnait à manger que du fromage. Fatigué de cette nourriture, Paolo n’osa se plaindre, mais résolut de ne plus retourner au couvent. L’abbé l’envoya chercher plusieurs fois inutilement ; et si, par hasard, Paolo apercevait des moines dans la ville, il se mettait aussitôt à fuir à toutes jambes. Un jour, il fut poursuivi et atteint par deux jeunes moines qui étaient curieux de savoir pourquoi il les évitait avec tant d’obstination, et refusait d’achever ce qu’il avait commencé. À leurs questions pressantes, Paolo répondit : « Je me sauve de vous, parce que vous m’avez bouleversé le corps, de telle façon que je ne peux plus passer devant les boutiques des menuisiers. Votre abbé m’a bourré de tourtes et de soupes au fromage, avec si peu de discrétion, que j’ai peur que les menuisiers ne fassent de moi une colle au fromage[1]. En vérité, si je continuais, je ne serais plus Paolo, mais fromage ». Les moines le quittèrent en riant, et racontèrent la chose à l’abbé, qui le rappela en lui promettant et en ayant soin de ne plus lui donner de fromage.
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Paolo s’appliqua donc sans relâche aux parties les plus ardues de son art. Il parvint à tirer le plan et le profil des édifices, jusqu’au faîte des corniches et des toits, au moyen de l’intersection des lignes. Il trouva des règles certaines pour indiquer, par la fuite ou la diminution des objets, leur éloignement plus ou moins grand. Enfin, il n’y a sorte de perfectionnement qu’il n’ajouta à cet art, soit pour mettre les personnages de ses tableaux à leur plan, et en raccourci, soit pour représenter des voûtes, des plafonds ou des colonnades. Ces études abstraites le rendaient excentrique et fantasque. Il demeurait des semaines et des mois entiers enfermé dans sa maison, sans se laisser voir à personne. Certes, il aurait excellé dans le dessin, s’il eût donné à cette partie si importante de son art tout le temps qu’il perdit dans des travaux qui le laissèrent pauvre et obscur. Aussi, lorsqu’il montrait des couronnes, des boules à soixante-douze faces et à pointes de diamant, et d’autres semblables bizarreries tirées en perspective, à son ami Donato, le sculpteur, celui-ci s’écriait : « Eh ! Paolo, ta perspective te fait quitter le certain pour l’incertain. À quoi cela te mènera-t-il ? Veux-tu donc faire de la marqueterie ? »
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Paolo Uccello, peintre florentin

Depuis Giotto, on n’aurait vu aucun peintre aussi ingénieux que Paolo Uccello (1), s’il eût consacré aux figures d’hommes et d’animaux les heures qu’il perdit dans ses recherches sur la perspective. Sans doute, cet art est beau et précieux ; mais celui qui en fait une étude trop exclusive gaspille son temps, se fatigue l’esprit, finit par adopter une manière sèche, stérile, mesquine, hérissée de difficultés, et risque de tomber dans l’isolement, l’extravagance, la mélancolie et la pauvreté, comme Paolo Uccello.

Cet artiste, doué d’un génie subtil et capricieux, tourna tous ses efforts vers la perspective, qui lui fit négliger les figures, de telle sorte que dans sa vieillesse il ne cessa d’aller de mal en pis. L’homme qui se livre à un travail excessif violente la nature, et produit des ouvrages dépourvus de cette gracieuse facilité que rencontre naturellement celui qui sait se modérer et éviter certaines minuties qui offrent je ne sais quoi de raide, de forcé et de pénible.
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NOTES.

(1) Voyez le Baldinucci, tome I, page 17 de l’édition florentine, où il est dit que les Cimabui étaient aussi appelés Gualtieri.

(2) Vasari se trompe, en faisant travailler ces peintres grecs dans la chapelle des Gondi, bâtie, avec l’église entière, un siècle plus tard. Il fallait dire, dans une autre chapelle, sous l’église, où l’on plâtra depuis toutes ces peintures grecques, pour leur en substituer d’autres d’un artiste du XIVe siècle.

(3) Ce tableau est également mentionné par le Cinelli, page 317 des Bellezze di Firenze ; mais il ajoute qu’il fut enlevé lorsqu’on restaura l’église, et on ne sait où il se trouve aujourd’hui.

(4) Le tableau de Baldovinetti fut remplacé par une peinture de Pîero Dandini, représentant la Trinité.

