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Critiques de Héléna Hirata (6)
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Quand les femmes se heurtent à la mondialisat..

J’ai commencé ma lecture en me disant que c’était vraiment actuel comme propos, jusqu’à ce que je tombe sur un extrait où il était question de l’Europe des Quinze. Un doute s’est alors emparé de moi et m’a conduit à vérifier la date de parution de cet essai : 2003. Vingt ans plus tard, rien ne me semble avoir réellement changé et c’est assez démoralisant.



Il est question ici des difficultés rencontrées par les femmes dans un monde de plus en plus globalisé et livré au capitalisme.



Le propos est étayé, chiffré et démontre que le libéralisme n’est pas pourvoyeur de l’égalité tant attendue, bien au contraire. On y démonte également l’idée que la répartition du travail et des tâches entre les sexes est antédiluvienne : souvenons nous des haleuses et des femmes africaines qui portent de lourdes charges sur des kilomètres.



Zones franches, écart salarial, plafonnée verre, prostitution, délocalisation, accaparement des terres sont quelques uns des thèmes abordés dans cet essai.



Intéressant mais peu réjouissant.
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Le sexe de la mondialisation : Genre, class..

Les analyses documentées démontent « les mécanismes à l’œuvre et le fonctionnement concret, quotidien, économique et politique, de la mondialisation, que ce soit sous l’angle des mutations de la division sexuelle et internationale du travail, des mobilités internationales féminines, de la mondialisation du care et du ”marché du sexe”, ou bien sous celui des violences, du militarisme et des résistances – notamment féministes – au néolibéralisme. »



Comme le rappelle Bruno Lautier dans l’introduction « La mondialisation ne crée pas mais exacerbe les dimensions spatiales de la division sexuelle du travail ». Il souligne à la fois, la nécessité de prendre en compte dans les analyses le travail domestique non payé et l’apport de l’analyse systémique. En le citant, j’ajoute aussi la nécessité de ne pas oublier les asymétries « Les millions de domestiques, infirmières, prostituées, etc ; qui circulent d’un continent à l’autre pour satisfaire les besoins des ménages de cadres ”sans épouse” ne doivent pas faire oublier les centaines de millions d’ouvrières immobilisées dans les usines chinoises, bengladaises, mexicaines, notamment, dont les bas salaires jouent un rôle important dans la contention des salaires au Nord » ou « Ce ne sont pas seulement les femmes-cadres ”libérées” du travail domestique, mais toute la population -hommes et femmes – des pays du nord qui profitent des formes actuelles de la division du travail à l’échelle mondiale. »



Il ne s’agit pas ici de culpabiliser celles et ceux du Nord mais de mettre en avant, une des problématiques, devant être traitée en tant que telle, pour pouvoir penser l’émancipation au niveau le plus large.



De multiples thèmes sont abordés. Je n’évoque que quelques articles extraits de la première partie de l’ouvrage.



Saskia Sassen « Mondialisation et géographie du travail » traite de « l’émergence de nouveaux circuits globaux de travail » et montre que « Les femmes des pays en voie de développement jouent un rôle croissant dans la création d’une nouvelle économie politique alternative, même si cela n’est pas toujours visible, entre autres parce que la recherche traditionnelle sur le développement néglige les femmes en tant qu’actrices, à part entière. » De ses analyses, il ressort que « une partie des emplois à faible rémunération font précisément partie des secteurs économiques les plus avancés ». L’auteure utilise la catégorie de « ménages professionnels sans épouse » qui me semble apporter un éclairage pertinent à la fois sur la demande croissante de services et sur la polarisation genrée « non seulement des revenus salariaux mais aussi sur la qualité de l’emploi. »



Fatiha Talahite analyse le déploiement entravé du marché mondialisé et la place des marchés régionaux ou nationaux. L’auteure discute de la non prise en compte du travail domestique dans les définitions du produit intérieur brut, de l’augmentation massive du taux de participation des femmes qui « a toutes chances de se traduire par une hausse de leur taux de chômage ». Elle souligne la nécessité de prendre en compte les dimensions historiques des structures sociales et d’y inscrire, sans l’isoler, la dimension de genre.



