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Critiques de James Joyce (269)
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Ulysse

S'il est certain que ce livre a un caractère unique et très novateur pour son temps, il est néanmoins difficile de prétexter qu'Ulysse est un livre agréable à lire.

Comment vous dire ? C'est une manière d'immense marché aux puces où l'on doit fouiner pour trouver son bonheur, et encore, pas garanti : des monologues ou l'on saute du coq à l'âne en permanence, aucune longueur épargnée, des jeux de mots ou de sonorités parfois indéchiffrables, des liens quasi infaisables.

Bref, c'est éprouvant et sur un livre comme le Bruit Et La Fureur de Faulkner, on peut encore tenir le coup et l'on est — globalement — payé de retour, par contre quand le pavé dure plus de 1150 pages, il faut avoir l'estomac solide et une sérieuse envie d'aller au bout pour ne pas décrocher.

Il y a pourtant des tonnes de trouvailles dans toute cette mélasse où nous englue Joyce (manifestement avec plaisir), et l'on devine l'influence sur des auteurs majeurs comme Céline ou Kerouac, mais qui eux ont su rendre leur oeuvre un tant soit peu digeste.

Bien sûr, c'est plus vendeur, mieux vu et mieux en phase avec l'intelligentsia bobo prout-prout de dire que face à un tel OVNI, on est pantois d'admiration, que ces plus de 1000 pages ont été un bonheur, qu'on en aurait voulu 3000, 5000, que sais-je, 10000 tellement c'est bien écrit, tellement c'est jouissif, tellement c'est hors tout et, sincèrement, j'aimerais le dire, mais c'est un pur mensonge.

Combien de fois me suis-je accrochée, combien de fois ai-je voulu tout abandonner, tout plaquer de cette lecture parfois imbuvable, indigeste et sans queue ni tête ?

Pourtant, je ne peux pas non plus dire que tout a été négatif dans mon ressenti de l'ouvrage. Des chapitres comme "Nausicaa", "Eumée", "Eole" ou même "Hadès" m'ont bien plu, mais il y eut aussi (et malheureusement surtout) les bouillies inqualifiables comme "Les Sirènes", "les Lestrygons", "les Lotophages", "Charybde et Scylla", "Circé" etc. dont la lecture n'est à souhaiter à personne, sauf si c'est un véritable ennemi.

Si je puis juste me permettre un conseil aux personnes désireuses de le lire malgré tout (et je conçois parfaitement que le piment de la curiosité vous y amène), ne prenez pas ce livre trop au sérieux (comme Joyce lui-même semblait le faire), amusez-vous des exercices de styles (Joyce explore un nouveau style à chaque chapitre), oubliez la glose multilingue incompréhensible, bref, prenez ce qu'il y a à prendre et ne vous encombrez surtout pas du reste.

À noter que la nouvelle traduction est vraiment excellente et l'on imagine bien les arrachages de cheveux que cela a dû être pour traduire des bredouillis de mots comme Joyce en emploie souvent. Mais tout ceci, vous le savez, n'est que mon misérable avis qui, lui, n'a rien d'homérique, c'est-à-dire, pas grand chose.
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Gens de Dublin

Livre impressionniste par excellence, son titre aurait pu être Impression Dublin Levant. Exactement à la manière des peintres de la mouvance de Monet qui essayaient de capturer la lumière d’un instant, James Joyce essaye de recueillir en le moins de pages possible des impressions, des sensations, des sentiments fugaces, qui, mis bout à bout, donnent une idée de la « température » du Dublin début de siècle, juste après la grande hémorragie de la seconde moitié du XIXème et juste avant la nouvelle hémorragie de la Première Guerre Mondiale et en plein processus d’accession à l’indépendance dans un contexte religieux houleux dont on sait ce qu'il deviendra.

Dans son style, ce recueil de quinze nouvelles peut être rapproché du livre de John Dos Passos, Manhattan Transfer, qui reprendra cette manière impressionniste de Joyce en cherchant lui aussi à dresser non le portrait de personnages, mais l’atmosphère d’une ville et d’une époque.

Moi qui avait été tellement déçue à la lecture d’Ulysse, je ne peux qu’applaudir devant la finesse d’écriture, l’élégance, la justesse et la maîtrise de l’exercice, plutôt périlleux, s’il en est, et qui m’a ravi.

On peut certes être dérangé par la sensation de « papillonnement » autour de telle ou telle personnalité qu’on aimerait creuser davantage. Mais dans le projet littéraire que James Joyce s’est proposé, c’est absolument parfait, des petits instantanés au Polaroïd de sa plume, où l’on évoque la religion, l’émigration, les problèmes économiques, le nationalisme, l’alcool et les pubs, les relations de travail, les formes de l’amour et surtout le Caractère avec un grand C de ces gens de Dublin (ou de ces Dublinois, selon la traduction).

En guise de conclusion, si vous aviez encore un doute sur quel bouquin de Joyce vous deviez lire, je vous conseille sans ambages Gens De Dublin plutôt qu’Ulysse (ou pire encore Finnegans Wake, sauf pour notre ami Gurevitch qui doit le trouver limpide et même un peu simpliste), cela vous prendra beaucoup moins de temps et vous n’y perdrez pas au change, en tout cas c’est mon misérable avis émis depuis le continent, c’est-à-dire, pas grand-chose.
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Ulysse

Mon prof de philo m’avait dit à la fin d’un cours : « Ulysse de Joyce, ça se mérite ». Je n’ai jamais aimé cette notion de mérite, récompense de ceux qui ont bien transpiré, pour moi antinomique du plaisir de la lecture. Je m’y suis mis à vingt ans par esprit bravache, calant aux deux tiers, nauséeux sur certains passages extrêmement difficiles à lire, mais déjà fasciné par l’exercice de style (L’Odyssée d’Homère condensée sur une seule journée et racontée sur plus de mille pages) et les flamboyances époustouflantes de certains passages. Je m’y suis replongé calmement une quinzaine d’années plus tard, prenant mon temps, sautant des passages (merci monsieur Pennac pour ce conseil avisé), les relisant ultérieurement, les relisant encore (je conseille à haute voix !). Je n’ai pas hésité une seule seconde à utiliser des « décodeurs » intellectuels, à lire en parallèle des explications de textes, des résumés, des analyses de certains passages. Ce livre est devenu pour moi une brique indispensable à mon petit édifice personnel.

Alors, Ulysse, non cela ne se mérite pas mais tant mieux pour ceux qui sont rentrés dedans et y ont puisé des ressources personnelles et du plaisir. Cela dépend de chacun, de l’effort qu’on est prêt à y mettre, de son état d’esprit au moment de la lecture. Au même titre que beaucoup d’autres romans « cultes » (encore un mot bien réducteur), mais pas toujours faciles à lire, avouons-le, comme, sans être exhaustif, Belle du Seigneur et les monologues sans fin d’Ariane, Cent ans de solitude au style souvent abscons, les descriptions pointilleuses et névrotiques de La vie mode d’emploi, pour ne citer que des ouvrages que j’ai beaucoup aimé par ailleurs ! Le monologue intérieur de Molly Bloom, Pénélope de cette épopée, point d’orgue final du roman, range indiscutablement Ulysse dans la même catégorie que ces œuvres littéraires majeures.
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Gens de Dublin

Le jeune James Joyce, en dépit du titre, ne nous lègue pas exactement un guide du routard pittoresque avec “Gens de Dublin”. L’emblématique auteur irlandais, adepte du “courant de conscience” use de la (désormais) capitale d’Irlande comme d’un ancrage, certes tangible, mais au second plan. Car ce sont avant tout les pensées, fluctuantes, les entrailles des personnages, sur fond d’une banalité parfois insoutenable, qui font l’attrait de ces nouvelles. Les sentiments sont sans frontières, ainsi nous sommes tous et chacun ces gens de Dublin.



