Citations de Ingar Johnsrud (58)
La culpabilité c’est comme la Lune. Elle n’éblouit pas tout, mais elle est toujours là. Et la nuit, c’est pire.
… il ne remettait pas en cause ses actions et pratiquait le langage pompeux de ceux qui se sentent incompris. Ceux qui sacrifient leur humanité soi-disant au nom de l’humanité. Ceux qui ne laissent derrière eux que corps mutilés, chagrin et désespoir.
(p. 525)
La culpabilité, c'est comme la Lune. Elle n'éblouit pas tout, mais elle est toujours là. Et la nuit, c'est pire.
Andreas appartenait indéniablement à cette dernière catégorie : un enquêteur acharné, un des meilleurs hommes pour mener un interrogatoire, un cérébral qui adorait les affaires compliquées. Mais Andreas était plus fiable qu'un prêtre et ne faisait vibrer sa fibre sociale que pour les grandes occasions et les enterrements. Résultat : sa carrière était au point mort. Aussi abattue qu'une putain après l'activité intense du Nouvel An.
Quand les Espagnols sont arrivés en Amérique du Sud, presque toute la population autochtone a été décimée. Quatre-vingt ou quatre-vingt-dix pour cent sont morts en l'espace de quelques années. Non pas sous les balles des Espagnols. Mais à cause de la maladie que ces derniers avaient apporté : la variole. Tel un essaim de criquets, elle a balayé tout le continent sur son passage.
Une histoire de choix. Certains se font tout seuls. C'est le corps qui réagit. Qu'on appelle ça pressentiment ou réaction instinctive, le choix révélera toujours qui vous êtes. Se défendre ou prendre la fuite?
C'est la malédiction de la richesse, pensa Fredrik. La première génération gagne de l'argent, la deuxième gère la fortune amassée et la troisième la dépense. Rien d'étonnant, au fond. C'est difficile d'apprécier à sa juste valeur ce qu'on n'a pas eu besoin d'acquérir à la sueur de son front.
- Je crois que vous avez été manipulés, dit-il. – Ah bon. Et pourquoi ? demanda le journaliste en plissant le front. – Parce que quelqu’un veut faire passer cette tragédie pour une sorte de vendetta religieuse. On veut nous faire croire que ce sont les intégristes musulmans qui ont fait ça. Il est possible que ce soit le cas, mais cette affaire est plus compliquée qu’elle n’en a l’air. J’en ai la certitude. – Fredrik marqua un temps d’hésitation avant de poursuivre. – Il s’est passé des choses dans cette cave… Jorgen leva les yeux au ciel. – La presse se serait donc fait manipuler ? On serait tombés dans le panneau comme des imbéciles ?
Certains choix vous tombent dessus. Le corps agit sans vous demander votre avis. Appelez ça intuition ou réflexe, en tout cas la décision reflète qui vous êtes.
Il ne pigeait que dalle à ce pays. Le peuple le plus riche du monde. Et pas foutu de profiter de son bonheur. Les gens ne voulaient pas, tout bonnement. Tels des lemmings, ils cherchaient un abîme où se précipiter. Troubles du comportement alimentaire, phobie sociale, édulcorants, personnes transgenres. Mindfullness ! Les Norvégiens ne savaient probablement pas que la vie leur filait entre les doigts.
- Et si les propriétés ne visaient pas à assurer une indépendance financière ? Si c'étaient juste des planques ? Des lieux où se réfugier si les choses tournaient mal ?
- Vous oubliez un détail, rappela Andreas sèchement. Les choses ont mal tourné. Il y a eu un massacre.
Ils avaient dû traverser la salle de couture avec les ouvrages en tricot dans les corbeilles et les machines à coudre sous leurs couvercles en plastique (pour qu'un tout petit, levé plus tôt que les adultes, ne risque pas de se blesser). Arrivés au pied de l'escalier, ils avaient dû avoir la certitude que tout le monde dormait à poings fermés.
La communauté était sans défense. Ils étaient montés à l'étage, où se trouvaient les adeptes.
La mauvaise herbe en politique à ceci de commun avec celle de la nature qu'elle arrive à faire exploser le béton.
"Chaque fois qu'un nouveau traitement ou vaccin voyait le jour quelque part, nous retournions dans nos laboratoires pour tenter de trouver le moyen d'en contrer les effets."
Ken Alibek, ancien vice-directeur de Biopreparat, le programme d'armes biologiques secret de l'Union soviétique. 1999.
Quand on possède les connaissances nécessaires pour mettre au point un remède, on a aussi les connaissances nécessaires pour fabriquer un poison.
- Vous n'aimez pas les animaux ?
- Je suis Musulmane.
- Je sais. Consolez-vous en pensant que ça aurait pu être un cochon.
Fredrik se demanda ce qu'avaient ressenti le ou les meurtriers, quand ils s'étaient retrouvés dans ce couloir. Quand ils avaient vu la rangée irrégulière de patères. Les étiquettes avec les noms en lettres majuscules, écrits par des doigts maladroits d'enfants. S'étaient-ils arrêtés pour lire ces noms ? La patère en bois marquée « Annette », sans rien dessus. Ou celle d'à côté, avec une casquette de parc animalier, fixée à un mètre à peine du sol. « William. »
Il devait régner un silence de mort quand ils s'étaient introduits. Peut-être avaient-ils jeté un coup d'oeil à la salle des enfants, vu tous les jouets bien rangés dans leurs caisses, puis senti l'odeur de savon noir qui flottait dans la cuisine ?
Dans l'escalier était suspendu un autre portrait de Jésus. Une toile d'un mètre cinquante sur un mètre cinquante représentant le Christ avec sa couronne d'épines, une plaie ouverte au front et des filets de sang le long de la joue. Le visage surdimensionné mit Fredrik profondément mal à l'aise ; l'attention extrême portée à chaque détail, faisant apparaître la moindre goutte de sueur, la moindre impureté de la peau, donnait le sentiment d'un immense cri.
Ce n'était pas que l'impression de s'être approché trop près. Fredrik éprouvait aussi l'acte de violence délibéré de celui qui avait placé ce tableau ici. La dernière chose que faisaient les habitants de cette villa avant d'aller se coucher était donc de passer devant la Passion du Christ. De même chaque matin, sans exception. Ils ne pouvaient même pas se brosser les dents ou chier en paix sans qu'on leur rappelle toutes les saloperies du monde.
« Fredrik, appelle-moi. Il y a eu un massacre. Dans la communauté de Solro. J'envoie une voiture te chercher. »
— Pourquoi parlez-vous de secte ?
— Parce que c'en est une. La croyance de détenir la vérité absolue. Un leader fort. L'isolement à la ferme. Les prophéties du Jugement dernier. – À chaque argument, Wetre pointait un autre doigt en l'air. – Ça correspond exactement à cette définition. Vous trouvez que c'est un endroit idéal pour grandir ? – Sans attendre de réponse, elle lui tendit la main. – Bon, j'ai des élections à remporter. Merci de nous aider. Nous vous en sommes très reconnaissants, mon mari et moi.
Elle sourit, comme à la télé.