Lourdes Benéria « Travail rémunéré, non rémunéré et mondialisation de la reproduction » analyse la fourniture de services de garderie et autres services dits sociaux, en soulignant la tendance de « l’ordre libéral à privatiser la survie individuelle », les conséquences en terme de mondialisation du care, de féminisation de la migration internationale, de brouillage des clivages formel/informel, notamment dans la sous-traitance et les externalisations.



Miriam Glucksmann traite des « Plats cuisinés » et des circuits internationaux, du transfert du travail aux consommateurs. Elle montre que « la réduction du temps de travail des femmes relève à la fois de l’indifférenciation des marchandises et du changement dans la division domestique du travail. »



L’ensemble de la seconde partie de l’ouvrage « Mobilités internationales : mondialisation du care et marché du sexe » approfondit les recherches sur des objets plus précis et mériterait une large diffusion, car les analyses font ressortir les conséquences de la profonde réorganisation de la division du travail, en particulier pour les femmes.



La dernière partie traite des « Violences et résistances : militarisme et mouvements féministes transnationaux », loin des visions enchantées déclinées ici ou là.



En conclusion, les auteures soulignent d’une part l’oubli délibéré « que la majorité des ”prolétaires” dans le monde sont des femmes » et d’autre part le « très fort creusement des inégalités de sexe, de classe et de ‘‘race” » ; sans oublier que le renforcement des « rapports de pouvoirs imbriqués » se double sur le plan idéologique d’une « renaturalisation de ces inégalités ». Leurs analyses font ressortir l’apport inestimable « du genre afin de créer un grille d’analyse de la complexité de la réalité sociale mondialisée. »



Je termine cette note par trois courtes citations :



« Le travail de reproduction sociale devient simultanément un enjeu de limitation des dépenses publiques et de réduction des coûts salariaux »

« Ces divergences ne sont pas le résultat d’identités stables ou fermés, mais bel et bien le reflet de positions et d’intérêts de sexe, de ”race” et de classe. »

« Les mécanismes de co-construction de ces rapports et leur poids relatif se modifient, mais ces transformations ne produisent nullement un magma indifférencié, ni une mosaïque de diversité communiant dans une citoyenneté mondiale pacifiée. »

Un bel ouvrage pour ne pas laisser, en silence, un pan majeur de la mondialisation et une invitation à toujours prendre en compte le genre comme clé d’analyse.



Des lectures additionnelles possibles : Jules Falquet : De gré ou de force. Les femmes dans la mondialisation (La Dispute, Paris 2008) ; Cahiers du Gedisst n°21 : Les paradoxes de la mondialisation (L’harmattan, Paris 2001) ; Cahiers du genre N°40 : Travail et mondialisation. Confrontations Nord/Sud ; Travail, genre et sociétés N°22 : Domestiques d’ici et d’ailleurs (La Découverte, Paris 2009)
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Travail et rapports sociaux de sexe : Renco..

En introduction, Xavier Dunezat, Jacqueline Heinen, Helena Hirata et Roland Pfefferkorn soulignent les « points forts d’un itinéraire théorique et empirique » : les caractéristiques et l’évolution des pratiques revendicatives ouvrières, l’idée que la classe ouvrière a deux sexes, la théorisation de la division sexuelle du travail, la dimension contrainte du travail à temps partiel, la prise en compte de la subjectivité, la question du rapport à l’autre et celle de la construction d’un collectif, la coextensivité et la consubstantialité des rapports sociaux de sexe, de classe et de « race » / ethnie, le travail d’édition et présentent succinctement le contenu de l’ouvrage.



