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Critiques de Jean Clair (33)
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L'hiver de la culture

Jean Clair a la plume féroce, incisive et amère.



Dans cet essai il dresse un constat accablant sur les lieux de culture, leur organisation, l'attitude des visiteurs, les files d'attente interminables dont il se demande les motivations pour se rendre dans les musées.



Visiteurs susceptibles s'abstenir tellement Jean Clair prend ces cohortes empressées pour des troupeaux de moutons (pardon pour les moutons, qui n'étaient d'ailleurs pas à la fête le week end dernier), et parfois même des béotiens.



On l'aura compris Jean Clair est un brin "conservateur", pour rester modérée. Néanmoins on peut constater que parfois certains sont plus préoccupés et accrochés a leur perche à portable, agglutinés devant les tableaux, devant lesquels pour le moins, leur émotion est absente, plus empressés à se bombarder de selfies.

J'ai pu observer cela au Van Gogh museum d'Amsterdam en mars dernier.



On ne peut pas lui donner tout à fait tort. Chacun d'entre nous avons pu constater ces dérives. Pour autant on ne va pas fermer ces lieux de culture et imposer des aptitudes à comprendre les vertus de l'art et apprécier ces chefs d'oeuvres, pour avoir le droit d'y pénétrer.



Par ailleurs les dérives de l'art contemporain sont l'objet de spéculations colossales, douteuses et dispendieuses.



S'agissant des expositions à scandale telles celles de Damien Hirst et ses animaux tranchés, je pensais que le comble de l'horreur avait été atteint avec l'Expo "Our Body" et les corps plastinés de prisonniers chinois.



Oui à chaque époque les artistes ont connu des refus et leurs oeuvres souvent incomprises avant d'être encensées.



Maintenant comparer les impressionnistes pour ne citer qu'eux et des créations comme celles citées ci-dessus me laisse perplexe... Et me rend alors moi même "conservatrice".



Ce court essai est éclairant, et le propos de Jean Clair a le mérite de nous faire réfléchir.
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La part de l'ange : Journal 2012-2015

Pas vraiment un journal mais plutôt des mémoires, indifférentes aux dates, des réflexions philosophiques ou esthétiques, des commentaires sur l’actualité.

En réalité ‘’un essai qui veut rendre justice à la part invisible de l’esprit, à « la part de l’ange ‘’.

………………….

Ce qui passionne jean Clair qui a été conservateur général du Patrimoine c’est tout ce dont l’art nous parle par le truchement de l’invisible. Une quête, de ce qui dans l’œuvre d’art, née de main d’homme, nous parle de nous.

Il défend une peinture « réaliste », essentiellement figurative.

D’où de belles pages sur le visage qu’on découvre ravagé au matin, par la fatigue, la maladie ou

l’âge, ce visage que l’on voile aussi. Son admiration pour Zoran Music, le peintre rescapé des camps.

Les raisons pour lesquelles il est devenu si difficile de représenter un visage et de peindre un nu ?: L’ « l’impuissance à ressaisir l’identité du moi dans le portrait » et l’oubli du fait que toute entreprise de figuration présuppose du sacré et du sacrificiel.

D’où son sentiment que l’art est quasi moribond.

…………………….

Mais parce que tout s’effondre

Et c’est alors un réquisitoire contre les renoncements qui caractérisent notre époque : massification de la culture, financiarisation de l’art, fascination pour la laideur, refus de toute transcendance…

Qui s’accompagne du déclin des bonnes manières, du langage, des habitudes de lecture, de la tenue vestimentaire, de la liturgie catholique etc. …..

Avec la villa Médicis transformée en dancefloor pour « gros vers blancs »

On peut le suivre jusque-là mais il pousse le bouchon un peu trop loin lorsqu’il loue l’entente entre Vladimir Poutine et l’église orthodoxe russe ou le président Erdogan, grand défenseur de la liberté d’expression ou qu’il fait un rapprochement entre le journal satirique Charlie-Hebdo et les caricatures antisémites nazies

……………………….

En réalité, malgré tout, une forte nostalgie habite ce livre : nostalgie de la France rurale, du Paris d’antan, du parler d’antan, d’habitudes vestimentaires comme le port du chapeau ou de la voilette, nostalgie de l’enfance.

Une vie rurale idéalisée comme une espèce d’âge d’or, où chacun connaissait sa place et y restait

Peut-on pour autant le créditer d’une lucidité de prophète quant à l’écologie ?

……………………….

