GRAND ENSEMBLES
c'est une belle ironie
appeler grands ensembles
ces barres qui nous tiennent
si isolés et si petits
CHEZ MOI
Les changements que j'attendais
ce n'est pas moi qui vais en profiter
peut-être une voisine
peut-être un voisin
je reste heureux de leur sourire
de leur serrer la main
Moi le quartier
je vais devoir le quitter
il faut digérer
Ces chantiers - c'est pas pour moi
c'est pour d'autres personnes
qui s'installent déjà
Des personnes qui travaillent
parce qu'il y a trop de chômeurs ici
mais j'aurais préféré que ce soit le travail
qui vienne à nous - pour que je reste aussi
Boutiques de mode, salle de concert
jardins partagés, trame verte
tout ça n'était pas nécessaire
pour nos mères et nos pères
Cette terre autrefois déclassée
est devenue un terrain prisé
qu'on reprise sur la misère d'hier
Comme si la culture populaire
n'avait pas d'attachement
pour les murs qui l'ont vu grandir
même si c'était en emprisonnant
p.18
« J’ai grandi dans une nature d’architecture ornée d’arbres d’acier aux lumières sales, une immensité en désespoirs de hauteur, un horizon troué par un beffroi lointain. » (p. 11)
LE NID
J'ai vu la guerre des rues s'opérer
Un nouvel art de ville avec ses publicités
Des roses neuves sur nos balcons vieux
Du street art sur nos graffitis de vauriens
Sur le fil des saisons
Personne n'y trouve raison
Les moines d'un nouveau dieu
Restaurent nos allées surannées
Les saintes grues en bataille
scintillent à des kilomètres
Comme des cierges qu'on voudrait éteindre
p.23
Ton quartier, je vais te le ré-no-ver
Transformer ton environnement délabré
En produit pour le marché immobilier
J’habite à Lille -Sud et c’est sans gratitude
Que je salue les architectes qui ont vomi sur ces latitudes.
« C’est une belle ironie
appeler grands ensembles
ces barres qui nous tiennent
si isolés et si petits. » (p. 29)