J’indique, en premier lieu, la « chaleur » qui se dégage des différents textes, dans ce livre-hommage aux travaux et la personne de Danièle Kergoat. La plupart des intervenant-e-s la nomme d’ailleurs simplement « Danièle »…



Le livre est divisé en sept parties :

Rapports sociaux de sexe

Division sexuelle du travail

Travail et subjectivité

Croiser les disciplines

Par delà les frontières

Mouvements sociaux et résistance

Transmettre

et se termine par un poétique « Il était une fois », en guise d’épilogue.



Je n’aborde que certains points, comme invitation à se réapproprier des éléments incontournables, pour analyser les fondements matériels (incluant les dimensions idéelles) des rapports sociaux…



Rapports sociaux (« rapport signifie contradiction, antagonisme, lutte pour le pouvoir, refus de considérer que les systèmes dominants (capitalisme, patriarcat) sont totalement déterminants et que les pratiques sociales ne font que refléter ces déterminations ») et non simple juxtaposition de relations interpersonnelles, rapport social comme « contradiction vivante, perpétuellement en voie de modification, de re-création », conception non réduite de la notion de travail (« le travail comme production du ‘vivre’ et comme production de soi »), division sexuelle du travail… Et un regard tourné vers l’émancipation « si le social fabrique, il peut aussi défaire, et pas seulement les classes sociales ! » et une invitation à « détecter les germes d’utopie dans les situations présentes ».



Rapports sociaux et refus de les hiérarchiser, « La consubstantialité, c’est l’entrecroisement dynamique complexe de l’ensemble des rapports sociaux, chacun imprimant sa marque sur les autres ; ils se modulent les uns les autres, se construisent de façon réciproque », « La coextensivité quant à elle, renvoie au dynamisme des rapports sociaux puisque ce concept veut rendre compte du fait que les rapports sociaux se coproduisent mutuellement », effets sociaux du féminisme comme mouvement social, pratiques sociales collectives, stratégies de résistance des groupes dominés « saisies dans leur dynamique temporelle et spatiale »…



Les deux sexes de la classe ouvrière ou la dimension sexuée de la classe laborieuse, la dissymétrie des pratiques et des représentations sociales, le rapport à l’autre dans l’acte de travailler, la double face du travail, le travail invisible de soins et du souci des autres, le consentement et le rappel de Geneviève Fraisse que celui-ci « ne peut tenir lieu d’argument politique », les affects à l’oeuvre, « l’activité de travail est production de soi », subjectivité et travail…



Le personnel est politique, le sujet incarné dans une expérience située, la résistance du réel des rapports sociaux de sexe, les compétences invisibilisées des femmes, l’économie érotique des collègues, l’invisible qui fait mal…



Lip, Bulledor, les mouvements sociaux, les infirmières et leur coordination, le « mouvement social sexué »…



Sans oublier la collection legenredumonde à La dispute, dont certains ouvrages sont chroniqués sur ce blog…



Un invitation à lire et relire les travaux de Danièle Kergoat, à parler des rapports sociaux et de leur coextensivité et consubstantialité, à revenir sur le travail et la division sexuelle du travail, à ne jamais négliger les résistances toujours présentes…



« un potentiel émancipateur et des pratiques subversives sont bien plus présentes dans la réalité qu’il n’y paraît… »
Lien : https://entreleslignesentrel..
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Etat / Travail / Famille:

Le genre des politiques de conciliation travail/famille et le maintien des hiérarchies dans les rapports sociaux de sexe



Dans leur introduction, Jacqueline Heinen, Helena Hirata et Roland Pfefferkorn soulignent que la notion de conciliation (articulation entre vie professionnelle et vie familiale) ne s’applique de fait qu’aux femmes. Cette notion est par ailleurs très critiquable, il vaut mieux mettre l’accent sur « sur la contradiction, la tension ou le conflit » car rien ne permet de supposer une harmonie dans les rapports sociaux. Elles et il, iels, abordent des politiques publiques, la prégnance de normes sociales, les configurations institutionnelles diverses et leurs contradictions, leurs effets…



