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Critiques de Jack Boland (14)
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Crève la fin

Emouvant, sensible, digne d’un génie évident, « Crève la fin » est un récit essentiel, grave. L’incipit « Inquiet d’une naissance, que l’on disant négligeable, je m’étais recherché jusque dans la conception de mon innocent embryon. » enclenche une histoire tourmentée, caustique, crissures sur une vitre givrée. Le style est époustouflant. Habitué à la valse grammaticale, aux notes relevées soyeuses d’un verbe qui se lie à la lumière sans crainte aucune. L’aérienne fusion avec les faits, les rebondissements, bien plus qu’un alliage dont on observe la naissance subrepticement « Crève la fin » est un récit sombre dont la beauté se love dans les courbes, les dires, ce ciselé qui annonce un pictural déchiré par un cutter gorgé de doutes. Nous sommes en plongée directe dans un thriller psychologique, une tragédie en trois temps. « -Quels sont vos peintres préférés, alors ? -Sautine, Menessier, Bacon, ceux qui vont plus loin que les autres, qui se dépossèdent de leur âme, je les adore… » Julien, le narrateur, est un peintre. Fragile, décalé, envoûté par la mort, ses toiles sont des lambeaux de son âme torturée. Kaléidoscope de toutes les angoisses des peintres dont les toiles sont des exutoires. Des corbeaux dans un champ où l’imaginaire croasse à en déchirer les parois d’un ciel apocalyptique. « Nomade migrateur, attifé clodo, accoutré de mes hardes fanées, j’arriverais par la rue de Turenne. A chaque pas, je me demandais ce que je fichais là, avec mes deux croûtes sous chaque bras. » Julien va tomber insidieusement dans un piège. L’histoire enfle, charrie telle une boue malsaine, les fragilités de Julien, ses névroses, ses obsessions ténébreuses. Enfermé dans ses psychoses, il va devenir une proie pour les autres, un mobile de destruction mentale. « Aujourd’hui, je suis certaine que tous les lexiques du monde, ne suffiraient pas à m’offrir les mots que je cherche pour exprimer mon dedans clandestin. -Toi aussi, t’es bouclée dans ce grand bazar ? Ce parc d’attraction pour âmes en vrilles. Dommage les murs…. » Julien est pris dans une embuscade. L’histoire est glaçante, bouleversante. Manichéenne, elle déforme ce spectral et encense l’humanité de cet homme ravagé. Ce Diogène des temps modernes dont on aime les traits déformés par cette folie sournoise et implacable. « J’aime bien ce final parce que je suis fou de folie, dont la mienne et qu’elle me fait décoller dans des univers qui me rassurent. Même si je ne parviens plus me déterminer, je sais que j’existe. Dans le peu qui fait de moi quelqu’un, même d’approximatif. » Ce récit ploie sous la gravité d’une rare contemporanéité. Elle peut déranger, faire peur à en perdre le souffle. C’est dans cette double lecture que « Crève la fin » s’élève. Les manipulations, les mensonges, les diktats d’un enfermement parabolique sont décriés. Les femmes sont machiavéliques. Sous des allures de soignantes, de maîtresses femmes, elles sont des monstres. « Elles cherchent des preuves contre toi, pour que le directeur te garde ici ! « Mature, le pictural de Jack Boland dévore les conséquences, foudroie les apparences. « Tout à l’heure, j’irai dans le parc, ce lieu salvateur est devenu nécessaire à ma survie. Il y aura aussi Xéno. - Tiens ! salut ! Je lui dirai ça au jardinier. On parlera des jardins de mousse du Japon, des sequoias d’Amérique, aussi de cet imago de sphinx qui dort sous la branche d’un aulne, on parlera de trucs à nous, nous aurons des respirations. » C’est ici le point d’arrêt. L’instant de clarté, le bruissement d’une plénitude qui ne demande qu’à éclore. La vie qui survient. Un tableau de maître en devenir, un espoir. Que va-t-il se passer ? L’instant de vérité est à portée de vue. Jack Boland sait peindre. L’art en son summum épuré, la justesse, la finesse subtile et délicate. Les torpeurs et les doutes, les trahisons, les gouffres des différences, les rejets d’autrui. Il emblématise la vie en rouge sang, bleu nuit, en larmes et en craintes. L’inaltérable dévore les parois de ses inspirations en paroxysme de sincérité. « Autoportrait aux yeux bleus » « A vendre- Vingt-deux décembre. » « Crier la fin » est une métaphore puissante et bénéfique. La folie, un abîme. La lucidité est criante. L’intelligence en posture d’un garde-à-vous légitime. « Crève la fin » est une satire, une tragédie inoubliable. Un récit dont on ne sort pas indemne. Une pure merveille à déposer dans les musées paraboliques. (A noter une première de couverture peinte par l’auteur lui-même en autoportrait subjectif » Publié par Les majeures Editions La Trace.
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Crève la fin