Joyce, bien qu’ayant sacrifié à quelques facéties d’éditeurs sur son style, affirme déjà la suprématie de la vie intérieure des personnages dans la narration, rejoignant ainsi au panthéon des écrivains du “flux de conscience” Italo Svevo, Henry James, Marcel Proust et bien sûr, Virginia Woolf. D’ailleurs en matière de style, si vous êtes effrayé par “Ulysse”, sachez qu’avec “Gens de Dublin”, vous ne risquez rien ! C’est un livre très abordable, simple dans son écriture.



Le recueil se compose d’un certain nombre de petites histoires, certaines sont des “épiphanies”, comme Joyce les qualifiaient. C’est-à-dire une fulgurante clairvoyance où le personnage se trouve à un moment de bascule et donne impulsivement un coup de volant tantôt à gauche, tantôt à droite, marquant la bifurcation irrémédiable de son destin. Une technique efficacement éprouvée dans la nouvelle “Eveline” par exemple.



Les vies de ces “Dubliners” sont tourmentées dans leur nostalgie par une cruelle amertume, à l’image de Gretta Conroy, l’épouse de Gabriel, dans la dernière nouvelle “The Dead” ou encore du guichetier “Mr. Duffy” dans “A Painful Case”.



La dernière nouvelle, “The Dead” est bien plus longue et représente assez bien le côté déroutant de James Joyce. On a presque l’impression de deux histoires en une… et pourtant c’est bien là tout l’intérêt, derrière l’histoire sociale, celle d’une soirée bourgeoise où, à l’ombre des chants frivoles, des palabres politiques (nous sommes quelques années avant l’indépendance de l’Irlande) se joue l’histoire profonde de deux époux, leur “humus intime” comme disait Robert Musil. L’ouvrage fera l’objet d’une adaptation cinématographique fidèle par John Huston, et Gretta Conroy renaîtra pour le spectateur sous les traits aquilins de sa fille, l’envoutante Anjelica Huston.



Ce film est d’un grand intérêt car Huston donne une interprétation très inspirée et éclairante de cette nouvelle, pleine de pénombre. Mais le fameux flux de conscience reste hors de portée de sa caméra. Notamment dans l’exercice impossible de la description des pensées du personnage de Gabriel, que les équivoques et ambiguïtés d’un jeu d’acteur tout en nuance ne peuvent suffire à faire sentir au spectateur, sans le recours, parcellaire et comme un aveu d’impuissance, à la voix-off…



Qu’en pensez-vous ?

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Ulysse

Livre-monde

Une seule journée (le 16 juin 1904, date à laquelle Joyce a sa première liaison amoureuse avec celle qui deviendra sa femme, Nora Barnacle) de Léopold Bloom et Stephen Dedalus déambulant dans Dublin où rien ne manque des rues, statues, pubs, parcs, squares, jardins, ponts. Après quelques chapitres plutôt limpides, dont je parcours toutes les notes avec enthousiasme, des pages toujours plus labyrinthiques (ah, le chapitre XI, Les sirènes, avec ses jeux de sonorités) me font passer par maint états, consulter Wikipédia (souvent) et autres commentaires (dont des critiques sur Babelio assez savoureuses) pour tenter de trouver un sens à des phrases vraiment absconses. Je découvre alors dans ce qui est une parodie de l'Odyssée, truffée entre autre de nombreuses allusions à Hamlet et aux nationalistes irlandais, que chaque chapitre est un point de vue différent, exprimé dans un style différent (18 en tout) où Joyce pastiche tous les genres et styles littéraires, se jouant des règles d'orthographe et de la syntaxe. Qu’explorant le flux de conscience et le monologue intérieur Joyce avait pour dessein de décrire la totalité d'une journée, la totalité d'une ville, et la totalité d'un homme ordinaire (tout l'art de Joyce étant de faire de quelque chose d'apparemment banal quelque chose qui devient captivant par la manière extravagante dont il le raconte).



Ça et une multitude d'informations utiles pour décrypter le propos de Joyce, dont il m'est arrivé de me demander sérieusement s'il avait écrit pour être lu et compris. Pourtant, j'ai pris un plaisir certain à aller au bout de ma lecture. Quelque chose quand j'en avais assez qui me poussait à persévérer, comme des fulgurances, une lumière brillante éclairant un chemin obscur : la poésie, la trivialité, l'érudition, l'humour et l'ironie (souvent féroces), la transgression, les mots valises, la musicalité du texte de ce diable de Joyce. Vous l'aurez compris une fichue écriture expérimentale qui m'a donné du mal. Un seul jour raconté sur quelque mille deux cents pages dont je suis ressortie fatiguée, rincée mais néanmoins heureuse, pleine et repue telle celle qui sait qu'elle vient de vivre une expérience unique (d'autant que je ne pas sûre de la retenter un jour).

Merci à Gwen qui n'a pas aimé, mais l'a dit avec tellement de talent que j'ai eu envie de découvrir ce monument quelque peu monstrueux et vertigineux qu'est Ulysse de James Joyce.
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Gens de Dublin

« J'appelle la série Dubliners, afin de dénoncer l'âme de cette hémiplégie ou paralysie que beaucoup prennent pour une ville. »



Et c'est bien ainsi que nous apparaît Dublin dans ce recueil de nouvelles écrit autour de l'année 1904 : pétrifiée, fossilisée, confite en dévotion, grise et sale, provinciale, ennuyeuse, étriquée, moins qu'une ville, à mille lieues de ses prestigieuses aînées, Londres, Berlin, et surtout Paris, la flamboyante. Et pourtant, derrière l'ironie mordante de la plume se cache une infinie tendresse pour cette ville bancale et pour ses habitants cultivant un sens de l'hospitalité à nul autre pareil.

Chaque nouvelle est un instantané, un tableau de la vie dublinoise, un moment d'existence saisi sur le vif dans lequel le lecteur est précipité sans préavis, l'auteur ne s'embarrassant pas de propos liminaires. Cette façon de nous jeter dans le récit, cette plume qui semble avoir le mouvement pour principe, à l'image de l'incipit de la nouvelle « Après la course » — « Les voitures roulaient vers Dublin à toute vitesse, lancées comme des boulets dans le sillon de la route de Naas » — m'ont particulièrement séduite.

