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Citations de Iman Mersal (100)


“L’Etat

Une tête unique envoie des signaux impératifs à tous ces coeurs, membres et organes génitaux. Se forme alors une armée nationale dont absolument aucun soldat n’a de tête. Une génération dont personne n’a besoin naît pour brûler les bibliothèques publiques, chasse la mauvaise musique qui beugle sur une radio locale, ses meilleurs éléments se portent volontaires pour tenir un registre des prostituées de rues afin que l’Etat s’assure que tout le monde paye l’impôt sur le revenu. Alors les hymnes nationaux sortent des bains publics vers les places, d’honorables opposants se rassemblent sous les drapeaux et fondent une SARL pour la diffusion des Lumières, tandis que toi, penché sur ton balcon, tu regardes les rues obscures en te rongeant les ongles.”
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“Un homme décide de m’expliquer l’amour

Un homme a décidé de m'expliquer l'amour. Il finissait de déboutonner sa chemise tandis que l'obscurité gagnait le coin et que l'après-midi basculait de l'autre côté. Perte de repères, comme au moment où l'écran s’obscurcit et où le spectateur se demande de quel côté est la sortie. Là-dessus, il a décidé de m'expliquer l'amour, les lunettes bien calées derrière les oreilles.
La chambre était floue et claire quand il a dit : “L’amour c'est la quête de… “ J’ai ouvert les yeux et vu des bandes de conquistadors qui cherchaient de l’or au Chili, affamés et désespérés, et un Indien terrorisé qui se cachait derrière un rocher. Quand il a dit : “L’amour c'est accepter de…” Je me suis mise à palper une montagne de chocolat noir et à écouter Ella Fitzgerald qui chantait... “Et c'est le bonheur…” Là, je n'imaginais plus rien.
Je ne l'ai sûrement plus jamais revu. Je ne me rappelle pas lui avoir demandé si l'amour, c'était d'oublier sa montre à côté du lit.”
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"CV