Fils d'un cultivateur socialiste du Morvan et d'une mère, fervente catholique, née en Mayenne, il avançait :"Conservateur, c'est le dernier métier aristocratique qui reste dans ce monde moderne".

……………………..

Vieillir, quelle étrange aventure pour un petit garçon !



A-t-il vu le film de Ken Loach : « La part des anges »où des exclus malgré eux, se retrouvent pris dans un système qui les broie.et qui recherchent cette part à laquelle ils ont potentiellement droit, cette "part des anges", c'est justement ce whisky évaporé durant sa maturation, au sens propre comme, ici, au figuré.

Un film qui distille avec humour et finesse un regard bienveillant et optimiste sur la jeunesse désillusionnée et livrée à elle-même.











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Le livre des amis

L’ancien conservateur du patrimoine publie un magnifique livre de portraits, d’où se dégage une certaine idée de l’art libéré des snobismes.
Lien : https://www.lefigaro.fr/livr..
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L'hiver de la culture

C'est la nouvelle théorie de la relativité.

Oui ! Tout est relatif...

La notion de beauté ? Relatif.

Le spirituel ? Relatif.

Le religieux, les religions ? Relatif (encore que cela dépend, certaines sont à respecter, d'autres peuvent être moquées, rabaissées, vilipendées, huées, surtout si elles se laissent faire au nom de la liberté d'expression...)

La décence ? Relatif.

Tout se vaut.

J'ai découvert Jean Clair lors de la magnifique exposition du grand Palais "La mélancolie" en 2005, dont il était le commissaire.

J'ai partagé son accablement en lisant "Malaise-dans-les-musees".

J'ai eu l'occasion de visiter en 2009, l'exposition d'un choix d'oeuvres de la collection François Pinault à Dinard.

Et ? Et rien. Aucune émotion, aucun sentiment d'admiration, aucun choc devant la beauté (quelle beauté ? D'ailleurs n'est-ce-pas relatif ?), parfois un sourire, souvent une exaspération devant tant de provocation gratuite et sans risque...

Je parle peut-être un peu trop de moi, mais Jean Clair met ses mots, son érudition et son humanisme sur ce qui n'était qu'un ressenti, une gêne.

Benjamin Olivennes, non-spécialiste, mais vrai passionné a fait le même constat dans "L'autre art contemporain : Vrais artistes et fausses valeurs".

Par contre, si je partage l'avis de Jean Clair sur la dérive des musées, c'est grâce à leur existence que l'on peut approcher cette beauté...

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Balthus : Exposition, Venise, Palazzo Grass..

Ce volumineux catalogue a été réalisé à l'occasion de l'exposition au Palazzo Grassi à Venise consacrée à cet artiste un tantinet sulfureux. Il comprend 13 essais d'auteurs divers sur son œuvre, sa vie, ses influences et ses relations avec des écrivains (Rilke, PJ.Jouve...) . Ensuite le catalogue des œuvres abondamment illustré et commenté . Considérable et passionnant.
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Malaise dans les musées

« Ce petit livre est né d’un désenchantement », ainsi Jean-Clair commence-t-il son essai dans lequel, effectivement, désenchanté, amer il s’insurge et dénonce la faiblesse des politiques culturelles françaises et les menaces qui pèsent sur notre patrimoine du fait des dérives dues à la globalisation et à la marchandisation muséologiques à l’œuvre.

Pour exemple, il cite notamment l’opération du Louvre d’Abou Dhabi qu’il estime avant tout purement mercantile et scélérate. Mais plus globalement c’est toute une réflexion sur notre monde occidental englouti par une décadence qui affecte l’art en général, mais aussi la culture dans son ensemble qu’il nous propose.

Il sera facile de le taxer de nostalgique d’un temps où… et du reste d’aucuns ne s’en sont pas privé à la sortie de cet essai (mais il suffit d’y aller voir leurs conflits d’intérêts) ; il n’en reste pas moins que, malgré peut-être quelques excès dus sans doute à sa passion pour l’art, cet essai, nourri de sa grande culture, a le mérite d’être brillant et de mettre le doigt et alerter sur une dégringolade de plus qui affecte nos modèles occidentaux.

Qu’importe les grincheux, cela ne l’aura pas empêché d’en remettre une couche quelque temps après avec « L’hiver de la culture », tout aussi brillant et utile, et il a bien raison.



A noter aussi, un passage intéressant sur le système de la fondation Guggenheim (éclairant !)

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Giorgio de chirico - Catalogue Exposition 1..

