Le roi va mourir. Périclès se meurt, dans une Athènes ravagée par la peste. Aussi le temps est-il venu alors que la maladie le ronge de convoquer son fils pour un ultime bilan de quinze années de « règne » alors que le pouvoir vacille : « Je me fais à moi-même un récit, qui tient à la fois de la légende, de l’examen de conscience et du livre de comptes » …
Un bilan sous forme de mise en garde sur la tentation de copier le passé : « Je ne crois pas aux leçons du passé, sinon pour mettre en garde contre la tentation de le copier. » ; sur la tentation de gouverner en force : « Le consentement mutuel est un lien plus solide que la crainte. » ; sur la possibilité de la mollesse : « Une minute, parfois, décide de tout. La refuse-t-on ? Plus tard, l’occasion perdue pèse sur la vie comme une dalle au tombeau. »
Tel est l’état d’esprit de Périclès alors qu’il sent que la maladie le ronge et que sa fin approche. Une longue introspection sur son action, ses faiblesses et ses hésitations, ses violences et ses impatiences dans sa quête pour faire d’Athènes la cité dominante de l‘Hellène.
« L’olympien », un court récit dont nos politiques feraient bien de s’inspirer, à l’heure où un virus met à mal la santé des citoyens, sur fond d’Europe qui se délite.
J. de Bourbon Busset fait partie, me semble-t-il, des auteurs quelque peu oubliés. Pour ma part, ce sera toujours un ravissement de me plonger dans cette prose « classique », élégante tant dans la syntaxe que dans le vocabulaire ; en finesse …
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En 1987, Jacques de Bourbon Busset, veuf, écrivait ce somptueux " hymne à l'amour " que fut "Lettre à Laurence", sa femme ; un ouvrage qui fut ma première lecture de l'auteur.
Depuis, au fil de mes promenades de bouquiniste en vide grenier, je ne manque jamais une occasion de me replonger dans sa prose si élégante...
"Les aveux infidèles" 1962. Laurence est à ses cotés, mais Jacques de Bourbon Busset vient de perde une amie très chère, J. , à la suite d'une longue maladie, comme il est convenu de le dire ...
" Les aveux infidèles ", une suite de courts chapitres sans lien véritable les uns avec les autres ; une suite introspective au fil de l'eau, au fil de la pensée qui va... qui vient... On revient avec l'auteur sur une histoire familiale , la sienne, dramatique ; on revient sur sa carrière de diplomate ; on insiste sur cette relation avec sa femme, une relation de complicité amoureuse, tout autant que compétition intellectuelle.
En un mot comme en cent, c'est toujours pour moi un vrai régal que de me replonger au du hasard d'une rencontre " de chine ", dans ce genre de lecture ; comme on retrouve un vieil ami, qu'on a pas vu depuis un certain temps mais que la rencontre, au gré d'une promenade sans but aucun, rend celle-ci lumineuse.
Les premiers mots : " à Laurence "...
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Tu coque mi fili !
Nous sommes à Rome en 44 av. J.-C. et plus précisément aux ides de mars. César attend de se rendre au Sénat pour se faire couronner.
C'est l'occasion pour lui de revenir sur sa vie, ses succès, ses échecs, ses doutes, ses projets. Et notamment cette guère contre les Parthes…
L'homme est sûr de lui et de son pouvoir, bien qu'il n'ignore pas les nombreux ennemis « qui ne pensent qu'à l'égorger », et bien qu'il n'ignore pas non plus les recommandations à la prudence de L'haruspice étrusque Spurinna : « César, entre le faste et la gloire, je vous mets en garde contre les Ides de Mars. »
Après « L'olympien » qui voyait Périclès mourant, se pencher sur son passé, plein de doutes sur ce qu'il a fait d'Athènes, J. de Bourbon-Busset nous entraîne dans la Rome antique de César au moment où celui-ci attend la gloire. Il ne sait pas qu'à l'instar de Périclès, il attend lui aussi la mort.
Je ne dirai jamais assez combien un petit opus de Bourbon-Busset comme celui-ci, cent-cinquante pages, peut ouvrir de pistes de réflexion : politiques, philosophiques…
A l'époque, André Billy, du Figaro, notait : « Je voudrais pouvoir relever dans MOI, CESAR tous les passages les plus propres à faire réfléchir et rêver le lecteur. On en trouve presque à chaque page.»