Est-ce que l'histoire est réaliste et plausible ? Je ne sais pas.

Est-elle trop caricaturale pour l'être ? Je ne sais pas. Parfois les vies sont leur propre caricature, donc pourquoi pas.

Tout ce que je sais, c'est qu'elle nous permet d'entrer dans la tête d'un artiste, d'un véritable artiste... jusqu'à sa déchéance. Qu'elle nous amène à peut-être revoir notre "jugement" sur la norme. Et à voir la mort autrement à travers ses yeux. Rien que pour ces choses, elle vaut le coup d'être lue.
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Crève la fin

Hypersensibilité transcendante libératrice

~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~





Où ? Vert

Tripes à l'air

Premier cri





Homme à la terre

Vers de trouvère

Au chant d'honneur

Bleu de peau

Soupir Aïe

Clic-clac Kodak

C'est dans la boîte

A horreurs





Rouge aplat

Le sang fait toile

Soleil couchant

Levant dans les voiles

Splich-splach

J'en pince oh ouuuui

Belle toile Etes-vous con

Quise à ma guise ?

Et patati et patata

Dernier cri





Yards des yards

Monter la cote

Remonter les cotes

De maille qui m'aille

Vaille que vaille

Champagne !

Génie ?

Folie ?

Seule une petite

Ligne blanche

Snif, snif

Du talent renié

Pour des talents

S...s et trébuchants





Snif, snif

La chute

D'un rien

Petite fille éthérée

La mort

Encore

Vaporeuse

Ensorcelante

Clic-clac

Verrou

Mais qui est le plus fou ?

Clap de fin



La mort en toute liberté

Laisse courir son imagination

Liquide sans modération

Hors du cadre normatif

Surprend à tous les coups

La mort aussi est une artiste

…………………….incomprise





Flute

Demain je pourrirai plus

De vers

Traversières





https://www.youtube.com/watch?v=90X62itERcY&list=RD90X62itERcY&start_radio=1&t=87





Tous mes remerciements à Babelio pour cette masse critique et aux éditions La trace pour cette vertigineuse plongée dans les profondeurs de l'univers intérieur d'un artiste peintre et écrivain dans un roman sur la créativité qui pose la question de la norm-alité.



Profond. Passionné. Impressionant.
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Crève la fin

« Sans être différent des autres, je sortais d’un moule qui n’était pas homologué par la norme. On me reprochait de frayer avec la mort. »

Gamin, Julien Tuilery s’interrogeait sur la mort, sa meilleure amie.

Cela creusait un fossé avec le monde réel.

Sa mère morte, à 18 ans il fut poussé dehors par un père qui lui signifia que c’était sans retour.

Comme l’oiseau, profitant de la cage ouverte, il prit sa liberté à tire-d’aile quitte à en payer le prix fort.

« Je peins pour exorciser ma vie, je représente mes travers, mes pulsions un peu barrées, m’accuse-t-on souvent. Je défigure des guerriers violents, pétris des nus érotiques et charcute des portraits d’agonisants, mais, j’aborde surtout le thème de la mort… »

Tel est son portrait de peintre, pendant ses années de bohème.

Puis dix ans plus tard, il rencontre Sigismonde La Barre, jeune galeriste branchée « Art contemporain ».