Les textes proposés ont plusieurs objectifs : « Examiner, dans une optique historique, le rôle de l’État et des pouvoirs publics locaux ou régionaux quant à la configuration des rapports sociaux de sexe, dans la sphère du travail comme au sein de la famille – en lien, notamment, avec les facteurs démographiques et les fluctuations du marché de l’emploi. Analyser les diverses formes des modes de garde de la petite enfance et leurs effets contrastés pour les adultes concernés – les femmes, au premier chef – selon qu’il s’agit de services collectifs (crèches, maternelles) ou de dispositifs incitant à une prise en charge individuelle des jeunes enfants (congés parentaux de tous ordres, dégrèvements fiscaux favorisant l’emploi d’assistantes maternelles à domicile, etc.). Donner à voir divers modèles de répartition des tâches dans les activités de care(entre les hommes et les femmes et à l’intérieur du groupe des femmes) en fonction de la place assignée aux pères et aux mères, ainsi qu’en fonction des transformations économiques à l’échelle mondiale, de la polarisation Est-Ouest et Nord-Sud, et même Sud-Sud, ainsi que de l’importance et des caractéristiques des flux migratoires ».



Sommaire :

Dossier

Jacqueline Heinen, Helena Hirata, Roland Pfefferkorn : Politiques publiques et articulation vie professionnelle / vie familiale (Introduction)

Olivier Giraud, Barbara Lucas : Le renouveau des régimes de genre en Allemagne et en Suisse : bonjour ‘néo maternalisme’ ?

Fiona Williams, Constanza Tobío, Anna Gavanas : Migration et garde des enfants à domicile en Europe : questions de citoyenneté

Dorottya Szikra, Dorota Szelewa : Welfare et socialisme : de certains concepts relatifs au genre

Jacqueline Heinen : Les politiques familiales en Europe de l’Est : d’une époque à l’autre

Isabelle Attané, Catherine Scornet : Vers l’émancipation ? Politiques reproductives et condition des femmes en Chine et au Viêt-Nam

Bila Sorj, Adriana Fontes : Les politiques publiques au Brésil et l’articulation entre travail et famille. Une comparaison interrégionale

Hors-champ

Virginie Rozée : La domination masculine et l’image de la madresposa. L’exercice des droits reproductifs et sexuels des femmes boliviennes

Lecture d’une œuvre

Marie Garrau, Alice Le Goff : Différences et solidarités. À propos du parcours philosophique d’Iris Marion Young







Une remarque générale. Contrairement à la précision soulignée dans l’introduction, certain·es auteur·es semblent oublier l’extériorité socialement construite – ou dit autrement, leur auto-dispense – des hommes concernant l’articulation entre travail et « vie familiale » (travaux et soucis de ces travaux). Hors, on ne peut, il me semble, aborder les « gestions » féminines sans en signifier le fondement. Toute politique institutionnelle, ne s’affrontant pas à cette inégalité, ne peut que renforcer la naturalisation de la famille et la division sexuelle des tâches – et pas seulement dans la sphère privée. Les politiques publiques ayant pour objet « la vie professionnelle et la vie familiale » des seules femmes ne sont donc jamais que des politiques d’inégalité des citoyen·nes. Elles ne peuvent que conforter les hiérarchies dans les rapports sociaux de sexe.



Cela ne signifie cependant pas qu’elles n’aient pas d’effets immédiats et à terme, que les marges d’autonomie de femmes ne varient pas, que les contradictions à l’oeuvre ne se déplacent pas ou ne se reformulent pas. Il convient donc d’étudier ces différentes politiques publiques et leurs impacts dans le temps.



