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Citations de Jacques Ancet (223)


Jacques Ancet
Écrire c’est être traversé.
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Jacques Ancet
UN MORCEAU DE LUMIÈRE

J’écris des dates
le temps les traverse
ne laisse qu’un peu de poudre humide
parfois les feuilles remuent
le ciel n’est pas le ciel
le jour est un reste de regard.
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Jacques Ancet
Je me demande encore ce qu'est l'amour
cette folie de faire tourner le monde
autour d'un même centre rose et mortel
je sais qu'il n'est pas de réponse je sais
que c'est se vouer à la perte et aux larmes
mais malgré tout j'ouvre les bras je dis oui.

( " La brûlure " in " Lettres vives" 2002)
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Sans cesse ça te traverse
ça te blesse. Comme un vent
qui n'arrêterait jamais,
qui soufflerait sans souffler,
sans que rien ne le révèle
qu'une absence dans le jour,
dans les feuilles, dans les gestes
et tu te tais, tu écoutes,
et plus tu écoutes moins
tu entends et moins tu sais.
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Tu te dis qu'il faut se dépêcher, qu'il faut garder
ce qui peut l'être encore, un après-midi de mars,
par exemple, avec un ciel gris et des primevères,
un marché, peut-être aussi, comme il y a longtemps,
la lumière, les cris, les odeurs et ce silence
où tout soudain s'arrête sans pourtant s'arrêter,
tu vois chaque visage, chaque geste figé
dans l'éclat d'un instant suspendu, une explosion
immobile qu'on entend partout dans la douceur
de l'heure qui sonne, un roucoulement de pigeon,
sous les paroles, les sourires, les mains serrées,
tu te dis qu'est-ce qu'on peut faire, la vie continue,
mais la vie c'est quoi au juste....

(Extrait du douzième chant)
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CHANSON

Tu me regardes. Tu souris :
les choses brillent dans tes yeux.
Tu dis: "arbre" et l'arbre fleurit,
poudre de neige, feuilles bleues.

Tes mains enfantent des oiseaux
fuyant en un bruissement d'ailes
au fond du jour, et tout est beau
quand la nuit monte au bord du ciel.

Et ton pas trouve les échos
perdus au ventre gris des pierres,
sourdes rumeurs, presque des mots
qui parlent d'une autre lumière

la même qui, obscure, douce,
luit toujours au creux de ton corps
et m'appelle, comme en la source
la perle bleue de l'eau qui dort.
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ALPHABET

Chaque jour
puisqu'il faut vivre
- ce qu'on appelle vivre -,
chaque jour je bâillonne
cet enfant bleu qui crie
derrière la mémoire,
je casse en deux sa voix,
la frêle flûte d'air,
je le boucle
à double tour,
je refuse d'entendre
son eau coulant très loin,
de voir ses pas de neige,
je ne veux plus sentir
cette angoisse du temps
perdu, cette absence,
cette vie qui s'en va,
je me jette tête baissée
dans la grisaille,
je mets le masque,
j'avale tout, les horaires vides,
matins et soirs,
je n'écoute plus,
je m'aveugle d'images,
jusqu'à ce coin de rue,
ce jardin triste,
cette chambre peut-être,
où, malgré moi,
ma bouche épelle encore
un alphabet d'insectes et de nuages.
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LUEUR

Écoute en ta mémoire la rumeur
de l'enfance, cette averse égrenée
sur la vitre, tandis que bouge et tinte un rameau sous le vent. Écoute aussi

quand tout n'était encore que reflets pénombre et cils d'une pluie fugitive, parler cette voix que tu ne comprends pas
dans la douceur d'une chambre imprécise.

Il n'y avait alors que ce frisson
sur la peau, ce froissement de nuages, cet immobile égouttement des heures qui peu à peu luisaient dans le silence.

Quelqu'un te souriait. Tu regardais
le jardin gris à travers le flocon lumineux du rideau, tu attendais,
et, lentement, du devenais la pluie.


