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Citations de Jean-Baptiste Del Amo (322)


La croissance du rendement est exponentielle, tout les encourage à l'utilisation des pesticides : l’Europe, les groupements agricoles, le bon sens même. Ils ont foi dans le progrès, la technique, la science.
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Certains se souviennent, l’âme lourde, des vers de Du Bellay qu’ils récitaient en classe et dont le sens maintenant les pénètre :

Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village
Fumer la cheminée, et en quelle saison
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,
Qui m’est une province, et beaucoup davantage ?
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Comme toi, je fais partie de ce monde fragile et beau. Nous le partageons tous ensemble.
Et même si nous sommes différents, j'ai moi aussi un coeur qui bat.
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Dans cette obstination de l'un à engloutir la viande des porcs, à assimiler littéralement leur condition et l'existence de la porcherie, et cette réticence de l'autre, cette répulsion viscérale, primitive, à l'idée de n'être qu'un rouage mâchant, digérant la chair que l"élevage déverse dans leurs bouches grandes ouvertes, fières, reconnaissantes, rassasiées, puis mâchant, digérant, chiant cette chair qui sera de nouveau épandue sur la terre grasse des Plaines pour servir d'engrais aux céréales qu'ils font pousser et donnent à manger aux porcs, créant ainsi un cercle vertueux ou infernal dans lequel la merde et la viande ne sont plus dissociables.
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Il lui arrive de se demander si la porcherie a enfanté leur monstruosité, ou si ce sont eux qui ont donné naissance à celle de la porcherie.
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Tant d'autres défilaient à l'atelier et Gaspard les découvrit peu à peu. Chacun portait jusque-là ses histoires, ses non-dits, des secrets bien gardés que l'on s'empressait de répéter après s'être fait désirer un peu. Billod se régalait de la confidence, jurait à longueur de temps de ne rien dire mais cédait au moindre assaut d'une cliente, puis faisait promettre le silence, ce qu'elle jurait à son tour avant de s'offusquer que l'on pût douter de sa parole. Ils apprenaient ensuite que l'un et l'autre n'avaient pas tenu promesse, se grondaient gentiment, souvent ne disaient rien.
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On lui avait enfin parlé ; se dit-il avec satisfaction. Pas grand-chose, mais ces quelques mots prouvaient qu’il existait en cet instant, qu’il investissait Paris de sa présence.
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Lorsqu'elle sort de la maison en chemise de nuit, la montagne noire repose encore dans l'aube détrempée de rosée. L'air colle à sa peau. Elle marche jusqu'à l'emplacement du potager. Les herbes mouillent ses chevilles et ses orteils. Elle contemple la terre scarifiée.
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Au soir, ils mangent à leur faim et les plus jeunes, épuisés par la marche et par leurs jeux dans l’eau vive du torrent, s’endorment au son d’une psalmodie chantée près du feu par l’ancien meneur. Ce chant est quelque chose d’avant le chant, d’avant même la voix, une plainte gutturale, modulée, faite de vibratos et d’ondulations dissonantes, d’expirations profondes et graves dont le corps du vieillard est tout entier la caisse de résonance. Il semble par instants qu’il provienne non pas du vieillard, mais d’hors de lui, des secrets de la nuit profonde, de la plaine invisible, du lit noir de la rivière et du cœur des pierres – secrets convoqués dans ce corps aussi sec et noueux qu’une souche, car rien ne bouge de ce visage embroussaillé sur lequel passe seulement l’orbe lumineux des flammes.
Les lèvres frissonnent à peine sous la barbe et les yeux sont clos, le regard tourné vers l’intérieur. La mélopée charrie un torrent d’images, de sensations dont tous éprouvent dans leur chair la profonde mélancolie, celles de leur errance sur la terre, sans but et dénuée de sens, du cycle des saisons toujours renouvelées, des morts qui continuent de cheminer à leurs côtés et se rappellent à eux dans la coulisse de la nuit par une ombre furtive ou le cri d’un loup. Et lorsque le vieux se tait, que le chant s’éteint au-dedans de lui, ils retiennent leur souffle ; quelque chose vient d’être dit de leur insignifiance et de leur majesté.
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Quelque chose cède en lui, une réserve, une crainte, qui le pousse à s'abandonner aux mouvememnts de l'auto, à rechercher furtivement le contact du père, de son bras sous l'épaisseur du blouson, en une infime, hésitante et maladroite tentative de lui signifier son affection - ou ce qu'il conçoit être l'affection attendue d'un fils pour son père, d'un enfant à l'endroit de l'homme, de l'étranger qu'on lui a brusuquement désigné comme étant son père.
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... la Bête, le Règne animal, reprend sa Liberté, échappe aux hommes et à leur folie.
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Le regard que Marcel pose sur elle et le sourire qu'il esquisse sont autant de caresses à son âme triste.