Un appareil critique extrêmement complet comme toujours avec les catalogues du Centre Georges Pompidou. Une introduction fantastique "De Chirico et la modernité" de William Rubin, une histoire passionnante "De Chirico à Paris 1911-1915" de Maurizio Fagiolo dell'Arco, trois écrits de De Chirico, une étude "De Chirico et les surréaliste", une chronologie.

Et puis les plus fameuses énigmes métaphysiques du maître Italien, mais aussi une splendide collection de dessins et lithographies... tout jusqu'à ses horreurs néo-classiques de fin de carrière.
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Terre natale

Jean Clair, homme de passion et de colère raconte....se raconte.

Biographie éclatée, souvenirs emmêlés, ce récit plonge le lecteur, dans la nostalgie des années enfantines et dans le regret d’ un monde traditionnel disparu .

L’ écrivain , parfois révolté, souvent pessimiste, critique sévèrement l’ art contemporain et s’ inquiète de l’ évolution de notre société.

ce féru d’art et de littérature, écrit des pages émouvantes sur les pietàs du moyen âge, les vierges à l’enfant de la renaissance ou l’ œuvre de Marcel Proust.

Même , si je ne suis pas, toujours, son indignation, lire Cet auteur, est un régal.

L’ écriture est sublime, sa culture impressionnante.

« L'écriture est un filet de mots pour attraper les papillons de l’ âme « 

Finir l’année avec une telle phrase, un vrai bonheur.
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Marcel Duchamp

Recueil d'articles dans la revue l'ARC, ce livre ouvre de nombreuses portes pour analyser la portée de l'œuvre de Marcel Duchamp, autant sur la trajectoire de l'art contemporain que pour la place de l'art et de l'artiste.

Quelques articles drôles et fantaisistes, d'autres difficiles à pénétrer.

L'occasion de jeter un nouvel œil sur Duchamp et le ready-made.
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Terre natale

L’écrivain et académicien publie un journal non daté où il mêle souvenirs et considérations personnelles, et aussi ses rêves.
Lien : http://www.lefigaro.fr/livre..
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Zoran Music à Dachau

Avec ce nouvel ouvrage dédié à Zoran Music, l’historien d’art et conservateur des musées Jean Clair se fait tour à tour polémiste, poète et défenseur des Humanités .
Lien : http://www.nonfiction.fr/art..
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L'hiver de la culture

Le Louvre est le musée le plus fréquenté du monde avec six millions de visiteurs par an. Alors que cette vénérable institution abrite les plus grands chefs d’œuvre de l’histoire, les touristes chinois se bousculent pour photographier la Joconde avec leur téléphone portable. Ce serait Nabila qui se fout à poil, ce serait le même attroupement. Seulement voilà, dans cinq ans, Nabila, elle est shampouineuse chez Franck Provost à Melun et tout le monde l’aura oubliée. Alors que la Joconde, dans cinq cents ans, les esthètes du monde entier continueront à se pâmer devant son sourire énigmatique. Les chinois ne font donc pas la différence. A ce titre, doit-on les laisser consommer de l’art comme du fast-food ? C’est la question pertinente que pose Jean Clair dans son essai.
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Journal atrabilaire

Oui, et mille fois oui !

Une personne humaine qui nous fait la restitution des événements, des parades, des positions, des discours, des politiques qui le font râler, geindre et lui donne envie de mordre.

Évidement, ce livre est publié par ce que Jean Clair est déjà connu, pour un premier livre un jeune auteur n’aurait eu aucune chance.

Jean clair à une belle écriture, un français de gourmet.

Il râle à plein, mais finalement il s’agit surtout de l’abandon d’une partie de notre humanité pour nous plonger dans le salmigondis d’une langue qui se délite, de rencontres de personne humaine à personne humaine qui deviennent de plus en plus superficiel et difficile tant le bruit ambiant est fort (et là c’est 2004).

La culture ne peu remplacer le culte

Le portable ne peut remplacer la relation

Le globish ne peut remplacer la profondeur de notre langue

Le progrès technique ne peut se substituer au progrès humain



Et tout cela avec cette sorte d’ironie dramatique qui m’a bien réjoui.



Au moment ou je finis, j’écoute France culture, 19h00 un dimanche.

Titre de l’émission : food, foodies, fooding, foodosphère, slow food

Et une phrase entendue par une jeune personne de 30 ans.

Nous faisons du régional food par soucis d’authenticité !



JEAN ils sont devenu fou !