(extrait de "Le songe et la blessure" - p. 66).

.
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La fatigue a des couleurs
comme les saisons. Elle a
ses douceurs et ses éclats,
ses silences. Mais surtout
ce qu'elle permet de voir :
d'une chose à son image,
imperceptible, une sorte
de distance sans distance.
L'incertitude du monde.
Comme un vacillement bref.

.
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Dans tout poème, une voix parle. Non pas celle de celui qui écrit - sa voix privée - mais une autre. Qui soudain lui vient dans la bouche, lui fait bouger la langue, chuchote, prononce des mots qu'il ne comprend pas. C'est cette voix dans son étrangeté que perçoit le lecteur. Laquelle éveille en lui, à son tour, son propre inconnu : celui d'une voix latente qu'il ne connaissait pas non plus, et qui est comme l'écho de l'altérité qui habite l'écrivain. D'où l'émotion produite par la lecture. Tout poème est, au fond, un monologue : celui d'une voix nocturne qui s'adresse à tous et à personne. Et qui vous conduit à cette heure qui n'est ni la nuit ni le jour mais leur rencontre. Une heure où tout s'achève et commence à la fois : l'heure de cendre.

.
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Jacques Ancet
J’attends


– Qu’est-ce que tu fais ?
– J’attends.
– Quoi ?
– Si je savais.
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Ni sport ni exploit technique. Il ne s'agit ici ni de vaincre un sommet, ni même, comme on dit, de se « dépasser ». Plutôt d'entrer dans un rapport où sujet et objet confondus ne sont plus qu'un seul continu de pierre, de chair, de regard, de lumière, de mémoire, d'espace, de pensée et de vide. Et ce rapport ne peut avoir lieu que dans l'emportement d'un mouvement. La montagne écrase quand on l'affronte dans la fixité du regard; elle accueille si l'on marche vers elle, si l'on s'y oublie. L'expérience à laquelle elle invite est celle d'une dépossession. Du temps, de l'espace et de soi-même. Gravir pas à pas sa grande forme à la fois inquiétante et accueillante, massive et aérienne, c'est entrer dans un présent qui ouvre à l'instant des choses. Dans la lenteur de l'ascension s'établit un contact d'ordre... ontologique. J'hésite à écrire ce mot, tant il recouvre de facilités et de prétentions. Je veux parler de cette manière d'être ensemble où, aux moments les plus forts de l'ascension, le temps de l'homme et le temps du monde se rencontrent. Alors, on est là, totalement. Dans l'éclat unanime - anonyme. Où chaque parcelle d'espace et de temps reflète l'infini du monde. Une expérience d'être, effectivement. Je marche, et chaque pas réaffirme la vie. L'intensifie. Face à la mort. Qui, un instant recule. Dans l'oubli de soi-même. Dans l'affirmation de tout.
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Un rayon d'or poudroyait et fumait
sur les meubles lustrés par le silence
et l'haleine du temps. A la fenêtre
l'après-midi jaunissait sur les champs
puis rougeoyait à la cime des arbres.
Un calme immense illuminait le ciel.
Contre la vitre une mouche bruissait.
Muets, nous regardions tomber le soir
toujours semblable, toujours différent,
où se mêlaient souvenirs et présages
comme au miroir de cette chambre morte,
et l'ombre de la branche sur le mur
frémissait en un grêle dessin,
signe secret et tendre de la vie.


(extrait de "L'Autre pays" - p.54)
.
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Le temps s'étire comme, mot à mot, une phrase si lente qu'elle semble immobile. Et c'est peut-être dans cette lenteur qu'on voudrait entrer. Pour y trouver ce qui pousse et à la fois appelle. Ce passage comme d'une eau obscure, silencieuse, qui coulerait on ne sait où pour resurgir soudain, miroitante et sonore, ouvrant la vie - un espace si clair qu'il serait sans limite.

p. 62
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                    X
  
  
  
  
   Donc, j’entre. Rien d’autre à faire : dans le jour, dans
le soir, dans la nuit.

