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4/5 (sur 11 notes)

Nationalité : France
Né(e) : 1944
Biographie :

Jean-Daniel Verhaeghe est un réalisateur et écrivain français, né en 1944. Il habite depuis 25 ans dans la Sarthe, près du Château-du-Loir.

Réalisateur de télévision avant tout, Jean-Daniel Verhaeghe est essentiellement connu pour ses adaptations d’œuvres de la littérature : Bouvard et Pécuchet, Le Rouge et le Noir, Sans famille, Les Thibault, Le Père Goriot...

En 1991, son téléfilm La Controverse de Valladolid fut très remarqué. Il a également réalisé plusieurs adaptations d’œuvres de Guy de Maupassant pour France 2. Pour cette même chaîne, il a raconté la vie de Jean Jaurès dans Jaurès, naissance d'un géant, puis de Robert Badinter dans L'Abolition, avant de consacrer un téléfilm à George Sand (George et Fanchette) et à Pablo Picasso (La femme qui pleure au chapeau rouge). Pour le cinéma, il a signé une adaptation du livre Le Grand Meaulnes sortie en 2006.

Il a publié, en 2002, un premier roman, Un goût du secret, aux éditions du Rocher. Puis ub deuxième, Le jeu de l'absence.
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Source : Wikipedia
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Au bord du lit (chez Maupassant).


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(Les premières pages du livre)
Un message de « La petite encadreuse » avertissait Ferdinand que son tableau était prêt, restauré et encadré. Avant de rentrer chez lui, en sortant de la gare de Tours, il ferait un détour par le magasin pour récupérer « ses meules ». Depuis des années, au hasard des brocantes, des vide-greniers, voire des antiquaires, Ferdinand achetait des toiles représentant des meules de foin, il en possédait à présent une petite trentaine de tous formats, dans différents paysages, sous des lumières variées et des cieux plus ou moins cléments, l’une d’elles représentait deux meules en flammes entourées de paysans qui, avec des baquets d’eau, tentaient d’éteindre l’incendie, des femmes et des enfants formaient une petite chaîne pour alimenter en eau les barriques. Ce fut le premier tableau que Ferdinand acheta, il était tombé amoureux de cette scène paysanne qui semblait illustrer, à l’insu du peintre dont le nom était illisible dans le coin gauche de la toile, celle décrite par Flaubert dans Bouvard et Pécuchet: «Il y avait, autour de la plus grande, trois cents personnes peut-être, et sous les ordres de M. Foureau, le maire, en écharpe tricolore, des gars avec des perches et des crocs tiraient la paille du sommet afin de préserver le reste... Bouvard contemplait l'incendie en pleurant doucement. Un vieux ramassa des brins qui brûlaient pour allumer sa pipe. Des enfants se mirent à danser.» Ce fut dans un déballage de bord de route, en allant dans les Cévennes, que Ferdinand acheta ce tableau qui fit le bonheur de sa journée et fut le premier à grimper le long du mur de l’escalier de sa maison tourangelle. Il aimait ces meules aux toits pointus ou arrondis qui témoignaient d'un temps à jamais perdu; à présent de tristes rouleaux souvent enveloppés de plastique bleu essaimaient dans nos champs, faisant fuir les peintres des campagnes, témoins naïfs et désuets de cette vie «d’avant».
La devanture de «La petite encadreuse» était à peine plus large que deux fois la porte d’entrée, déjà étroite. Par la vitre on pouvait voir une petite femme s'affairant à fixer un châssis ou à confectionner une marie-louise. L'encadrement choisi par Ferdinand était toujours le même, une baguette vieil-or de 2,5 cm. Ce qui lui importait était que Madeleine = c’était son nom retrouve les couleurs et la luminosité de la toile enfouies sous des années de poussière. Acheté souvent pour quelques poignées d’euros, le prix de la restauration multipliait par dix le prix du tableau.
Comme à son habitude, Ferdinand ne voulait pas voir le travail effectué par Madeleine, il la féliciterait lors de sa prochaine visite, quand il lui apporterait un nouveau trophée. Son sac sur le dos, encombré à présent par le tableau - il n’en avait pas encore de cette dimension -, il regagnait par les rues du vieux Tours sa maison à l’ombre de la cathédrale.

Ferdinand avait souvenir de deux, peut-être trois meules, d’arbres courbés par le vent et d’une plaine sans couleur, quelques ombres venues d’on ne sait où noircissaient la terre retournée. Posé sur la table de la cuisine, le tableau, à vrai dire un autre tableau lui apparut. Il découvrit non pas deux, mais cinq meules qui se perdaient dans la perspective du champ, un soleil qu'il n’avait jamais vu crédibilisait leurs ombres, les arbres réapparus au bord du chemin semblaient résister à un fort vent. Les couleurs avaient repris un nom. La fraîcheur de ces tableaux peints par quelques amateurs amoureux des paysages ravissait Ferdinand presque autant que les vingt-cinq tableaux de Monet immortalisant à jamais son champ voisin à Giverny. La facture était bien plus gauche, la lumière plus rare, mais dans le regard du peintre on retrouvait le même bonheur d’être là devant ce paysage et de tenter de le fixer après l’avoir cadré. Il pouvait retrouver la même émotion que dans les tableaux d’Eugène Fromentin découvrant le Sahel. Ferdinand regretta qu’un tel travail ne puisse se faire sur ce tableau pour lui rendre des couleurs, il avait dépassé la trentaine et aurait bien besoin d'une restauration.

Le dictionnaire donne cette définition du mot «restaurer»: rétablir dans sa forme première et quelques lignes plus loin l’on peut lire «restaurer: faire manger — restaurez-vous avant de prendre la route».
Mais quelle route ?

Ferdinand alla poser le tableau sur le manteau de la cheminée en lieu et place de celui qu'il avait nommé «Meules dans la brume». Il en était toujours ainsi: avant de l’installer dans l’escalier à côté des autres, Ferdinand posait sa dernière acquisition sur la cheminée afin qu'il puisse à loisir le dévisager, l’appréhender, l’examiner, s'inventer la vie du peintre ou des personnages du tableau et les endroits où la toile avait vécu avant d’échouer chez lui. C’était donc aux «Meules dans la brume» d’aller prendre place dans la montée d’escalier. Aux dires du brocanteur, le tableau était l’œuvre du curé de la paroisse, il y a de cela plus de cinquante ans. Le presbytère, désaffecté, avait été vidé et tous les objets non religieux vendus au profit des œuvres de la paroisse voisine. La brume conférait à la peinture un côté inquiétant. Ferdinand avait acheté le tableau avec Jeanne. Jeanne était partie il y a plusieurs années. Il n’était pas de ceux qui savent garder les personnes qui veulent le quitter mais la blessure était toujours là et le tableau, en bon réserviste du passé, tenait son rôle de béquille dans le présent, même si depuis Béatrice avait réussi à le faire marcher sans boîter. Le souvenir de Jeanne fut ravivé à la fin de l’année scolaire par quelques lignes dans le bulletin des anciens élèves du Lycée Voltaire, mentionnant «la mort de Jeanne Auchard dans un accident de train en Inde, à l’âge de vingt ans». Ferdinand n’en apprit guère plus en contactant Jacques Lefèvre, le responsable du bulletin. L'information lui était parvenue par le Quai d’Orsay. Dans ses papiers on avait trouvé une carte des amis du Lycée Voltaire, il se souvenait de cette carte qu’elle gardait toujours, avec sa photo souriante, conquérante, frondeuse, son visage de vingt ans qu’éclaboussaient ses cheveux roux en bataille.
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