AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de enkidu_


Trois des quatre Évangiles du Nouveau Testament, ceux de Matthieu, Luc et Jean, signalent que Jésus a été « vu » après sa mort, afin de confirmer qu’il est bien revenu d’entre les morts. Mais que dire de Marc, alors ? Nous arrivons ici à l’un des aspects les plus méconnus, ou délibérément ignoré, de notre histoire : aussi renversant que cela puisse paraître, les manuscrits originaux de Marc, notre plus ancienne source évangélique, ne mentionnent aucune apparition de Jésus ressuscité ! Il achève son récit sur la découverte de la tombe vide, rien de plus. A l’origine, le dernier verset était Marc, 16, 8 : « Elles(1) sortirent du sépulcre et s’enfuirent. La peur et le trouble les avaient saisies ; et elles ne dirent rien à personne, à cause de leur effroi. » Je dis « à l’origine », car pour des raisons évidents, il était impossible qu’une conclusion aussi abrupte, aussi « incomplète », soit tolérée : elle était trop dérangeante, pour les premiers chrétiens. Le christianisme s’est précisément construit sur l’idée que Jésus était apparu à des individus et des groupes après sa mort. Mais comment expliquer que Marc ait laissé de côté un point aussi capital ?

Au cours du IIe siècle – soit cent ans après la rédaction du texte original ! –, des scribes zélés ont « inventé » une fin à l’Évangile de Marc. La conclusion reprise dans la plupart des éditions, c’est-à-dire les versets 9 à 20 du chapitre 16, n’existe dans aucune des copies les plus anciennes – et donc les plus fiables – du texte. En réalité, il s’agit d’une compilation plutôt maladroite des différentes apparitions de Jésus rapportées par Matthieu, Luc et Jean(2). Elle ne contient aucun matériau qui appartienne spécifiquement à Marc, et son style diffère sensiblement du grec utilisé par cet évangéliste.

Deux auteurs chrétiens du IIIe siècle, Clément d’Alexandrie et Origène, ne connaissaient même pas l’existence de cette finale « allongée », puisqu’elle n’avait pas encore été concoctée… Au début du IVe siècle, Eusèbe et Jérôme connaissaient son existence, mais soulignaient son absence dans presque tous les manuscrits grecs dont ils disposaient.

(1) Marie, Marie Madeleine et Salomé.

(2) Ces derniers versets ne se trouvent ni dans les plus vieux manuscrits dont nous disposions (Sinaiticus et Vaticanus), ni dans plus d’une centaine de copies arméniennes, ni dans la version en latin ancien, ni dans le Sinaticus syriaque. Même les versions qui les reprennent sont souvent accompagnées d’une note du copiste précisant qu’ils ne sont pas présents dans des manuscrits plus anciens. (pp. 238-239)
Commenter  J’apprécie          60









{* *}