Non, ma petite fille ne connaîtrait jamais la cruauté de recevoir le document officiel et laconique qui informe de la disparition d’un proche – frère, cousin ou fiancé – à qui l’on prête le courage d’avoir su mourir dans la dignité, comme si de tremblements, de mauvaises sueurs ou de désespoir, il n’existait pas. Comme si tenter de sauver sa peau en attentant à celle des autres allait de soi. C’est vrai, face à un ennemi à abattre, je n’ai jamais pensé à l’homme. Je n’ai regardé ni ses traits ni ses yeux qui me l’auraient rendu trop fraternel : sous l’uniforme, un ancien enfant habite qui a joué avec d’autres enfants, grandi dans une famille aimante, donné la vie à son tour peut-être