Nous avons créé des monstres Superficiel Narcisse et Orgueilleux !

Et Martel de ne rien dire !



Lire ce livre comme un catalyseur réveille notre âme (1) cénobitique !



(1) Âme : ce qui anime le corps, Psyché, émotions, perception et inconscient. Quand je veux aborder la spiritualité j’emploie le terme d’Esprit (depuis Fromaget).

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Paradoxe sur le conservateur

Jean Clair conservateur, historien d'art, critique et essayiste empêcheur de tourner en rond, trouble fête et poil à gratter du monde de l'art et de l'institution muséale n'est pas que le passéiste que l'on croit. S'il fulmine ce n'est pas contre la modernité mais plutôt contre l'idée que cette dernière serait la mesure de toute chose, déplorant la religiosité de certains de ses pairs devenus grands prêtres des processions et des cérémonies d'un art contemporain adulé (nouvel art officiel qui se suffirait à lui-même ?), plus soucieux d'avant-garde que de sauvegarde et de transmission. Paradoxe. Jean Clair s'interroge sur la notion même d'art contemporain et ce qui pourrait, sous les piques acérées volontiers polémiques d'un conservateur agacé, n'être qu'un prolongement du combat entre anciens et modernes pointe en réalité quelque chose d'autrement plus dérangeant pour notre époque avant tout centrée sur elle-même. L'explosion du nombre des musées ces nouveaux temples festifs de la culture, leur évolution aussi bien que celle des missions du conservateur dans la deuxième moitié du vingtième siècle – plus particulièrement après les années soixante, ne seraient-elles pas tout bonnement les symptômes de la corrosion d'une pensée en quête d'artifices, déconnectée des pratiques et des oeuvres du passé pour mieux s'affranchir du sens originel de l'art ? Les Romains ne multiplièrent-ils pas les temples quand ils ne crurent plus en leurs dieux… le soupçon redoutablement étayé justifierait à lui seul qu'on lise et relise cet opuscule de faible tirage (je dispose d'une réédition à mille exemplaires de 1990, la première datant de 1988 peu de temps – deux ans – après l'installation des Colonnes de Buren dans la cour d'honneur du Palais-Royal à Paris qui firent tant gloser). Le texte très court parfois magnifiquement inspiré quand il est question de peinture et de matière, de simples pigments, d'usages et de rituels, du culte des morts, ne fait que rendre plus pénétrante une réflexion sous-jacente passionnante (véritable sujet de ce tout petit livre) sur les sources et la finalité de l'art prenant à contre pied la vision de Malraux ; battant en brèche le concept si répandu d'autonomisation de l'art. J'aime quand Jean Clair propose un sens enfoui des oeuvres inscrit dans la conscience humaine de sa propre finitude, qu'il rappelle leur portée depuis la nuit des temps, totalement occultée aujourd'hui, qu'il relie le geste du paléolithique à celui du peintre d'aujourd'hui et qu'il écrive « L'art n'est pas né du culte des dieux : il est né d'abord de l'obligation d'envisager la mort et d'en surmonter en esprit l'inéluctabilité ». Une lecture flash qui donne à réfléchir longuement avant de s'engouffrer dans les files d'expositions estivales et d'y rejoindre le peuple des fidèles…









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Bonnard

Excellent livre sur Bonnard par Jean Clair. je suis conquise. L'ensemble développe des idées très intéressantes dans une écriture tout simplement merveilleuse selon mes goûts, tellement parfois que j'en suis parfois discrète du contenu.

On apprend beaucoup sur Bonnard sa vie et son œuvre mais le livre dépasse la simple biographie et analyse la palette et la peinture de l'artiste. Quel plaisir. Je recommande.
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Lait noir de l'aube

C'est la suite de son Journal atrabilaire que nous donne Jean Clair avec Lait noir de l'aube, un titre venu d'un poème de Paul Celan, et qui condense à merveille la couleur et la matière des émotions propres aux pensées et aux réflexions d'un homme historien de l'art, ancien directeur du musée Picasso, commissaire de grandes expositions confronté aux errements de notre époque. Des pages où se mêlent " le grave et le léger, l'annotation et le savant essai, la touche et la fresque, l'esquisse et l'achevé, la maxime et l'impromptu ".