« Par-delà les efforts consentis dans tel ou tel pays pour promouvoir l’autonomie économique des femmes, se dégage en effet la persistance – à des degrés variables, il est vrai – de pratiques sexuées en matière de care et de prise en charge des jeunes enfants. Et ces inégalités sont d’autant plus sensibles qu’il s’agit de femmes migrantes ou issues des catégories sociales défavorisées. La dimension comparative des études menées a ceci d’heuristique qu’elle donne un aperçu de l’ampleur des changements indispensables, sur le plan politique comme sur celui des représentations, pour que les politiques familiales s’adressent aux hommes autant qu’aux femmes et pour que la mixité s’impose enfin dans les pratiques ».



D’autres débats seraient nécessaires autour de la baisse radicale du temps de travail salarié, la requalification importante des postes occupés par les femmes (et de leurs rémunérations) – il n’y a pas de tâche que certaines feraient « naturellement » -, un congé naissance/adoption obligatoire et rémunéré pour les parents, des équipements généralisés pour accueillir les enfants en bas âge (au passage, suppression de la notion d’école « maternelle »), des structures collectives où les personnes plus âgées pourraient garder leur autonomie tout en étant accompagnées en fonction de leurs besoins. Est-il besoin de préciser que les emplois du « care » devraient être mixtes et non très majoritairement occupés par des femmes – sauf demandes particulières justifiées par les effets de l’inégalité des rapports sociaux de sexe (non-mixité de protection, accommodements raisonnables, action positive, etc.), que des alternatives devraient être favorisées hors des seules socialisations, actuellement familiales et/ou privées, pour/par celles et ceux qui le souhaiteraient…



Quelques éléments abordés dans les textes.



Modification des « régimes de genre » en Allemagne et en Suisse, les angles morts d’analyse n’intégrant pas le travail domestique, la distribution sexuée des rôles sociaux, la protection de la famille favorisée plutôt que la protection des individu·es, les discours néolibéraux sur l’« activation » des femmes sur le marché du travail, les régimes fiscaux non individualisés, le poids du temps partiel et des emplois « féminins », les structures de garde extra-familiaux, l’égalité de droit et l’égalité de fait, la notion de « libre-choix », « la valorisation des tâches de carese maintient dans la grammaire des rapports de genre marquée par le maternalisme »…



L’interférence entre les politiques de la petite enfance et les politiques migratoires, « Les recherches effectuées sur la chaîne du careen Europe révèlent, outre le caractère éminemment oppressif de ce travail, en quoi les dispositifs juridiques et migratoires fragilisent ces femmes sans statut de citoyenneté, dont le seul débouché est le secteur informel, sous-payé et dévalorisé, du travail domestique », la restructuration internationale de l’économie et du marché du travail, les nouveaux schémas d’inclusion et d’exclusion, la marchandisation des systèmes de garde des enfants, les itinéraires de migration, les déclassements sociaux et les conditions d’emploi, les protections des salarié·es et leur non-application dans les espaces domestiques, « La définition des normes de travail est beaucoup plus floue que dans d’autres secteurs d’emploi », une association de représentation collective des employé·es de maison, les assignations sexuées et les « devoirs de mère », la différence entre « être de la famille ou dans la famille », la dévaluation et l’invisibilité des travaux fait dans la sphère du privé…



Les anciens pays du « socialisme réellement existant », les concepts sexués de « maternalisme » et de « familialisme », l’absence de droits politiques, l’activité professionnelle, les conditions des allocations familiales, les programmes « s’adressant aux femmes en tant que mère », les évolutions du droit à l’avortement, la sacralisation de la famille, le double fardeau imposé aux femmes…



