Marcella Trailer Season 1
La paix de Fredrikshamn en 1809. D’une simple signature, la Suède perdait un tiers de sa surface, un quart de sa population.
Du haut de son expérience, elle constat e que c'est ça qu'il lui faut désormais pour qu'on s’intéresse à elle : des tragédies et des morts violentes.
Hannah ne partagea pas ce qu’elle pensait des influenceurs. Pendant une courte période, au lycée, Alicia avait à tout prix voulu en devenir une. Cela avait duré quelques mois, mais elle avait abandonné le projet en l’absence de followers, de percée et d’argent. Non qu’Hannah ait quelque chose contre eux personnellement, ils étaient jeunes, intelligents et assez entreprenants pour tirer profit de la fascination de l’époque pour le narcissisme superficiel et son besoin de remplir ses écrans d’étrangers qui vous disaient ce qu’il fallait faire, penser, aimer et surtout acheter. Mais le seul fait de leur existence, que ce soit considéré comme un métier pour lequel on pouvait se former était le symptôme qu’ils vivaient dans le meilleur des mondes à la pire des époques.
La plaie refusait de cicatriser, malgré tous ses efforts pour la nettoyer. Le mal et la chaleur étaient remontés dans sa patte. La meute s’était adaptée à son rythme. Un temps. Trois de ses petits avaient suivi les autres mais le plus faible était resté avec elle. Condamné à sa perte. Elle ne pouvait plus chasser, il n’avait pas encore appris. […] Et elle était repartie en boitant avec son petit, jusqu’à ce qu’il ralentisse, se mette à gémir, titube sur le flanc, bientôt incapable de se relever. Elle était restée auprès de lui jusqu’à être certaine qu’il était mort, puis avait continué. Pas longtemps. Les crampes et les tremblements l’en empêchaient. Elle s’était effondrée dans la mousse, était restée étendue sur le flanc. Dans la chaleur. Dans la lumière. La lumière éternelle.
Le petit studio sentait le renfermé, la fumée de cigarette, le mégot, la crasse et la vieille cuite.
Il y eut des époques où non seulement elle se sentait le centre du monde, mais où elle l’était. Une vraie métropole loin au nord. Espions, contrebandiers, révolutionnaires, prostituées, aventuriers et artistes venaient de près et de loin. Grande politique, affaires, destin des hommes : tout cela se discutait, se négociait et s’influençait dans les salons du Stadshotellet.
Elle connaît ses habitants. Elle partage leurs vies, voit et sait. Se souvient et espère. Elle a besoin d’eux tous. Elle est une ville, n’existe que tant que des gens choisissent de vivre en elle. Comme un dieu qui cesse d’exister dès lors que plus personne ne croit en lui.
La question de la faune sauvage, et des loups en particulier, divisait la Suède. D’année en année, le débat se faisait plus dur et plus haineux. Menaces, harcèlement et mises au pilori sur internet étaient monnaie courante dans les deux camps. Avec parfois des actes de vandalisme et des violences. Ce serait pain béni pour les ennemis du loup : un homme réellement tué en Suède, c’était autre chose que des chiens de chasse estropiés ou des rumeurs d’attaques contre des personnes dans les montagnes du Kazakhstan.
Les cheveux noirs, la courte coupe au bol, les sourcils marqués au-dessus des yeux bruns, les pommettes saillantes, le nez droit, les lèvres pulpeuses. Pas de maquillage, comme toujours, sauf si le travail l’exigeait. Elle savait qu’on la trouvait belle, ce qui facilitait les choses, lui permettait d’approcher plus simplement. Les hommes en particulier, mais l’expérience lui avait appris que tout le monde, quel que soit le sexe, était plus ouvert et accueillant vis-à-vis de quelqu’un de beau.
Après une période de tests, d’analyses et de coûteuses séances chez des psychologues, ils avaient eu ce qu’ils voulaient. Non pas un fils reconnaissant ayant pris conscience de son échec et résolu à tout faire désormais pour ne pas haïr la moindre seconde de leur existence de classe moyenne en état de mort cérébrale. Non, ils avaient obtenu mieux. Un diagnostic. Une confirmation de ce qu’ils savaient depuis toujours.
Qu’il était malade.