(5) Cimabue fit aussi, pour l’église des Vallombrosani de San-Pancrazio, un tableau représentant la Vierge et l’Enfant-Jésus. Ce tableau, entouré de divers sujets, après avoir orné le chœur de l’église, fut transporté dans le monastère.

(6) Toutes ces peintures sont détruites.

(7) Ces sujets de la vie du Christ ont péri.

(8) Ce tableau est décrit par le P. Richa, page 62, tome III.

(9) Le Musée du Louvre possède deux tableaux de Cimabue : la Vierge et des Anges ; la Vierge et l’Enfant Jésus.

Le P. Richa parle de plusieurs tableaux attribués à Cimabue, et dont Vasari ne fait point mention ; il cite, entre autres, un saint François, à Santa-Croce de Florence ; une Madone, sur un autel de San-Pietro-Scheraggio ; le devant de l’autel de Santa-Cecilia ; un Crucifix, dans le monastère des religieuses de S.-Jacopo di Ripoli, etc.
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Simone de Sienne introduisit le portrait de Cimabue dans son tableau de la Foi que possède le chapitre de Santa-Maria-Novella. Le visage est de profil et maigre, la barbe courte, un peu rousse et pointue : le front est couvert d’un chaperon qui enveloppe le cou avec grâce : à côté, Simone se peignit lui-même de profil, à l’aide de deux miroirs. Entre eux, un soldat armé représente, dit-on, le comte Guido Novello, alors seigneur de Poppi.

Il me reste à dire que, dans un livre où j’ai rassemblé des dessins de tous les artistes qui ont existé depuis Cimabue, on voit, de la main de ce maître, plusieurs petites miniatures qui, toutes grossières quelles paraissent aujourd’hui, peuvent montrer combien le dessin s’améliora dans ses mains (9).
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À propos de ces vers, un commentateur du Dante, qui vivait du temps de Giotto, dix ou douze ans après la mort du poète, c’est-à-dire vers l’an 1334, écrivait ces propres paroles : « Cimabue de Florence, contemporain de l’auteur, fut un peintre aussi noble qu’on peut l’imaginer. Il était si fier et si hautain, qu’il n’hésitait jamais à détruire un ouvrage, si précieux qu’il fût, dès qu’on lui faisait apercevoir ou dès qu’il apercevait lui-même un défaut ; et cependant, comme cela arrive aux artistes, il ne fallait accuser que la matière ou l’outil. De tous les peintres de la même ville de Florence, Giotto fut et est encore le plus éminent, comme le prouvent ses ouvrages à Rome, à Naples, à Avignon, à Florence, à Padoue, et en beaucoup d’autres endroits, etc. » Ce commentaire est aujourd’hui entre les mains du révérend Messer don Vincenzio Borghini, prieur degl’Innocenti, homme illustre, non seulement par sa noblesse, sa bonté et son savoir, mais encore par son amour éclairé des beaux, arts ; aussi a-t-il justement mérité d’être choisi pour lieutenant du duc Cosme dans notre Académie du dessin. Mais revenons à Cimabue. Il n’est que trop vrai que sa renommée s’éclipsa devant celle de Giotto, de même qu’une petite lumière pâlit à côté des rayons éclatants d’un grand foyer. Cimabue fut le premier qui restaura l’art de la peinture ; mais Giotto, son élève, aiguillonné par une louable ambition, et favorisé du ciel et de la nature, ouvrit la porte de la vérité à ceux qui ont poussé l’art à cette perfection et à cette hauteur où il se trouve à présent. Notre siècle, accoutumé à voir chaque jour les prodiges et les miracles enfantés par nos artistes, est arrivé au point de rester presque indifférent devant les plus merveilleux chefs-d’œuvre, quoiqu’ils semblent dus à la Divinité elle-même plutôt qu’au génie de l’homme. Heureux encore seraient ceux qui embrassent avec courage cette pénible carrière, si, au lieu d’éloges et d’encouragements, ils ne recueillaient pas le blâme et même souvent la honte !
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Malheureusement pour Cimabue, sa gloire fut obscurcie par celle de son élève Giotto, comme le témoigne le Dante dans le onzième chant de son Purgatoire où, en faisant allusion à l’épitaphe que nous avons citée tout à l’heure, il dit :

Credette Cimabue nella pintura
Tener lo campo, ed ora ha Giotto il grido ;
Si che la fama di colui oscura.
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Ces travaux avaient valu à Cimabue une grande fortune et une immense réputation. Il fut alors adjoint à Arnolfo Lapi, habile architecte, pour construire Santa-Maria-del-Fiore ; mais il mourut l’an 1300, à l’âge de soixante ans, après avoir en quelque sorte ressuscité la peinture. Il laissa plusieurs élèves, et entre autres Giotto, qui fut un peintre du plus haut mérite. Giotto habita, dans la rue del Cocomero, la propre maison de son maître Cimabue, après la mort de celui-ci.