Parfois, l'amorce s'effectue en un long plan séquence, comme dans « Les deux galants »:

« Le crépuscule d'août gris et tiède était descendu sur la ville et un air doux et tiède, comme un rappel de l'été, soufflait dans les rues. (…) Pareilles à des perles éclairées du dedans, du haut de leurs longs poteaux, les lampes à arc illuminaient le tissu mouvant des humains qui, sans cesse changeant de forme et de couleur, envoyait dans l'air gris et tiède du soir une rumeur incessante, monotone. »

D'autres fois, le récit débute par un gros plan sur l'un des protagonistes, comme dans « Eveline » :

« Elle était assise à la fenêtre et regardait le soir qui envahissait l'avenue. Sa tête s'appuyait contre les rideaux de la croisée, et dans ses narines montait l'odeur de la cretonne poussiéreuse. Elle était lasse. »

Toujours, c'est la surprise qui domine, le lecteur légèrement déstabilisé devant fournir un effort pour entrer dans chacune de ces histoires, un effort mille fois récompensé par la verve, la truculence de la plume, ainsi que par l'acuité du regard que l'auteur porte sur ses contemporains et sur lui-même. Entrelaçant savamment éléments autobiographiques et sens aigu de l'observation, Joyce nous offre des instantanés de vie qui, certes, appartiennent à une époque, le début du vingtième siècle, et à un lieu, Dublin, mais dont les constantes intemporelles s'appliquent avec une pertinence intacte à aujourd'hui et à nous-mêmes.



À l'instar de Proust qui, en 1904, va bientôt s'atteler à son grand oeuvre, Joyce fait de sa vie son oeuvre et de son oeuvre sa vie, autrement dit conçoit son oeuvre comme une quête de soi-même. Raison pour laquelle l'un et l'autre ont si profondément marqué la littérature occidentale du XX° siècle.

Je me suis d'ailleurs surprise à relever des correspondances entre Joyce et Proust dans Gens de Dublin. Bien que ne se connaissant ni l'un ni l'autre, je me plais à penser qu'une sensibilité commune, une sensibilité qui fait la part belle à la mémoire et à l'imagination, les réunit.

Ainsi dans la nouvelle « Arabie », le narrateur se consumant d'amour pour sa jeune voisine, emporte son image partout avec lui « même dans les endroits les moins romantiques », psalmodiant à voix haute son nom et pleurant sans raison, de même le jeune narrateur de la Recherche éperdu d'amour pour Gilberte Swann, englobe dans son adoration tout ce qui a trait de près ou de loin à l'objet aimé, jusqu'au vieux maître d'hôtel des Swann sur les favoris blancs duquel il attache « des regards pleins de passion. »

Ou encore quand, dans la nouvelle de Joyce, après que la femme adorée a demandé au narrateur s'il compte se rendre à la foire de charité l'Arabie, celui-ci se prend à rêver aux consonances de ce nom — « les syllabes du mot Arabie m'arrivaient à travers le silence dans lequel mon âme baignait luxueusement et projetaient comme un enchantement oriental tout autour de moi » — je n'ai pu m'empêcher de penser au narrateur de la Recherche qui, sur la foi d'une phrase de Swann prononcée des années plus tôt au sujet d'une « église presque persane » visitée à Balbec, pare en imagination la ville de bord de mer normande des mille charmes de l'Orient.



C'est un tableau de vies grises, mornes, irrémédiables que dresse Joyce dans Gens de Dublin, un tableau où affleure parfois l'amour, une fugitive tendresse, mais où partout domine la solitude.



« Son âme s'évanouissait peu à peu comme il entendait la neige s'épandre faiblement sur tout l'univers comme à la venue de la dernière heure sur tous les vivants et les morts. »

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Ulysse

Un chef d’œuvre avant-gardiste, déconcertant, révolutionnaire.

L’histoire : les déambulations physiques et les pérégrinations mentales de Léopold Bloom à travers Dublin pendant une journée.

Le roman se compose de dix-huit épisodes dont les dix-huit titres que l’auteur ne voulait pas mettre au départ, représentent les personnages de la mythologie grecque que l’on retrouve dans l’Odyssée d’Homère et dont il fait allusion à travers les tribulations de Bloom.

Le roman de James Joyce est une cathédrale symphonique de mots. C’est une expérience intérieure mystique. La narration rappelle parfois celle du « Cantique des cantiques ». Il y a aussi de l’ « Ubu roi » d’Alfred Jarry (1896), de l’ « Alice au pays des merveilles » de Lewis Caroll (1865), dans cette monumentale histoire. Le personnage principal, Léopold Bloom (Ulysse) fait penser à Ahasvérus, le juif errant de cette légende moyenâgeuse qui a inspiré bien des écrivains.

James Joyce cultive l’art du monologue intérieur. La phrase réduite parfois à sa plus simple expression de mot est magnifiée. Son texte donne l’impression d’être chanté plus que lu. Le style changeant d’un épisode à un autre est déroutant. Il fait parfois penser à de l’écriture automatique. En fait, il s’agit plus d’une écriture au débit épileptique, saccadée car l’auteur a pris un soin méticuleux à construire son récit, l’enrichissant de citations latines, de références à l’histoire de son pays, l’Irlande, et aux personnages illustres qui l’ont écrite. Il fait aussi souvent référence aux auteurs illustres tels que Shakespeare, Byron et bien d’autres. L’œuvre est imprégnée de son éducation jésuite.

Style décousu, écriture psychédélique, le roman de James Joyce contient les outils dont s’inspireront plus tard William S. Burroughs, « le festin nu » et sa technique du « cut-up », ou Jack Kerouac, « on the road » et beaucoup d’autres auteurs de la Beat Génération ou pas.

L’architecture novatrice du roman de James Joyce bouleverse l’académisme antique de ses contemporains. Il va même jusqu’à inventer son propre vocabulaire en collant les mots pour en former d’autres et rendre son texte pratiquement illisible.

La musicalité de la narration est un des éléments essentiels du texte de James Joyce. On y retrouve son goût immodéré pour l’opéra, Verdi, Mozart, dont l’auteur sera un spectateur assidu, jusqu’à acheter des places pour voir huit ou dix fois d’affilé la même représentation. Dans « Ulysse », on retrouve ce chant, cette construction lyrique.

Extrait : Les Lotophages, épisode V.

Tellement chaud. Sa main droite une fois encore plus doucement passa sur son front et ses cheveux. Puis il remit son chapeau, soulagé : et repris sa lecture : mélange premier choix, provenant des meilleurs variétés de Ceylan. L’extrême orient. Un chouette coin que ça doit être : jardin du monde, grandes feuilles paresseuses sur lesquelles dériver, cactus, prairies en fleurs, lianes-serpents qu’ils les appellent. Va savoir si c’est vraiment comme ça ? ces Cingalais lambinant au soleil, dolce far niente. Ne remuant pas le petit doigt de la journée. Dorment six mois sur douze. Trop torride pour chercher querelle. Influence du climat. Léthargie. Fleurs de l’oisiveté.

« Ulysse » de James Joyce fait partie des romans dont la lecture ardue décourage nombre de lecteurs et c’est bien compréhensible, à croire que c’est un fait exprès. Jacques Aubert, spécialiste de Joyce recommande (source France Culture) :

1. Ne pas commencer par le début

2. Ne pas voir "Ulysse" comme un roman qu'il FAUT avoir lu. Il s'agit non pas de lire pour terminer un livre, mais de lire pour "faire acte de lecture"

3. Ne pas chercher à élucider toutes les allusions. Le lecteur d'Ulysse doit donner plus d’importance à l’énonciation qu’aux énoncés.