Ajoutons à cela une langue splendide. Un récit dont le sous-titre aurait pu être : « confession d'un politique, essai sur l'ambition ».
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J’ai découvert Jacques de Bourbon Busset avec « Lettre à Laurence », paru en 1987.
Veuf depuis trois ans il communique ainsi avec celle qui fut l’amour de sa vie : « Je m'adresse à toi. Je cherche à me prouver ainsi que mes mots sont capables de t'atteindre, même s'ils restent sans écho. »
Depuis, chaque fois que le hasard me fait découvrir au fil de mes « promenades » de bouquiniste en vide grenier, un volume de son journal, ou tout simplement un de ses romans ou récits, je n’hésite pas un instant.
Dans cette « Lettre à Laurence », il parle à celle qui partagea quarante ans de sa vie.
En 1956, il publiait déjà, dans la même veine d’inspiration, « Antoine, mon frère » où l’on découvre un homme prêt à monter à l’assaut de l’ennemi, dans une guerre qu’on imagine sans mal, celle de 14/18. Un testament, en quelque sorte ; les chances de s’en sortir vivant lui semblent minces…
Aussi rédige-t-il ce document à l’adresse de son propre frère, Antoine disparu depuis plusieurs années. Antoine, son frère, son ami, son confident.
Il parle de sa quête de l’amour, des femmes, de l’amitié, de la folie, de la vie, de la mort…
« Antoine, mon frère », une introspection profonde qui laisse penser à quelque chose d’autobiographique, même si l’auteur n’a jamais eu de frère prénommé Antoine. Une introspection d’une rare finesse portée par un style qui me ravit ; même si j’entends les détracteurs du diplomate devenu académicien le qualifier de désuet.
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Georges Mortagne, un banquier parisien de renom est en route pour New-York. On perd sa trace à Shannon, en Irlande : disparu !
Sa femme, Irène s’agite : n’est-il pas parti rejoindre son ex, Madeleine ? A-t-il décidé d’en finir ?
Une drôle « d’enquête » dans laquelle elle se verra secondée par l’ami fidèle du couple, et discrètement amoureux, Letellier, l’historien…
Un excellent bouquin sous la plume élégante de Jacques de Bourbon Busset qui ne livrera les clés du problème que dans les derniers chapitres. Une occasion pour l’auteur de nous présenter une galerie de portraits saisissante ; d’Irène, la femme aimante, à Madeleine, l’ancienne maitresse, en passant par l’historien Letellier, le philosophe Raynal, mais aussi et surtout Philippe, le fils un peu perdu…
Une occasion également pour l’auteur, de commenter les relations humaines et internationales, la politique, la religion… Un livre paru en 1958, mais dont la plupart des thèmes abordés n’ont (malheureusement pour certains) pas pris une ride.
Et quel style ! Un vrai régal de se plonger, en vacances, dans ce genre de prose élégante et reposante.
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Veuf, Jacques de Bourbon Busset nous livre ses pensées, mélancoliques, nostalgiques... et quelles pensées !
Un hymne à l'amour, à l'aimée...
On atteint des sommets dans la délicatesse. Une prose qu'on enseigne plus dans nos écoles, à la limite de la poésie...
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Jacques de Bourbon-Busset, diplomate et membre de l'Académie Française, adresse dans une langue magnifique une lettre à sa femme décédée trois ans auparavant. Ne pouvant rivaliser avec la beauté de cette écriture, j'appuierai chacun de mes arguments sur des citations du livre.
En 110 pages, l'auteur parle d'un ‘'amour fou'' qui a duré plus de quarante ans et qui continue après la mort («L'aventure d'un amour fou durable et l'alliance du vertige et de la durée. (…) Tu étais pour moi ce qu'il y avait de plus réel dans le réel. (…) L'amour change la couleur du temps. Des points lumineux s'allument, s'éteignent, se rallument après des années. Les mois, les semaines, les jours sont multicolores. Il en est de noirs, de bleus, de rouges, d'écarlates. le temps n'est plus un long chemin qui s'étire tristement, c'est un feu d'artifice où les fusées de la joie s'efforcent d'éclairer la nuit obscure. (…) Ma vraie vie s'est terminée le jour de ta mort. (…) Désormais, nous sommes tout le temps ensemble. C'était ton rêve. Il est accompli. Il m'a fallu du temps et du courage pour le comprendre. Maintenant encore, par moments, je lâche pied. Tu es là et tu m'aides. Je ne veux pas te décevoir.»).
