Animation à deux voix (Marité Villeneuve et Jean Désy), avec musique et lecture de textes, notamment des lettres et des poèmes inédits de Paul Villeneuve (décédé en 2010), ainsi que des extraits du roman « Mon frère Paul » (Del Busso Éditeur) de Marité Villeneuve.
Spectacle-hommage présenté dans le cadre de la 57e édition du Salon du livre du SaguenayLac-Saint-Jean le 1er octobre 2021.
Captation : Groupe Photo Média international
Production : Salon du livre du SaguenayLac-Saint-Jean
Scénarisation et écriture des textes : Marité Viilleneuve
Lecture des textes : Jean Désy et Marité Villeneuve
Accompagnement musical : Frédéric Dufour
Montage des extraits : Alain Bouchard
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Et pour tout acheter, vous devez travailler, travailler tel un forcené, comme il vous est subtilement ordonné de le faire dans les campagnes de publicité. Vous sentez bien qu'il n'y a pas de vraie liberté quand on est emporté par un tourbillon qui annihile l'esprit et commande d'acheter, acheter pour toutes sortes de raisons plus ou moins capitalistes, acheter pour l'Halloween, pour Noël, pour le Boxing Day, pour la Confédération, pour Pâques, pour la Saint-Jean-Baptiste ou pour le jour du Souvenir. Ce n'est qu'au prix d'une certaine pauvreté qu'on peut rester maître de sa vie. Mais êtes-vous à ce point maître de votre vie quand vous habitez une cabane dans le bois ? Peut-être, dans la mesure où c'est en nomade que vous habitez ce monde.
Les magasins vous offrent tout ce dont vous avez besoin, mais en plus ce dont vous n'avez pas besoin. Avec plaisir, on invente pour vous l'inutile auquel vous n'aviez même pas songé. Tout peut devenir dingue, totalement hors sens, car pour le manteau à trois cents dollars, ou pour la bicyclette à huit cents, ou pour l'automobile à vingt mille dollars, vous devez sacrifier beaucoup de votre temps, de votre paix et votre espace de rêverie, pour courir et courir afin de tout acheter.
Toundra
Vivre ne suffit pas
Il faut le poème
Ce silence de la pierre duveteuse
Sucre dans le monde du Nord
Pépiement d’oiseau nu
Sur la croûte nivale qui fond
Percée d’infini sur une mer de granit
Je ne saurais mieux conclure cette invitation pressante à lire ce très beau livre que par ces mots de l’auteur: «Serait-il possible que même aujourd’hui, rien n’ait changé à propos de l’essentiel, de l’amitié, de l’amour et de l’âme? J’ai l’intuition qu’au fond du gouffre contemporain règne une éblouissante lumière.»
Ashteieshkushiu assi – La terre se repose
Je suis un poème et c’est ma façon
D’arriver jusqu’à vous sans fracas
Par la porte d’en arrière avec mes mocassins
De dire bon hiver et puis voilà
Jean
La beauté, sans cesse, demeure complice de la rêverie.
Tout à coup, j’ai vu Frédéric qui entrait […]. Il revenait tout juste d’un assez long séjour en Afrique pour le compte de Médecins sans frontières. […] Frédéric semblait posséder un bagage inouï d’histoires plus tragiques les unes que les autres. Soudain, Pierre s’exclama: «C’est comme si tu revenais de l’enfer!» «De la barbarie!», répéta Frédéric, ce qui mit le peintre en verve: «En t’écoutant, je me suis dit que c’était par amour que ton âme avait un tel besoin de risquer sa vie. Comme si l’âme manifestait de cette façon son pouvoir sacré sur la mort, pouvoir qu’elle ne peut exercer qu’en s’offrant à la mort avec un magnifique saut dans le vide sans filet.»
Tout jeune, je me suis retrouvé à l’école, où j’ai été mis en contact avec le monde du savoir et des connaissances. J’ai immédiatement aimé apprendre. J’ai apprécié et j’apprécie encore les savoirs factuels, scientifiques, rationnels. Savoir pourquoi un ballon flotte dans les airs quand il est rempli d’hélium. Savoir que le sang artériel est pompé à partir du coeur jusque dans l’aorte pour parvenir aux plus fines artérioles des membres supérieurs et inférieurs. Même savoir par quels mécanismes la bombe atomique a pu tuer tant de gens à Hiroshima et Nagasaki.
Par ailleurs, personne ne m’a jamais convaincu de la véritable « raison » qui a pu mener à l’invention de la bombe A. Des milliers d’explications ont été fournies à propos de l’avènement de cette arme terrible ; d’autres raisons, des milliers d’autres, seront toujours données, mais la vraie explication… Faut-il seulement chercher du côté de l’irrationalité, que tant de gens considèrent encore aujourd’hui comme la « folie » ?
Alex à mes côtés, sous l’appentis, accroupi devant un feu de petite joie fait de branches d’épinette, j’ai senti que ce n’était plus la conviction de ma survivance qui me dirigeait, mais ma fille à aimer, tout comme j’aimais le monde inuit. L’idée ne suffit pas pour survivre ; il faut la foi, irrationnelle foi en la folie amoureuse qui mène toute vie. (p. 73)
Le givre sur les pierres prenait les éclats de mon âme qui voulait valser dans les aurores bien au-delà de moi quand je vivais ces jours-là, extrêmement. Et moi, et moi, si plein de cieux bleus, si petit et si grand, moi-même changé en lac, si vaste et si creux, je buvais tous les jours le cristal des rivières et l'eau des ruisseaux. Je m'abreuvais à la source, je plongeais, je nageais, j'étais bien eau de glace, eau lustrale jamais tarie, eau forte de mes ivresses quand je vivais ces jours-là.