En quelques lignes ou en quelques pages, et sous un titre qui en indique le thème, c'est son intranquillité comme dirait Pessoa face à la rapide disparition d'un monde où la lecture et la méditation avaient encore leur place, c'est son désarroi face à l'humanisme mou où l'âme de notre temps s'enflasque, que décline Jean Clair. À partir de choses vues, entendues, lues, vécues, c'est une pathologie de notre époque qu'il dresse. Une société où règne l'idéologie du " festif " si décriée par feu Philippe Muray, du " spectaculaire ", du " politiquement correct ", du " culturel "... La Culture, " ce monument de savoir et de sensibilité " a fait place à l'artistisation de la société, à l'effacement de toute distinction entre art et non-art : plus de Culture mais des cultures, de la rue, des cités, des blogs, des minorités, de l'entreprise...

Amalgames hâtifs, glu doctrinale, impostures programmées, impérialisme de l'insignifiant, rien n'échappe à notre limier solitaire traquant, sous les reflets de l'actualité, ce qui couve dans les profondeurs et ce qui se prépare de ténèbres. La fête n'est que " danse autour du bûcher ", la maison moderne se conçoit autour de la cuisine et de la salle de bains " culte du ventre et du bas-ventre " ; on fait du jogging alors qu'" il n'y a que les enfants qui courent naturellement. Ou les voleurs que l'on poursuit. Un adulte qui court, court après son enfance, ou, pis encore, se sent poursuivi par elle ". On jette l'anathème sur le tabac, l'alcool, le café qui " l'a-t-on oublié ? aidaient à travailler, à produire, à s'éjouir aussi ", tandis que la publicité pervertit allégrement les genres que sont la comédie et la pastorale, le tragique et le grotesque, pour nous vendre des pots de yaourt ou un crédit auto. De la trivialité des " communicants ", à la " danse du scalp autour de l'art, ce que c'est, ce que ce n'est pas, ce que ce devrait être, ce que ce fut, ce que ce sera ", c'est à l'agonie de l'art (" qui n'a fait qu'accompagner le déclin de la foi ") que nous assistons. Époque de soldes monstres, époque où s'achève, avec le lent naufrage de la langue, une manière de nommer le monde. " Mal dire, c'est maudire ", " avoir la haine ", tant avec la norme qui disparaît, c'est la violence qui s'établit dans la société. On ne se rend pas compte que les fautes de langue sont des fautes de pensée, qu'employer " générer " à la place d'" engendrer " c'est confondre cause et effet, qu'une expression floue cache une pensée fausse, que la langue commande le rapport à autrui. Le rappeler, c'est poser la question de l'enseignement, de la transmission, du rapport au savoir en ces temps où il se réduit à la technologie et aux techniques qui donnent accès au marché... Banalisation, nivellement, simulacre, dans un monde qui ne rêve aujourd'hui que d'un réel univoque et consommable.

Face à ce désarmement général de la pensée, face à ce degré zéro de la médiocrité, à ce " surmonde " d'images et à son galopant puritanisme d'apocalypse, le voyage n'est même plus une consolation : " pesants, rougeauds ", " le short ouvert sur des cuisses grasses et blanches, la grole au pied, le sac au dos " " alpinistes en terrain plat ", les touristes sont partout. Alors Jean Clair se console avec l'insondable capacité onirique de l'homme, et surtout en cultivant son amour de la lecture (Baudelaire, Pavese et Sebald, " ces deux grands errants mélancoliques ", Proust, les journaux d'après 1945 de Jünger), et son approche de l'art. Qu'il parle du dessin de Music ou du Picasso rhétoriqueur, la pertinence de ses vues est toujours passionnante. Ainsi de la morale du joujou, chez Picasso encore, qui prend un relief tout particulier lorsque le joujou à démonter est un corps de femme, " et que le peintre s'arrange pour revisser, ployer et tordre ses différentes parties de sorte à les avoir toutes sous la main, bouche, seins, fesses, sexe et anus, du même côté du corps ".

À une époque où les maîtres du temps sont des Messieurs Loyal télévisuels, et où la réflexion a fait place à la sociologie constatative, il est salvateur de partager les chasses subtiles d'un des derniers vrais humanistes. Un ouvrage écrit dans l'amour de la vie et de l'art, nourri d'attention aux rapports qu'entretissent les mots avec leur mémoire et leur imaginaire. Du miroitement de l'intime au déploiement quasi musical des synesthésies, en passant par un kaléidoscope de petites aventures érudites, c'est une furtive métaphysique du temps et une thérapie par le savoir que nous donne à lire, en filigrane, Jean Clair. Très subtilement réconfortant.

