Poésie - Un enfant - Jacques BREL

Je vous souhaite de souhaiter.
Je vous souhaite de désirer.
Le bonheur c'est déjà vouloir.
Comme en droit pénal, l'intention vaut l'action.
Le seul fait de rêver est déjà très important.
Je vous souhaite des rêves à n'en plus finir,
et l'envie furieuse d'en réaliser quelques-uns.
Je vous souhaite d'aimer ce qu'il faut aimer,
et d'oublier ce qu'il faut oublier.
Je vous souhaite des passions.
Je vous souhaite des silences.
Je vous souhaite des chants d'oiseaux au réveil
et des rires d'enfants.
Je vous souhaite de respecter les différences des autres parce que
le mérite et la valeur de chacun sont souvent à découvrir.
Je vous souhaite de résister à l'enlisement, à l'indifférence,
aux vertus négatives de notre époque.
Je vous souhaite enfin de ne jamais renoncer à la recherche,
à l'aventure, à la vie, à l'amour,
car la vie est une magnifique aventure et nul de raisonnable
ne doit y renoncer sans livrer une rude bataille.
Je vous souhaite surtour d'être vous, fier de l'être et heureux.
Car le bonheur est notre destin véritable.
(Voeux offerts par Jacques Brel au micro d'Europe 1, le 1er janvier 1968)
Ça n'existe pas les adultes, c'est une attitude. On n'en finit pas de courir après les rêves qu'on a eu quand on était petits.
C’est marrant, personne n’a voulu que je débute, et personne ne veut que je m’arrête.
(Le soir de sa dernière à l’Olympia, en pleine gloire)
“La qualité d'un homme se calcule à sa démesure ; tentez, essayez, échouez même, ce sera votre réussite.”
Y en a qui ont le coeur si large
Qu'on y entre sans frapper
Y en a qui ont le coeur si large
Qu'on n'en voit que la moitié
Voir la rivière gelée
Vouloir être un printemps
Voir la terre brûlée
Et semer en chantant
Voir que l'on a vingt ans
Vouloir les consumer
Voir passer un croquant
Et tenter de l'aimer
Voir une barricade
Et la vouloir défendre
Voir périr l'embuscade
Et puis ne pas se rendre
Voir le gris des faubourgs
Vouloir être Renoir
Voir l'ennemi de toujours
Et fermer sa mémoire
Voir que l'on va vieillir
Et vouloir commencer
Voir un amour fleurir
Et s'y vouloir brûler
Voir la peur inutile
La laisser aux crapauds
Voir que l'on est fragile
Et chanter à nouveau
Voilà ce que je vois
Voilà ce que je veux
Depuis que je te vois
Depuis que je te veux
C'est trop facile quand les guerres sont finies
D'aller gueuler que c'était la dernière
Grand Jacques.
Je vous souhaite des rêves à n'en plus finir et l'envie furieuse d'en réaliser quelques uns. Je vous souhaite d'aimer ce qu'il faut aimer et d'oublier ce qu'il faut oublier. Je vous souhaite des passions, je vous souhaite des silences. Je vous souhaite des chants d'oiseaux au réveil et des rires d'enfants. Je vous souhaite de respecter les différences des autres, parce que le mérite et la valeur de chacun sont souvent à découvrir. Je vous souhaite de résister à l'enlisement, à l'indifférence et aux vertus négatives de notre époque. Je vous souhaite enfin de ne jamais renoncer à la recherche, à l'aventure, à la vie, à l'amour, car la vie est une magnifique aventure et nul de raisonnable ne doit y renoncer sans livrer une rude bataille. Je vous souhaite surtout d'être vous, fier de l'être et heureux, car le bonheur est notre destin véritable.

Je suis un soir d'été
Et la sous-préfecture
Fête la sous-préfète
Sous le lustre à facettes
Il pleut des orangeades
Et des champagnes tièdes
Et les propos glacés
Des femelles maussades
De fonctionnarisés
Je suis un soir d'été
Aux fenêtres ouvertes
Les dîneurs familiaux
Repoussent leurs assiettes
Et disent qu'il fait chaud
Les hommes lancent des rots
De chevaliers teutons
Les nappes tombent en miettes
Par-dessus les balcons
Je suis un soir d'été
Aux terrasses brouillées
Quelques buveurs humides
Parlent de haridelles
Et de vieilles perfides
C'est l'heure où les bretelles
Soutiennent le présent
Des passants répandus
Et des alcoolisants
Je suis un soir d'été
De lourdes amoureuses
Aux odeurs de cuisine
Promènent leur poitrine
Sur les flancs de la Meuse
Il leur manque un soldat
Pour que l'été ripaille
Et monte vaille que vaille
Jusqu'en haut de leurs bas
Je suis un soir d'été
Aux fontaines, les vieux
Bardés de références
Rebroussent leur enfance
À petits pas pluvieux
Ils rient de toute une dent
Pour croquer le silence
Autour des filles qui dansent
À la mort d'un printemps
Je suis un soir d'été
La chaleur se vertèbre
Il fleuve des ivresses
L'été a ses grand-messes
Et la nuit les célèbre
La ville aux quatre vents
Clignote le remords
Inutile et passant
De n'être pas un port
Je suis un soir d'été

Bien sûr, il y a les guerres d´Irlande
Et les peuplades sans musique
Bien sûr, tout ce manque de tendre
Et il n´y a plus d´Amérique
Bien sûr, l'argent n´a pas d'odeur
Mais pas d´odeur vous monte au nez
Bien sûr, on marche sur les fleurs
Mais, mais voir un ami pleurer !
Bien sûr, il y a nos défaites
Et puis la mort qui est tout au bout
Nos corps inclinent déjà la tête
Étonnés d´être encore debout
Bien sûr, les femmes infidèles
Et les oiseaux assassinés
Bien sûr, nos cœurs perdent leurs ailes
Mais, mais voir un ami pleurer!
Bien sûr, ces villes épuisées
Par ces enfants de cinquante ans
Notre impuissance à les aider
Et nos amours qui ont mal aux dents
Bien sûr, le temps qui va trop vite
Ces métros remplis de noyés
La vérité qui nous évite
Mais, mais voir un ami pleurer!
Bien sûr, nos miroirs sont intègres
Ni le courage d´être juif
Ni l´élégance d´être nègre
On se croit mèche, on n´est que suif
Et tous ces hommes qui sont nos frères
Tellement qu´on n´est plus étonné
Que, par amour, ils nous lacèrent
Mais, mais voir un ami pleurer!