Tout d'abord, force est de constater que le management est rarement considéré dans son acception étymologique. Rares sont les organisations qui corrèlent la qualité relationnelle à l'efficacité opérationnelle, probablement pour des raisons culturelles. Les écoles de management elles-mêmes substituent volontiers les compétences relationnelles à la maîtrise des process. Ensuite -et peut-être est-ce là une spécificité française -, nombreux sont les managers qui accèdent à la fonction sur la foi d'une expertise technique. Or, un bon technicien n'est pas nécessairement un bon meneur d'hommes, car ce sont là des aptitudes bien distinctes.
C'est oublier l'étymologie du mot et, par conséquent, la part d'animalité qui nous constitue et sur laquelle repose à vrai dire l'art du management des hommes. « Manager » nous vient du latin « manu agere», signifiant « conduire par la main ». A la Renaissance, en Europe, le terme devient « Managgiere », vocable largement répandu dans les académies équestres de l'époque et pouvant se traduire par « préparer sa monture au travail », c'est-à-dire « créer les conditions de la coopération ».
Miroir grossissant mais non déformant de nos comportements en situation de relation, le cheval sait provoquer, mieux et plus rapidement que ne le ferait un accompagnement « conventionnel », des prises de conscience susceptibles de nous ouvrir la voie de la transformation.
Ceci est particulièrement vrai dès lors qu'il s'agit de questionner son leadership, qualité attendue de tout manager ou du moins, de toute personne en responsabilité. En effet, avec le cheval, seule la juste et bonne autorité conduit à l'adhésion. Toute entorse aux besoins du cheval en la matière (excès ou déficit) provoque une réaction : le désintéressement ou la fuite. Dans ces deux cas, l'alliance est impossible, mais le cheval nous donne toujours une deuxième chance. Il convient alors de réajuster son comportement pour en voir immédiatement le résultat.
Ramené à la dimension de la connaissance de soi, le cheval permet, dans un laps de temps très court, d'effectuer une cartographie de son mode relationnel et managérial spontané. Une fois mis en évidence les points forts comme les axes de progrès, l'expérience se poursuit par la mise en œuvre des préconisations que la première séquence a dégagées. Chaque séquence d'expérimentation est suivie d'un débriefing « à chaud » au cours duquel la personne procède à une sorte d'auto-évaluation complétée par le «point de vue du cheval » décrypté par l'équicoach.
Rappelons-le, la performance durable et renouvelable exige que chacun des contributeurs mette pleinement ses compétences au service du projet. Le niveau d'engagement de chacun doit alors être optimal et il ne peut l'être que si la confiance préexiste. On retrouve là la notion d'effort, c'est-à-dire de la capacité d'aller au-delà des limites fixées par le contrat de travail. Sans confiance partagée, les compétences ne s'expriment qu'a minima et chacun peut être alors tenté d'estimer que sa (maigre) contribution est bien suffisante.
Le manager ne peut décemment donner le cap que dans la mesure où celui de l'entreprise est clairement annoncé. Ceci relève du bon sens, mais nombreux sont les managers tiraillés entre des injonctions paradoxales rendant difficile la tâche qui est la leur. Les changements de cap imposés par le contexte ou l'actualité ne peuvent être valablement supportés qu'à la condition que la confiance unisse les hommes. Rappelons-nous qu'elle engendre l'agilité, qualité requise pour affronter les changements.
La rencontre organisée avec le cheval constitue un acte de management pris dans son acception étymologique et dans sa dimension "animale", c'est-à-dire exempt des particularités qui sont les nôtres. Le cheval, et c'est là son grand intérêt, représente un interlocuteur qui ne joue pas le jeu habituel des relations interhumaines et nous ramène ainsi aux fondamentaux de la relation "interespèces".