A Charles Spon. 17 septembre 1640. —
Il y a ici un plaisant procès entre les libraires. Le syndic a obtenu un nouvel arrêt, après environ trente autres, par lequel il est défendu à qui que ce soit de vendre ni d'étaler des livres sur le Pont-Neuf. Il l'a fait publier et à fait quitter ce Pont-Neuf à environ cinquante libraires qui y étaient, lesquels sollicitent aujourd'hui pour y rentrer. M. le Chancelier, le premier président, le procureur général et toute la cour sont pour le syndic contre ceux du Pont-Neuf, à qui on a fait entendre que la reine voulait que cela allât ainsi. Maintenant les valets de pied du roi, qui tiraient tous les ans quelque profit de ces libraires, un certain nombre de pistoles pour le droit de leurs boutiques, sollicitent pour leur profit envers la reine, laquelle infailliblement ne cassera point l'arrêt de la cour pour ces gens-là ; et, par provision, de peur que quelqu'un ne se saisît de ces places vides, ils y ont mis une espèce de nouveaux marchands de bas de soie : je pense qu'à la fin les fripiers s'y mettront. En bonne justice il ne devrait y avoir sur le Pont-Neuf aucun libraire, pour les friponneries que ceux, qui y ont été par ci-devant, y ont exercées, vu, qu'ôté quelque défroque de nouvelles bibliothèques qui y venait quelquefois, on y vendait trop de livres imparfaits et dérobés, que les valets, les servantes et les enfants de familles y portaient tous les jours, et de tous côtés, sans aucune punition.