Ils feront un bout de route ensemble.

Le succès arrivant, il va y plonger mais avant de s’y noyer il refera surface comme lui l’entend.

En effet ce succès fulgurant est bâti sur « le côté trash » de ses peintures, les acquéreurs n’y voient que spéculations et ne s’intéressent nullement à celui qui les a peintes ni au pourquoi.

En traînant son blues sous les ponts il trouve une population plus proche de son être que de son paraître.

La célébrité l’a transformé en objet que l’on s’arrache, tout ce qu’il exècre. Grande déstabilisation.

Et le piège se referme.

Même sentiment que lorsque j’ai lu pour la première fois L’étranger de Camus.

Comme Meursault, Julien Tuilery est sans filtre. Il ne se force pas à répondre aux codes sociaux, c’est sa force et sa faiblesse. Cela entraîne incompréhension, rejet etc.

Une question comme une antienne : « suis-je normal ? »

Une autre, comme son image déformée à la surface de l’eau est celle de la solitude que cela induit.

De façon à la fois très cache, mâtinée de poésie, Jack Boland nous raconte dès lors sa course pour amasser le non visible, le non palpable pour le quidam.

Le décompte s’enclenche car lui sait « qu’un jour, il tuera la Mort. »

Ne pourrait-on pas dire, que vu de l’extérieur, l’œil se pose et ne retient que ce qu’il ne comprend pas. C’est comme si le cerveau restreignait son champ de vision et l’œil son champ de compréhension en un cercle vicieux.

Un livre que chacun lira selon son vécu et son approche de la différence.

Heureusement l’écriture et les portraits cocasses offrent des bulles d’air à ce livre qui parle d’un homme broyé par le diktat de l’uniformisation et l’absence d’amour dès le départ.

C’est une plongée sans bouteille qui nous interroge jusqu’à Crève la fin.

©Chantal Lafon-Litteratum Amor 12 février 2020.



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Crève la fin

Comment dire... Crève la fin est l'histoire d'un homme pris au piège. Il a le sentiment d'être mis de côté, d'être un moins que rien, à crever de faim, comme un artiste maudit, préférant s'acheter des tubes de peintures que de manger. Ensuite, l'amour, le succès, et tout le jet set possible et inimaginable, mais encore, cage dorée où il se fait manipuler par sa femme, jusqu'à ce qu'elle le dénonce, et vlà, notre peintre se retrouve enfermé dans un lieu étrange qui pourrait bien être un asile. Et jusqu'à la fin, il le sera, piégé : par ses pensées, par lui-même... Ce Julien, peintre-artiste, sera révolté contre tout, tout le monde, sous l'idée principale qu'il est incompris, pas tellement ses tableaux, mais sa passion pour la mort, pour la fin (d'où le titre !) de la vie .



Comment dire... Crève la fin ne fait pas dans la finesse. C'est peut-être bien parce que Julien est enragé contre tout la terre, qu'il est le seul être bien et pur sur cette planète et que tout le monde profite de lui, ce qui le rend un tantinet révolté. C'est d'ailleurs cette rage qui fait tout le charme de ce livre et qui fait qu'on le lit jusqu'à la fin. Je ne dirai pas que c'est la langue, parfois les métaphores sont assez pauvres, mais c'est le rythme, la gnaque ! La façon qu'il peut se défouler, ce n'est pas rien. L'auteur, par le biais de l'artiste-peintre, il nous déballe et remballe une énergie qui permet d'accepter plusieurs raccourcis narratifs.



Comment dire...Les premières pages simplifient les choses à un point qu'il faut bien se tenir pour ne pas abandonner la lecture. (Ayant reçu ce livre par masse critique, je me sentais un peu obligé d'aller jusqu'à la fin). Ça commence, comme on l'a dit, l'artiste crève la faim, mais qui est tellement génial, marginal, que dès qu'une dame « coincée » du milieu de l'art le voit, elle jubile, n'jamais rien vu d'pareil ! Évidemment, elle tombe amoureuse de cet artiste en loque, et ils vivent une « grande » histoire d'amour sur 2 ou 3 pages, avant la débandade, parce que notre Julien découvre un cadavre de petite fille et qu'on l'accuse, à tord, bien évidemment, d'être le coupable. le problème vient qu'on ne croit ni à l'histoire d'amour, ni au fait qu'on l'accuse, ni à sa marginalité,... ni à son talent de peintre.



