Hervé Hamon publie "
Dictionnaire amoureux des îles" chez Plon.
Votre mer est un milieu hostile, meurtrier, menaçant, attirant peut-être parce qu'il est tout cela. Loin de l'image un peu aseptisée des agences de voyages, ce livre nous donne envie de larguer les amarres, de voir ces îles de près et parfois on veut même s'y installer y compris dans les plus inhospitalières.
Les îles sont synonymes de mystère et d'exotisme, mais aussi d'exil, de migrants, de conquête, de trésors, de pirates, de négriers, de déportés, de prisons et de liberté. Elles nous parlent d'écologie de mondialisation, de solitude mais aussi de joie.
"Les îles éveillent en nous un imaginaire, mais je parle aussi des tragédies qu'elles ont vécu ou qu'elles sont en train de vivre comme à Lampedus ou Lesbos. Il y a les changements climatiques qui les menaces également."
Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous : https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/
+ Lire la suite
Sa philosophie du commandement, au fond, est exactement contraire à celle de beaucoup d'hommes politiques : inscrire la victoire au compte de l'effort mutuel, et l'échec ou la faille à son propre compte. Ne jamais se décharger sur un subordonné de l'erreur ou de l'accident.
Pas de doute, c'est la njuit que la tempête est magistrale. Parce qu'on n'a ni le temps ni le pouvoir de calculer son élan - la déferlante est là, on ne l'a pas devinée. Parce qu'on danse un bandeau sur les yeux, parce que l'ouïe reste en dernière instance le témoin du monde et de ses ténèbres. A une exception près, peut-être : par moments, la nuit, on voit le vent. Quand tout n'est plus qu'un chaos brouillé, quand l'oscur chevauche l'obscur, une fumée de sel se déchire en tournoyant : c'est le vent qui se montre.
jadis, le thermalisme marin visait à corriger une coxalgie. Désormais, il remet sur pied des décideurs stressés, des urbains asphyxiés désireux de faire le break.
Sauver n’est pas obéir. Plus qu’un impératif catégorique, le sauvetage est une culture. La fameuse « solidarité des gens de mer » n’est pas légende. Elle est propre à ceux qui partagent le secret de l’horizon insaisissable, à ceux qui connaissent le mystère de l’estran, la zone indécise entre la terre et l’eau, la frange des écueils et des remous d’où jaillissent le monstre et l’étranger - le comble de l’étranger, n’est-ce pas l’homme dont le navire est perdu, tellement vulnérable, tellement dépouillé, privé de mots, de vêtements, d’argent, de carte, que tu ne saurais l’abandonner ?

Le pays dont je me réclame, dont je suis excessivement absent, n'est pas (uniquement) un berceau ni une matrice.
C'est une côte.
C'est un fragment de terre que la mer dessine, creuse et modifie.
C'est une zone de contact, tout à l'inverse d'un camp retranché où l'on serait, enfin, entre soi.
J'ai récemment visionné une cassette vidéo riche en images somptueuses, tournées par des amateurs. Mariage bourgeois à Saint-Brieuc, banquet à Scrignac réunissant tout le village, départ des terre-neuvas, Internationale en breton sous l'égide de Marcel Cachin, le spectateur s'attendrit, est ému, sourit.
Mais le commentaire...Le commentaire professe que "nous" vivions ainsi autrefois, "nous" étions solidaires sur les goélettes morutières, "nous" n'avions guère de conflits entre "nous", jusqu'à ce que l'étranger, dont l'ultime avatar fut le "congé payé" du Front Populaire, ne vienne bousculer "nos" coutumes et rompre "notre" harmonie.
Difficile d'évoquer le passé sans barboter dans la niaiserie réactionnaire....
(extrait du chapitre 3 "Ar Mor")
Même si ces éléments jouent, ils pèsent infiniment moins qu'autre chose : l'articulation nécessaire entre le caractère très individuel de la résolution aui a été prise et le caractère emminemment collectif du travail effectué. Un bateau chargé d'assister les autres, c'est et cela doit être l'absolue liberté confondue avec l'absolue solidarité.
C'est une question d'élément.
Les pêcheurs, les commerçants, les militaires, les navigateurs de toute espèce et de toute origine n'ont cessé d'annoncer d'autres continents, les uns émergés, les autres engloutis.
Autant d'univers parallèles et insoupçonnés.
Hannon le carthaginois s'embarqua en 465 avant notre ère, franchit les colonnes d'Hercule, doubla le cap Vert, longea l'Afrique et découvrit les îles dites "Fortunées".
Himilcon, un de ses compagnons, s'aventura jusqu'à l'île d'Albion.
Ils furent les inventeurs pour mille ans, de routes inédites....
(extrait du chapitre 2 "Mais où est passé le centre du monde ?")
Les marins sont gens du départ et de l’abandon.
Pour Lionel, Jean-Marc ou Charly, un bon bateau, ce qui s'appelle un bon bateau, un outil entretenu par des gens qui savent l'entretenir et qui ont reçu ce savoir de leurs prédécesseurs, un bateau pareil est, sinon une anomalie, du moins une survivance. La plupart des bâtiments qu'ils s'en vont assister sont l'incarnation de leur propre déclin. Un sauvetage réussi est toujours exaltant. Mais il y a, conjointe, la souffrance de voir s'estomper une culture maritime, de la voir partir en miettes, se démembrer comme craque une coque, avant d'aller au fond.
Est-ce un métier ? Carlos, là dessus, est catégorique. Non, cette partie-là du métier n'est plus un métier. Ce n'est pas un dû, cela n'a pas de prix, ni de salaire équivalent, ce n'est pas un fragment de "culture d'entreprise". a un certain stade, celui où l'on engage sa peau, voire, plus simplement, celui où l'on craint de l'engager, une démarche volontaire et singulière est requise. On ne peut pas expliquer ce choix par la seule recherche de l'exploit, par le narcissisme héroïque, ni par l'émulation.