4. Le lire en anglais... si possible !

5. Comparer ses échecs de lecture et leur trouver des points communs. Pour sortir de ce "face à face mortifère entre le lecteur et l’œuvre", il suggérait que celui qui se trouve en échec devant Ulysse tente de discerner, par rapport à d’autres textes ayant eu le même effet sur lui, à chercher ce qu’il y a de commun et de différent entre ces échecs de lecture.

On ne rentre pas dans le roman de James Joyce comme dans une auberge. Il faut de l’humilité, de la réflexion et beaucoup de patience pour arriver à appréhender une fraction de la réflexion de l’auteur. Il a réécrit neuf fois son roman avant qu’il ne soit publié par la librairie parisienne « Shakespeare et compagnie » dirigée par Sylvia Beach, le 2 février 1922, jour de son anniversaire.

Autre date emblématique, le 16 juin 1904, l’auteur rencontre Nora Barnacle qui deviendra son épouse. L’action d’« Ulysse » se déroule le même jour. Le Blooms Day en Irlande, a lieu à cette date commémorative, et donne lieu à un festival de lectures d’extraits de l’œuvre de James Joyce, les participants habillés dans les costumes du début du XXe siècle.

La lecture de « Ulysse » de James Joyce frôle souvent le calvaire mais heureusement tous les épisodes ne se valent pas. Après certains passages infernaux, un rayon de soleil peut parfois illuminer l’obscurité du propos de l’auteur. Le dernier épisode, « Pénélope » est certainement le plus savoureux. Néanmoins, le surréalisme de l’écrivain fait de son œuvre une véritable expérience éprouvante de lecture.

Traduction et édition sous la direction de Jacques Aubert.

Traduction de Jacques Aubert, Pascal Bataillard, Michel Cusin, Sylvie Doizelet, Patrick Drevet, Stuart Gilbert, Bernard Hoepffner, Valery Larbaud, Auguste Morel, Tiphaine Samoyault et Marie-Danièle Vors.

Editions Gallimard, Folio, 1659 pages.

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Ulysse

C'est elle. Elle a commence par me flairer, incredule, sans rien dire. Puis est apparue l'inquietude, articulee en mots: "Fais semblant de vivre, et bientot tu vivras". Enfin une certaine colere, en cris: "Leve-toi et marche!".



Pour elle, j'ai reajuste mes lunettes sur mon nez. J'ai laisse de cote toutes les lectures que j'avais commence et pris en mains l'Ulysse de Joyce. Si deja, autant entreprendre une odyssee, ou au moins un long voyage, une longue marche dans les rues de Dublin. Avec elle aussi j'ai fait une longue marche, un long periple. Quelques passages eprouvants, en fait une bien belle balade. Une balade de vie. Je me souviens, comme Jeremie, de la grace de sa jeunesse, de l'amour de ses fiancailles. Je lui saurai toujours gre de m'avoir suivi au desert, dans une terre inculte. Pour elle, j'ai lu. Pour elle, j'ecris. Elle ne sait pas ce que j'ecris, mais elle respire: "ouf!"



Pourquoi Ulysse? Pour me mesurer a ma jeunesse? Imberbe, je me pavanais, aureole d'intellectualisme, devant mes amis: "C'est sublime!" Comment vais-je le trouver aujourd'hui?



C'est tres long. Et je me fatigue vite. Je me suis entete, mais ca m'a pris du temps. Beaucoup plus que prevu. Et je ne sais quoi ecrire. Que pour moi aussi c'est un grand chef d'oeuvre? OK. C'est dit. MAIS. Il est completement destructure. Il est chaotique. Il est bouffi de citations dont deux doctorats ne viendraient pas a bout et qui survolent la tete du lecteur normal sans presque jamais s'y poser. Il est deroutant, changeant de style a chaque chapitre. Et le plus recurrent: le flux de conscience, un monologue interieur qui peut paraitre sans queue ni tete, ou les mots apparaissent sans etre coordonnes en phrases, par unites, par paires, par petits groupes. Et ce flux s'entremele souvent de descriptions, de dialogues faits pour devoyer le lecteur, pour le fourvoyer. Ah! Il faut s'accrocher! MAIS. Il s'en degage un magnifique portrait de Dublin. Tout en amour. de quai en ruelle, de pub en estaminet. Et un brossage pointilleux d'une multitude de personnages, d'une multitude de caracteres. Un zoo humain. L'arche de Noe. Et un heros antiheros. Leopold Bloom. Un juif errant a Dublin! L'homme qui renait de ses cendres chaque fois qu'il est tue par le ridicule! Les epousailles reussies d'Orient et d'Occident! Et un deuxieme heros. Stephen Dedalus. La jeunesse, reveuse, desorientee, incomprise, incomprehensible. Et c'est quand meme l'espoir. Et une heroine. Molly Bloom. Molly, la diva. Bon ce n'est qu'une petite diva, une diva provinciale, mais ses seins ont de quoi rendre affame Bloom, ce juif mangeur de cochon, et de quoi monopoliser les pensees du lecteur.



Je suis fatigue. Ce livre est une prouesse. le lire a aussi ete une prouesse. J'en suis sorti avec la joie d'avoir reussi a atteindre un sommet. Ereinte mais heureux. Fourbu. Beat. Rompu. Exauce.



Et me voila en donneur de conseils: Tous, tous ceux qui ont appris l'alphabet, tous les debutants en lecture, devraient lire deux chapitres, le premier et le dernier. le premier est tout en dialogues d'un humour percutant. le dernier est une romantique declaration d'amour a faire chavirer les coeurs les plus endurcis. Les autres chapitres pourront faire le bonheur de lecteurs aguerris.



Et moi? Moi je suis fatigue. La lecture m'a fatigue. L'ecriture de ce billet aussi. J 'y ai mis beaucoup de temps. Je fatigue vite. Je me dandine. Mais c'est pour elle. Non, pour moi. Elle a raison, ca me fera du bien. Et c'est aussi une sorte de bouteille a la mer... quelqu'un la ramassera... un jour... un ami peut-etre...





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Ulysse

Je déteste l'idée qu'une œuvre littéraire soit si impénétrable aux lecteurs qu'elle fera dire à certains avec, de mon point de vue, une bonne dose d'affectation : "C'est un roman qui se mérite."



Je déteste l'idée même qu'une œuvre "se mérite", cela exclut d'emblée le lecteur du travail de l'auteur, donnant au premier le sentiment de son insuffisance et au second une sorte de divinité auto-proclamée plutôt snob. Si l'auteur n'écrit pas pour le lecteur et s'il n'écrit que pour lui et sa sanctification littéraire, peut-on encore dire de lui que c'est un écrivain ?



Rappelons qu'"Ulysse" est paru en 1922, c'est-à-dire il y a tout juste un siècle. Ecrit par l'Irlandais James Joyce, le roman se déroule sur une journée de déambulation dans Dublin. Comptant plus de mille pages, la narration s'étire d'heure en heure et se partage entre une galerie de personnages parmi lesquels Leopold Bloom et Stephen Dedalus, figurant respectivement Ulysse et Télémaque.



