Derain, Balthus, Giacometti : trois amis, trois artistes, apparemment bien différents les uns des autres- en tous les cas ni une école, ni un courant.
Mais beaucoup plus que cela : des affinités électives, des exigences parallèles, une même quête de modernité enracinée et ressourcée dans l’histoire artistique et culturelle.
L’exposition semble injustement boudée : une critique snobinarde récuse ce rapprochement parce qu’elle refuse de l’entendre. Il faut aller la voir, pourtant, dans le calme luxueux du Musée d'Art moderne de Paris, tant elle est riche et parlante,
Le catalogue, pédagogique et élégant, met en scène ce trio improbable que tout , étonnamment, rapproche.
D’abord, l'amitié.
Elle est indéfectible, jusqu’à leur mort, malgré les écarts d'âge, de condition sociale, de provenance -France, Italie, Allemagne- malgré les avatars de l'histoire- la guerre, les soupçons de collaboration et la mise à l'écart , sans doute injuste, de Derain.
Les trois amis partagent les mêmes modèles, fréquentent les mêmes cafés, intègrent les mêmes mouvements et s’en font mêmement exclure!
Ils ont la même frénésie de culture, le même goût pour les anciens et pour la peinture du quattrocento, qu’ils copient avec talent et étudient avec ferveur - fresques pompéiennes, crétoises ou celles de Piero della Francesca, statues égyptiennes , fétiches africains.
Ils tendent à la même quête de la modernité, ont les mêmes interrogations lancinantes sur la figuration du réel, et sa dérobade éternelle.
L’ascèse calviniste d’un Giacometti, dans son atelier –palimpseste et le dandysme un peu décadent d’un Balthus – de son vrai nom Balthazar Klossowski de Rolla- en son château font bon ménage avec le train de vie familial et petit-bourgeois d’un Derain, en robe de chambre et gros cigare, entre sa femme aux cheveux blancs et sa nièce aux yeux coquins. Ils s’invitent, s’écrivent, se peignent l’un l’autre.
Un jeune modèle, de temps en temps, resserre encore le lien et passe de la toile de l’un à la tête sculptée de l’autre, telle cette Isabel Rawsthorne peinte par Derain, à la façon de la Parisienne des fresques crétoises- chevelure bouclée, lèvres gourmandes et œil mutin- devenue amie et modèle de Giacometti qui la sculpte, la peint et échange avec elle une correspondance intense, puis se fait modèle et amie des Balthus…au point qu’ils l’emmènent en voyage de noces !
L’amour du théâtre donne aux trois amis l’occasion de dessiner décors et costumes pour la scène…
Certes, l’arbre de plâtre d’ En attendant Godot, tout minimaliste, est nettement plus dans les cordes de Giacometti et dans les goûts de Roger Blin que les jupes colorées, les fracs fantaisistes, ou les paravents bariolés dessinés, par un Derain inspiré, pour Le Barbier mis en scène par Jean-Louis Barrault, ou que les perspectives étranges et l’élégant modernisme des décors de Balthus pour le Jules César du même Jean-Louis…
Chacun sa patte, chacun sa facture, mais l’amour du théâtre les réunit !
Cette belle exposition, ce catalogue réussi proposent un parcours atypique, une échappée très documentée et convaincante sur les fondements d’une amitié artistique qui, loin d’être un carcan ou une source de rivalité entre eux, a permis à chacun de ces trois Grands de suivre sa propre voie et d’y exceller - en se sentant conforté par le regard amical,à la fois exigeant et empathique, des deux autres.
Une belle leçon de partage et d’autonomie !
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Pas pour les enfants
Le beau livre est tourné en bonne part sur Marthe la femme de Pierre Bonnard. Marthe au bain, Marthe nue au lit, Marthe nue dans le jardin. Marthe ceci, Marthe cela. Pierre Bonnard était un peu obsédé de sa femme. Il n'y avait donc pas que le jaune mimosa qui monopolisait l'attention du grand peintre.
Les photos qu'on peut voir dans le beau livre, en noir et blanc, de Marthe, encore nue au bain etc.. laissent apparaître un semblant de bipolarité sur le visage lustré de Marthe étincelante de beauté sculptée, bien loin des grosses dondons de Renoir qui a pourtant peint la femme avec génie et sollicitude, une impression étrange de fille paumée qui ne sait plus très bien quand elle s'habille et quand elle se déshabille. Heureusement qu'on a pas eu droit à Bonnard à poil se représentant en Bonnard à poil. C'est un témoignage nouveau pour moi ces indiscrétions qui me font dire que la folie qui va naître chez Marthe n'est pas dédouanée de la personnalité du grand peintre Bonnard. L'air d'éternel étudiant de Bonnard le fait prendre pour un bon samaritain chez qui le moindre geste serait bénédiction.
Bon Pierre dorénavent je me méfierai de tes intentions louables et de ce que j'en ai lues, mais ça n'enlève rien à ton immense talent !..
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Munch mettait ses toiles dehors, à l'extérieur pour leur donner la patine du temps, peut-être était-ce aussi l'assurance que ses toiles étaient l'émanation pure de sa vie intérieure qu'il fallait libérer.
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magnifique intéressant
même si le fauvisme ne m'emballe pas .....
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Présentation emballante du mouvement artistique, elle fait découvrir les fauves avec enthousiasme.
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Remy Labrusse est un excellent connaisseur de l'oeuvre de Matisse, et des "fauves"
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Un ouvrage très bien documenté, qui propose à la fois une biographie complète de cet artiste expressionniste, et de nombreuses planches (dont certains détails de tableaux)
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