Riley hésita, sachant qu’il n’avait que peu de chances dans un combat contre Misha quoi qu’il en soit, mais McClane se moqua de son inquiétude.
—Je me fiche qu’il soit assis ou debout. On est bien plus rapides et plus forts que lui. Tu n’as qu’à me le demander, et on lui botte le cul.
Il devait avoir capté l’envie d’être couvert de Riley, car il ressentit soudaine une sensation de chaleur, et les yeux de Misha s’abaissèrent de nouveau et s’écarquillèrent. Riley regarda en bas lui aussi. Un pantalon de métal venait d’apparaître, lâche et confortable, sans épine ni lame nulle part. Génial. Et très discret, vraiment.
McClane émit un son qui ressemblait à un raclement de gorge, chagriné.
— Hum, à ce sujet… en parlant de discrétion… c’est pas un souci. Je l’ai pratiquement décapité quand je me suis réveillé ; il nous a vus en armure complète.
Fantastique, songea Riley. Son ex-petit ami tueur de la mafia savait pour le système d’armure alien. Pile ce qui leur manquait.
— Putain. De. Merde. C’est quoi ce bordel ?
Misha se pencha en avant sur le siège passager et fixa l’autre côté de la rue, hypnotisé par la scène à laquelle ils assistaient. Ils s’étaient garés dans le parking seulement quelques minutes auparavant, avertis par Kolya, et ils discutaient de la meilleure manière d’extraire Riley de là quand tout était parti en sucette de la manière la plus spectaculaire possible. Misha était vaguement conscient de la présence d’Andrej près de lui et de Kolya à l’arrière, et une partie de lui aurait voulu les regarder pour vérifier qu’ils voyaient bien la même chose, mais putain, il ne parvenait pas à détacher le regard de ce qui se produisait devant eux. Des hélicoptères. Des soldats. Des gens qui criaient en fuyant à travers le trafic ralenti. Et Riley, au milieu de tout ça, au cœur d’un siège dans un café miteux et minuscule, avec un nombre impressionnant de flingues pointés dans sa direction. Misha en avait la tête qui tournait.
— J’aurais dû m’en occuper, fit observer Kolya, laconique, clairement blasé malgré la folie de ce à quoi ils assistaient.
— C’est quoi ce bordel, putain ? répéta Misha en l’ignorant. Ils ont perdu les pédales ou quoi ?!
— Où aurais-tu pu aller mis à part ici ? fit JC en haussant les épaules. Je sais pas comment, mais ce mec a énervé le gouvernement. C’est pas rien. Je ne pense même pas que ton mafioso en chef sera capable de te protéger de l’ouragan qui vous guette.
— Mon « mafioso » n’est au courant de rien, l’informa Andrej avec un froncement de sourcils. Et j’aimerais que ça reste ainsi, merci bien. La dernière chose dont nous avons besoin, c’est de voir le vieux tirer à l’aveuglette sur Riley. Misha est déjà bien assez près de l’implosion comme ça.
Peut-être que la Russie n’était pas une si mauvaise idée. Ou l’Islande. C’était, disait-on, un beau pays, plutôt paisible, si l’on exceptait les éruptions volcaniques occasionnelles. Apparemment, les chevaux y étaient plus petits que ce dont Riley avait l’habitude, mais il s’y ferait, voilà tout. De plus, c’était très vert, là-bas. Du genre rustique. Cela leur ferait un bon changement d’air. Aucune personne saine d’esprit n’irait les chercher en Islande.
Il avait la cravate défaite, une barbe de trois jours sur les joues, portait l’odeur du café et de la vieille sueur, mais pas une seule trace de fatigue ne traversait son regard froid et attentif. Il suffirait de lui en donner l’ordre pour qu’il se lance dans le combat, véritable version Duracell du tueur à gages russe. C’était presque aussi rassurant qu’inquiétant.
Et c’était… c’était juste… c’était ridicule. Il ne pourrait jamais trouver de meilleur hôte, jamais de la vie, nulle part ailleurs dans tout ce putain d’univers. Il n’y avait qu’un seul Riley Cooper et McClane le voulait, avec toutes ses parfaites imperfections, son insécurité et sa fierté stupide, ses pauvres capacités à résoudre des problèmes, et son ouverture d’esprit nonchalante qui faisaient de lui un si bon compagnon pour un système d’armure et d’armement intelligent qui ne pouvait vivre qu’en co-dépendance. McClane se fichait même que leur alliance implique des ajouts externes. Misha était un bonus. Il rendait Riley stupide et chaud à l’intérieur. McClane appréciait cela, parce que c’était ainsi que Riley le faisait se sentir lui. Il ne pouvait pas s’imaginer fusionner avec quiconque d’autre, qui ne soit pas Riley. Il ne pouvait pas s’imaginer quitter cet homme pour quelqu’un d’autre.
— Hé, marmonna-t-il avec prudence. Toujours là ?
— Ouais, fit-il en réponse immédiate, avant d’ajouter, mécontent : Tu vas continuer longtemps à m’appeler ton squatteur ?
— Non, lui assura Riley d’un ton aimable. Parce que tu vas pas rester longtemps, hein ?
Il se préparait déjà à recevoir une réplique, puis quelque chose du genre « ouais, à ce sujet… », mais l’alien le surprit autant qu’il l’attendrit :
— Bien sûr que non, bon sang. C’est juste que… j’aimerais un nom. Les choses et les êtres qui comptent ont tous des noms. Les gens ont des noms. Les animaux de compagnie. J’en veux un moi aussi.
— La nourriture, c’est de l’énergie, contra McClane, l’encourageant à prendre une bouchée supplémentaire. Tu en as besoin, tu en as besoin. N’oublie pas que tu dois manger pour deux désormais.
Riley faillit en faire tomber sa fourchette, mais son instinct (ouais, c’est ça) lui intima le réflexe de resserrer sa prise juste à temps.
— Nourris la machine, se corrigea rapidement McClane, tâchant d’effacer le spectre de la grossesse qu’il venait d’invoquer malgré lui.
— Des comparaisons. Pas des métaphores.
McClane parvint il ne savait comment à le faire secouer la tête de l’intérieur sans pour autant le blesser davantage. Il devenait bon dans ce genre de trucs.
— Je te paierai en argent sonnant et trébuchant, si tu promets de ne jamais nous dire de quoi toi et l’alien vous parliez juste à l’instant, intervint Andrej de l’endroit où il examinait son pistolet pour voir s’il était en bon état.
— Un alien qui faisait du stop.
McClane grommela une protestation.
— Un système alien et sensible d’armure et d’armement, clarifia Riley. Très sophistiqué. Unique en son genre. Un vrai Monsieur je-sais-tout. Il s’appelle McClane.