« Une anthologie de femmes-poètes ! - Eh oui, pourquoi pas ?
[
]
On a dit du XIXe siècle que ce fut le siècle de la vapeur. le XXe siècle sera le siècle de la femme. - Dans les sciences, dans les arts, dans les affaires et jusque dans la politique, la femme jouera un rôle de plus en plus important. Mais c'est dans les lettres surtout, - et particulièrement dans la poésie, - qu'elle est appelée à tenir une place considérable. En nos temps d'émancipation féminine, alors que, pour conquérir sa liberté, la femme accepte résolument de travailler, - quel travail saurait mieux lui convenir que le travail littéraire ?! [
] Poète par essence, elle s'exprimera aussi facilement en vers qu'en prose. Plus facilement même, car elle n'aura point à se préoccuper d'inventer des intrigues, de se créer un genre, de se faire le champion d'une idée quelconque ; - non, il lui suffira d'aimer, de souffrir, de vivre. Sa sensibilité, voilà le meilleur de son imagination. Elle chantera ses joies et ses peines, elle écoutera battre son coeur, et tout ce qu'elle sentira, elle saura le dire avec facilité qui est bien une des caractéristiques du talent féminin.
[
]
Et puis, au moment où la femme va devenir, dans les lettres comme dans la vie sociale, la rivale de l'homme, ne convient-il pas de dresser le bilan, d'inventorier - si l'on peut dire, - son trésor poétique. Les temps sont arrivés où chacun va réclamer le bénéfice de son apport personnel. [
] » (Alphonse Séché [1876-1964])
« Il n'y a pas de poésie féminine. Il y a la poésie. Certains et certaines y excellent, d'autres non. On ne peut donc parler d'un avenir spécial de telle poésie, masculine ou féminine. La poésie a toujours tout l'avenir. Il naîtra toujours de grands poètes, hommes ou femmes [
]. Où ? Quand ? Cela gît sur les genoux des dieux, et nul ne peut prophétiser là-dessus.
[
]. » (Fernand Gregh [1873-1960])
0:00 - Jeanne Perdriel-Vaissière
1:17 - Marguerite Burnat-Provins
1:54 - Hélène Picard
4:05 - Jean Dominique
5:16 - Lucie Delarue-Mardrus
6:11 - Anna de Noailles
8:25 - Renée Vivien
9:41 - Générique
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Référence bibliographique :
Alphonse Séché, Les muses françaises : anthologie des femmes-poètes (1200 à 1891), Paris, Louis-Michaud, 1908.
Images d'illustration :
Alphonse Séché, Les muses françaises : anthologie des femmes-poètes (1200 à 1891), Paris, Louis-Michaud, 1908.
Marguerite Burnat-Provins : https://christianberst.com/en/artists/marguerite-burnat-provins
Bande sonore originale : Arthur Vyncke - Uncertainty
Uncertainty by Arthur Vyncke is licensed under a CC BY-SA 3.0 Attribution-ShareAlike 3.0 license.
Site :
https://www.free-stock-music.com/arthur-vyncke-uncertainty.html
#PoétessesFrançaises #PoèmesDeFemmes #LittératureFrançaise
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CHANSON
Le léger do ré mi fa sol
De la pluie à mon coeur de verre,
Le phonographe, rossignol
Des pauvres jungles de barrière,
L'hivernal accompagnement
Au triste accordéon du bouge,
Le pizzicato nonchalant,
A ton gilet, de l'oeillet rouge,
Cette valse où tu convias,
Avec ta guitare en détresse,
La lune et, fleuri de lilas,
Le dernier soir de ta jeunesse,
Le clairon des sombres bagnards,
La cymbale de l'affreux nègre,
Et le sifflet des boulevards
Qui fait passer de longs brouillards
Sur les absinthes de la Pègre,
L'orgue, le fifre, le tambour,
Le grand rire de l'as de pique,
Et le violon angélique,
Mais faux, si faux de nos amours...
Tu m'as donné tant de musique!
(Pour un mauvais garçon)
La bonne joie
Souvent, je m'attendris, vraiment, jusqu'à pleurer
En m'imaginant nue et dans sa stricte vie,
Votre chair jeune et douce et j'éprouve l'envie,
Les sens calmes et purs, d'aller la respirer.