Cimabue fut inhumé dans l’église de Santa-Maria-del-Fiore. Nini composa en son honneur l’épitaphe

suivante :
Credidit ut Cimabos picturæ castra tenere,
Sic tenuit vivens, nunc tenet astra poli.
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De retour à Florence, Cimabue exécuta plusieurs sujets de la vie du Christ, très bien dessinés, dans le cloître de Santo-Spirito (7). À la même époque, il envoya plusieurs de ses ouvrages à Empoli où on les conserve précieusement encore aujourd’hui, dans l’église du château. Il fit ensuite, pour Santa-Maria-Novella, la Madone qui est placée entre la chapelle des Rucellai et celle des Bardi de Vernio (8). Cette figure, la plus grande que l’on eût tentée jusqu’alors, est entourée d’anges qui témoignent que, si notre artiste n’avait pas complètement délaissé la manière grecque, il s’était du moins approché du bon style moderne. Ce tableau excita l’enthousiasme général. Le peuple s’empara de la Madone et la porta en triomphe au bruit des trompettes et des cris de joie, jusqu’à l’église où elle devait être déposée. On raconte et on lit dans les mémoires de quelques vieux peintres, que les magistrats de Florence ne crurent pouvoir faire un plus grand plaisir au roi Charles d’Anjou, qui traversait leur ville, qu’en lui montrant cette Madone à laquelle Cimabue travaillait dans une maison de campagne près de la porte San-Piero. Comme personne ne l’avait encore vue, tous les Florentins, hommes et femmes, accoururent en foule pour la contempler. En souvenir de cette fête, le faubourg prit le nom de Borgo Allegri qu’il a conservé même depuis qu’il est renfermé dans les murs de la ville. Cimabue peignit ensuite en détrempe un petit tableau que l’on trouve dans le cloître de San-Francesco de Pise, non loin de la porte qui conduit à l’église, où il avait déjà laissé plusieurs ouvrages de sa main, comme nous l’avons dit plus haut. Ce tableau représente un Christ entouré d’anges qui portent à la Vierge éplorée une inscription contenant ces paroles : Mulier, ecce filius tuus; une autre inscription, où on lit : Ecce mater tua, s’adresse à saint Jean l’Évangéliste accablé de douleur. Enfin un ange tient ces mots : Ex illa hora accepit eam discipulus in suam. Il faut remarquer que Cimabue ouvrit ainsi la voie à l’invention en appelant les paroles à l’aide de la pensée : méthode aussi bizarre que neuve.
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Tous ces travaux rendirent illustre Cimabue et le firent appeler à Assise, où il peignit, dans l’église souterraine de San-Francesco, une partie des voûtes et sur les parois la vie de Jésus-Christ et celle de saint François, en compagnie de quelques peintres grecs qu’il laissa bien loin derrière lui. Encouragé par ce succès, il entreprit, sans aucun aide, les fresques de l’église supérieure. Sur quatre parois de la grande tribune, au-dessus du chœur, il représenta la Mort de Marie, Jésus-Christ transportant au ciel l’âme de sa mère sur un trône de nuages, et un chœur d’anges assistant au couronnement de la Vierge. Le bas de cette composition était rempli d’une foule de saints et de saintes aujourd’hui détruits par le temps et la poussière. Cimabue divisa ensuite la voûte de l’église en cinq compartiments. Dans le premier, au-dessus du chœur, il peignit les quatre évangélistes plus grands que nature. On reconnaît encore aujourd’hui dans ces figures d’éminentes qualités ; la fraîcheur du coloris montre que, grâce aux efforts de Cimabue, la fresque faisait des progrès remarquables. Le second compartiment est semé d’étoiles d’or sur un fond d’outremer. Le troisième renferme quatre cadres circulaires occupés par Jésus-Christ, la Vierge, saint Jean-Baptiste et saint François. Le quatrième, comme le second, est couvert d’étoiles d’or sur un fond d’outremer. Enfin le cinquième contient les quatre docteurs de l’église accompagnés des quatre premiers ordres religieux. Après avoir terminé cette voûte avec un soin incroyable, Cimabue décora, également à fresque, la partie supérieure des parois de l’église. À gauche de l’autel, il représenta seize sujets de l’Ancien-Testament, et à droite, en face, seize sujets tirés de la vie de la Vierge et du Christ. Sur les parois où se trouve la porte principale, et autour de la rosace, il peignit l’Ascension et la Descente du Saint-Esprit sur les apôtres. Ces fresques, d’une grandeur et d’une richesse extraordinaires, durent sembler des prodiges aux yeux du peuple de ce temps, si l’on songe aux ténèbres qui environnaient alors la peinture. L’an 1563, je les revis, et je restai étonné en pensant à quelle hauteur Cimabue avait su s’élever dans ce siècle d’ignorance. De toutes ces peintures, celles de la voûte, naturellement moins exposées à la poussière, se sont le mieux conservées. Cimabue commença ensuite la décoration de la partie inférieure des parois ; mais, rappelé à Florence par quelques affaires, il abandonna ce travail qui fut achevé, long-temps après, par Giotto, comme nous le dirons en son lieu.
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Giorgio Vasari
Le gardien, qui avait jadis confié à Cimabue les travaux de Santa-Croce, l’appela de nouveau pour exécuter le grand crucifix en bois qui orne l’église encore aujourd’hui. Satisfait de cet ouvrage, le gardien conduisit notre artiste à Pise où il lui fit peindre, dans le couvent de San-Francesco, un saint François qui fut regardé comme un chef-d’œuvre. La tête du saint et les plis des draperies offraient des qualités que jamais l’école grecque n’avait montrées à Pise ni même dans toute l’Italie. Cimabue laissa en outre, dans l’église de San-Francesco, une Madone avec l’Enfant Jésus et une foule d’anges à l’entour. Ce tableau, de grande dimension et sur fond d’or, fut enlevé de la place qu’il occupait d’abord, et transporté à gauche de la porte d’entrée, lorsqu’on construisit l’autel de marbre qui existe à présent. Cimabue fut comblé d’éloges et largement récompensé par les Pisans. Il peignit également dans leur ville, à la demande de l’abbé de San-Paolo-in-Ripa-d’Arno, une sainte Agnès placée au milieu de petits tableaux dont les sujets étaient tirés de sa propre vie. Cet ouvrage se trouve actuellement sur l’autel della Vergine (6).
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GIOVANNI CIMABUE,
PEINTRE FLORENTIN.