J’ai particulièrement apprécié l’article de Jacqueline Heinen : Les politiques familiales en Europe de l’Est : d’une époque à l’autre. Les similitudes au delà des options économico-politiques, la « rhétorique nationaliste incitant les femmes à conférer la priorité à leur rôle de mères », la soumission de l’individu·e « à l’Etat paternaliste omnipotent », les contradictions entre statut individuel et poids conféré à la famille, les replis sur l’univers familial, le rejet de l’« égalitarisme » et les souvenirs fantasmés de la « sécurité », la réduction des dépenses publiques et l’abaissement du montant global des allocations, les mesures pro-natalistes, la limitation voire l’interdiction du droit à l’avortement, la féminisation de la pauvreté, la montée des violences dans l’espace domestique et l’extension de la prostitution, l’extension de la sphère commerciale lucrative, la marginalisation des femmes sur le plan économique et politique…



Les politiques reproductives et la condition des femmes en Chine et au Vietnam, le contrôle de la croissance de la population, les mesures incitatives et répressives, les effets ambivalents de la libéralisation économique sur le statut des femmes, l’adoption du concept de « droits en matière de sexualité et de reproduction » comme partie intégrante des droits des êtres humains, les discriminations envers les filles, les avortements sélectifs des fœtus féminins, l’instruction comme facteur d’émancipation, les inégalités d’accès à l’emploi…



Le Brésil, le Programme Bourse Famille, « il consiste en des aides monétaires spécifiques attribuées aux groupes les plus démunis de la population ; l’autre étant la politique générale de la petite enfance qui donne aux enfants de moins de six ans accès à des crèches et à des maternelles », l’augmentation de la part des femmes sur la marché du travail, le non partage du travail domestique, la précarisation de l’emploi, l’« altruisme » maternel des femmes et le renforcement des visions maternalistes, les politiques axées sur la lutte contre la pauvreté et les mesures qui ne favorisent pas l’émancipation des participantes…




Lien : https://entreleslignesentrel..
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Etre chômeur à Paris, São Paulo, Tokyo. Une méthode ..

Une ambition théorique et méthodologique remarquable pour un livre qui laisse néanmoins ouvertes un certain nombre de questions, sur le rôle des cultures nationales notamment.
Lien : http://www.laviedesidees.fr/..
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Travail et genre : Regards croisés France-Eur..

« L’ambition n’est pas d’ajouter une variable supplémentaire, le genre, mais d’affiner la constructions de nouvelles approches et problématiques avec la conviction qu’en approfondissant l’analyse des différences de sexe sur le marché du travail, on ne contribue pas seulement à l’accumulation de savoirs sur l’activité féminine et masculine, mais aussi à la progression des connaissances sur le monde du travail. »



L’ouvrage est divisé en trois parties « Marché du travail et genre : comparaisons internationales », « Entre vie professionnelle et vie familiale : pratiques et politiques » et « Genre, professions et carrières ».



J’extraits de ce riche ensemble, quelques articles ou pistes qui m’ont semblé particulièrement pertinents ou novateurs, tout en soulignant que de nombreux articles, par leur démarche même de comparaison entre pays, enrichissent la compréhension des modalités changeantes des articulations entre genres, ou rapports sociaux de sexe, et travail.



Outre la poursuite de l’analyse du sexe du chômage, Margaret Maruani souligne la conjonction d’une mutation essentielle (la forte progression du travail salarié des femmes) et la permanence d’inégalités coriaces. « La féminisation du salariat n’est pas l’égalité des sexes mais la liberté des femmes. »



De la comparaison entre Paris et Sao Paulo, dans une analyse prenant en compte à la fois les rapports sociaux de sexe (le genre), le racisme (la ”race”, bien évidemment non compris au sens biologique, mais comme classification sociologique) et les trajectoires, les auteures font ressortir que « les mécanismes qui construisent la ségrégation doivent être recherchés dans la trame spécifiquement tissée dans chaque métropole par les différences et les hiérarchies symboliques socialement construites.» Elles montrent qu’à Sao Paulo « la variable sexe apparaît comme une sorte de séparateur qui organise les chances d’accès des individus aux divers parcours sur le marché du travail » et que la segmentation ”raciale” « dans le parcours des individus les plus vulnérables au chômage a plus de chance de se manifester à Paris qu’à Sao Paulo. »