Concernant la lecture laborieuse (quel euphémisme !) d'"Ulysse", si j'étais parfaitement honnête avec vous, avec moi-même et avec l'auteur, je ne noterais pas mon ressenti de lecture (car je rappelle qu'il n'est pas question ici de donner une note à l'œuvre mais bien à ma lecture) ; toutefois je vais quand même attribuer une note minimale pour montrer que j'ai perçu (sans l'apprécier) le perturbant exercice de style auquel James Joyce s'est livré. Comment passer à côté quand cette narration ne ressemble objectivement à aucune autre ? est-ce en cela que ce roman monstrueux se voit décerner l'étiquette tant convoitée de chef-œuvre ?



Mais comme nous le disions entre camarades de lecture commune (car oui, il aura fallu la motivation d'une lecture commune pour me donner le courage de me lancer à l'assaut de cette forteresse imprenable), est-ce qu'un roman qui n'apporte aucun plaisir peut légitimement se prévaloir du noble titre de chef d'œuvre ?



Car, sincèrement, en ce qui me concerne, il n'y eut pas de plaisir de lecture. Il n'y eut pas, non plus, de connections directes et explicites entre le récit d'Homère et le roman de Joyce. Je n'ai pas perçu les symboliques mais seulement subi une logorrhée déstructurée et lassante, crispante et assommante ; fouillis de correspondances, de liens, de références donnant lieu à une infinité de notes de bas de page exégètes si érudites qu'elles se révèleront aussi inaccessibles que le récit qu'elles tentent d'éclairer. J'ai simplement été "engluée" pendant des mois dans un flux de pensées pour moi sans queue ni tête qui ne présentaient pour moi, la majorité du temps, aucune cohérence voire aucun intérêt. Sans parler qu'une fois lue, une phrase était aussitôt remisée dans les limbes inaccessibles de mon cerveau. #auxoubliettes



J'ai discuté récemment de ma lecture avec plusieurs Babeliotes, j'ai essayé de leur (dé)montrer à quel point je m'étais accrochée à ma lecture, essayant diverses stratégies comme lire à voix haute (à l'instar des épopées antiques d'Homère), ou comme laisser décanter chaque phrase avant de passer à la suivante (étant donnée la taille du livre, je ne suis pas sûre qu'à ce rythme je l'aurais terminé avant l'heure funeste de mon trépas) ; et puis, à un moment, ce fut le déclic - la révélation ! - et j'ai lâché prise ; j'ai pris du recul et je me suis posé cette question fondamentale : "Gwen, est-ce qu'un livre dont la lecture nécessite de consulter sa page wikipedia en continu pour le comprendre mérite-t-il d'être lu ?" #pertedetemps



Moi dont le passage sur terre est limité en temps, moi dont le nombre de livres que j'aurai la chance de lire est limité par mon passage sur terre ? et la réponse fut NON. A partir de ce moment, soulagée d'un grand poids, j'ai terminé ma lecture assez rapidement, sans chercher à la comprendre, terrassée par le dernier chapitre long de plusieurs dizaines de pages sans aucune ponctuation et qui laisse le mot de la fin à Molly/Pénélope, faisant expirer le récit à l'issue d'un interminable monologue. #conscienceenpaix



La traduction française d'"Ulysse" a nécessité les efforts, les nuits blanches et la sueur aigre de douze traducteurs. Encore un mérite à mettre au compte de ce "chef d'œuvre", à côté des insignes "Roman le plus imperméable de tous les temps" et "Roman le plus soporifique et inextricable de tous les temps" ?



Nul doute qu'"Ulysse" fera encore longtemps parler de lui dans les sphères littéraires supérieures, nul doute qu'il fera encore bâiller d'ennui des myriades de lecteurs non-initiés destinés à le rester ou plutôt destinés à rester incultes et humbles devant l'insaisissable. Ce sentiment d'infériorité n'en est pas un d'échec et c'est avec soulagement que je vais pouvoir poursuivre ma vie de courgette, euh, pardon, de lectrice.





Challenge PAVES 2022

Challenge des 50 objets 2022

Challenge BBC

Challenge MULTI-DEFIS 2022

Challenge ABC 2021 / 2022

Challenge XXème siècle 2022

Challenge XXème sans limite de temps

LC commune avec Cricri08, Pirouette0001, palamede et MarieLywood
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Eveline

Quelle bonne idée de publier cette nouvelle extraite du recueil Gens De Dublin sous format plutôt destiné à la jeunesse.

Voici en effet une superbe nouvelle, très courte, et dont le mode narratif peut être étudié de façon vivante et dynamique au collège/lycée.

On lève peu à peu le voile sur les pensées qui traversent l'esprit d'une jeune Irlandaise de 19 ans à sa fenêtre. Pas à pas, par bribes, on apprend des choses de son passé, de ce qu'elle aime et de ce qui lui déplaît de sa vie.

La balance penche plus d'un côté que de l'autre et l'on s'aperçoit qu'elle est en fait au moment crucial du choix. Doit-elle ou ne doit-elle pas partir ? Tout quitter pour tenter de reconstruire une autre vie en Argentine.

L'heure du choix, le moment le plus cruel qui soit, car, quoi qu'il arrive, choisir, c'est renoncer.

James Joyce traduit admirablement ce sentiment d'arrachement qu'on éprouve au moment de quitter son foyer, ses proches et tout ce qui a constitué nos repères jusqu'à ce jour, quand bien même, notre vie nous aurait été suffisamment déplaisante pour chercher à tout prix à la fuir. Pour l'avoir déjà éprouvé, je ne puis que saluer cette performance de l'auteur, qui plus est avec une économie de mots admirable. Chapeau l'artiste, tu m'as fait oublier l'horrible Ulysse !

J'ai vraiment adoré cette nouvelle ainsi que sa construction et je pense qu'elle pourrait avantageusement faire écho en un lecteur jeune, peu ou prou de l'âge de l'héroïne (quitter ses parents, ne pas les quitter, etc.), mais bien évidemment, ce n'est là qu'une considération toute personnelle, c'est-à-dire, bien peu de chose en ce bas monde.
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Ulysse



- Nath, tu as quoi ?!

- Oui, je le reconnais, je viens de terminer Ulysse de James Joyce.

- Mais qu’est ce qui t’a pris de te lancer dans une lecture pareille ?

- Je ne sais pas trop…La curiosité, le besoin de savoir pourquoi ce livre a cette réputation de lecture difficile…Et puis aussi, il fait partie du challenge BBC…

- En tout cas, je ne te voyais pas si tenace, car en plus, c’est un sacré pavé, non ? Tu as mis combien de temps à les lire, ces 1664 pages ?

- Pratiquement trois mois… Quelques pages chaque jour, car sinon, on risque vite l’indigestion devant ces longues élucubrations….

- Mais, il me semble bien qu’il est difficile à comprendre ce bouquin ?

- Je confirme…Bon, j’avoue que j’ai lu toutes les notes de bas de page et en prime, je suis allée régulièrement sur Wikipedia, histoire de comprendre ce que je lisais à chaque chapitre…

- Donc, ça veut dire que tu as tout compris alors ?

- Ah….comprendre, ne pas comprendre…..Etre ou ne pas être….

- Naaaath…..

- Bon, je l’avoue…Même avec Wikipedia, par moments, je n’ai pas compris grand-chose…. Je me suis même demandé à plusieurs reprises ce que Joyce avait fumé comme moquette pour l’écrire, ce bouquin.

- En tout cas, tu ne donnes pas spécialement envie de le lire, ce livre !