   Dans ce que je ne sais pas dire. Dans ce que je ne sais
pas voir.

   L’espace est immense ou étroit, c’est la même chose.
J’entre.

   Entrer suppose qu’on est sorti. Mais quand était-ce ?
Et où ?

   Je compte sur mes doigts. Je les confonds. Je les perds.

  Où en sommes-nous ? Voyons voir. Le soleil éblouit.
L’horizon s’obscurcit.

  J’avance dans ce qui s’avance et se retire. Je suis sur un fil.

Je vais tomber. Est-ce qu’on appelle cela le présent .
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S’immobiliser. Entrer dans la lenteur des choses,
disait-il. Perdre la voix et ce qui va avec.
Convoquer les ombres pour en tirer une lumière.
Peu importe ce qu’elle révèle. L’important
tient dans ce presque rien — un silence, un bruit de pages
et, de l’un à l’autre, la navette du désir.
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Qu'est-ce qu'un lieu - ce qu'on appelle un lieu ? Non pas l'en face du paysage, la distance du panorama, mais cette configuration singulière où, sans qu'on l'ait ni prévu ni voulu on se découvre soudain là, au centre. De quoi on ne le sait pas. Mais on est dans un espace où habiter, où découvrir, une fois encore, que quelque chose commence, ne cesse de commencer et qu'on commence avec.
Comme parfois au détour de tel chemin, la surprise d'un jardin entrevu - l'obscur d'un tronc, le vert liquide de l'herbe et des feuillages - par la porte entrebâillée d'un mur. Ou, plus simplement, ce coin de place au soleil, ce banc à l'ombre de trois peupliers sur lequel on attend. Car c'est peut-être l'attente qui fait le lieu. Tout ce que le corps et le regard y mettent de vie pressentie et promise. En ce sens, n'importe quel morceau d'espace peut devenir un lieu, pour peu que l'habite l'intensité d'une attente qui est moins peut-être celle de ce qui vient que de ce qui revient. Quelque chose comme un grain d'enfance. Et tout se met à briller.

Pp. 11-12
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Huit heures

Entre le vif et la vie
vient se glisser le matin.
Le chien passe à la poursuite
de l'instant. Mains, table et bols
ouvrent le récit du jour.
Le nom de ce qui s'approche
est caché dans les couleurs.
Il est huit heures. L'air brille.

p.26
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[...]
cette sorte d'impatience parfois minuscule,
toujours présente, même si c'est un jour de plus,
le même jour toujours, toujours différent, et l'air
qui bouge dans les feuilles, la lumière un peu grise
autour du tronc obscur qui semble ne pas bouger
mais qui bouge, imperceptiblement, au plus profond
de sa matière, on ne voit rien et pourtant il bouge
autant qu'herbe, nuages, corneilles, tout autour,
mais dans un temps trop lent pour qu'y entre le regard
et trop rapide pour l'attente de la montagne,
chacun son rythme, disait l'autre, puisque le monde
est un faisceau de rythmes croisés entrecroisés
jamais synchrones, celui de l'étoile et du sang,
du mur et du vent, du silex et de l'araignée,
rien ne vibre à l'unisson comme le croient les sens,
tout s'enfuit, tout diverge, se disperse, s'efface
dans l'apparente immobilité, le feu crépite
sous les arbres, on voit les flammes rouges, la fumée
qui penche avec le vent, on entend le bruit de l'eau,
celui des feuilles ou des pas qui ressemble à la pluie,
[... ]

(extrait du "Chant IX") pp. 56-57
56
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Au lever, c’est un éblouissement sur lequel se détache l’encre de deux grands feuillages, quelques bosquets, un ou deux toits. L’air est d’une fraîcheur sonore, rayée d’insectes vifs, l’herbe un infini de feux liquides. Si les yeux montent, ils ne rencontrent que la dérive floconneuse d’une buée et la découpe lumineuse et obscure à la fois d’un grand vide bleu.
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