Analysant les grandes entreprises en Europe et au Brésil et les politiques d’égalité des chances, Paola Cappellin conclue « L’abandon de la centralité de l’emploi, qui n’est plus le lieu préférentiel où corriger la maturation des asymétries de traitement, conduit les entreprises à mettre l’accent, dans des programmes d’aide à la population, sur les dimensions traditionnelles de la féminité, à la fois maternelle et domestique. Autrement dit, en abandonnant la sphère du travail comme cœur de la formation des rapports asymétriques de genre, on ne fait que récupérer la dimension essentialisée de la féminité, pour développer ce que l’on pourrait appeler le maternalisme des organisations;»



L’étude sur le temps de travail des hommes et des femmes en Europe, prend logiquement en compte, mais cela ne semble pas un acquis pour tou-te-s les sociologues, à la fois les emplois rémunérés et le travail domestique et souligne le sur-travail hebdomadaire des femmes.



L’étude de Bila Sorj et Adriana Fontes « Familles mono parentales féminines, pauvreté et bien être des enfants » précise les différentes utilisations des budgets, la qualité du suivi scolaire et le travail des enfants dans différentes régions du Brésil. L’étude porte sur les familles dont le chef est une femme seule, un homme seul, une femme avec présence du conjoint et un homme avec présence de la conjointe. Il ressort très nettement que les comportements ne sont pas uniquement liés à la pauvreté mais sont aussi structurés par le genre (l’équipement du foyer, en est un exemple frappant). Les résultats des enquêtes contredisent l’assertion qui voudrait que « les enfants de familles pauvres ayant pour chef de famille une femme connaissent une plus grande vulnérabilité que les enfants relevant de configurations familiales conventionnelles. »



L’article le plus stimulant me paraît être celui de Celi Scalon, Clara Araujo et Felicia Picanço « Genre, famille et travail dans une perspective comparative » qui intègre dans la réflexion sur les médiations entre vie familiale, travail domestique et travail rémunéré, les différences entre perceptions, pratiques et niveau de satisfaction des femmes et des hommes.



La conclusion est bien évidemment que les femmes « sont les plus insatisfaites de la façon dont sont conciliés travail rémunéré et vie privée et familiale. »



Cette démarche est aussi présente dans l’étude sur « Travail domestique et organisation des temps de vie dans les ménages » et « Division sexuelle du travail professionnel et domestique ».



Les auteures (Helena Hirata et Danièle Kergoat) de ce dernier article résument ainsi les points forts des nouvelles modalités de la division sexuelle du travail :



l « Réorganisation simultanée du travail dans le champ salarié et dans le champ domestique. Cela renvoie, en ce qui concerne ce dernier, à l’externalisation du travail domestique mais aussi à une nouvelle division du travail domestique,



l Double mouvement : d’une part masquage, d’atténuation des tensions dans les couples bourgeois, et d’autre part d’accentuation des clivages objectifs entre femmes »



Tous les articles non cités n’en sont pas moins à étudier. Division sexuelle du travail, exploitation et oppression/domination des femmes, ”l’égalité est aussi genrée”.



Je termine cette note de lecture en reproduisant la conclusion de l’article « La pluralité des modèles de féminisation des professions supérieures en France et en Grande -Bretagne » de Nicky Le Feuvre : « Dès lors que les femmes se trouvent en position d’accéder à tous les secteurs de ces groupes professionnels, la pression pour la transformation des fondements matériels et symboliques du système sexe/genre devient forte…. C’est pour cette raison que l’avancée en mixité des anciens bastions masculins constitue bel et bien un enjeu social et politique fondamental, sans pour autant pouvoir représenter, à elle seule, une solution à envisager de manière univoque dans la lutte contre les inégalités de sexe dans les sociétés contemporaines. »



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