Tous personnages, à l'exception de Julien, bien évidemment, sont peints de manière simplifiée, voire caricaturale. C'est peut-être secondaire, finalement, mais cela agace. Par chance que Julien passe une bonne période seul à ruminer ses idées, ça permet de belles envolées que l'on suit et qui nous font oublier le reste.
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L'amort fraternel

L'Amort fraternel, c'est d'abord un titre intrigant, qui serait comme un mélange d'amour fraternel et de regrets éternels. Ou Amort, comme mise à mort. Il y a un peu de tout cela dans ce texte bref et haletant qu'on lit d'une traite. Deux frères se sont séparés après la mort de leur père, laissant le goût amer du doute chez l'un des deux, l'auteur du récit. Un doute qui au fil des années monte en puissance, devient certitude et crie à la vengeance. Tout est prêt lorsque Paul revient des années plus tard dans la maison paternelle où son frère l'attend.

Un texte magnifiquement écrit sur la méprise qui peut faire d'un homme un meurtrier. Cela fait réfléchir. Sans pour autant devenir meurtrier, qui ne s'est jamais trompé sur autrui et n'a tué avec des phrases assassines ?

 

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L'amort fraternel

Après trente années d'absence, Paul retourne dans la maison familiale où son frère l'attend, bien décidé à exécuter ce qu'il a depuis longtemps envisagé : son assassinat. Pour lui, la loi du talion, œil pour œil, dent pour dent, s’impose. La réponse au parricide sera donc un fratricide. En tout cas, c'est bien ce qu'il imagine.

S'ensuit alors une joute psychologique entre un présumé tueur, Paul, le frère, et un hypothétique criminel, le narrateur, l’autre frère.



Les soixante-neuf pages du livre de Jack Boland maintiennent le lecteur dans une tension extrême, chaque mot, chaque phrase pouvant occasionner la bascule.

Il y est question de rancune, de haine, tout cela dans un climat lourd. Mais aussi de fatalité, tous ces éléments s’alliant jusqu’à produire le drame. Et la tension, croissante, atteint un stade paroxysmique, celui de la méprise.



Parricide, fratricide, destin… Et nous voici plongés en pleine tragédie grecque où rien de ce qui était écrit ne peut être évité. L’enchaînement implacable des malentendus aboutissant à l’accomplissement du destin funeste.

Impossible de ne pas penser au mythe d'Oedipe (la mort du père), au récit biblique d'Abel et Caïn (Caïn, le premier meurtrier de l'humanité, exécutant son propre frère).



Alors, peut-on mourir d’un simple malentendu ?

L’Amort fraternel plonge le lecteur dans des négations qui transforment chaque acte en erreur, en faute irréparable. Alors qu’il se sentait justement soulagé du lourd poids de ses soupçons, le narrateur accomplit l’irréparable, sans même participer à l’acte meurtrier. Et le crime devient effectif alors même qu’il n’était plus envisagé.



La description des scènes, la précision des détails, le regard aiguisé de l’auteur m’ont paru teintés d’une couleur toute à fait spécifique. Et je n’ai pas été étonnée d’apprendre que Jack Boland était également peintre, photographe, et auteur de pièces de théâtre. Je comprends mieux l’éclairage particulier, unique, qui permet à l’auteur de nous plonger si habilement dans l’ambiance évoquée.



Alors, un grand merci à Jean-Philippe Lafont et aux Editions La Trace, incroyables orpailleurs détecteurs de pépites, de m’avoir permis de découvrir ce livre et cet auteur. Lecture qui m’encourage vivement à me procurer le précédent roman de l’auteur, « Crève la fin », également publié aux éditions La Trace.
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L'amort fraternel

Ayant quitté son frère sans explications après la mort de leur père malade, Paul revient dans la maison familiale après trente ans d'absence.