La malheureuse Italie avait vu disparaître, au milieu du déluge de calamités qui la bouleversa, tout ce qui pouvait porter le nom d’édifice, et même tous les hommes qui cultivaient les arts, lorsque, l’an 1240, naquit à Florence, de la noble famille des Cimabui (1), Giovanni Cimabue que Dieu destinait à remettre en lumière l’art de la peinture. En grandissant, Cimabue donna des preuves d’intelligence qui engagèrent son père à l’envoyer étudier les lettres à Santa-Maria-Novella, auprès d’un de ses parents qui enseignait la grammaire aux novices du couvent. Mais Cimabue, cédant à un penchant naturel, au lieu d’écouter les leçons, passait tout son temps à dessiner sur ses livres des hommes, des chevaux, des maisons et d’autres fantaisies. La forfortune vint d’ailleurs favoriser sa vocation. Quelques Grecs appelés à Florence par les chefs de la ville qui voulaient y faire revivre la peinture plutôt entièrement perdue qu’écartée de la bonne route, commencèrent, entre autres choses, la chapelle des Gondi, dont les voûtes et les parois sont aujourd’hui presque entièrement dégradées par le temps, comme on peut le voir à Santa-Maria-Novella (2). Entraîné par son amour pour le dessin, Cimabue s’échappait souvent de l’école et restait des journées entières à regarder travailler ces peintres qui ne tardèrent pas à le remarquer. Ils pensèrent que notre jeune élève irait loin si l’on cultivait ses dispositions. Le père de Cimabue partagea cet avis et leur confia son fils dont la joie fut grande alors. Grâce à son application et à ses qualités naturelles, il surpassa bientôt, dans le dessin et le coloris, ses maîtres qui, se souciant peu de sortir de leur ornière, se contentaient de produire des ouvrages dans ce style barbare qui caractérise cette époque, et qui est si différent de la bonne et antique manière grecque. Cimabue, tout en imitant d’abord ces Grecs, perfectionna leur art et franchit les grossières limites de leur école. Peu de temps après, son nom et ses ouvrages faisaient la gloire de sa patrie. Tout le monde admirait le devant de l’autel de Santa-Cecilia, et cette Madone qui ornait et orne encore un pilastre du chœur de Santa-Croce (3). Il peignit ensuite, d’après nature, sur un fond d’or, un saint François qu’il entoura de vingt-quatre petits tableaux renfermant l’histoire de la vie du saint. Après avoir achevé ce travail, il entreprit pour les moines de Vallombrosa, dans l’abbaye de la Santa-Trinità de Florence, un grand tableau où il ne négligea aucun effort pour justifier la haute opinion qu’on avait conçue de lui. Il y représenta sur un fond d’or des anges en adoration devant l’Enfant Jésus soutenu par la Vierge. Ce tableau fut placé par les moines sur le maître-autel de leur église. Plus tard il céda la place à une peinture d’Alesso Baldovinetti (4), et fut relégué dans une petite chapelle de la nef gauche. Cimabue peignit ensuite à fresque l’Annonciation de la Vierge, et Jésus-Christ avec Cléophas et Luc, sur la façade principale de l’hôpital del Porcellana situé au coin de la Via-Nuova qui conduit au bourg d’Ognissanti (5). Dans ces compositions, dont les personnages sont grands comme nature, il s’affranchit du joug de la vieille manière, et traita ses figures et ses draperies avec un peu plus de vivacité, de naturel et de souplesse que les Grecs si raides et si secs, aussi bien dans leurs peintures que dans leurs mosaïques. Cette vieille manière, dure, grossière et plate, était le fruit, non de l’étude, mais d’une routine que les peintres d’alors se transmettaient l’un à l’autre depuis nombre d’années, sans songer jamais à améliorer le dessin, le coloris ou l’invention.
