Citations de Isabel Ashdown (34)
La jalouser ? La partie est perdue d'avance, une femme vivante n'est pas de taille face à une femme morte, une mère qui plus est, arrachée trop tôt à sa famille, sanctifiée par le trépas. Une madone figée dans l'éternité.
Ce qui se passe sur la plage reste sur la plage.
A de rares exceptions près, [elle] a toujours su dissimuler ses sentiments. C'est un don, chez elle. Elle arrive à les contrôler, soit en s'en détachant, soit en les analysant, et elle est convaincue que cette faculté a rendu son existence plus heureuse, plus paisible. La plupart des gens qu'elle connaît en sont incapables. Comme ils se laissent porter par leurs émotions, leur vie n'est qu'une suite de hauts et de bas. Tantôt ils exultent de bonheur, tantôt ils s'abîment dans les affres du désespoir, perdant un temps précieux à se reprocher bêtement telle ou telle chose, à se sentir coupable d'avoir blessé autrui, d'avoir négligé un ami dans la peine...
(p. 328)
[Elle] supposait qu'il traînait encore avec Lizard, Adrian et les autres minables qu'il fréquentait. Elle les imaginait s'envoyant des bières dans leur troquet habituel puis faisant un crochet par le bord de mer pour se fumer une pipe ou un joint ou autre chose, en fonction de ce que Lizard avait pu dégotter dans la semaine. A la rigueur, elle admettait qu' [il] ait envie de « s'éclater un peu », comme il disait, mais la chose qu'elle ne supportait pas, c'était qu'il préfère la compagnie de ses potes à la sienne.
« Tu n'es qu'une allumeuse », balança[-t-elle] à sa soeur, un jour qu'un garçon particulièrement stupide venait de rompre avec elle. Non content de la larguer au bout de trois semaines, il avait poussé la muflerie jusqu'à lui demander si sa soeur n'aurait pas envie de sortir avec lui, par hasard. Outrée par cet affront, [elle] était sortie en courant de la piscine municipale où l'incident s'était déroulé et, sur le chemin de la maison, avait passé en revue tous les lieux, toutes les occasions où il avait pu croiser [sa soeur]. Et à force de ruminer, elle était parvenue à la conclusion suivante : sa soeur se servait de sa timidité comme d'une arme de séduction passive, pour lui faire de l'ombre à elle, l'aînée, la plus populaire des deux.
(p. 244)
Je trouve qu'elle fait vraiment gamine malgré toutes ses incursions dans l'univers des adultes - le petit copain, l'alcool, les mystères, les mensonges. Elle n'est encore qu'une petite fille, vulnérable aux maux de l'existence.
Emily ne se souvient pas de la naissance de sa soeur. Elles n'ont même pas un an d'écart et, de ce fait, elles ont grandi comme des jumelles, à ceci près qu'Emily avait toujours un temps d'avance tandis que Jess franchissait chaque étape en second. Emily se montrait parfois un peu dure, un peu autoritaire avec sa cadette, mais c'était compréhensible car Jess n'était ni assez jeune pour qu'elle la materne, ni assez vieille pour suivre son rythme, être son égale. Emily savait que Jess n'y pouvait rien, mais ça ne l'empêchait pas d'en être parfois agacée, comme si le manque d'assurance de sa soeur était une entrave à sa propre évolution.
(p. 40-41)
Maman et papa ne disaient pas 'l'église' mais 'la maison de Dieu'. Quand elles entendaient cette expression, Emily et sa soeur évitaient de ricaner ou de lever les yeux ; bref, elles s'abstenaient de faire ce que font les adolescentes fâchées avec la religion en pareil cas.
(p. 25)
J'entendis maman dire au revoir à papa sur le perron. Du plus loin que remontaient mes souvenirs, elle avait reproduit chaque matin cet étrange rituel qui devait dater des années 1940 : lui dans son méchant costume gris, elle avec son tablier de ménagère modèle.
(p. 95)
Et, regardons les choses en face, nous nous mentons constamment à nous même, que ce soit à propos de nos sentiments ou de nos opinions. Peut-on vraiment parler de mensonges, en l’occurrence ? Non, s’ils ne font de mal à personne. Reconnaissons-le, s’ils sont uniquement motivés par de bonnes intentions, comme rassurer quelqu’un, le réconforter, lui épargner une déception, il ne s’agit pas de mensonges à proprement parler. Plutôt une manière d’enrober la vérité, de la rendre plus belle.
Vous seriez étonnée de savoir ce dont les gens normaux sont capables.
Ils croient que je me soigne, mais c’est faux. Ils ne savent pas ce que c’est. Ils ignorent à quel point ces médicaments m’amoindrissent. Quand je les prends, je ne suis plus moi-même, je n’arrive pas à t’aimer autant que je le souhaite. Quand je suis moi-même, tout est connecté, le monde autour de moi devient terriblement net, mais aussi incroyablement lumineux.
Il y a des jours où elle se dit qu’elle est peut-être morte et que le lieu qu’elle prend pour sa maison n’est autre que l’enfer.
Elle voudrait que tout s’éclaire. Une image s’impose, celle de James rentrant à la maison l’autre nuit et découvrant Emily penchée sur le corps ensanglantée de Jess. Elle hurlait comme une folle, exigeait que Jess lui dise ce qui s’était passé. La police était déjà en route ; elle l’avait appelée tout de suite après avoir constaté la disparition de Daisy – ç’avait été son premier réflexe.
Quand j'ai eu vidé mon sac,Sammie m'a donné la version d'Emily et,en l'espace d'une soirée,mon univers a basculé.
J'ignore pourquoi Emily prenait un tel plaisir à me soumettre à ces tests de loyauté parce qu'à l'exception de l'incident qui se déroulerait des années plus tard,je ne lui avais jamais donné motif à douter de ma dévotion.
Manifestement,elle estime que Chloe est trop jeune pour certaines choses mais assez grande pour qu'elle s'amuse à la torturer.Une cruauté que je connais bien pour en avoir été victime autrefois.
On dit que les femmes ont souvent tendance à choisir un mari qui ressemble à leur père.
Elle le déteste, lui en veut de ne pas souffrir autant qu’elle. Pourquoi n’est-il pas désespéré ? Pourquoi n’est-il pas rongé par la culpabilité, lui aussi ? En plus, elle se sent désavantagée de par leurs positions respectives, lui, debout, habillé, prêt à affronter le monde, elle, tremblante, blottie sous les couvertures, les yeux bouffis de sommeil.
« De toute façon, nous sommes déjà coupables aux yeux du monde entier. Les parents ont toujours l’air coupables ».