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3.55/5 (sur 58 notes)

Nationalité : Ouzbékistan
Né(e) : 1954
Biographie :

Hamid Ismaïlov est né en Asie centrale en 1954. Il a été expulsé d’Ouzbékistan– devenu un État indépendant en 1991 – en 1994, pour ses « inacceptables tendances démocratiques ». Après avoir vécu en Russie, en France et en Allemagne, il s’est installé à Londres avec sa femme et ses deux enfants. Il dirige à la BBC le service Asie centrale et Caucase. Parlant de nombreuses langues, dont le français, il écrit à la fois dans sa langue natale, l’ouzbek, et en russe. Il est l’auteur de recueils de poèmes et de romans, parmi lesquels Le Chemin de fer est le premier traduit en français. Ce livre, dont il existe une édition russe, et qui a également été traduit en anglais, n’a pas été publié en Ouzbékistan.

Source : http://www.swediteur.com/auteur.php?id=55
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Hamid Ismaïlov au Brooklyn Book Festival (2014)


Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
Pour quelqu'un qui n'a jamais vécu dans la steppe, il est difficile de comprendre comment il est possible de survivre au milieu d'un tel désert. Mais ceux qui y vivent depuis des générations savent que la steppe est riche et changeante. Que le ciel est multicolore. Que l'air tout autour est fluide. Que la végétation est variée. Que les animaux qui la parcourent et la survolent sont innombrables. Une tempête de sable peut surgir sans crier gare. Une tornade jaune peut brusquement se mettre à tournoyer dans le lointain comme une laine de chameau que les femmes tressent pour en faire de la ficelle. Tout le poids incalculable de ce ciel immense et lourd peut soudain se mettre à siffler en balayant la terre encalminée et soumise...
En grandissant, Yerzhan se mit a remarquer les subtils changements de teinte de la route qu'ils prenaient pour se rendre aux leçons de musique de Petko. Et cette route lui était comme de la musique : elle était aussi gracieuse, les sons en étaient aussi varies. Les notes lancées par le vent se balançaient dans les petits buissons de tamaris et de salicornes.
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L’été, on installait les tables de la tchaïkhana sous les immenses peupliers argentés près de la gare. L’année où la guerre éclata, il y avait également cinq supas sur le sol. Il restait de moins en moins de monde à l’ombre des peupliers : les habitants de Guilas étaient partis au front, les blessés et les fuyards n’étaient pas encore arrivés. Il y avait Oumarali l’Usurier, réformé pour avoir pris seize kilos pendant son séjour en prison, avant le conflit, et aussi Tolib le Boucher, qui, à l’époque, comme pour faire baver d’envie Oumarali, était si maigre qu’on lui confiait le dépeçage et la distribution de la viande rationnée : on pouvait être sûr qu’il ne serait pas tenté de s’en mettre plein la panse. Pourtant, Boïkouch la Bigleuse avait bien dit, à l’époque, qu’un homme qui n’avait que la peau sur les os serait incapable de veiller au bien-être des autres. À l’aube, apparaissait sous les peupliers Koutchkar la Tchéka, auquel Oppok la Belle avait un jour crevé un tympan en lui tapant dessus, si bien qu’aujourd’hui, il n’avait qu’une oreille pour faire son travail de mouchard.
Le matin, tous les trois occupaient leur supas, bien séparés, afin que personne ne pût les soupçonner de comploter ; glissant une petite boule d’opium sous leur langue, ils fermaient leurs paupières enflées en attendant soit l’aube, soit des rêves, soit le train de 7 h 12 et le Bureau des informations de Guilas.
Parfois, le doux bruissement des feuilles chauffées par le soleil était interrompu par des remarques d’Oumarali l’Usurier, dont la grosse tête s’appuyait sur un poing de la taille d’un gant de boxe.
« Il paraît que les Allemands sont tout près. Hier, Oktam le Russe a dit qu’on en avait aperçu un à Tchengueldy... »
Quelques minutes passaient, pendant lesquelles on n’entendait à nouveau que le chuintement des feuilles ; puis, Tolib le Boucher prenait la parole. Deux mouches qui venaient de se réveiller rampaient déjà sur son visage exposé au soleil :
« S’ils viennent du côté du Kazakhstan, ils arriveront forcément par le chemin de fer... »
Nouvel instant de silence et, ayant enfin enregistré ces informations de son unique oreille, Koutchkar la Tchéka, ratatiné comme un abricot sec, ajoutait :
«S’ils arrivent de Guilas, ils passeront fatalement par la tchaïkhana... »