- Bon, je reconnais que je n’arriverais pas à vraiment le recommander ….Il faut quand même être très tenace et avoir un zeste de masochisme….

- Bref, tu n’as pas aimé…

- Je ne sais pas trop…Difficile de se prononcer… Ce n’est clairement pas un coup de cœur et la lecture fut laborieuse par moments avec des envies de sauter des pages…Quelquefois, je me disais que c’était bien écrit, et quelques pages plus tard, je soupirais car cela partait dans tous les sens…

- En conclusion, tu dirais quoi ?

- Heureuse comme Nath qui fit un long voyage littéraire…. (Je sais, un peu facile…)







Challenge BBC

Challenge Multi-Defis 2021

Challenge Pavés 2021

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Gens de Dublin

"Ulysse" de James Joyce est réputé être un sommet de la littérature, une œuvre de très haut niveau, exigeante et difficilement accessible, un livre qui se mérite en somme. Sur cette réputation, il est devenu mon Everest littéraire. Mais ne sentant pas mon cerveau aussi affûté que les pieds d'un sherpa, j'ai préféré opter, pour commencer à appréhender l’œuvre de Joyce, pour une altitude plus raisonnable avec le recueil de nouvelles "Gens de Dublin". Une colline de 200 pages me semblait être une ascension moins escarpée.



Cette œuvre a de nombreuses qualités. Tout d'abord, l'écriture, élégante, fine, à la fois fluide et très travaillée. Un style au service d'un art de la description tout à fait remarquable. Dans chacun des textes du recueil, Joyce parvient à décrire de façon si précise, si subtile ses personnages qu'ils semblent réels. Cette précision dans les descriptions n'est jamais lourde ni pesante. C'est là toute la finesse de Joyce, parvenir à faire des descriptions fouillées et détaillées tout en gardant une écriture fluide.



Les textes qui composent ce recueil, j'ai du mal à parler e nouvelles tant ces textes forment un tout, sont plus des tranches de vie que des histoires à proprement parler. Il n'y a pas vraiment d'intrigues, pas de chutes. J'ai bien perçu que l'objectif de l'auteur était d'évoquer une atmosphère, une ambiance, de rendre compte de l'identité de la ville de Dublin à une période précise. Etant très ignorante du contexte historique et social évoqué par Joyce, je suis restée assez hermétique au but visé par l'auteur.



Tout en reconnaissant la grandeur de l'écriture de l'auteur, c'est pour moi une rencontre en demi-teinte. J'aurais préféré que ces descriptions si subtiles et cette écriture si fine soient au service d'une véritable histoire, au sens classique du terme, une intrigue de départ, des développements qui la font évoluer dans un arc narratif, et un récit traversé de d'avantages d'émotions.



Après cette lecture, que je ne regrette pas, je me dis tout de même que l'alpinisme n'est peut-être pas pour moi et que je ne tenterai peut-être finalement pas d'aller planter mon petit drapeau au sommet d'"Ulysse".



Challenge Petits plaisirs 27

Challenge Variété 26 (catégorie "un recueil de nouvelles")
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Gens de Dublin

Gens de Dublin, première oeuvre de James Joyce, publiée en 1914, après moult difficultés, vaut le détour.

Ces quinze nouvelles courtes sauf la dernière, offrent des tranches de vie saisissantes de l'Irlande, au début du XXe siècle. Et l'on peut applaudir des deux mains, le talent de Joyce à saisir sur le vif, les traits saillants d'un personnage, même si la galerie de portraits qu'il propose n'a rien de réjouissant !

Les hommes, dans cette peinture de la misère sociale qui sévit à cette époque, remportent la palme. Qu'ils soient scribouillards ployant sous le poids de tâches ingrates et mal rémunérées, gigolos à la recherche d'une bonne fortune ou tout simplement déclassés, ce sont tous des "loosers" qui ne trouvent de consolation que dans la "stout" ! Ce qui nous vaut quelques jolies scènes de bar, car Joyce excelle dans l'art de peindre en quelques phrases une ambiance, qu'il s'agisse d'un paysage, d'un lieu animé ou d'un simple arrêt sur image. Et la place des femmes dans ce recueil ? Elles sont très présentes et s'en tirent mieux que les hommes si je puis dire. Souvent victimes ou résignées, elles savent aussi se montrer des "matrones" intraitables lorsqu'il s'agit d'argent ou d'honneur.

Dans cette Irlande de début du XXe siècle, ce qui frappe, en effet, c'est le poids de la morale religieuse. Pas d'autre issue à une relation amoureuse, que le mariage ; pas d'autres remèdes aux souffrances ou dérives personnelles qu'une messe ou une retraite. Le clergé tout puissant régente les consciences et étouffe toute velléité de révolte dans le carcan pernicieux de l'auto-censure.

Pas d'échappatoire dans cette société où pauvres et riches se côtoient sans se fréquenter. Le seul espoir évoqué dans quelques nouvelles : celui de l'exil. Seule façon d'échapper à la médiocrité de sa condition et à une mort psychique lente et certaine.

L"ombre de la mort, d'ailleurs, plane sur tout le recueil. Pas la mort physique mais la mort à soi-même, résultante du poids des frustrations, du décalage entre les espoirs de jeunesse et la routine usante de la vie de couple par exemple, comme avec ce très beau portrait du "petit Chandler" dans la nouvelle Un petit nuage. Ce sentiment de passer à côté de sa vie, on le retrouve dans la superbe dernière nouvelle : Les Morts où Joyce nous permet de suivre à travers les "flux de conscience" du personnage principal, Gabriel, son cheminement vers un vide existentiel abyssal !

Je crois que ce que j'ai le plus apprécié dans ce recueil est le traitement des personnages. Qu'il s'agisse de caricatures à la Daumier ou de "gros plans" mettant plus en valeur la complexité d'un parcours individuel, avec bien souvent un drame personnel à la clé, ces hommes et ces femmes ont été très présents tout au long de ma lecture et resurgiront probablement de ma mémoire au gré des circonstances...
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Gens de Dublin

La malédiction du grand frère

OU

un désenvoûtement littéraire.



L'Irlande a toujours eu ce grand frère, et a eu l'imprudence de l'inviter chez soi.

Pendant le bas moyen-âge, il y a lutte pour la suprématie en l'île d'émeraude, qui

n'est pas un royaume unifié, et les prétendants malheureux, parfois, font appel

au grand frère anglais. Il ne faut pas trop tenter le diable, ou il s'installe chez vous.

C'est ainsi qu' Henri VIII décide de se faire couronner roi d'une Irlande qui payait

déjà tribut à l'Angleterre depuis le douzième siècle. Là commencent les choses sérieuses: l'Irlande devient, peu à peu, une colonie de peuplement du Royaume-Uni.

Confiscation massive des terres, attribution de celles-ci à des colons anglais ou écossais, réduction des autochtones à l'état d'ouvriers agricoles sur la terre qui était la leur, impôts, tentatives de conversion forcée de la population catholique à l'anglicanisme, résistance puis massacres. Jamais l'on ne réussit à soumettre ce peuple, toujours les coups continuent de pleuvoir. Au 19 ième siècle, s'y ajoute la famine, provoquant un exode massif vers les Etats-Unis.