Il s'interroge sur les raisons qui ont poussé Laurence, enthousiaste et éprise d'absolu, à jeter son dévolu sur lui, le dilettante. (« Pourquoi me faisais-tu confiance d'une manière aussi inconditionnelle? Cet acte de foi me paraissait en contradiction avec ta lucidité et ton sens du réel. Il y avait là quelque chose d'inexplicable et qui, pour moi, reste inexpliqué. C'est ta confiance aveugle qui, en fait, a façonné notre destin. (…) Il y avait une inexplicable disproportion entre tes sentiments et l'homme que je suis. (…) Je désirais rester libre, mais, devant toi, je prenais conscience de la stérilité, de la mesquinerie de ce désir. (…) J'ai senti fortement à quel point l'être aimé pouvait être un obstacle, obstacle à la débauche bien sûr, obstacle à l'arrivisme, obstacle à la camaraderie facile, obstacle surtout à la vie sans histoires, prise comme elle vient. (…) J'ai entendu battre dans ton âme la passion de l'absolu et j'ai compris que jamais je n'écouterais aucune musique plus intense que celle-là. (…) C'est ton amour violent et généreux qui m'a fait passer sur l'autre rive, qui, en m'expulsant de moi, m'a fait devenir moi. (…) La joie d'exister, c'est toi qui me l'as apprise. Avant de te connaître, j'étais un de ces vivants qui ont l'air de s'excuser de vivre. »).
Cet amour est ancré dans le réel (« Une vie n'est pas faite que de temps forts. (…) Rien n'est jamais acquis, tout peut être remis en cause à chaque instant. ( …) Aimer, ce n'est pas rêver qu'on aime, c'est agir comme si l'on aimait. (…)Il a fallu désarmer de nos amours-propres. Ce fut long et difficile. Nous étions aidés dans cette conviction que rien ne tue plus sûrement l'amour que l'amour propre. (…) Nous n'avions pas déclamé des serments romantiques mais nous savions qu'aucune circonstance ne pourrait jamais nous séparer. Bien des fois, nous avons été mis à l'épreuve. Nous en avions longuement parlé et avions réduit l'obstacle à un incident de parcours.»)
Cet amour est basé sur le respect de l'autre, ‘'la nécessité d'une distance à conserver'' («Ce qui est le plus intime doit être protégé. Ce n'est pas un trésor, c'est beaucoup plus, c'est le ressort intérieur et il importe de le ménager chez l'autre comme chez soi. Aussi convient-il, entre amants, d'user de discrétion, de savoir renoncer à certaines questions et de respecter certains silences.»).
Cet amour est aussi basé sur une grande complicité (« Cette étrange complicité qui faisait de nous les coauteurs d'un roman où se mêlaient les lianes vertes du sentiment, les étincelles des idées, les nénuphars du souvenir, les tentacules de l'angoisse. (…) J'ai appris la valeur incomparable des vraies conversations à coeur ouvert. Sont-elles possibles s'il n'y a pas union des corps ? Sans doute, mais je crois qu'il faut avoir abandonné toutes ses défenses, s'être livré physiquement tel quel pour s'exposer entièrement au jugement de l'autre.»)
Une lettre à des années-lumière des SMS et autres MMS ; elle aurait pu avoir pour sous-titre la première phrase du livre ‘'J'ai connu la grâce de vivre un grand amour partagé'' et se termine ainsi : ‘'Je te remercie d'être, plus que jamais, la chance de ma vie, toi, ma raison ardente''.
