« Entre deux épilations, j’écris des chansons d’amour. Quelque fois des poèmes. Mais c’est plus difficile ». Voilà comment s’ouvre le deuxième livre de Ilan Darlan Cohen. C’est précisément la lecture de ces premières lignes, percutantes et si singulières, qui ont décidé l’acquisition de ce court roman, malgré une quatrième de couverture peu alléchante.
Hélène, la narratrice de ce roman, est épileuse dans un modeste institut parisien. Installée depuis peu avec sa collègue et amie Fanny, un peu nymphomane sur les bords, elle se retrouve à la rue quand celle-ci veut héberger son nouvel amant et trouve refuge chez un de ses fidèles clients, un certain M. Blumenfeld, diamantaire juif homosexuel, excentrique, avec un « visage de chat » et le cœur sur la main. Il héberge Hélène chez lui, au coeur du Marais, où elle devra partager l'unique chambre d'amis avec le jeune Schlomo. Malgré la volubilité de son hôte, Hélène perçoit très vite sa fragilité : l'homme de sa vie, son cher Simon, « le fils de la sardine », est parti. Blumenfeld est anéanti, malheureux, dévoré par la jalousie. Quant à Schlomo, il semble totalement désemparé et la lecture des psaumes n'est plus d'aucun secours pour ce jeune juif pratiquant. Entre les débordements passionnels de M. Blumenfeld et l'exaltation mystique de Schlomo, Hélène trouve étrangement sa place. Ensemble, ils vont chercher Simon.
Ilan Duran Cohen parvient en quelques lignes à installer un univers très particulier avec des personnages hauts en couleur, tous très différents, et qui pourtant se comprennent totalement.
Cet élan romanesque explore avec beaucoup d’inventivité la culture juive et la recherche souvent difficile de l'épanouissement amoureux… mais pas seulement. Les sujets sont multiples: au-delà de l’évidente satyre de la communauté juive orthodoxe, l’auteur aborde également l'homosexualité, la maternité, la quête d’une vie simple d'une jeune esthéticienne, le deuil, la famille, l'amour ou encore la chirurgie esthétique. Une multitude de sujets qui éparpille le récit et risque de perdre bon nombre de lecteurs à mi-chemin, et ce malgré un format court (179 pages).
Restent un onirisme et une poésie très particulière qui envoûtent dès les premières pages et qui donnent envie de s’intéresser au reste de l’œuvre de l’écrivain et cinéaste, Ilan Duran Cohen qui avait connu un certain succès littéraire avec "Chroniques aliciennes" en 1997 ou encore plus récemment « Le petit polémiste » en 2020.
Malgré une histoire un brin décousue, « Le fils de la sardine » révèle une galerie de personnages fascinante mais aussi et surtout la plume fluide, originale et incisive de Ilan Darlan Cohen. Reste à se plonger dans le reste de son œuvre.
Lien :
https://www.instagram.com/p/..