(critique : http://www.lmda.net/din/tit_lmda.php?Id=57265..
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Gustav Klimt : Papiers érotiques

UNE PERLE RARE

KLIMT

DANS SES DESSINS LES PLUS PERSONNELES

DEPOUILLES

UNE MERVEILLEUSES EXPOSITION

UN LIVRE EPURE

SANS EXPLICATION

PARFAIT
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Malaise dans les musées

Jean Clair publie en cette année 2007 un pamphlet particulièrement intéressant. Il s’insurge contre la politique culturelle française et la gestion particulière de ses musées. On ressent beaucoup de tristesse et de regrets de la part de l’auteur. Il regrette profondément la transformation des musées en entreprises qui cherchent désormais à faire des bénéfices, à « marchander »  l’art. Il oblige le lecteur à se poser beaucoup de questions sur le changement de statut du musée. On peut toutefois reprocher à l’auteur de ne pas soutenir son propos par des références écrites. Il est donc nécessaire de prendre du recul par rapport à la diatribe de Jean Clair qui se compose parfois d’affirmations gratuites.
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Dialogue avec les morts

Ce récit autobiographique de Jean Clair est une sorte de promenade qui égraine la pensée de la mort. Alors que l'écrivain dit se refuser à l'idée du pessimisme, il révèle par ses écrits mélancoliques, ses considérations sur notre société en manque de valeur et dissèque le sujet de la mort face à sa mémoire, sur un ton satirique qui fait ressortir ses convictions, ses émotions. Chaque passage révèle son rapport avec l'art et la culture.



Une écriture qui donne l'importance au silence et à la réflexion. Il convie le lecteur à s'interroger sur l'arbre de la vie. Une intropection sur son époque et sa quête personnelle du lendemain.
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Retour à Milan

« L’Echoppe » s’est spécialisée dans l’édition de textes courts, inédits, indisponibles ou rares. Il suffit de s’attarder sur le catalogue pour être saisi de vertige : Marcel Duchamp, Lucian Freud, Pierre Soulages, Balthus, Alberto Giacometti, Sean Scully ou Giorgio de Chirico. Dans le volume que voici, nous trouvons la réédition d’un texte (ici, en quinze pages) paru en janvier 2011 dans « Il Giornale dell’Arte ». Il est dû à Jean Clair, de son vrai nom Gérard Régnier. Cet historien de l’art a été, entre autres, le directeur du Musée Picasso, de 1989 à 2005. Dans plusieurs écrits restés fameux, il s’est révélé être un virulent polémiste fustigeant l’art contemporain, jugé sans racines (françaises). Ainsi, dans ce texte rédigé lors de l’inauguration du Museo del Novecento à Milan, il tente de corriger l’idée fausse qui veut que l’Italie, berceau de la Renaissance et du Baroque, n’ait pas donné d’artistes majeurs à la modernité. Bien entendu, les plus célèbres sont les Futuristes, d’Umberto Boccioni à Gino Severini, qui, sous la férule de Filippo Tomasso Marinetti, ont participé à la déstructuration de l’unité spatio-temporelle de l’image. Mais tant d’autres ont été incompris, négligés ou purement et simplement oubliés : Giorgio de Chirico est phagocyté par l’ogre surréaliste ; Giorgio Morandi n’est connu que des spécialistes ; Mario Sironi, par son réalisme, est jugé rétrograde ; Arturo Martini, lui, est formellement trop classique. Mais, en même temps, Jean Clair évoque surtout les intellectuels, les galeristes et les collectionneurs italiens qui, lors de son premier séjour milanais en 1978, l’ont initié à la modernité péninsulaire, tout en déplorant l’intérêt porté à Piero Manzoni et à l’Arte povera.

Le style inimitable de Jean Clair est tout de suite reconnaissable par sa fluidité et le fait qu’il est souvent concis. Quant au propos, au fond tout à fait louable, il relève presque du vœu pieux, tant l’histoire de l’art, pour le grand public, est articulée par de grosses charnières. Elle est, et là Jean Clair a raison, trop souvent envisagée selon un schéma d’une chaîne dont chaque maillon serait la conséquence du précédent et l’initiateur du suivant. Rien de plus faux : de tout temps, il y a eu des artistes aux fulgurances extralucides et d’autres aux reculades passéistes. Non, l’histoire de l’art n’est pas un fleuve tranquille… et n’en déplaise à Jean Clair, heureusement que dans le lit du cours d’eau, se trouvent des rochers pour déchirer la sécurité de nos certitudes.
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