C'est dans cette Irlande exsangue, mais jamais soumise, que naît James Joyce. Père et mère appartiennent à la bourgeoisie, le premier travaillant dans l'administration, la seconde ayant apporté une dot substantielle. Mais il y a quelque chose de sauvage, d' étrange dans la lignée masculine des Joyce., et le père n'y échappe pas. Une déchéance financière, ethylique aussi. le jeune James, fils aîné et brillant élève des jésuites, doit quitter son collège et finir son secondaire comme il peut. Une bourse lui permet d'entreprendre des études universitaires à Dublin, où il participe avec énergie à la vie culturelle et sociale de la capitale. Il commence aussi à devenir un homme engagé, ce qui, dans une colonie de peuplement, vous attire très vite toutes sortes d'ennuis. Diplômé, il part pour Paris, où commence une vie d'exil, qui est aussi une existence de bohême...





Les Gens sont la première grande oeuvre de Joyce. Elle se compose de quinze nouvelles, qui pour l'essentiel décrivent une existence maussade dans un univers gris. Un monde clos, statique, sans espoir ni projet : un vie qui n'a d'autre objet que de survivre. Un verre de Guinness ou une partie de cartes aident à supporter la médiocrité de cette existence carcérale. Mais la colère reste souterraine, l'esprit est moribond. Joyce veut précisément ranimer l'esprit de son peuple, le remettre en marche vers la vie. Pour ce faire, chaque nouvelle se termine sur une “ épiphanie” : une vision surprenante, déchirante, de ce qui est, ou de ce qui pourrait être. Certains voient la déchéance de leur état présent, d'autres la gloire d'une aube nouvelle. Et quelques-uns reculent devant cette lumière éblouissante qui tout à coup les révèle à eux-mêmes.





Un écrivain patriote, un combattant pour la liberté, un homme qui maniait la plume comme on tire le sabre : voila James Joyce. J'ai vécu quelques mois à Dublin, dans le cadre d'une mission, en 2010. Je me souviens d'un peuple optimiste, ouvert, joyeux, qui avait confiance en sa bonne étoile. Tout le contraire des Gens De Dublin. Un peuple un peu déboussolé, quand même, par les changements de ces dernières décennies. Comme le disait un collègue, autochtone : " être irlandais, c'était être pauvre et contre les anglais. Qu'est-ce que ca veut encore dire maintenant ? Qui sommes nous?". Ils n'ont pas perdu au change : gageons que Joyce serait fier, et heureux ! Bonne lecture .
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Gens de Dublin

James Joyce est une sorte d'acrobate de la plume qui réussit en quelques phrases rapides et habiles à construire tout un univers et à instaurer une ambiance particulière dans chaque nouvelle. le dosage et le choix minutieux des mots est une de ses grandes forces.



Ce qui crée un trouble particulier à la lecture de Gens de Dublin c'est la multiplicité de thématiques qu'il concilie et l'infinité d'interprétations du sens de ces nouvelles dans le recueil.

Pour chacune de ces courtes nouvelles James Joyce pastiche un style bien particulier.



Ses déambulations littéraires autour des Dublinois ne manque pas de laisser deviner la grande affection qu'il porte à la ville et ses habitants.



On fait connaissance avec sa société de Dublin, du début du 20ème siècle à travers les mentalités de l'époque et les relations humaines : la famille, le mariage, l'amitié, les rencontres et mondanités, les questions religieuses et politiques, les bonheurs et les drames, les souvenirs et les regrets.



L'atmosphère est superbement restituée, avec une grande place au monologue intérieur des personnages, assez novateur à l'époque.



Ecrivain à la plume un tantinet désuète mais d'une acuité impressionnante, parfois décrié mais reconnu pour son talent, James Joyce marquera la littérature anglaise du XXème siècle.



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Gens de Dublin

Toute relecture est une nouvelle decouverte. On n'y entre pas vierge, mais on en ressort comme si on l'avait ete. C'est en tous cas mon sentiment avec ce recueil de nouvelles. Une nouvelle perception, celle d'avoir decouvert un auteur mur, en pleine possession de ses meilleurs moyens. Le grand Joyce (J.J. pour les intimes) est deja la, bien avant l'Ulysse.





Pour commencer, j'ai trouve que c'est un livre organique (ou bien organise), pas un recueil disparate. Ce sont des nouvelles qui se suivent et se completent pour former un tout.





C'est un regard porte sur toutes les etapes de la vie des hommes, des emerveillements de l'enfance jusqu'au delabrement physique et moral de la vieillesse et jusqu'a la mort, en passant par les reves et les espoirs de la jeunesse, les aboutissements, succes ou frustrations de l'age mur.





C'est une ribambelle de personnages (tres nombreux dans certaines nouvelles) qui des fois reapparaissent, ou donnent cette impression, au detour d'une page. De differentes classes sociales, qui se confrontent et se melent pour fusionner en un large tableau de la societe dublinoise du debut du 20e siecle.





Et c'est Dublin. Comme dans Ulysse, cette lecture ebauche une carte de la ville, concrete, d'une realite palpable, de ses differents quartiers, ses avenues et ses ruelles, ses maisons, cossues et miserables, et bien sur ses pubs et ses gargotes. De quoi faire une visite virtuelle, avec differents itineraires pour pouvoir y passer quelques jours. Mais c'est une impression fallacieuse, parce que ce que fait Joyce, ce qu'il reussit si bien, c'est transferer la ville de son apparence objective, perissable et circonstancielle historiquement, vers le monde fictif, intemporel et subjectif des grandes creations litteraires. La Dublin de Joyce n'en est pas pour autant irreelle, mais au contraire elle est plus que reelle. L'amour de Joyce pour sa ville natale (je crois qu'il a vecu beaucoup plus longtemps ailleurs, a Paris ou a Trieste, qu'en elle) le pousse a la malmener autant qu'a la caresser. L'amour vache. Qui ne fait que la rendre plus seduisante a nos yeux.





Seduisante? Oui, mais en litterature. Malgre sa decrepitude et ses rues boueuses. Comme ses habitants. Bien que la societe que Joyce decrit soit plutot sordide, mesquine, etroite de vues et repressive, sous la tutelle minutieuse d'une Eglise dessechee, et ou le nationalisme anti- britannique est pour beaucoup synonyme d'un provincialisme un peu ridicule. Mais la prose de l'auteur, empreinte d'humour autant que de derision, arrive a embellir jusqu'aux plus minables aspects de la societe qu'il evoque. Ce n'est pas un rapport sociologique d'academie, mais une relation plus authentique, plus eclairante sur cette societe que sa realite temporaire.





15 nouvelles. La derniere, "Les morts", beaucoup plus longue que les autres, est un petit chef-d'oeuvre, qui nous emmene depuis une reunion mondaine peuplee de conversations d'une trivialite exasperante jusqu'a un final huis clos poignant entre deux epoux, ou ressurgissent des remembrances de blessures douloureuses. John Huston en avait tire a la fin de sa vie un film memorable: The dead (en francais je crois qu'on l'a titre Gens de Dublin).

Mais il n'y a pas qu'elle. Mes preferees? "Penible incident", ou l'habitude de la solitude abime tout, en soi et autour de soi. "Eveline", ou la peur de l'inconnu aboutit a une fin navrante, qui m'a dechire le coeur. "La pension de famille" ou j'ai retrouve des accents De Maupassant et/ou de Tchekhov. "De par la grace", ou pour railler la religion Joyce utilise des dialogues qui rappellent (anticipent en fait) Ulysse. Et j'en oublie, ou j'en passe...