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Francesco Camiliiani , sculpteur et académicien florentin, fut le disciple de Baccio Bandinelli. Après avoir montré son habileté dans maints ouvrages de sculpture, il consacra quinze années de sa vie à construire des fontaines et à les enrichir de ses statues. La fontaine la plus étonnante qu’on lui doive est celle qui est à Florence , dans le jardin du senor Don Luis de Tolède. Elle est décorée de figures d’hommes et d’animaux d’une variété extraordinaire et d’une somptuosité vraiment royale.
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Si de grandes obligations lient les peintres à la nature, qui leur sert continuellement de modèle, et qu'ils s'efforcent de reproduire et d'imiter, en s'inspirant de ses parties les meilleures et les plus belles, à mon avis nous sommes d’autant redevables à Giotto, peintre florentin.
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A l’époque où Vasari écrit son histoire, l’Italie n’est plus ravagée par les guerres de religion, ni troublée par les rivalités politiques. L’école puissante des Ghiberti, des Masaccio, des Léonard, s’est développée et résumée en Raphaël et en Michel-Ange. Jusqu’alors, que de luttes cruelles les artistes n’ont-ils pas eu à soutenir contre l’indifférence du pouvoir, dont l’activité et la force concentratrice ont nécessairement et fatalement tendu dans un autre sens que celui de l’art! Jusqu’alors que de peines, que d’injustices, que de déboires les artistes n’ont-ils pas eu à supporter pour parvenir seulement à achever presque gratuitement la plupart de leurs œuvres !
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Ilarione Ruspoli, jeune citoyen florentin, cultive avec succès la sculpture, sous la direction de Vincenzio. Les statues qu'il a exécutées, à l’occasion des obsèques de Michel-Ange et des noces du duc, témoignent qu’il n’est ni moins savant dessinateur, ni moins bon praticien que ses collègues de l’Académie.
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L’Académie compte encore dans son sein plusieurs jeunes peintres de la ville et de l’état de Florence, qui ont travaillé aux décorations des obsèques de Michel-Ange et des noces de Son Altesse.
Alessandro del Barbiere, jeune Florentin, âgé de vingt-cinq ans, peignit, entre autres choses, à l’occasion des noces , d’après les dessins et sous la direction de Vasari, les toiles de la grande salle où sont représentés les plans de toutes les villes des états du seigneur duc. Le talent qu’Alessandro déploya dans ce travail fit concevoir de lui les plus hautes espérances. Le Vasari fut encore aidé dans ses entreprises par beaucoup d’autres de ses élèves et de ses amis, tels que Donienico Benci; Alessandro Fortori, d’Arezzo ; Stefano Veltroni, son cousin; Orazio Porta, de Monte-Sansovino; et Tommaso del Verocchio.
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