Il ignore que durant ces trente années, un flacon vide retrouvé dans une poubelle a laissé le doute et les certitudes maintes fois ressassées s'insinuer dans l'esprit de son frère y semant haine et rancoeur.



Un texte court, vigoureux, efficace et bien rythmé.

En moins de septante pages, Jack Boland réussit l'exploit d'écrire une nouvelle digne des plus grands auteurs de thrillers psychologiques.

Tout y est, le suspense, l'humour noir, le décortiquage de l'âme humaine et une chute particulièrement savoureuse.

Maniant la plume avec brio, il utilse des néologismes percutants et un lexisme sonore qui donnent toute sa puissance au récit.



Ce que j'appelle un vrai bon moment de lecture !!
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L'amort fraternel

La vengeance est un plat qui se mange froid sauf qu’à trop attendre, il risque d’être avarié. Trente ans qu’il attend le retour de Paul, son grand frère, parti il ne sait où, juste après le décès de leur père. Trente ans qu’il rumine sa rancune, il veut savoir le « pourquoi ». Et quand enfin, il saura, ce sera trop tard, il y a des actes manqués qui ne pardonne pas. Une nouvelle bien écrite, un huis clos étouffant et les non-dits entre les deux frangins qui les auront menés vers ce drame final. Merci les Éditions La Trace.
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L'amort fraternel

De prime abord ce livre semble trop court avec moins de 70 pages écrites dans une police un peu trop grande à mon goût. Cependant, cette première impression passée, impression qui d'ailleurs ne correspond qu'à des apparences, j'ai plongé dans une lecture intense où l'on se place aux côtés du narrateur qui accueille après de nombreuses années un frère à la fois attendu et redouté.

Une belle lecture !
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L'amort fraternel

Serré comme un café fort, mené d'une main de maître, « L'Amort Fraternel » est un texte de 69 pages crissant comme la glace. Un retournement de situation (dont je ne dirai rien). Jack Boland pousse le lecteur dans le dos, force le huis-clos. L'ambiance est hivernale. « Qu'est devenu ce vieux parricide naïf qui, doutant de ma fragile mémoire ou la supposant clémente, ose reparaître devant moi ? » « Bien sûr que le père n'aurait pas vécu beaucoup plus longtemps, mais nous assurait le toubib : Il en a encore pour plusieurs mois… plus, s'il ne fait pas d'imprudences. » Le narrateur doute. Les soupçons sont vifs, lames de fond. Il pressent son frère Paul coupable : flacon vide, 10 gouttes pas plus quotidiennement. Seul dans la maison paternelle, les rancoeurs enflent, crescendo, tsunami, elles happent le narrateur. La teneur de « L'Amort Fraternel » est hors norme, une mise en abîme captivante. Une fratrie écartelée par les méprises, les cartes qui vont se retourner, vite, trop vite. Qui est Paul, ce frère revenant ? « Celui qui arrive est un homme épuisé. Qu'il le soit brusquement me désarme…. Non. Il n'est que vieux. Il a tué le père. Il est en marche. Il me revient. » Jack Boland délivre un récit claquant, intuitif, habile. Il ouvre les tiroirs, un à un, incite le grave, la violence des aprioris, filigrane qui va piéger l'idiosyncrasie. Les fissures générationnelles, les jalousies intestines, les doutes, les psychoses. Profond, « L'Amort Fraternel » est un récit noir, psychologique, superbe. Il prouve un Jack Boland accroché aux branches d'une histoire plausible. Il arrime les mauvaises pensées, les métaux, le contraire d'une exactitude des faits. Et c'est là que le chant est beau, insistant et enclenche une vengeance, une destinée contrée par la marche des mauvaises directions, compagnons en déroute des existences floutées, les convictions implacables. Jack Boland est un nouvelliste de renom. Acide, caustique, brillante, la chute est une prouesse, la preuve, le non-retour. Lisez « L'Amort Fraternel ». Prenez garde à l'envers du décor, à la traversée du miroir. Publié par les majeures Éditions La Trace.
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L'amort fraternel



Une vieille bâtisse, au milieu des érables. Et la garrigue à perte de vue.