C'est puissant, c'est divin, c'est neuf... Je m'extasie...
Quoi ! vous avez un cœur dans votre cher côté,
Un cœur de tiède sang, de force et de santé,
Un cœur qui bat, profond, à la place choisie ?
J'adore votre forme exacte et son contour,
L'éclat matériel de votre belle lèvre,
Votre vigueur qui monte et vous fait de la fièvre
Et précipite en vous le besoin de l'amour.
Combien c'est net et bon, combien cela m'enchante !...
Je pense à votre faim, à votre beau sommeil,
Je me dis : « il est plein de sève et de soleil,
Et la joie est sur lui comme l'eau sur la plante. »
Vous avez mon amour, la poignante douceur
De l'animal qui boit, qui marche et qui désire
Et même, sans vos pleurs, vos rêves, votre rire,
Vous avez, par le sang, une haute splendeur.
Je vous loue, éblouie et grave, car vous Êtes...
J'écoute votre pas, j'entends votre soupir...
« Ah ! comme il est vivant ! » me dis-je... « Il doit mourir... »
Mon adoration fond en larmes secrètes...
Et c'est un plaisir sain, vrai, robuste, émouvant,
Je n'y mets pas d'ardeur cache et sensuelle,
Et je ris tendrement lorsque je me rappelle
Vos cheveux, une fois, emmêlés par le vent...
p.161-162
Le jardin est, ce soir, si mystique, si beau...
Le feuillage est penché sous le souffle de l'eau,
Le puits est débordant d'astres et de mystère,
La neige des sureaux ensevelit la terre ,
Et pâle, et lumineux, et farouche, et blessé,
L'amour est là, présent... Et l'on entend glisser
Les ombres des bouleaux au long de l'onde pure...
Et je suis jeune fille et la forêt murmure...
(" L'instant éternel")
Mes larmes
Oh ! ces larmes que tu me coûtes,
Que Dieu les prenne dans sa main,
Qu’il les compte, les pèse toutes,
Qu’il les jette sur ton chemin.
Chacune deviendra la sève
De ton avenir enchanté,
La plus claire sera ton rêve,
La plus lourde ta volupté.
Oui, que ta route en soit suivie
En des bienfaits toujours constants,
Qu’elles s’écoulent sur ta vie
Comme une averse de printemps.
Prends, oh ! prends mes larmes fidèles
Qui trempent mes doigts anxieux,
Et que les plus poignantes d’elles
Soient de la douceur pour tes yeux.
Que leur cristal soit ton ivresse,
Leur amertume ta bonté,
Et que leur sel soit ta sagesse
Et leur poids ta félicité.
Qu’elles fassent fleurir ta gloire...
Ô Dieu, ces larmes de ferveur,
S’il a soif, faites-les-lui boire,
S’il souffre, mouillez-en son cœur.
Qu’elles soient l’eau de son étoile,
Le suc de ses nobles douleurs,
Et de sa pitié le long voile...
Que ses fautes, que ses erreurs
Soient, par leur baume, rachetées...
Qu’à son âme, ces larmes d’or,
En vertus elles soient comptées
Au soir si triste de sa mort !
Je veux plus encor en répandre,
En des sanglots plus douloureux,
Ô Dieu, si tu me fais comprendre
Qu’il peut en être plus heureux !...
p.83-84
LE JARDIN
Notre âme, autour de nous, en rayons se prolonge,
Nos rêves sont épars sous nos flottants cheveux,
La contemplation ouvre ses grands yeux bleus,
Tout le jardin remue au long souffle du songe.
On voit l'amour, les pleurs, les lis se mélangeant,
Les astres, sur les cieux, sont beaux comme des lyres»
Au visage du soir les lacs sont des sourires,
Le silence s'avance avec ses pieds d'argent.
La nuit vient nous blesser au cœur, l'une après l'une,
D'une flèche d'azur et d'étoiles... Sur l'eau
Une neige d'odeurs tombe du vieux sureau.
Le temps passe, léger, voilé de clair de lune...
Sous l'ombre qui se creuse en un dais plus profond,
Regardez le jardin célébrant son mystère.
Les parfums des forêts s'abattent sur la terre.
