Vidéo de Jean-Baptiste Pedini
On est passé à côté de l'essentiel. Il faut peut-être y voir un signe. Le bloc-notes du jour prêt à être recyclé ou l'encre sèche ou les ratures ou l'espace sur la page quand le ciel tend l'oreille. Tel un confident.
Le matin tousse discrètement. La lumière entre au goutte-à-goutte pour surprendre l'enfance. Pour l'étouffer dans son sommeil avec un grand ciel blanc. Alors tout est pauvre. Tout manque. Quelqu'un ouvre la fenêtre et cette fois on ne dort pas. On fait semblant.
Une première ondée. On en a plein la tête de cette salissure-là. Il faut se remonter les manches et tordre les mots crus et s'armer de mélancolie pour faire barrage à la tempête. C'est ça. On débite un stère de ciel, une sciure jaune se répand. L'éclaircie vient.
Garder l’eau en mémoire
Garder l’eau en mémoire
les mots
comme bouteilles d’oxygène
on ne s’aventure pas loin
l’horizon est à bout de souffle
et on bégaie de vivre
et on déborde
trop plein de ces images
que personne ne purge
c’est que le sable coince
c’est qu’on vit déjà tard
sans sel au bord des lèvres
le silence tout autour.
Le jour est indemne
Le jour est indemne
il n'y a de petites entailles
que dans les yeux
même si on l'ignore
même si le ciel s'ébruite
la vie dedans reste discrète
et puis on se sent de travers
on laisse aller
mais quoi, mais où
le corps ne le sait pas
et la chaleur glisse autour
et rien de plus
seul l'océan fait face.
Tout est familier
le chemin vers la plage
l’odeur des pins
plus déroutante à chaque pas
on approche
malgré l'espace étroit
et-une lumière en bloc
les terres qui lentement dérivent
on va le long des dunes
presque seul et sans voix
on porte le soir à la bouche.
La baie est endormie
La baie est endormie
parfois ces mots suffisent
et on ferme les yeux
parfois on veut aller voir
mais la distance
mais autre chose fait que
on reste là
sans soleil dans les mains
on se débat à peine
sachant que l’ombre vient
avec le même fracas
avec peaux, avec corps
et la tristesse au ras de l’eau
mieux en vue que l’écume
bordant la nuit.
…