Une vieille bâtisse. Celle du père. Celle sur laquelle pèse toujours ce silence, cette ombre, cette absence, longue de trente années. Depuis ce jour où…



Oui. Trente années. Un bail. Trente années où l’incompréhension aura fait place au doute puis le doute à la colère… Jusqu’à cette graine de certitude qui germera en moi et qui réclamera vengeance.



Trente années sans nouvelles de mon frère… Trente années pour détricoter les mailles de cet amour fraternel. Et aujourd’hui, enfin, boucler la boucle.



« Celui qui arrive est un homme épuisé. Qu'il le soit brusquement me désarme. Je l'imaginais gladiateur, navigateur baraqué, solitaire, virant la bouée de chaque pôle, torse nu, seul sur le pont, les voiles en lambeaux. Grand reporter, rampant dans les ruines de Bagdad ou de Kaboul. Orpailleur hors-la-loi inondant de mercure les flots grondants de l'Iguaçu ou de l'Amazone. Tombeur de princesses ou trafiquant d'armes.



Non. Il n'est que vieux. Il a tué le père. Il est en marche. Il me revient. »







--







Dans la très belle collection TEXTE des Éditions LA TRACE, L’Amort Fraternel est loin de faire pâle figure.



C’est une courte nouvelle. Et pourtant, en moins de 70 pages, Jack Boland parvient à faire de ces retrouvailles fraternelles un moment puissant, psychologiquement intense, où se confrontent haine et amour…



Une écriture directe, brute, dépourvue de rondeurs et qui entraîne avec efficacité le lecteur dans l’ambiance de ce huis clos. Une nouvelle dont le climat oppressant n’est pas sans me rappeler Le Puits, d’Ivàn Repila.



Je ne connaissais pas encore Jack Boland mais je me plongerai volontiers dans son précédent roman Crève la faim, sorti l’année dernière.
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L'amort fraternel

Un tout petit roman dense et noir



u texte puissant, resserré dans une soixantaine de pages à peine, si bien écrit que j'en aurais volontiers lu un peu plus.



"Qu'est devenu ce vieux parricide naïf qui, doutant de ma fragile mémoire ou la supposant clémente, ose reparaître devant moi?"



Cet incipit frémissant de colère contenue donne le ton , la tension est palpable, un homme attend dans la maison familiale le retour d'un frère dont il n'a plus eu de nouvelles depuis 30 ans.



C'est trop court pour en dire plus. Mais sachez que c'est intense, noir... très noir ! Une très belle découverte que ce huis-clos familial dramatique écrit d'une plume vibrante, au titre terriblement imagé avec ce mot inventé "l'Amort" qui ne peut mieux décrire les sentiments qui animent le narrateur, entre amour et haine. Quelle trouvaille !



Ce petit opus est édité dans la collection Texte des éditions La Trace.

Ils disent dans leur présentation vouloir éditer des auteurs qui soient "des contrebandiers des mots". Eh bien Jack Boland en est un qui vous laissera ko par uppercut de sa langue brute, forte et ciselée et l'incroyable intensité de ce texte.
Lien : https://www.instagram.com/ca..
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L'amort fraternel

Cet opuscule est résumé dans le titre… un jeu de mot puissant et révélateur de ce long monologue dense et sombre.

Une découverte fortuite et une absence de 30 ans ont peu à peu instillé doute, puis certitude chez le narrateur : « Je fus, pendant toutes ces années, ce juge tragique qui se crut infaillible et se doubla d’une logique de détective borné. » S’ensuivent un huis-clos tendu fait de non-dits et une tragédie.

La pirouette finale est totalement imprévisible et révèle tout le talent de cet écrivain par ailleurs metteur en scène de théâtre.



PS : Merci aux Editions La Trace pour cet envoi joint au livre sélectionné dans le cadre d’une opération Masse Critique.

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