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Avez-vous déjà dialogué avec un arbre, un chêne, en l’occurrence ; ou une aubépine, Florence ? Non ? Moi non plus… Pourtant c’est bien ce que fait Jacques de Bourbon Busset… enfin… tantôt Ego, tantôt un goéland… mais c’est sans doute la même chose…
Un petit bouquin : quatre-vingts pages d’une densité poétique incomparable ; à tel point qu’à la lecture de cette petite musique de la nature, on doit se retenir de ne pas citer l’ensemble du texte. Une ode à la frange de terre qui s’étend entre mer et forêt, mais également à l’homme situé entre sa réalité et les rêves apportés par le vent qui lui « souffle à l’oreille beaucoup de choses sensées et quelques absurdités », entre sa pensée et la vie…entre l’esprit et la lettre…
Un court texte d’une grande beauté pour tous ceux qui, comme moi, sont sensibles à la musique des mots…
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Le renvoi au diamant me semble pour ma part un éloge évident au "tranchant", au catégorique (jamais vraiment impératif ). Je ne peux en ce qui me concerne ne pas signaler (c'est presque un devoir moral !) la dédicace "à Mircea Eliade dont le "Traité d'histoire des religions" m'a conduit sur les chemins de l'hiérogamie, en témoignage d'amicale gratitude."
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Je pense que ce petite livre c'est la chose la meilleure que j'ai lu dépuis des années.
Très emouvant, jamais banal, bref, très beau.
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Sympathique méditation sous forme de réflexions et de dialogues (avec un arbre) sur l'importance de l'instant et d'une présence intense au monde. L'auteur privilégie l'attention aux sensations à l'intellectualisme pur, allie la sensibilité à la rationnalité, et ce sous une forme poétique qui évoque une sorte de mystique de la vie, pour parler comme Péguy. De jolis passages, quelques longueurs et redites (heureusement fort brèves) composent l'ensemble de ce court texte qui demande de l'attention pour être lu.
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C'est en 1964, deux ans après l'attentat du Petit-Clamart, que Jacques de Bourbon-Busset a écrit ce court roman au caractère de fable.
Roman d'anticipation, il s'agit surtout d'un roman hors du temps. L'action est censée se passer en Italie, mais nous sommes un peu hors de l'Espace.
Un gouvernant, dont nous ne connaissons pas trop la légitimité, ni le caractère démocratique, a fait l'objet d'un attentat. Son auteur, un tout jeune homme, est condamné à mort.
Sur ce maigre décor, Bourbon Busset imagine la méditation du chef d'Etat face à son droit de grâce : s'il permet l'exécution, c'est une faute, s'il gracie, un aveu de faiblesse.
Le livre, court mais ardu, plein de références à Musset et Hugo, me semble avoir perdu de son actualité. Peut-être suis je passé à coté, mais il ne m'a pas vraiment marqué.
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Trois ans après la mort de son épouse, avec qui il a vécu quarante ans, Jacques de Bourbon-Busset revisite leur histoire et son essence, dans ce magnifique texte qu'il lui adresse. Ce texte court - une centaine de pages qui ne se lisent pas si vite - me marquera plus profondément que bien des œuvres beaucoup plus longue. Avec un style très pur, qui n'est pas sans rappeler celui de Chardonne, Bourbon-Busset nous offre un véritable collier de perles. De magnifiques phrases viennent régulièrement nous éblouir et nous toucher à l'âme. Entre deux perles, un chemin plus escarpé, parfois difficile, qui nous oblige à réfléchir et à plonger au cœur de nous même.
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S’il ne devait rester qu’un livre dans ma bibliothèque, ce serait celui-ci. Une ode à l’amour véritable, celui qui accepte l’autre avec ses silences et ses éclats, ses ombres et ses lumières. Un amour juste, réaliste, lumineux, dans lequel même l’absence reste une présence. Une déclaration intense, d’une sincérité à vous tordre le cœur, à celle qu’il surnommait avec respect, admiration, amour et tendresse le Lion. Il a si bien dit « L’amour durable, ce n’est pas l’amour qui se maintient, c’est l’amour qui grandit avec le temps »
Voilà ce qu’est la Lettre à Laurence. La trace de cet amour conjugal exceptionnel.
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Une magnifique lettre d'amour écrite d'une plume admirable, qui témoigne d'un amour exceptionnel et tendre.
Un chef d'oeuvre... petit par le nombre de pages, mais inoubliable par la profondeur et la vérité des sentiments exprimés.
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Une très belle lettre d’amour, très émouvante.
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Le style épuré de Bourbon Busset (l'ainé des Capétiens) est une école pour moi. Pas de redondances, de formules ampoulées... Le mot juste remplace la phrase alambiquée. C'est le respect de son lecteur par l'auteur. Il va à l'essentiel. Il est précis. Il exprime sa pensée le plus simplement possible et ne la fait pas deviner ne nous entrainant dans un labyrinthe de mots.
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