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Citations de Henri Atlan (28)


Les questions posées par la littérature genre sont : l’AMP pour quelles femmes ? Pourquoi la femme s’est-elle transformée en système d’approvisionnement utérin au service de l’embryon et de la recherche scientifique ? Pourquoi a-t-on réduit l’expérience subjective et phénoménologique de la grossesse à une technique plus ou moins performante de production de la vie en ressortant de la naphtaline le vocabulaire le plus classique du vitalisme ? Comment l’expertise médicale et politique sur la procréation devient-elle une extension légitimée de la décision familiale et privée sur la création comme fabrication de qualité ?

Le débat est d’autant plus complexe qu’il remet en jeu les dichotomies entre vitalisme et matérialisme, public et privé, droits corporatistes des mères et droit des femmes sur leur corps, etc., qui soulèvent d’énormes enjeux de pouvoir. Les craintes du public liées à l’AMP, et aux technologies reproductrices en général, sont les craintes de l’instrumentalisation ou de la commodification , l’incertitude liée à la sexuation, à la production ou à la fabrication d’enfants.
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Derrière l’argument moral de la protection de la vulnérabilité du foetus, puis de la vulnérabilisation du concept d’humanité, que se cache-t-il ? Devons-nous construire une position a-morale qui mettrait fin aux conflits de convictions dans une démarche purement procédurale de protections des autonomies ? N’y aurait-il qu’un conflit entre libertés, qui pourrait se résoudre en termes de compromis sur le second ou le troisième choix des conflits d’intérêts entre protagonistes ? Au-delà de cette confusion entre sacré et qualité de la vie, des éléments sociologiques, des modes d’existence entrent en jeu.

Nous avons vu que la procréation désexualisée a fait vaciller l’ordre juridique et politique puisque l’enfant n’est plus obligatoirement conçu ou porté dans le ventre de sa mère et que les parents biologiques peuvent être plus que deux. Ici l’ambiguïté majeure du discours se nourrit de l’assimilation entre les représentations de l’engendrement et de la filiation.
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Recevoir une dignité impliquait de s’inscrire dans l’ordre naturel de la reproduction. C’était le lot pour la plupart des femmes jusqu’à la maîtrise de la procréation, dès les années 1970. Les mouvements de libération des femmes ont contribué à inscrire cette dignité dans leur capacité d’autodétermination et d’appropriation de leur corps, en dehors du schème patriarcal qui leur avait octroyé une dignité déterminée par la marâtre Nature. Cette évolution du concept de dignité des femmes, en rapport avec les techniques reproductives et le progrès moral des femmes, est liée à la lutte des femmes pour la reconnaissance de leur individualité morale, comme indépendante de leur statut reproductif.

Mais ce discours de libération a été suivi, dès l’émergence des techniques de PMA, d’un discours du risque, celui de l’infertilité, qui a agi comme une limitation à cette liberté de la reproduction ou de la non-reproduction, dans une société qui restait globalement patriarcale. Comme la reproduction devenait assistée, la notion de liberté et de droits reproductifs était affaiblie, ce qui fut vécu par certaines femmes comme le prix à payer de leur libération sexuelle.
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A la très vieille question de savoir si l'homme est bon ou mauvais par nature, depuis un quart de siècle, les biologistes apportent la réponse profondément pessimiste que nous n'aurions aucun sens moral naturel.
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« Il ne se passe pas de semaine qu'on n'identifie de nouveaux gènes donnés pour responsables de l'apparition de caractères normaux ou pathologiques. Il y aurait évidemment beaucoup à dire sur le manque de rigueur qui entache trop souvent la manière dont cette identification est établie, en général à partir de corrélations statistiques approximatives, sans qu'aucune relation causale soit démontrée. »
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la notion même d'humanité, qui distinguerait l'humain du non-humain, semble être devenue plus problématique qu'elle ne l'était autrefois
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« Ainsi, l'état d'activité des gènes (les données) est modifié par l'état du réseau biochimique (le fonctionnement du programme), mais en retour, tout se passe comme si cet état modifié des ADN allait ensuite jouer le rôle d'un programme en modifiant à son tour la structure du réseau biochimique... C'est la raison pour laquelle le modèle qui semble le plus proche de la réalité ne repose pas sur l'une de ces deux métaphores, mais sur une espèce de balancement de l'une à l'autre, à des échelles de temps différentes, constituant ce qu'avec Katchalsky nous avons appelé un 'réseau évolutif', c'est-à-dire un réseau dont la structure change au fur et à mesure de son fonctionnement. »
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Sous les formes les plus diverses, la dialogique entre l'ordre, le désordre et l'organisation, via d'innombrables inter-rétroactions, est constamment en action dans les mondes physique ,biologique et humain.
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De plus en plus, la recherche de cause se révèle inadéquate et tend à être remplacée par une recherche des lois. La physique mathématique a fait éclater la notion de cause. Aujourd'hui les phénomènes physiques décrits à l'aide de lois mathématiques, c'est-à-dire d'équations qui permettent à partir d'un état donné d'un corps de prédire ce que vont être les états suivants. La notion classique de cause a disparu dans la façon de décrire ce phénomène. Pour Wittgenstein, la croyance en la réalité d'une relation de cause à effet éprouvée dans le temps n'était que superstition. En physique, cette évolution est difficilement contestable parce qu'elle est formalisée, mathématisée. En ce qui concerne les autres sciences, la biologie, les sciences humaines, la médecine, il est difficile de pousser la dénonciation jusqu'à ce point, et l'on recherche encore des causes. Il serait alors prudent d'appliquer la distinction spinoziste entre cause adéquate et causes inadéquates, entre cause partielle et cause totale. En biologie et en médecine, il y a malheureusement encore beaucoup de confusion dont les effets sont très dommageables, parfois catastrophiques.

