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Citation de J-line


Corps fragmentés :
J.F. Mattéi et H. Atlan ont en commun d’abstraire la cellule totipotentielle clonée et de la départir de sa nature (sa nature ‘en soi’ : comme puissance de devenir) du fait d’une production sans fécondation et dépourvue de finalité procréatique. De la sorte, ils soumettent la cellule en sa définition comme en ses représentations et transpositions au seul projet extérieur. A savoir pourtant quel est cet embryon arrêté ? Une simple construction accédant à la réalité (du monde matériel et des réseaux sémantiques ou linguistiques) par l’intellection et l’assignation (destination) -régies toutes deux par le dessein ou le besoin spécifiques … Une chimère donc : mélangeant matière propre et potentialités autres, réalité actuelle et virtualisations conceptuelles, puissance intrinsèque et assignations tierces, en-soi et pour autrui. Où interfèrent biologie, technique, projections, affects et droit –pour produire une entité réduite à sa plasticité biologique et à ses dépendances diverses. Où donc l’absence de projet parental exorbite l’embryon de la sphère humaine, l’écarte du substrat symbolique et l’exclut du devenir pour réduire sa puissance (d’individuation) à sa matérialité présente -réduire son fait processuel à son état transitoire ou encore son individuation potentielle à ses potentialités divisées. En d’autres termes, l’arbitraire de l’utilitaire rend l’embryon à sa matérialité immédiate pour le soumettre à la négation de toute spécificité, de tout devenir (comme puissance et potentiel intrinsèques) et de toute signifiance ou insertion dans le monde conceptuel et psychique de l’humain. Mais si tel devait être l’embryon, soumis à une déclinaison différentielle et multiréférentielle en sa nature comme en ses appartenances , l’individu ne se décrypterait-il pas (ne se livrerait-il pas à lui-même) tel une incarnation réussie : potentialité ou puissance d’individuation privilégiées eu égard à d’autres possibles (de destruction ou d’utilisation thérapeutique) ? Ou encore, matière investie d’un projet extérieur, individuation soutenue d’une volonté tierce, individualisation confortée d’une reconnaissance événementielle et individualité protégée d’un statut dicté par l’arbitraire du bon plaisir ou par l’irrationnel du pulsionnel ? En fait, procédant de la sorte, l’homme introduit différentes ruptures ou coupures : une coupure biologique (par rapport à un matériel embryonnaire soumis à l’insignifiance, proprement pluripotentiel en sa destination), une scission conceptuelle (dans l’introduction d’une discontinuité originelle intrinsèque –faisant suite à la conceptualisation d’une entité qui serait primitivement étrangère à l’individuation), et une rupture biographique (vis-à-vis d’une individualisation en perte de continuité ou d’une identité en pointillé). Et cette coupure biologique et cette rupture biographique offrent certains stades ou certains états aux manipulations. Si la coupure biologique répond à la distance grandissante séparant l’identité ultime (ce qui est vécu en noeud identitaire) de la chair ou de la forme corporelle, la rupture biographique s’intègre dans une situation sociale, familiale et existentielle semblablement morcelée ou morcelante : changements professionnels multiples, exclusions socio-économiques ou culturelles, séparations ou dislocations familiales, reculs du relationnel et de ses lieux au profit du virtuel, brouillages des différents repères, et finalement refus ou craintes des appartenances diverses (à une terre, un lieu, une généalogie, un trajet existentiel et un corps proprement personnel…). Raisons pour lesquelles, en désaccord avec H. Atlan ne décelant aucun élément anthropo-négateur dans ces techniques, nous redoutons que le clonage thérapeutique ne soit vecteur ou facteur de désintégrations du fonds anthropique. De même, nous hésitons face aux glissements sémantiques qui suivent les circonlocutions à fins neutralisantes. Cependant, bien que nous reprochions aux projets technicistes de désaffecter les mots pour offrir les ‘choses’ qu’ils désignent aux différentes emprises, nous ne suivons pas d’avantage G. Bénichou usant du procédé inverse : appel clair et net à l’émotion pour écarter sans discussion la technique associée à une quasi monstruosité de son praticien –et à un projet qui serait résolument «humanicide» (...)
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