Classement rigoureux des soupirs,
années sur l'écran, les diplômes avant les emplois
les langues, avec tout leur calvaire, dans la rubrique des langues.
où sont passés tous les jours perdus, l'expérience de la cécité,
les hallucinations qui courent sur les murs de la chambre,
où sont les fautes,
les coups de blues devant une pyramide de fruits sur une charrette dans une rue oubliée ?
Années sans attente ni enterrements,
sans déceptions sordides, ongles rongés,
clés oubliées dans la maison.
Sans la moindre fenêtre ouverte, la moindre envie différée de sauter dans le vide.
Une vie débordante de réalisations,
lavée de la crasse de la vie elle-même,
preuve irréfutable que son possesseur
a enfin réussi à effacer son lien avec la terre."
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Cette nuit-là, elle nous a dit qu'elle voulait divorcer. Elle n'a rien voulu entendre. Elle était déterminée et révolutionnaire. On était toutes révolutionnaires, c'était une période de transition. Enayat et moi nous étions nos propres leaders, nous savions que le changement social qui se produisait alors, ce n'était pas une plaisanterie, que notre génération était capable de faire ce qu'elle voulait.
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... la voix discrète d'Enayat, qui ne s'adresse pas au grand public, cette voix mystérieuse, dépressive, répétitive, sans aucune confiance en elle, semblable à une plainte qui cherche à se faire entendre derrière un mur, cette voix qui n'a pas trouvé le chemin de la poésie qui l'aurait peut-être sauvée de la mort ...
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Il faut que tu meures sous mes yeux.
La mort des êtres aimés est l'occasion idéale de chercher des alternatives.
Dans les trains de l'Est du Delta, je choisis toujours une femme
prête à ouvrir pour moi le placard de la compassion quand je
lui dis que j'ai perdu ma mère à l'âge de six ans.
En fait, j'avais sept ans quand c'est arrivé,
mais six, ça me paraît faire plus d'effet.
les mères d'âge mûr adorent la tristesse,
peut-être pour se donner une raison de porter le deuil avant
l'heure.
Ces petites retouches dans la conversation
ont un charme
que ne peuvent comprendre
ceux qui n'ont jamais eu besoin de voler l'affection des autres.
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Cet adolescent, l'armée en a fait un homme. Sa carte d'identité est dans la poche de son treillis. Au lieu de fumer dans le débarras au milieu des vieilles affaires dans la crainte des fantômes et de la sanction paternelle, il a le désert tout entier devant et derrière lui.
On lui a donné des rangers pour piétiner le passé. Une pelle pliante sous le bras, il va creuser une tranchée où il n'aura pas le temps de se cacher. Je ne sais pas qui était derrière l'appareil pour le remercier, mais la photo est bien arrivée chez sa mère, grâce à Dieu. Avec la montre, la carte d'identité, et le corps.
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Voilà que je me remets à mentir, alors qu’on est censé devenir angélique bien avant de mourir, pour que nos amis n’aient pas à se creuser la tête pour nous trouver de grandes qualités.
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Les suicidés — c’est sûr — ont trop fait confiance à la vie.
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Quant à moi
je suis à peu près sûre et certaine
que je me mets à nu
pour me cacher derrière moi-même.
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Un jour, je l’avais vu
propre et bien mis comme à son habitude, vêtu d’un
tee-shirt qui portait cette inscription, en anglais : “Mon
corps, mon choix.” Dieu sait où il l’avait trouvé. C’était
le slogan d’une association pour le droit à l’avortement.
Devais-je le lui dire, avait-il le droit de savoir ? J’ai hésité
une minute avant de trancher ce dilemme moral : je ne
lui ai rien dit. Je me sens coupable maintenant.
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Cette erreur
n’était pas due aux biais littéraire, idéologique ou de
genre qui l’ont tenue à l’écart des arbres généalogiques
littéraires de la culture égyptienne. C’était une erreur qui
ressemblait à l’oubli et qui ne manquait pas de beauté.
Elle-même aurait peut-être souhaité rester en dehors de
cet arbre.
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Il avait reçu une excellente éducation, il
maîtrisait plusieurs langues, il fréquentait la famille de
Muhammad Ali, avait des amis dans l’élite politique et
dans l’aristocratie égyptienne et turque : c’est ainsi que
le petit esclave est devenu un homme richissime, plusieurs fois ministre.“Je n’ai pas parlé dans le livre des épouses d’Ahmed
pacha Rachid ni de sa descendance, mais de lui seulement, et de son voyage en Grèce à la recherche de sa
famille après qu’il a été affranchi.
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Ahmed pacha Rachid était un petit
Grec qui s’appelait Dimitri. Quand les Turcs l’ont enlevé
pendant la guerre de 1822, il avait six ans. Il a été acheté
par Ahmed Agha al-Kawlali qui était le gouverneur de
Kavala, en Macédoine. La même année, ce dernier est
venu s’installer en Égypte avec sa famille à l’invitation de
son ami le vice-roi Muhammad Ali, originaire lui aussi
de Kavala, pour l’aider à construire une armée moderne.
Comme Dimitri avait le même âge que Chaabane, le fils
unique d’Ahmed Agha, il l’a emmené en Égypte pour
en faire l’ami et le compagnon de son fils.
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Elle a aussi écrit un livre sur l’Amérique où elle présente l’image idéale de la femme égyptienne en Occident, parfaite représentante à chaque pas
qu’elle fait de l’art oratoire, de l’étiquette et des justes
causes arabes37. Gazbeyya avait-elle jamais entendu parler d’Enayat, ou bien la multiplicité des grands-mères
avait-elle éloigné les unes des autres les petites-filles de
Rachid pacha ? J’imaginais une scène absurde où Enayat
rencontrerait Gazbeyya à l’occasion de quelque réunion
de famille, disons en 1962.
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Je trouvais curieux que la tombe voisine de la sienne, bien que dotée d’une pierre tombale en marbre, ne porte pas de nom, et qu’elle et sa grand-mère soient inhumées dans une pièce assez marginale, occupée pour l’essentiel par des tombes de charité. Je me suis demandé si elle ne se sentait pas seule, mise à l’écart ici. Sa mère et son père sont enterrés dans le tombeau de la famille Zayyat, sa sœur Aïda dans celui des Habb al-Romman, son fils dans celui des Chahine, et Azima souhaite être inhumée avec les Sadr. La tombe d’Enayat est le prolongement de sa vie d’écrivaine : chassée de l’arbre généalogique patrilinéaire, marginalisée dans l’arbre matrilinéaire.
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Une partie de moi était là, qui ne
manquait rien de tout ce que mes compagnons disaient
sur les khédives Tewfik, Ismaïl et Abbas Helmy II. Ils ont
parlé aussi de la princesse Amina hanem Ilhamy, de la
princesse Fatheya, de la famille Toussoun, du prince
Mohammed Ali qui était le propriétaire du palais de
Manial. Le Dr Sadek a raconté l’histoire du vol de la
kiswa de la Kaaba*** : le voleur s’est blessé en l’arrachant,
son sang a coulé abondamment sur le mur mais n’a
jamais été nettoyé, pour dissuader quiconque aurait
été tenté de l’imiter. Dans ma somnolence, j’entendais
bien tout cela, mais curieusement, je rêvais en même
temps et, pour Dieu sait quelle raison, ce n’est pas
Enayat que j’ai vue en rêve, mais une autre femme dont
j’ai souvent suivi le parcours : l’actrice Magda al-Khatib était assise par terre à côté de moi ; elle était jeune,
au faîte de sa beauté, vêtue d’une robe de soirée noire,
les jambes tendues ; je voyais ses chaussures rouges
à talons aiguilles.
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Je les imagine les yeux
ouverts, se divertissant de temps à autre du bruit de la
scie et des clous martelés. Sous la fenêtre qui donne sur
le patio, un pneu couvert de poussière et percé d’un gros
trou et, à côté de lui, un seau en plastique où traînent
des chiffons huileux.
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Le Dr Sadek
nous explique qu’il est d’usage que la famille propriétaire du tombeau enterre les siens dans les chambres
principales et fasse l’aumône du patio, voire d’une ou
deux petites chambres, à des parents nécessiteux ou aux
gens qui étaient à son service, dans ses maisons ou dans
ses terres. Pour faire passer ma nervosité, je pense à l’acacia. Où ai-je lu qu’en égyptien ancien, cet arbre s’appelait shent, les pharaons faisaient des bouquets avec ses
fleurs et son bois était utilisé pour construire portes, sarcophages et bateaux ? Qu’est-ce qu’on attend ici, alors
qu’Enayat repose à quelques mètres de là ?
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J’ai traversé l’avenue de Roda et me suis installée au café à l’entrée de la rue Dar-el-Sinaa, dont on
dit qu’il fait face à l’appartement où a vécu l’actrice
Souad Hosni. Je pensais à elle tout en luttant contre le
mauvais pressentiment que personne n’allait venir. C’est
l’été, ils doivent encore dormir. À onze heures et demie,
Youssef Ossama m’a appelée, il était en route pour
Mohandessine avec une amie, ils allaient passer prendre
le Dr Sadek chez lui. J’essayai de maîtriser ma colère. Quelle
amie ? Et qui est ce Dr Sadek ? On avait un rendez-vous
de travail, non ? Est-ce qu’on ne s’était pas mis d’accord
pour commencer tôt pour éviter à la chaleur ?
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