L'exemple le plus tristement connu nous ramène dans les années cinquante : on avait remarqué que des femmes qui faisaient des avortements spontanés récurrents présentaient un taux d'oestrogènes urinaires plus bas que la normale. Sur la base de cette corrélation statistique faible, on a déduit que l'avortement était causé par ce déficit et l'on a prescrit à ces femmes un médicament, un œstrogène de synthèse, le distilboene. La mode était aux hormones. Vingt ans plus tard, beaucoup de filles nées de ces grossesses ont développé des cancers gravissimes du vagin ou de l'ovaire. Scandale : une étude statistique n'avait montré qu'une corrélation. L'autre étude aurait consisté à rechercher chez les femmes qui avaient un taux d'oestrogènes plus bas que la normale le pourcentage de celles qui avortaient. Mais cette seconde étude, plus lourde, n'avait pas été faite. Plus tard, elle a montré que la corrélation était le fait d'une causalité en direction opposée : les avortements à répétition sont la cause de la baisse du taux d'oestrogènes. Une relation de causalité avait été déduite sans raison. Deux erreurs se sont ajoutées : une première confusion entre corrélation statistique et causalité ; puis une confusion entre cause partielle et cause totale. Il y a bien une forme de superstition dans cette recherche des causes à tout prix et cette incapacité à accepter qu'un évènement puisse exister sans qu'on en connaisse la cause.
(pages 37 à 39)
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« Comme le souligne Lewontin, ces molécules [ARN et ADN], toutes seules, sont incapables de rien faire, pas même de se répliquer. L'activité demande la présence de molécules actives, qui sont au minimum des protéines et des ARN couplés au ADN. »
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Henri Atlan
Il en résulte un état de crise où toujours plus de science semble vouloir dire toujours moins d’humanité
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Celui qui a accompli la longue et difficile ascension vers la sagesse qui le rend capable de fabriquer un Golem, sait qu'il doit s'abstenir de le faire
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nous faisons tous des modèles depuis longtemps, comme Mr Jourdain faisait de la prose : sans le savoir
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Les controverses sur l’intelligence artificielle (IA) illustrent bien cette problématique

un dualisme du corps et de la pensée, en ce que des capacités intellectuelles comme celle de comprendre seraient indépendantes de la nature de leur support matériel
une IA faible ne fait que « simuler » la compréhension et ne comprend pas plus qu’un programme simulant un vol d’oiseau ne vole ou qu’un programme simulant la digestion ne digère
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Qui se laisse comme “prendre par la main” sur le chemin indiqué ne peut donc pas négliger la compréhension claire et distincte de ce que nous apporte l’accumulation de connaissance de phénomènes mentaux avec leurs corrélats corporels
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« C’est l’état de la pièce de monnaie dans ses deux côtés vus comme la même chose sous deux aspects différents, qui se trouve modifié. Et l’état d’un côté n’est pas la cause de l’état de l’autre. La cause de l’un comme de l’autre se trouve dans l’action exercée de l’extérieur par le poinçon sur la pièce dans son ensemble
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Le Corps ne peut déterminer l’Esprit à penser, ni l’Esprit déterminer le Corps au mouvement, ni au repos, ni à quelque chose d’autre ». Pour preuve « le corps peut se mouvoir sans esprit, ainsi que le montre l’exemple des somnambules […] L’expérience n’a appris à personne jusqu’à présent ce que le Corps peut faire par les seules lois de la nature
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Les régimes de croyance différents peuvent coexister sans se confondre, permettant de progresser dans ces chemins du milieu sur la voie d’une bonne gestion de nos croyances »
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Il faut utiliser les croyances comme des outils pour se transformer les unes les autres en connaissances, et non comme prêt-à-porter de réponses toutes faites
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La question n’est pas de croire en un contenu de connaissance scientifique, mais de délibérer sur le domaine de ses applications pertinentes, pour savoir comment s’y référer et comment l’intégrer à l’orientation de notre pensée et de notre existence.
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