- Si je comprends bien, vous ne manquez pas de client, vous.
- Les gens s'entêtent à mourir.
David Brandstetter, enquêteur sur décès, de la compagnie d'assurance Medaillon-vie.
- Qu'est-ce que vous faites? demanda Dave.
- La plonge, répondit Taylor d'une petite voix aigre.[...]
- Enfin, ce que je fais, en réalité, je remplis ces grands appareils. Ce sont eux qui lavent la vaisselle. Mais on nous appelle quand même des plongeurs.
J'ai des clients qui comptent s'en sortir, changer de vie depuis des années. Le font jamais. Font jamais rien, feront jamais rien.
Je connais deux genres de personnes dans cette vie : ceux qui font arriver des choses et ceux à qui il arrive des choses.
- Nous voudrions nous renseigner sur la voiture de Mr Owens, dit Yoshiba, l'El Camino qui est garée en ce moment sous l'abri. Qui l'a conduite lundi soir ? Ce n'est pas lui.
- Avec deux jambes cassées? répliqua-t-elle avec un mépris écrasant. Vos pouvoirs de déduction sont remarquables, lieutenant.
- Les orientaux ne sont pas sensibles aux sarcasmes, Mrs Ewing. Nous sommes extrêmement impassibles. Les insultes et le dédain glissent sur nous comme sur le dos d'un canard. Un canard mandarin, bien entendu.
La preuve que le lieutenant Yoshiba existe bien... dans ma critique et qu'il n'arrivera pas à résoudre cette enquête seul ! Et je ne mens pas, Hansen adore les animaux. Pour les ignorants comme moi, El camino est un type de camionnette.
- Personne ne vous a jamais dit que l'homme qui veut être son propre avocat a un imbécile comme client ?
- Vous voyez ça ? Né avec le soleil dans la huitième maison. Devait mourir cette année ou au début de l'année prochaine. Vous êtes dans les assurances. Voici quelque chose que vous auriez intérêt à connaître. Les natifs de la huitième maison meurent dans leur quarante-cinquième année. [...] Ce qui veut dire de mort violente. C'était pareil pour le Président Kennedy. C'est drôle. Tous les deux étaient influencés par Saturne dans la dixième maison. Chute au moment de l'apogée, voilà ce que ça signifie.
- Dommage que vous n'ayez pas pu le prévenir, fit Dave.
- Je n'avais pas ses données de naissance, sinon j'aurais pu.
Il est venu parce que Stanley a insisté :
" Dans cette ville tu n'es rien tant que personne ne te connaît. Si tu veux arriver quelque part, il faut sortir et rencontrer des gens. Les gens du cinéma.
- Mais je ne suis pas dans le cinéma, a dit Nathan.
- Tu es écrivain. Le cinéma est la seule manière de gagner de l'argent avec ta plume. Qu'est-ce que tu comptes faire - mourir de faim toute ta vie ?
- Le livre n'est même pas écrit, a dit Nathan. C'est trop tôt.
- Mais ce n'est pas trop tôt pour ta beauté. Bon sang, ils vont te trouver splendide.
- Excusez-moi, mais je ne comprends pas le rapport avec mon roman ?
- A Hollywood, ce genre de rapport se passe de commentaires.
- Je crois que je ferais mieux d'attendre la sortie du livre.
- Mon cul. Pour eux, avoir un livre dans la tête et le sortir en librairie, c'est la même chose. De toute manière, ils ne savent pas lire. Ce sont des marchand de ferraille et des presseurs de pantalons. Des ignorants.
- Je ferais mieux de ne pas venir, a dit Nathan.
- Mets un costume sombre, a dit Page.
Engourdi, Nathan quitta sa machine à écrire et suivi Hyot dans le salon. Le tableau était là. Achevé. Hyot l'avait travaillé de la même façon que le portrait de Nathan : il l'avait zébré de bandes de noir de fumée, si bien qu'il fallait le regarder fixement pendant une minute avant de distinguer l'image et les couleurs. Mais c'étaient l'image et les couleurs que Nathan avait espérées.
- Il est encore plus beau que mon portrait, dit-il.
- J'ai beaucoup appris en peignant celui-ci, dit Hyot.
Nathan garda le silence. Le tableau le remplissait d'amour pour Hyot. Et de pitié. Le portrait de Hyot, assis sur cette chaise dure et efflanquée, avec ses jambes dures et efflanquées innocemment allongées, un pinceau à la main, un chapeau de cow-boy posé en arrière sur sa tête, son corps efflanqué et dur tendu légèrement en avant et scrutant son modèle, était terriblement vrai dans son application, et terriblement solitaire. Il s'était bien sûr pris lui-même comme modèle, tel qu'il apparaissait dans le trumeau ovale. Mais si les deux tableaux avaient été accrochés l'un à côté de l'autre, le spectateur aurait pu croire que Hyot s'était peint en train de peindre Nathan. Pas solitaire. Un acte d'amour.
Une fois la nuit tombée, Nathan se remet à marcher. Adolescent, il était un marcheur forcené et passait de longues nuits à errer dans Fair Oaks, ne rentrant chez lui qu'à l'aube, en trébuchant, pour s'endormir comme une pierre pendant une heure ou deux avant de partir à l'école. Il n'avait pas de réponse à cela, alors. Il n'en aura sans doute jamais. Peut-être était-il à la recherche de quelque chose.
Les bras chargés de livres, Nathan descend les marches en ciment qui mènent à l'arrière-boutique, entre dans le magasin où il les porte par brassées jusqu'au troisième étage en empruntant de longues volées d'escaliers en bois. Là-haut, aussi loin que porte son regard, des montagnes de livres s'élèvent et attendent - quoi ? Nathan ne le sait pas. Il doute qu'Angus MacKenzie le sache. Il doute que Dieu le sache.