Le phalène, en volant, fait un bruit qui sent bon.
SOIR DE PLUIE
C’était un soir de pluie et de vague brouillard.
Un soir de romanesque et douce nostalgie.
Tendre et lasse, j’avais, pour contempler la vie,
Toute l’humidité du soir dans le regard.
Il flottait, remplaçant, sous le ciel, l’heure enfuie,
Ce chagrin véhément et si gonflé d’amour
Qui rentre dans les cœurs lorsque tombe le jour,
Et quand l’air est trempé par l’odeur de la pluie.
Or, mon corps se faisait plus immatériel,
Le silence mourait avec ma chevelure,
Et, dans moi, fléchissait mon âme amère et pure
Comme une feuille d’arbre où pèse l’eau du ciel.
Et voici que, soudain, d’une fenêtre ouverte,
D’un violon coula toute l’âme du Rhin,
Et cet air allemand unit son lent chagrin
Avec les bois mouillés et l’atmosphère verte.
L’averse tombait, large, avec un peu de soir,
L’esprit du violon s’épandait dans son onde.
Bientôt, leur harmonie exista si profonde
Que je les confondis, désormais, sans savoir
Si l’instrument pleurait l’averse magnifique,
S’il jetait de l’eau claire à travers les chemins,
Ou si c’était la pluie étrange et pathétique
Qui, pleine de soupirs et de sanglots humains,
Dans l’air triste et léger versait de la musique..,
Le Trouble
Ah ! laissez-moi bercer mon ineffable rêve,
Je sens d'un autre lin se vêtir ma beauté,
Et la lune est ainsi qu'une averse d'été,
Et la colombe au bord de son nid se soulève...
Il semble que je vis dans un biblique jour,
Mes cheveux sont pareils aux vapeurs du cinname,
C'est l'âme de Sion qui chante dans mon âme,
J'ai brûlé des parfums et respiré l'amour.
J'ai crié vers les bois pour réveiller les roses
Et pour en obtenir le cœur du bien-aimé...
J'ai compris en passant dans le vent enflammé,
Que le désir est mûr sur mes lèvres écloses.
Mon rire était ainsi que du cristal brisé,
J'ai supplié la vie en pleurant sur la terre,
Aux arbres, aux ruisseaux, à l'ombre solitaire,
J'ai demandé tout bas le secret du baiser...
Le printemps regardait se balancer les cloches,
Toute l'odeur de Pâque était sur les chemins,
Les muguets ont loué la blancheur de mes mains,
Et j'ai su que les temps de mes noces sont proches.
Je veux seule, ce soir, sangloter dans l'air doux.
Oh ! c'est trop de bonheur, trop d'ardeur, trop d'alarmes,
Mes yeux sont étonnés de leurs nouvelles larmes,
Vous ne pouvez savoir encor...
Éloignez-vous...
p.14-15
AU POÈTE
Poésie, c’est délivrance.
Venge-toi, poète, en faisant un livre.
Pense que tel roi ou que tel berger,
Comme toi, souffrant du vieux mal de vivre,
Ne peut s’en venger.
Oui, laisse tomber tes indignes armes,
Chasse le courroux qui te dévora,
Et crois, si ton livre est né de tes larmes,
Que Dieu le lira.
Il est temps d’avoir un peu d'égoïsme,
O toi qui marchas sur ton coeur battant !
Ramasse les fruits de ton héroïsme :
Le pressoir attend.
On t’a fait du mal, âme souveraine,
On a saccagé tout t
A chacun sa loi. la tienne :
Donne-nous des vers.
Si tu peux jurer à toutes les âmes
Que ce que tu dis n’est que vérité,
Et que ce qui fut eut pour belles trames
La sincérité,
Que rien ne te trouble et ne te surmonte,
Marche vers ton but, l’idéal aux yeux...
Le poète n’a qu’un devoir qui compte :
Son verbe et ses Dieux.
Crois que tu payas le droit de parole
Avec ton silence, avec ta douleur,
Et que le poète a pour parabole
Ses Dieux et son coeur.
Magnifiquement, sans scrupules, puise
Dans le détail, l’heure et les vieux fardeaux,
Et fais de ton âme et de la franchise
Tes matériaux.