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Certains, impétueux et patriotes, disent: "on part à la guerre!", et leur regard vole d'un visage à un autre comme celui des jeunes chevaux que l'on débourre, cherchant le sens de leurs propres mots. Ils savent qu'il faudra tuer, ils savent, c'est un fait acquis, une certitude, une vérité, la raison même, il faut tuer à la guerre, sinon quoi d'autre? Ils ont enfoncé des lames dans le cou des porcs et dans l'orbite des lapins. Ils ont tiré la biche, le sanglier. Ils ont noyé les chiots et égorgé le mouton. Ils ont piégé le renard, empoisonné les rats, ils ont décapité l'oie, le canard, la poule. Ils ont vu tuer depuis leur naissance. Ils ont regardé les pères et les mères ôter la vie aux bêtes. Ils ont appris les gestes, ils les ont reproduits. Ils ont tué à leur tour le lièvre, le coq, la vache, le goret, le pigeon. Ils ont fait couler le sang, l'ont parfois bu. Ils en connaissent l'odeur et le goût. Mais un Boche? Comment ça se tue un boche? Et est-ce que ça ne fera pas d'eux des assassins, bien que ce soit la guerre?
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Ce corps lui est étranger, tout comme l’être qui l’incarne, ce père taiseux et souffreteux avec lequel elle n’a pas échangé plus de cent mots depuis sa venue en ce monde, ce paysan minable qui se tue à la tâche ou y hâte sa fin, comme pressé d’en finir, mais après la moisson, après les semailles, après les labours, après… La génitrice hausse les épaules, soupire. Elle dit : « nous verrons bien », « si Dieu le veut », « que le Seigneur t’entende et qu’Il prenne pitié de nous ». Elle redoute qu’il ne tienne pas une énième échéance car que fera-t‑elle, orpheline de père et de mère qu’elle est, avec un enfant à nourrir ? Elle dit aussi la peine qu’elle a eue à enfanter et le malheur d’y être parvenue trop tard, déjà vieille à vingt-huit ans. Et pas même d’un fils qui, dès l’adolescence, aurait prêté main-forte au père, cet homme vaillant et opiniâtre mais sans ambition aucune et qui ne laissera derrière lui qu’une terre revêche, l’une de ces fermes familiales aux rendements médiocres. Autrefois, la famille de l’époux possédait de la vigne, mais les ravages du phylloxéra sur le vignoble n’ont pas épargné leurs quelques arpents de terre morcelés et caillouteux, et l’ancêtre, le père du père, s’est alors éteint, du jour au lendemain et sans dire un mot.
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Les passeurs plantaient leurs barques entre les bateaux. Ils embarquaient la foule des travailleurs de l'autre rive, s'engueulaient, frappaient l'eau à grand coup de pagaie, filaient au travers du Fleuve, évitaient l'inévitable : la collision, l'accident, le naufrage. Il n'était pas rare qu'un homme tombât à l'eau, fût entraîné par le courant ou les profondeurs du Fleuve. On usait alors de perche en bois. Mais la longueur et le poids de l'instrument en rendaient le maniement périlleux, et il arrivait qu'à défaut de sauver le misérable, la perche le transperçât ou l'assommât, achevant ainsi d'en faire un noyé.
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Le matin, la mère a eu de fortes nausées et le père a tôt compris qu'elle était grosse. Alors l'a passée à tabac. Armando se souviendra de sa mère rampant au sol sous les coups tandis qu'il se terre avec Antonio et leurs soeurs dans un angle de la pièce. Les enfants, comme les petits d'une meute prédatrice, ont appris à suivre leur instinct de survie. Leurs corps s'emboîtent parfaitement.
Les poings fermés, lourds comme des pierres, s'abattent dans le silence de la pièce sur le bas-ventre et le sexe de sa mère et elle ne crie pas.
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Jonas a le pressentiment que Nadia ne luttera pas, et la potentialité de sa mort, nichée au cœur de ce jour d'été, est insoutenable. L'été. Aucune saison ne lui semble soudain plus redoutable. Les jours de désastre sont souvent les jours d'un soleil qui n'en fait paraître que plus impitoyable et d'une violence inouïe cette beauté figée par la lumière; cette cristallisation du monde où la mort et la débâcle se glissent, insidieuses, souveraines, et calmes, sûrement. Pourquoi, pense Jonas, faut-il que les choses que l'on croit acquises basculent soudain et nous confrontent à notre propre insignifiance?
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Des images affluaient, se jetaient dans l'opaque mer de ses songes sans qu'elle cherchât à démêler les parcelles de sa vie de celles, réelles et supposées, de l'existence de Louise. Comme autant d'atomes, les rêves étaient des bribes et composaient un tout, une illusion.
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Louise avait accepté le jeu de séduction d'un homme qu'elle trouvait désormais, face à elle, insignifiant. Elle s'était prêtée à sa caresse et avait mis en péril la vie de son fils. Elle était salie par cette main, par le souvenir de son impression sur sa peau. Salie d'un adultère auquel jamais elle n'aurait supposé se prêter, avec un homme qui lui inspirait l'exact contraire de ce qu'elle devait aimer par-dessus tout. La peur, la rancœur et l'humiliation métamorphosaient la plage et le paysage dont elle avait cru percevoir la dimension poétique et infinie.
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Et lorsque l'homme passe son bras au-dessus des épaules du garçon, derrière le repose-tête, ne dirigeant plus l'auto que d'une main souple et experte, il semble au fils être parvenu à conquérir un peu de sa considération, peut-être même de la sollicitude, que le père qui, quelques instants plus tôt, représentait encore pour lui un bloc ésotérique, hostile, s'ouvre à lui, ou lui signifie par ce geste enveloppant qu'il le reconnaît et lui laisse entrevoir l'accès à cette part secrète qu'est son cœur solidement muré, inatteignable, mais aussi qu'il protège désormais.
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