Gens de Dublin. Pour moi un must. L'ebauche? Non. La graine. La graine qui contient deja toute l'oeuvre ulterieure de Joyce. Sans ses exagerations.



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Gens de Dublin

Joyce avec réalisme (quelque fois très proche du naturalisme) et une certaine dérision empreinte d’empathie nous fait entrer dans l’intimité dublinoise. Chacun de ces 15 récits, sont autant de pans de vie qui nous permettent de mieux comprendre cette société du début du XXè , enfermée dans un terrible carcan social et religieux .

Une multitude de petits détails révèlent l’atmosphère de la ville , l’animation des rues, les habitudes de chacun... C'est amusant, mais certains passages sont glaçants .

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Un petit nuage et autres nouvelles

C’est cinq petites histoires, moins de 100 pages pour l’ensemble. Du grand auteur irlandais James Joyce, je n’ai lu que Portrait d’un artiste en jeune homme, que je trouvais dense, difficile d’approche. Son recueil de nouvelles Un petit nuage est plus abordable : des histoires brèves, intimistes, des tranches de vie qui racontent un moment quelconque dans la vie de gens ordinaires.



D’abord, il y a ces jeunes gens, des amis, exubérants, un peu fêtards, se promènent dans Dublin. C’est une belle soirée, une paisible nuit d’été. Alcool, rencontres, ils jouent aux cartes jusqu’au petit matin. Qu’importe s’ils mettent en jeu la plus grande partie de leur bien. Pourquoi la vie devrait être plus compliquée ? Dans une autre nouvelle, il y a ces deux jenes hommes, des galants, qui espèrent être chanceux auprès des femmes. Ah, les joies et les malheurs d’être jeune et de vivre comme si ce jour était le dernier ! Et que de souvenirs cela peut évoquer. Il est si facile de se glisser dans la peau de ces garçons.



Puis, La pension de famille raconte cette femme courageuse, Mrs. Mooney, et sa fille qui tombe enceinte d’un pensionnaire. Le pauvre Mr. Doran ne sait trop quoi faire… J’ai trouvé cette histoire correctement écrite mais elle ne m’a pas interpelé particulièrement.



Dans la nouvelle éponyme, Un petit nuage, Little Chandler et Ignatius Gallegher discutent devant un whiskey. Ils parlent de tout et rien, des vieux copains, de Paris, mais aussi de trucs plus déprimants comme Londres, la corruption à l’étranger, de combien « ici nous sommes dans le train-train provincial de ce vieux Dublin, où l’on ignore tout de ces choses. » (p. 68) C’est un peu l’image stéréotypée que je me fais de ces types qui trainent dans les pubs irlandais, qui y passent leurs journées.



Un cas douloureux raconte l’histoire de ce M. Duffy routinier et qui, un soir, rencontre à la Rotonde une certaine Mrs. Sinico. Ils parlent, échangent, se découvrent des affinités. Mais, même si « la compagnie de cette femme avait l’effet d’une terre chaude sur une plante exotique », serait-ce suffisant pour sortir ce pauvre homme de son isolement ? À vous de le découvrir.



Toutes ces nouvelles, elles sont bien, elles mettent de l’avant des individus ordinaires et intéressants à la fois. Toutefois, la vraie vedette est Dublin elle-même. Tous les personnages, ils arpentent la ville en long et en large, James Joyce nomme et décris brièvement chacune des rues empruntées, des coins de rue populaires, des quartiers animés, des ponts et autres places reconnaissables. Probablement une manière facile d’entrer dans l’univers de James Joyce.
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Gens de Dublin

Foin de la version papier séculaire, c'est dans son édition numérique que je viens de terminer ces Gens de- Dublin.

Ce fut une heureuse lecture pour moi, tant ces tableaux et chroniques sont superbement écrits et détaillés. Les ambiances y sont minutieusement peintes, et les cararactères des personnages dépeints dans leurs âmes et quotidiens d' irlandais...

Joyce s'y entends à faire partager au lecteur un repas de Noël où les plats abondent, une réunion de campagne électorale, les terribles remords d'une épouse fatigué ou la veulerie d'un employé de bureau.

Autant de scènes et d'actes d'un théâtre mettant en scène un peuple attachant et souvent pittoresque dans ses joies, ses péchés et ses peines.
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Finnegans wake

Ce livre n'est pas un roman !



Finnegan's wake est une chanson à boire du répertoire comique traditionnel irlandais. Elle date des années 1850.

Elle raconte l'histoire d'un homme qui travaille dans le bâtiment et est assez porté sur le whisky. Il tombe d'une échelle et se brise le crâne. Ses compagnons de travail mènent un deuil plutôt alcoolisé, allant jusqu'à arroser son cadavre de whisky, ce qui provoque sa "résurrection" et lui permet de participer aux réjouissances. (ceci n'est pas un spoil)

https://www.youtube.com/watch?v=qstUxos2cBs

Sur le lien sus-noté, la chanson interprétée par les Dubliners. C'est une chanson de Dublin, donc ça parle surtout d'alcool, de beuverie, et de cuite mémorable. Avec l'accent de Dublin, ça donne quelque chose comme « le bruit d'un paquet de cacahuètes dévalant les escaliers » comme l'avait si bien décrit un critique anglais lors de leur premier passage à la BBC au milieu des années 60, les anglais et les irlandais ne s'aimaient pas trop à l'époque.



Donc il faut voir le livre de James Joyce comme un long poème, poème épique où les dieux des mythologie celtiques et européennes cotoient le monde populaire du Dublin de l'époque, le son rocailleux et rebondissant de leur langue et les délires d'ivrognes. Si vous entrez dans ce livre, vous allez aussi vous prendre une fameuse cuite avec un risque de gueule de bois non négligeable si vous en abusez, « la Grande Beuverie » version Dublin, mais rein ne vous empêche de le savourer de temps en temps le soir, par petites gorgées, comme on savoure un whiskey 18 ans d'âge (triple distillation), en alternant avec un verre d'eau. Ici on peut prendre un chapitre entier, ou un paragraphe seul, c'est comme si on lisait deux livre différents, on peut rouvrir deux fois la même page s'en même s'en rendre compte. Même chaque mot peut avoir une signification différente suivant votre humeur, le temps qu'il fait, ce que vous avez mangé à midi... Ce livre n'a pas de sens, c'est vous qui lui donnez son sens. c'est une sorte de livre qui à chaque fois que vous l'ouvrez, sera un nouveau livre, c'est juste un livre magique, un « Nécronomicon » d'ivrogne (ou d'irlandais). Un livre éternel.



Mais surtout, ne vous fatiguez pas à retrouver l'histoire dans ce livre, ce n'est pas un roman, et celui prétend avoir compris l'histoire en le lisant n'a sans doute jamais connu les propos poético-philosophiques incohérents d'une soirée très arrosée dont on ne se souvient plus du sujet le lendemain matin (ni même avec qui on en parlait).



Mais attention, la magie ne peut opérer à chaque fois. Parfois vous l'ouvrez et il ne se passe rien...



PS. Wiskhy vient du vieil irlandais qui veut dire "Eau de vie"
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