Une longue pause s’ensuivait, rompue par le grincement des traverses de bois ou les craquements des gros troncs de peupliers, qui semblaient annoncer un lointain écho : un train approchait... ou étaient-ce les Allemands ?
« Parpi le Serpent est un malin. Il leur servira du pilaf, pas vrai?»
Oumarali l’Usurier s’en léchait la moustache qu’il avait monstrueuse.
Le vent soufflait. Les minutes passaient. Le chétif Tolib ajoutait son grain de sel :
« Et avec de la viande par-dessus le marché ! »
Enfin, Koutchkar la Tchéka tressaillait au sifflement de la locomotive dans le lointain, comme si quelqu’un lui avait crié : « Garde-à-vous ! » Il concluait, impassible : « Il les volera, ce salaud. Il prendra aux Allemands tout leur argent, leur or. Il leur servira à manger, les baratinera et les dépouillera... »
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While the men keep on dying.
And the women keep on crying.
The war goes on and on.
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Un jour, le petit-fils de Tolib le Boucher, Nassim Beaugosse, surnommé - Dieu sait pourquoi ! - Passage à niveau, fut convoqué au bureau de recrutement. Il se tenait devant la commission militaire, perdu dans une file de gars aussi malingres et basanés que lui. C'est alors que le chirurgien Ichankoul Ilitchevitch leur ordonna à tous de baisser leurs caleçons (bleus, en coton)et de se pencher en écartant les jambes, pour la détection des hémorroïdes. Jeanne, à son habitude, se mit à examiner les anus poilus et malpropres, mais arrivée au milieu de la rangée... Elle ne comprit pas tout de suite de quoi il retournait et crut qu'on lui proposait un pot-de-vin.
Tolib avait toujours, à un crochet de sa boucherie, un long morceau de bavette. De même, entre les jambes écartées de son petit-fils pendait, presque jusqu'à terre, quelque chose d'incroyablement long et mou. Jeanne en eut le souffle coupé. Toutefois, son intuition professionnelle lui souffla que ce n'était pas de la bavette...
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"C'est quoi un kut ?" demanda Yerzhan, qui tremblait encore de froid. Il était surpris de la ressemblance entre ce mot et le mot "cul" - kyot.
"C'est le bonheur. C'est quand tu as chaud et assez à manger", répondit Mémé.
Elle repris son histoire.
"Quand tu t'apprêtais à naître, ton kut est tombé de cet arbre dans notre maison par la cheminée. Toutes choses suivent la volonté de Tengri et de notre mère Umai. Le kut est tombé dans le ventre de ta mère et dans la matrice et il a pris la forme d'un petit vermisseau rouge...
- C'est lui que tu grattes sur ton derrière ?"
Mémé gloussa et donna une claque sur la petite joue de Yerzhan avec la même main ridée qui venait de lui gratter le derrière.
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Les voies de la steppe, fussent-elle ferrées, sont longues et monotones, et la seule manière d’écourter un périple, c'est la conversation. La façon dont Yerzhan me narrait sa vie ressemblait à notre itinéraire : on n'y discernait ni virage ni retour en arrière. Son histoire, ponctuée par le craquement régulier des jantes, se poursuivait inlassablement, tout comme les fils électriques aperçus à travers la vitre couraient de poteau en poteau.
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Entre 1949 et 1989, au Polygone nucléaire de Semipalantisk, il fut réalisé un total de 468 explosions nucléaires, dont 125 explosions atmosphériques et 343 explosions souterraines. La puissance totale des appareils nucléaires testés dans l'atmosphère et sous la terre au Polygone (dans une région peuplée) dépassait par un facteur de 2500 la puissance de la bombe lâchée sur Hiroshima par les Américains en 1945.
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Lorsqu'il se mit enfin à jouer du violon, le son qui s'éleva était si pur que Yerzhan comprit instantanément le sens du premier commentaire de Petko: même un aveugle aurait pu voir le ciel bleu, la danse de l'air pur, la lumière éclatante du soleil, les nuages blancs neigeux, les oiseaux ravis.
Ce fut sa première leçon.
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Pour quelqu'un qui n'a jamais vécu dans la steppe, il est difficile de comprendre comment il est possible de survivre au milieu d'un tel désert. Mais ceux qui y vivent depuis des générations savent que la steppe est riche et changeante. Que le ciel au-dessus est multicolore. Que l'air tout autour est fluide. Que la végétation est variée. Que les animaux qui la parcourent et la survolent sont innombrables. Une tempête de sable peut surgir sans crier gare. Une tornade jaune peut brusquement se mettre à tournoyer dans le lointain comme la laine que les femmes tressent pour en faire de la ficelle. Tout le poids incalculable de ce ciel immense et lourd peut soudain se mettre à siffler en balayant la terre encalminée et soumise ...
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Sur le chemin de l'adhésion au Parti, Koun-Okhoun tomba sur Timourkhan, un Tatar bigle qui se reposait dans une clairière près du chemin de fer, après une nuit d'amour avec Mourzina la Mordve.
"Où vas-tu, s'enquit Timourkhan par pur désœuvrement, en fixant le passant d'un œil.
- C'est hors de question ", répondit Koun-Okhoun le Sourd, pensant que le Tatar cherchait, à son habitude, un compagnon pour boire un coup.
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