Jacques Scheuer

Plus précisément, toute l’aventure du bouddhisme depuis près de vingt-cinq siècles tient à une décision capitale : la décision prise par Gautama l’Éveillé de partager et transmettre ce qu’il a découvert. À vrai dire, s’agit-il d’une décision, d’un choix, d’une volonté, d’une initiative ou plutôt d’une nécessité ? Nous aurons à revenir là-dessus. Dans leur forme narrative, les premiers textes mettent simplement les choses en scène, ils déploient un récit, présentent une succession d’événements. Au cours d’une ultime nuit de méditation et de quête ardente, Gautama est parvenu à des découvertes décisives et transformatrices. Il voit à présent la réalité telle qu’elle est, débarrassée des constructions factices, libérée des illusions, des méprises et des attachements passionnés qui la masquaient et la défiguraient

Le bouddhisme en Inde, c’est un peu l’histoire de la bouteille à moitié pleine ou à moitié vide. Peu de gens le voient comme une composante du monde indien contemporain, dans la mesure où les communautés bouddhistes ont pratiquement disparu de l’Inde vers le XIIe siècle : ce qui a pu survivre ne comptait plus comme force organisée et influente, que ce soit au plan politique, culturel, philosophique ou religieux. C’est donc, depuis près de mille ans, la bouteille vide.

Cette insistance sur la pratique et l’expérience, nous la retrouverons dans le voyage que Thomas entreprendra en Asie, sans que disparaissent pour autant les questionnements de nature plus doctrinale