Dis ce qui t’advint. Dieu fera le reste.
Dis-toi que ton bien se trouve où tu mis
Ta pitié, ta foi, ton rêve, ton geste
Et l’air du pays...
Un fantôme hésite au fond de ton âme,
Avant qu’il soupire un suprême adieu,
Sur son coeur, son front, mets ta main de flamme,
Et dépouille-le !
S’il te fit sourire, effleura ta tête,
Redemande-lui ce charmant émoi.
S’il te fit pleurer, ô pauvre poète.
Ses yeux sont à toi !
Tout ce qu’il a fait autour de ta vie,
T’appartient de droit, devient ton trésor.
S’il fut vrai, qu’importe ! Une âme trahie
Est plus riche encore !
Beaucoup de candeur, de force éternelle...
O poète, suis ton penchant parfait,
Et dis-toi que si ta parole est telle
C’est qu’il le fallait...
Au spectre enchanté que tu ressuscites,
Crie, en lui montrant ton divin profit :
« Tu m’as fait souffrir... Mais nous sommes quittes
Puisque je l’ai dit !
« Quelque soit son vol, ton âme fut bonne
Car son aile émut mes pauvres instants,
Et je t'ai maudit, et je te pardonne...
Les Dieux sont contents ».
Venge-toi, poète, en toute harmonie.
Marche, parle, vis dans ta vérité.
On se venge, enfant, pour l’éternité
Avec du génie !
Hymne au Bien-Aimé
O jeune corps de joie où la splendeur circule,
Je te glorifierai dans la vague du blé,
Dans les grands horizons, lorsque le crépuscule
Ouvre une route bleue au silence étoilé.
O jeune fleur de vie, ô chair pure et sacrée,
O corps du bien-aimé, je te louerai le jour,
Lorsque la terre boit la lumière dorée,
Quand le soleil est beau comme un rire d'amour.
Je te retrouverai dans les vignes ardentes,
Dans la mûre si lourde aux doigts de la chaleur,
Dans le parfum du foin et des roses brûlantes,
Et dans le tiède sol et dans les fruits en fleur.
Je te désirerai dans les plantes de l'ombre,
Je te savourerai dans le pain du matin,
Je boirai ta douceur au cœur de la nuit sombre,
Et, dans le fleuve beau, je verrai ton destin.
Je baiserai le chêne ou tes dieux te saluent,
L'herbe de la vallée où tu dors en riant,
Le lin, l'outil, le blé que tes mains distribuent,
Belle, je chanterai pour toi vers l'Orient.
Je te respirerai dans les vents de l'automne,
Dans les vents où tournoient les fous insectes d'or,
Ivres, dans le verger qui s'effeuille et rayonne,
D'avoir goûté les fruits et pressenti la mort.
O bien-aimé, fraîcheur, parfum de la colline
O clarté de mes yeux, ô rythme de mon cœur,
Je mouillerai ta chair d'une larme divine
Et je m'effeuillerai sur toi comme une fleur.
Je t'apprendrai les mots dont s'alimente l'onde,
Dont s'avive l'azur, dont se dore l'été;
Pour toi, je lèverai mes deux bras sur le monde,
Et mes gestes, pour toi, feront de la beauté.
La source des forêts dira notre jeunesse,
Et ma lèvre, sans fin, dans la tienne mourra ;
La lune règnera, haute, sur notre ivresse,
Et l'urne de ma vie à tes pieds coulera...
p.165-166
L'Ardèche
Le paysage est tout de pierre et de lumière...
C'est le bloc de granit sous le flot de l'azur...
Un olivier finit l'horizon sec et pur,
Un lis rouge suinte aux creux d'une carrière...
Au roc inexorable et debout comme un mur
Ou de cigales d'or vibre la ronce entière,
L'Ardèchois, tous les jours, montera la rivière,
Ses deux cruches au dos, d'un pas pénible et sûr.
Roc maudit, il te fait un été plein d'abeilles,
Et ton vieux cœur s'épand parmi les jeunes treilles,
La promesse du pain dort dans ton blé vermeil...
Oh ! la moisson, là-haut, par les monts près des nues
L'homme met sur le ciel ses faucilles si nues
Ou tu flambes et ris, cruauté du soleil !...