La voix de Bob Dylan acheva de chanter Lay Lady Lay, puis il y eut un déclic, le bras de l'électrophone se souleva et la musique se tut.
Debout au centre de la cabine, David se sentait maintenant vidé de toute émotion. Comme si cet homme et cette femme, dont les corps étaient étendus devant lui, lui étaient inconnus.
Il demeura ainsi un long moment, les yeux fixes, sensibles seulement à l'immobilité des choses et au silence. Un silence que le coassement des grenouilles dans la nuit rendait de plus en plus intolérable. Puis ses doigts se relâchèrent, la Winchester glissa à terre, aux pieds d'Edward Schenley.
La première balle l'avait fait reculer d'un pas, la seconde l'avait plié en deux. Puis il était tombé en avant. Dans son dos, deux taches sanglantes s'agrandissaient encore, achevaient de se rejoindre.
Elle, Jacqueline, gisait au pied du divan de cuir sur lequel elle était assise un moment auparavant.
(incipit).
- J'ai envie de toi, murmura-t-il à son oreille. On va chez moi, tu veux bien ? Juste une heure.
Le bus s'arrêta devant eux.
- Une heure, c'est trop ou pas assez, sourit Lucia. Tu peux comprendre ça ?
Et elle monta dans le bus, dont les portes claquèrent derrière elle.
Il coupa le moteur de la Land-Rover et entra dans le bungalow.
- Fatima !
La Berbère arrivait déjà, un verre de thé glacé à la main. Friedman en engloutit la moitié d'un trait, passa dans la chambre et se déshabilla. La sueur avait creusé son visage de rides de poussière. Il prit une douche, revêtit un pantalon et une chemise propres et acheva son verre. Depuis trois ans qu'il vivait ici, il avait renoncé à la bière. Par force, pas par goût.
(incipit).